Le Sang de la Forêt

Bonsoir à tous !  

Comme promis pour le premier live de l'année, voici le premier chapitre de cette nouvelle histoire, j'espère qu'elle vous plaira ! Pas de spoilers sans contexte pour ce chapitre, juste le teaser sans contexte pour vus donner une idée du ton du récit.



Et sans plus attendre, bonne lecture à tous !  

L’aube naissante d’un soleil printanier vint illuminer de ses doux rayons le royaume d’Arendelle encore endormi. Anna venait à peine de se lever qu’elle constata que Kristoff était déjà parti pour son dernier voyage en tant que livreur de glace officiel du royaume. La jeune femme avait senti toute la précaution que son amant avait pris pour ne pas la réveiller lorsqu’il avait quitté leur lit, ce qui avait d'ailleurs lamentablement échoué même si elle avait préféré jouer le jeu tant la tendresse de sa tentative maladroite l’avait fait sourire. De plus, Anna ne voulait pas gâcher ce moment précieux pour le montagnard, qui à partir d’aujourd’hui commençait officiellement à se préparer pour devenir le prince consort d’Arendelle, lorsque enfin ils se marieraient. Nul doute que le jeune homme profitait en ce moment même de chaque bouffé d’air frais à bord de son traîneau, se sachant bientôt condamné à étouffer sous la montagne de règle et d’étiquettes qu’il allait devoir apprendre. Surtout que si même Anna, en sa qualité de princesse, avait mis un certain temps à réussir n'en assimiler parfaitement que les bases, elle n’osait imaginer ce qu’allait endurer le pauvre Kristoff qui ne connaissait rien de la royauté et de ses codes, même après trois années passées au château ! Cette pensé fit rire la jeune femme quand Gerda la gouvernante entra, l’imaginant déjà aux prises avec le montagnard pour qu’il retienne tous ses enseignements. Seule Elsa avait réussi à devenir maitresse dans le domaine, mais après tout c'était elle que l'on avait préparé toute sa vie à devenir reine, bien que ça ne devait plus lui être d'une très grande utilité dans la Forêt Enchantée. Il était même probable qu'elle allait devoir tout réapprendre auprès du peuple du soleil, qui avait des us et coutumes bien différents de ceux d'Arendelle. Cela rassurerait surement Kristoff de se savoir moins seul dans cet épreuve !


Voilà en tout cas une matinée ensoleillée qui commençait sous les meilleurs auspices, du moins jusqu’à qu’un nuage sombre ne vienne en gâcher l’éclat. En effet, à peine Gerda eut-elle finit d’aider Anna à s’habiller que Kai, le majordome du château, vint la prévenir qu’elle devait au plus vite se rendre sur la place du marché où trônait fièrement la statue d’Agnarr et Iduna enfant. La jeune femme comprit immédiatement à quel affreux spectacle elle allait devoir assister, qui à chaque fois lui faisait l’effet d’un coup de poignard en plein cœur. C’est donc sans surprise qu’une fois encore, des mots avaient été peints en rouge sur le fier monument qui portait les traits de sa mère alors que son père avait été épargné. Anna n’avait d’ailleurs aucun doute quand à la raison de ce traitement de faveur envers l’ancien souverain.


Le général Mattias l’attendait déjà près du piédestal, entouré de plusieurs gardes du château. Certains repoussaient les curieux et s’occupaient d’un petit groupe de villageois auquel on avait déjà passé les fers au pieds, tandis que les autres s’attelaient à effacer les dernières lettres des mots "meurtrière" ou "menteuse". Le vieux militaire s’approcha et après sa révérence, s’excusa d’une mine grave :

« Je suis désolé votre Majesté, nous n’avons pas eu le temps de terminer avant que le jour ne se lève. Que faisons-nous des vandales ?»


Anna ne répondit pas tout de suite, essayant de garder la tête haute face à ce nouvel incident qui venait s’ajouter à la longue liste de ceux déjà survenus depuis la révélation des véritables origines de la reine Iduna. Jusque là, son règne s’était déroulé sans aucun accroc, Elsa l’ayant bien préparé avant son départ pour la Forêt Enchantée. De plus, les Arendelliens l’avaient accueillis à bras ouvert comme leur nouvelle souveraine, ce qui ne fut guère étonnant puisqu’elle est déjà très proche de son peuple alors même qu’elle n’était encore qu’une princesse. Cependant, Anna était loin de s’imaginer que l’inauguration de cette statue, premier grand moment fort de son règne, ne marquerait pas le début de la paix comme elle l’espérait, mais celui d’un nouveau déchirement au sein de son royaume. Comment était-il possible que la situation est dégénéré à ce point en si peu de temps sans qu'elle ne puisse l'arrêter ?


La jeune femme secoua la tête, revenant au moment présent alors que le général Mattias attendait toujours ses instructions :

« Le même sort que pour les autres, déclara t’elle à contrecœur. Leur jugement sera rendu cet après-midi, en attendant veillez à ce qu’ils restent chez eux.»


Le général acquiesça et fit signe à ses hommes de libérer les villageois avant de les raccompagner jusqu’à leur demeure. Mattias n’était pas d’accord avec ce traitement qui lui semblait bien trop clément. Si cela ne tenait qu’à lui, il les aurait déjà fait tous jeter au cachot pour un long moment, avec juste du pain sec et de l’eau pour avoir osé souiller la mémoire de la famille royale. Cependant, il ne pouvait pas aller à l’encontre de la décision de sa reine, surtout quand il voyait toute la peine sincère dans son regard à la simple vision de ses sujets arrêtés comme de vulgaire malfrat et les marques des fers à leurs chevilles. Pourtant, leur crime la blessait bien plus qu’ils n’osaient l’imaginer et ils pouvaient à peine se rendre compte de la chance qu’ils avaient face à un sort aussi indulgent. Nul doute que dans n’importe quel autre royaume, leur tête rouleraient déjà sur le sol séance tenante. Surtout dans les Îles du Sud si leur méthode n’avait pas changé depuis que le vieux militaire y avait accompagné le roi Runeard il y a de cela très longtemps. Bien entendu, cette sentence extrême répugnait Mattias au plus haut point et il se félicitait qu’Arendelle n‘en fasse plus usage depuis la disparition de l’ancien souverain.


Cependant, la décision d’Anna était avant tout motivé par le fait d’éviter d’attiser les braises de la colère qui brûlait au sein de nombreux foyers d’Arendelle depuis qu’ils avaient apprit que la reine Iduna était une Northuldra. Le tonnerre d’applaudissement de la cérémonie d’inauguration avait jour après jour laissé place au grondement des ressentiments alors que cette nouvelle avait rouverte de vieille blessure dans le cœur de certains villageois. Même si le sang ne coulait plus sur le sol de la Forêt Enchantée, comment se sentir touché par le message de paix de deux peuples unis par l’amour, alors que la rancœur et la douleur rongeaient encore ceux qui  avaient perdus un père, un frère ou un fils dans ce conflit ? La guerre était finie mais parlé de réconciliation était encore bien trop prématuré quand les vieilles craintes d’autrefois refaisaient surface après plus de trente ans, tapis dans l’ombre à attendre leur heure pour de nouveau semer la discorde dans les âmes et les cœurs.


C’est sur cette sombre pensée qu’Anna continua sa visite journalière auprès du peuple d’Arendelle. Il eut été bien plus commode d’organiser des séances de doléances plus traditionnelle au château, comme le faisait Elsa. Mais la reine récemment couronnée ne pouvait se séparer de cette promenade matinale, comme du temps où elle n’était encore que princesse. Puis de fil en aiguille, à force de liens tissés avec les villageois, s’était devenu en quelques sortes sa propre séance de doléance, à la différence que c’est elle qui allait à son peuple et non l'inverse. À en croire les retours des Arendelliens, ils préféraient beaucoup plus cette approche de leur nouvelle souveraine, loin des fastes de la demeure royale, ce qui renforçait leur sentiment qu’elle était beaucoup plus proche d’eux et de leur problème quotidien qu’aucun autre souverain avant elle. Même si Elsa était très loin d’être insensible, il fallait reconnaître que les méthodes d’Anna était assez inédite, ce qui était loin de déplaire à ses sujets. Pourtant, il fallait bien avouer que ce matin, c’était les villageois qui réchauffait le cœur de leur souveraine avec leur sourire compatissant et leur paroles réconfortantes.


Malgré l'air marin qui offrait un cadre bien plus agréable pour Anna que de rester enfermé entre les murs du château, écouter chacun des habitants et essayer de trouver la meilleure solution restait un véritable exercice d’équilibriste, quelque soit le lieu où il était pratiqué. Surtout en ces temps troublés où elle devait s’efforcer de surveiller chacune de ses paroles pour ne pas attiser les tensions. Une épreuve d’autant plus difficile suivant les villageois auquel elle faisait face, le meilleur exemple étant les frères Bjarne et Bjorn, boulanger de leur état à la moustache noire pour l’aînée et châtain pour le cadet. En effet, les voilà qui de nouveau se disputaient pour d’obscures raisons qu’Anna allait forcement devoir régler avant qu’ils n’en viennent aux mains.


« Avoue que c’est toi qui m’a volé toute la cargaison ! s’énervait Bjarne en levant une baguette au dessus de sa tête comme si il s’agissait d’une épée.

– Et puis quoi encore ! Je te rappelle que nous devions être livré en même temps, donc si ce n’est pas moi qui les a, c’est forcément toi ! rétorqua Bjorn prêt à lui jeter en pleine figure un énorme pain de campagne.

– Allons messieurs, que ce passe t’il ? Je pensais pourtant que vos querelles n’étaient plus que de l’histoire anciennes.» dit Anna d’une voix calme en les séparant.

Un peu honteux, les deux frères s’inclinèrent sans oublier de s’échanger des regards noirs, continuant silencieusement leur dispute.

« Je suis désolé que vous ayez dû assister à cela votre Majesté, commença Bjarne. Voyez-vous, nous devions recevoir une cargaison tôt ce matin, mais le marchand qui devait nous livrer n’est toujours pas arriver.

– Peut-être a t'il été retenu et son voyage prend beaucoup de plus de temps qu'il ne l'avait prévu ? essaya de rationaliser la reine d’un air calme. Il n'aura simplement pas eu le temps de vous prévenir.

– Avec tout le respect que je vous dois votre Majesté, rétorqua Bjorn, il n’est jamais arrivé ne retard, ni en avance d’ailleurs. Notre fournisseur a toujours été d’une ponctualité exemplaire !

– Je suis bien obligé de rejoindre mon frère sur ce point. Il y a peut-être une première fois à tout, mais cela nous étonnerait beaucoup : la dernière fois que nous lui avons parlé, lors de la livraison de la semaine dernière, il nous a assuré qu’il arriverait même plus tôt que d’habitude grâce à un raccourci fraichement découvert, passant par la forêt.»


Le visage serein d’Anna laissa place à l’inquiétude. Au cours de ces récentes correspondances avec Elsa, cette dernière lui avait expliqué que les animaux de la forêt étaient assez agités. Peut-être des loups avaient-ils attaqué la charrette du marchand ? Non cela serait étrange, Elsa parlait de ce qui se passait au sein de la Forêt Enchantée, donc bien trop loin d’Arendelle pour que les bois alentour ne soient eux devenu aussi dangereux. Quoique, Anna avait elle-même constaté la férocité dont pouvait faire preuve une meute de loups affamés poursuivant leur proie lors de sa première balade en traîneau avec Kristoff, il valait donc mieux ne pas prendre de risque, autant pour ce marchand que pour tout les villageois.


« Je suis certaine que la route est simplement bloqué par un tronc d’arbre, les rassura Anna avec un grand sourire. Si vous connaissez le chemin qu’il a emprunté, indiquez le moi pour que j’y envois une patrouille afin de s’assurer qu’il ne lui est rien arrivé de grave. Vous retrouverez votre précieuse cargaison en moins de temps qu’il n’en faut pour le dire ! En attendant, pourquoi ne pas essayer de travailler ensemble et de mettre en commun les ressources que vous avez déjà ? Après tout, le plus important est que chaque foyer d’Arendelle puisse déguster votre délicieux pour leur petit déjeuner.»


C’est sur ses paroles enthousiastes que la reine laissa les deux frères réconciliés retourné à leur fourneau tandis que Mattias donnait déjà plusieurs instructions aux gardes présents pour leur futur expédition dans la forêt. Le vieux militaire avait senti le trouble de la jeune femme derrière son sourire, il avait suffisamment côtoyé le roi Runeard pour savoir quand un souverain cachait son inquiétude derrière son masque réconfortant. Naturellement, plus tôt cette affaire serait tiré au claire, plus vite son esprit en serait apaisé et Anna est avait terriblement besoin. Heureusement, aucun autre trouble ne fut à déplorer avant qu’elle ne retourne au château. Sur le chemin, elle se rassura de voir que les insultes avaient enfin été effacées. Tout du moins, avant qu’elles ne réapparaissent de nouveau à la faveur de la nuit pour souiller le souvenir de sa mère.


Le plus difficile était encore à venir, car avant le déjeuner Anna devait s’entretenir avec ses conseillers et elle ne pouvait encore une fois en repousser l’échéance, malgré qu’elle sache pertinemment que certains parmi eux nourrissaient les mêmes intentions belliqueuses envers le peuple du soleil que ceux qui avait vandaliser la statue de ses parents. La reine commençait même à soupçonner que ces mêmes conseillers poussaient les villageois les plus extrêmes à s’adonner à ces actes odieux. Même si elle gardait heureusement bon nombre de partisans loyaux, ses craintes se confirmèrent quand le sujet arriva sur la table des négociations aussi subtilement qu’un troupeau de renne au galop :

« Votre Majesté, commença l’un des conseillers, à propos de l’incident de ce matin, vous comprendrez que nous vous demandions de reconsidérer à nouveau notre proposition de la remplacer par...

– C’est hors de question ! stoppa immédiatement le général Mattias. La reine Iduna fut une souveraine et une épouse exemplaire, il n’y aucune raison pour que nous devions la déboulonner de cette manière.

– Je vous en prie général, ne parlez pas d’une époque que vous n’avez pas connu. Et même si je dois bien reconnaître que ce que vous dites est vrai, bon nombre de villageois ont montrés leur mécontentement vis-à-vis des actes de son peuple.

– Arendelle a attaqué les premiers en assassinant leur chef, rétorqua le vieux militaire. Les Northuldras n’ont fait que se défendre. Sur ce fait je suis bien placé pour en parler, puisque j’y est assisté.

– Bien sûr. Et après ce que avez vu, vous allez nous assurer que les craintes du roi Runeard n’était pas fondé ? demanda hargneusement un autre dissident.

– Jusqu’à preuve du contraire, la reine Elsa a sauvé Arendelle avec les mêmes pouvoirs que le roi Runeard craignait, fit remarquer un des loyalistes. N’est-ce pas une preuve suffisante pour que cette rancune infondée d’Arendelle envers le peuple du soleil ne cesse enfin ? Laissons nos morts reposez en paix avec ces vieilles querelle qui n’ont plus lieu d’être depuis longtemps.

– Vous n’avez qu’à aller expliquer cela à ma femme qui n’a jamais put enterrer notre fils.» assenât d’une voix sèche le meneur des conseillers dissidents.


La tension s’effondra pour laisser place à une atmosphère lourde et mélancolique alors que le vieil homme détourna la tête pour cacher les larmes qu’il tentait tant bien que mal de retenir face au souvenir douloureux du jour où son garçon n’était pas revenu de l’expédition dans la Forêt Enchantée. Malgré toute les accusations à l’encontre de sa mère qu’elle ne saurait excuser sous aucun prétexte, Anna ne pouvait rester insensible à la douleur profonde de ce malheureux. La reine ne connaissait que trop bien le sentiment de vide et de solitude qui nous envahit lorsque l’on perd un être cher. Pourtant, elle ne pouvait s’imaginer un seul instant ce que cela représentait d’attendre jour et nuit, convaincu de bientôt entendre celui que l'on pensait disparu à jamais enfin passer le pas de la porte pour annoncer son retour, sain et sauf. Combien était-il à Arendelle à s’être accroché à l’espoir de revoir ces disparus, de vouloir croire qu’ils n’étaient pas mort et finalement, ne jamais réussir en faire le deuil à force d’attendre de pouvoir dignement leur dire adieux ?


En dépit de cela, Anna essaya tout de même de calmer le chagrin du vieil homme, qui risquait à tout moment de se transformer définitivement en haine :

« Je comprends votre douleur, dit la reine d’une voix douce en lui prenant la main. Vous le savez. Vous étiez tous là quand à la place d’une grande fête pour célébrer le retour de mes parents, j’ai dû assister à leur funérailles. Et vous ne pouvez pas non plus imaginer à quel point il est difficile de savoir que c’est mon grand-père qui le premier a fait coulé le sang et entraîné tout ces innocents avec lui, qu’ils soient Arendelliens ou Northuldras. C’est pour cela que nous devons apprendre de cette guerre passée pour penser à l’avenir. Les enfants de nos deux peuples ne doivent jamais subir ce que leur ancêtre ont vécus.

– Je suis désolé Majesté, mais c’est là où vous faites fausse route, répliqua le conseiller en enlevant sa main.

– Je ne comprends pas, que voulez-vous dire ? s’étonna Anna.

– Vous êtes la seule à pouvoir parler de "vos" peuples à cette table, expliqua un autre dissident. Bien que nous admirons votre détermination quand à établir une paix durable, vous semblez oublier que vous êtes avant tout reine d’Arendelle, pas reine des Northuldras. Nos intérêts doivent passer avant les leur.

– Si demain un nouveau conflit éclatait, serez-vous capable de choisir le peuple de votre père ? Où rejoindrez-vous celui de votre mère dont votre sœur semble avoir déjà prit le parti ?» termina leur chef d’une voix cynique.


Le silence n’eut pas le temps de s’installer que les loyalistes éclatèrent de rage et fustigèrent immédiatement leurs opposants, allant jusqu’à réclamer qu’ils soient immédiatement jetés aux cachots sans autre forme de procès. Les voix s'élevèrent de plus en plus fort des deux côtés alors que même Mattias, qui jusque là avait gardé son calme, ne put se contenir plus longtemps :

« Comment osez-vous insinuez une telle chose ?! vociféra t’il en frappant violemment du poing sur la table. La reine Elsa a failli perdre la vie en nous sauvant tous et c’est comme ça que vous la remercié !

– Général, messieurs... S’IL VOUS PLAIT ! s’emporta soudain Anna qui fulminait à l’intérieur après ces fausses accusations contre sa sœur. Je comprends vos craintes, où plutôt j'essaie de les comprendre, MAIS il y a des propos que je ne tolérerai pas plus longtemps. C’est justement parce que ma sœur est auprès des Northuldras que je puis vous assurer que jamais un nouveau conflit n’aura à éclater entre Arendelle et les Northuldras. C’est ensemble que nous nous en assurerons, comme nos deux peuples avancerons ensemble pour que jamais le sang des innocents ne coule à nouveau. Ai-je été suffisamment claire ?»


La colère de la reine en surprit plus d’un tant ils étaient habitué à la voir souriante et enjoué, faisant vite comprendre à toute l’assemblée qu’ils étaient allés trop loin. Malgré tout, Anna savait au fond d’elle même que cela ne suffirait pas à convaincre les plus revêches d’entre eux, ce qui lui fut rapidement confirmer par la phrase lourde de sens des conseillers dissidents qui clôtura la réunion.

« Prions pour que vous ayez raison, votre Majesté. Autrement, nous espérons en temps voulu que vous saurez faire le bon choix.»


Anna eut beaucoup de mal à l’encaisser. Comment se pouvait-il que des hommes qu’elle avait côtoyé depuis toute petite, les mêmes qui avaient gouvernés avec ses parents durant de si longues années, puissent ainsi se retourner contre eux et douter de sa loyauté envers son propre peuple ? De toute manière elle n’aurait jamais à choisir entre Arendelle et les Northuldras, pourquoi ne le comprenaient-ils pas ! Maintenant qu’elle et Elsa formaient la passerelle entre leur deux peuples, il n’y avait plus rien qui empêchait que la paix s’installe, sauf la haine et la rancœur dont certains Arendelliens ne semblait pas pouvoir guérir. Malheureusement, il semblait que le choix d’Elsa de s’installer auprès des Northuldras n’avait pas arrangé la méfiance envers le peuple du soleil.  Encore un peu de temps et les plus craintifs commenceraient de nouveau à craindre ses pouvoirs, alors même que c’est grâce à eux que le royaume n’était pas englouti sous les eaux.


Enfin seule, Anna se prit la tête dans les mains, essayant de chasser cette pensé dont elle ne voulait même pas imaginer qu’elle puisse se réaliser. Elsa avait gouverné Arendelle pendant trois années sans qu'aucun incident ne vienne l'entacher. pour ce qui était de sa magie, l’émerveillement avait vite prit le pas sur la peur, alors comment était-il possible que la situation s’inverse aussi vite ?  Le doute qui l’envahissait lui fit complètement perdre l’appétit et elle préféra retourner directement à ses appartements. Lorsqu’elle entra dans sa chambre, une tasse de chocolat chaud encore fumante était posé sur sa table de chevet : apparemment, sa peine n’avait pas échappé à Kay et Gerda. Anna but goulûment la boisson de la même manière qu’elle le faisait étant enfant, tout en pensant à Elsa et en espérant que sa situation était bien plus enviable que la sienne. La cadette aurait aimé que son aînée soit avec elle en ce moment pour l’aider à se démêler de cette posture délicate. Peut-être devrait-elle lui écrire une nouvelle lettre ? Même si elle était promis de ne pas l’inquiéter plus que nécessaire, à situation exceptionnelle, mesure exceptionnelle !


La jeune femme n’eut pas le temps de se saisir de sa plume qu’un sifflement familier vint s’inviter à sa fenêtre. Comme une réponse des esprits à ses prières, Courant d’Air s’agitait joyeusement derrière le carreau, portant au milieu de son torrent de feuille tourbillonnante une lettre plié en forme d’oiseau. Trop heureuse de recevoir des nouvelles d’Elsa, Anna s’empressa de laisser entrer l’esprit du vent qui vint virevolter dans ses cheveux en guise de salutation avant de déposer le message sur son bureau. La reine déplia la lettre et en dévora chaque mot comme autant de nouvel espoir face à ses craintes. La demande d'Elsa de la rejoindre fut un échappatoire salvateur qu’elle ne pouvait pas refuser : aussitôt lu, aussitôt répondu ! L’esprit de l’air eut à peine le temps de faire le tour de la chambre qu’il repartait déjà gaiement en direction de la Forêt Enchantée.


Même si l’aînée était resté assez évasive sur les raison qui la poussait à demander à sa cadette de venir la retrouver au plus vite, le simple fait de savoir qu’elle allait bientôt retrouver Elsa avait redonné tout son entrain à Anna qui commençait déjà à préparer ses affaires. C’est en jetant un regard au loin alors que Courant d’Air disparaissait à l’horizon qu’elle entendit le traîneau de Kristoff entré dans la cour du château. Pile à l’heure pour le déjeuner ! Décidément, son estomac était plus efficace que toute les montres du royaume réunies. En tout cas, son retour tombait à point nommé et le montagnard serait sûrement ravi d’apprendre qu’il allait pouvoir profiter du grand air pendant encore quelques temps.


Anna eut à peine passé la porte de sa chambre qu’elle vit Kay arriver au bout du couloir :

« Votre Majesté, monsieur Bjorgman vient de revenir de sa tournée. Voulez-vous que je le prévienne que vous le rejoindrez pour le déjeuner ? demanda le majordome de son flegme habituel.

– Oui je m’y rends immédiatement, mais prévenez-le que nous repartons dès que nous aurons finis de manger.

– Repartir ? J’ignorais que vous aviez un voyage de prévu.

– Disons qu’il n’est prévu que depuis quelques minutes ! expliqua Anna souriante en lui montrant la lettre d’Elsa.

– Êtes-vous certaine après ce qu’il c’est passé ce matin que ce voyage soit très judicieux ? s’enquit le majordome qui comprit sans même avoir besoin de lire le message.

– Ne vous inquiétez pas Kay, ce sera justement l’occasion parfaite pour que je parle à Elsa de ce qui se passe à Arendelle, je suis certaine qu’elle sera de bon conseil.»


Le majordome eut du mal à cacher son inquiétude, mais la joie qui illuminait le visage d’Anna le fit rapidement céder. De toute façon, que pouvait-il faire ? Quand la jeune femme avait une idée en tête, il était impossible de l’empêcher d’aller jusqu’au bout, il ne l’avait que trop bien apprit quand elle était enfant.

« Entendu, soupira Kay, dans ce cas je vais demander au cuisine que l'on vous prépare des encas pour la route. Gerda vous les apportera avant votre départ. Les longs voyages ont toujours tendances à vous ouvrir l’appétit plus que de raison.

– Serriez-vous en train d’insinuer que votre reine serait gourmande ? taquina Anna en riant.

– Jamais je n’oserai, veuillez m’excuser. Dois-je dans ce cas demander à ne pas y inclure de morceau de chocolat ?

– Bien... Bien sûr que si, surtout qu’Elsa sera ravi d’en déguster ! Elle ne doit pas en trouver beaucoup chez les Northuldras.

- Comme vous voudrez votre Majesté.» répondit Kay en souriant alors qu'Anna se dépêchait d'aller rejoindre Kristoff.

Le voyage jusqu’à la Forêt Enchantée se déroula sans encombre. Comme Anna l’avait prédit, Kristoff savourait chaque minute passé loin du château et des leçons interminables qui l’y attendaient. Enfin, il les aurait sans doute bien apprécié d’avantage si Olaf avait arrêté de parler ne serait-ce qu’une petite minute, car depuis le départ il n’avait cessé de jouer au jeux du vrai ou faux, à vrai dire plus avec lui-même qu’avec le reste de la petite troupe. Cela fit beaucoup rire Anna tant la situation ressemblait à celle de leur première expédition vers les mystérieuse terres Northuldras. Tout du moins à quelques détails près, comme Elsa remplacé par une dizaine de soldat mené par Mattias qui fermait le convoi. Malgré que le cinquième esprit ait demandé à la souveraine d’emmener avec elle le moins de monde possible, Anna n’avait pas réussi à refuser la demande du vieux militaire d’avoir le minimum requis pour une escorte digne de ce nom. Et ce malgré Kay et Gerda qui avait essayé de lui faire entendre raison. Cela restait tout de même une visite officielle de la reine d’Arendelle, une impasse sur le protocole devenait donc totalement inconcevable pour le général. Qui plus est quand il s’agissait de se rendre auprès d’une autre membre de la famille royale. Ce n’est qu’après avoir réussit à trouver un terrain d’entente qu’il fut décidé de se mettre en route, retardant malgré tout le départ pour laisser le temps aux soldats qui les accompagnaient de se préparer pour cette nouvelle aventure.



Finalement, après de longs jours de route à travers monts et vallées, apparurent enfin les imposantes silhouettes des piliers de pierre, gravés des symbole des esprits, qui délimitaient la frontière du territoire du peuple du soleil. Elsa les y attendait déjà, accompagné de Yélana qui se tenait à un peu à l’écart. À peine le traîneau eut arrêter sa course qu’Anna bondit dans les bras de sa sœur :

« Je suis tellement contente de te revoir Elsa ! J’ai l’impression que cela fait des années ! s’exclama la jeune femme.

– Je suis très heureuse de te revoir moi aussi, répondit la jeune femme avec un grand sourire.

– Elsa ! cria Olaf qui à son tour lui sauta au cou. C’est bizarre de ne plus te voir au château tu sais, tu pourrais venir nous rendre visite plus souvent. Ce n’est pas comme si tu devais surveiller des forces aussi ancienne que le monde lui-même qui pourrait tous nous...»


Elsa le fit taire en lui faisant un énorme câlin que le bonhomme de neige reçut avec le plus grand plaisir avant qu’Anna ne les rejoigne, faisant fondre le cœur de tout ceux qui assistait à la scène.

« Bruni n’est pas avec toi ? Je vous pensais pourtant inséparable, s’étonna Anna.

–  C’est dommage, dit Olaf penaud, j’aurai aimé lui dire bonjour.

– C’est un esprit de la nature, il est libre de ne pas répondre à mon appel, expliqua Elsa. Après tout je ne suis que leur gardienne. Mais ne t’inquiètes pas Olaf, je suis sûr qu’il ne manquera pas l’occasion de venir jouer avec son bonhomme de neige préféré.»



Alors que Yélana retrouvait Mattias qui était descendu de son cheval, Kristoff avait libéré Sven qui s’empressa de profiter des grands espaces autour de lui. Gardant un œil sur son meilleur ami, le montagnard alla saluer sa futur belle-sœur :

« Elsa, c’est toujours un plaisir de vous retrouver.

– Moi de même Kristoff. Votre vie n’est pas trop chamboulé maintenant que vous êtes fiancez à la reine d’Arendelle ?

– Disons que c’est différents maintenant que vous n’êtes plus au château, répondit le jeune homme d’un malicieux regard complice avec Anna. En tout cas vous m’avez sauvé la vie en nous demandant de venir jusqu'ici.

– Je vous demande pardon ? s’écria Elsa dont le visage devenait pale.

– Rassures-toi il parle des leçons de Gerda, pouffa Anna devant sa réaction.

– Seigneur, vous m’avez fait une de ses peurs ! Même si je peux comprendre ce que vous voulez dire, j’ai dû y assisté pendant toute mon enfance. Sachez malgré tout que vous ne serez pas seul dans votre tourmente, devoir tout apprendre d’une nouvelle culture n’est pas non plus une chose aisée.

– Dans ce cas, je penserai à vous quand je serai seul face à ce supplice.

– Ahem, désirez-vous que je vous laisse seul ?» taquina Anna en jouant la jalousie.



Un soldat vint s’excuser d’interrompre leur fou rire pour demander de l’aide à Kristoff afin de finir de décharger leurs montures, ce que le jeune homme accepta sans hésiter. Il embrassa son amante avant de les rejoindre, tandis qu’Elsa se rendait peu à peu compte du nombre de soldats qui s’affairait :

« Dis-moi Anna, ne t’avais je pas demander de n’emmener que le strict minimum de personne avec toi ?

– C’est le minimum nécessaire pour une suite royale ! Après tout, cela reste une visite officielle, même si c’est pour toi je ne peux pas en oublier le protocole.» répondit la reine d'un sérieux qui se voulait un peu taquin.



Mattias hocha la tête d’un air satisfait quand la souveraine répéta ses propres mots, alors que le cinquième esprit jetait un regard inquiet vers Yélana, la matriarche semblant tout aussi soucieuse qu’elle face à la petite cohorte qui accompagnait la reine. Cette dernière perdit d'ailleurs son air enjoué quand elle vit le visage inquiet de sa sœur qui s’avança vers la cheffe :

« Pensez-vous que le reste du camps acceptera un tel nombre de soldats ?

– Pas au sein de la forêt en tout cas, affirma Yélana. Je n’ose imaginer la réaction des anciens devant un tel nombre d’hommes aux abords de nos terres. Tout ce que nous pouvons espérer, c’est qu’installer leur camps à la lisière de la forêt suffira à ne pas les rendre furieux.

– Excusez-moi, est-ce qu’il y a un problème ? demanda Mattias.

– Il n’y en aura pas tant que vos soldats resteront ici et ne poseront pas un pied par delà ces rochers.

– Quel accueil ! s’exclama le général qui voulut juste plaisanter.

– Mais de rien, rétorqua sèchement la cheffe qui commençait à perde patience, nous essayons simplement d’éviter un bain de sang. Elsa il faut nous dépêcher, plus nous attendons et plus les éclaireurs risquent d’alerter les anciens que la situation est bien différentes de ce que nous leur avons promit.»



Un frisson parcourut l’échine de tout le monde quand Yélana leur lança un regard emplit de sévérité alors qu’elle fit signe à Elsa de la suivre en direction des arbres. Le feuillage tressaillît, annonçant l’arrivé d’Honeymaren qui atterrit gracieusement sur le sol. Anna rattrapa sa sœur, de plus en plus anxieuse face à la tournure des événements et aux paroles de la vieille femme :

« Elsa, dis-moi ce qui passe s’il te plait ! Est-ce que j’ai fais quelque chose de mal ?

– Oh non Anna, je t’assure ce n’est pas ta faute. Au contraire, je suis si fier de toi, tu commences déjà à devenir aussi pointilleuse que moi sur le protocole. J’aurai dû t’en dire plus dès le début dans ma lettre, tout ce que je voulais c'est ne pas t’inquiéter.

– Je suis là maintenant, tu peux tout me dire.

– Je t’expliquerai en chemin. Suis-moi.»



Prenant son mal en patience, la reine emboîta le pas au cinquième esprit qui se dirigeait vers les deux Northudras déjà en pleine échange :

« Le chemin est-il sûr ? demanda Elsa.

– Tant que nous ne nous attardons pas trop longtemps, répondit Honeymaren. Ryder n’est pas encore arrivé ?

– Il ne devrait plus tarder. Kristoff, Mattias, vous devrez rester ici pour l’accueillir, ordonna Yélana.

– Il est hors de question qu’Anna aille dans la forêt sans moi ! s’indigna le montagnard. Entre ce que vos paroles peu rassurantes et les têtes que vous faites, je ne peux pas dire que cette idée m’enchante.

– Pourquoi ne pouvons pas tout simplement venir tout les deux ? soupira Mattias qui trouvait cette situation ridicule.

– Parce que la vue de Ryder en train de discuter avec quelqu’un portant une tenue semblable à la sienne  échauffera moins les esprits de la tribu que si il s’agissait uniquement d’un uniforme militaire. Nous avons déjà assez bataillé pour que vous puissiez traverser la forêt, alors veuillez suivre nos instructions. Vous allez donc restez tout les deux ici, ce n'est pa sla peine d'essayer d'en discuter. Honeymaren, après toi.»



Nul n’osa remettre en question la décision de Yélana devant sa détermination et c’est le cœur serré que Kristoff se résigna à laisser Anna suivre seule le petit groupe qui disparut bientôt entre les arbres. Seul restait tout de même un bien grand mot, puisqu’avec Elsa à ses côtés elle ne risquait rien. Cependant, le montagnard se sentait frustré d’être de nouveau mit à l’écart. Bien entendu, rendre Anna heureuse était déjà largement suffisant pour le combler, mais il aurait voulu faire plus que de simplement conduire le traîneau. Il en connaissait trop peu sur la politique pour l’aider sur la plan diplomatique, alors ne parlons même pas de ces connaissances en matières d’esprits de la nature. Pourtant il voulait ardemment faire plus que de simplement se tenir aux côtés de son amante. Anna avait beau lui assurer que sa présence était ce qui lui importait le plus, le jeune homme nourrissait toujours ce besoin d’en faire d’avantage. Son seul et pourtant si important obstacle étant de savoir comment, malheureusement cette fois encore il n’aurait pas l’occasion de trouver la solution. Voyant le trouble qui l’habitait, Mattias le réconforta d’une tape sur l’épaule et plutôt que de ruminer seule ces noires pensées, l’invita à continuer d’aider les soldats à installer leur camps en attendant l’arrivé de Ryder.



Pendant que les pensées de Kristoff n’était occupé que par Anna, cette dernière s’enfonçait toujours plus profondément dans une Forêt Enchantée bien trop silencieuse à son goût, comme si le temps s’y était arrêté. Alors que l’on aurait pu s’attendre en cette saison à un véritable orchestre de chant d’oiseau, cette quiétude en devenait telle qu’il s'en dégageait une certaine froideur, contrastant avec la lumière éclatante du soleil qui s’infiltrait entre les branches. Voilà qui était bien dommage, car la forêt était devenu magnifique après que le feuillage ait troqué sa robe rouge et or d’automne pour la verdoyante printanière, lui donnant une atmosphère bien différente par rapport à la dernière fois où la reine s’y était rendu. La jeune femme était d’ailleurs déçu de ne pas avoir put l’admirer dans sa blanc manteau d’hiver, la neige abondante de cette année ayant rendue les routes presque impraticables.



Souain, Anna se rendit compte qu’elle ne cessait de se remémorer son premier voyage auprès du peuple du soleil, presque comme si elle le regrettait. Un moment qui lui semblait si lointain alors qu’il n’avait pas plus de quelques mois, quand elle était réuni à Arendelle avec Elsa. À l’image de la forêt, tout était devenu différents... mais ce changement était-il une si bonne chose ? Car là où la canopée renaissait sous les lueurs chaudes de la belle saison, la situation des deux sœurs face à leurs nouvelles fonctions se dégradait telle les feuilles sous le froid automnal. En effet, Anna connaissait trop bien Elsa pour qu’elle arrive à lui cacher que quelque chose n’allait pas, ce qu’elle avait de toute façon admit à demi-mot. Surtout avec les propos peu rassurants de Yélana qui ne faisait que confirmer ses doutes.



« Je ne peux m’empêcher de me demander, interpella Anna en direction de la cheffe, que vouliez-vous dire par éviter un bain de sang ? Et pourquoi vous êtes vous battu pour que nous puissions venir ?»



La cheffe ne répondit pas tout de suite, gênée et cherchant ses mots, avant qu’Elsa ne la devance après avoir prit une grande inspiration :

« Parmi les Northuldras, il y en a beaucoup qui refuse de tisser à nouveau des liens avec Arendelle, de peur d'être trahit à nouveau. D'autres vont jusqu'à appeler à se venger des crimes de notre royaume envers eux, surtout pour les anciens qui ont perdus...

– Un être cher, termina la reine. C’est exactement la même situation à Arendelle. La statue de maman a été vandalisé et certains conseillers ne cache plus leur hostilité envers les Northuldras... et envers toi.»



Le sang d’Elsa ne fit qu’un tour en entendant le récit des événements. Si cela n’avait tenu qu’à elle, le cinquième esprit aurait immédiatement chevauché le Nokk pour aller expliquer à ces dissidents le concept de reconnaissance. Sans s’en rendre compte, sa colère se porta sur sa petite sœur qui ne l’avait pas prévenu de la graviter de la situation.

« Pourquoi tu ne m’as rien dit ! explosa l’aînée. Bon sang Anna, j’espère au moins que tu as fais arrêté les responsables. Est-ce que tu te rends seulement compte de la gravité de ces actes ?

– Je pourrais te reprocher la même chose et je te rappel que ce n'est pas toi qui y assister à ce spectacle désolant chaque matin, rétorqua la cadette d’un ton cynique qu’elle ne se connaissait pas.  Et j’espérai justement que tu pourrai me donner des conseils, après que TU m’as laissé la couronne. Maintenant excuses moi de ne pas avoir voulu t’inquiéter avec tout le travail que tu as déjà à faire ici.

– Cela ne me dit pas pourquoi tu n'as pas prévenu. N’est-ce pas toi qui ne voulais pas que nous n’ayons plus de secret l’une pour l’autre ?

– Pour ça j’ai apprit de la meilleure !»



Anna se rendit compte trop tard que c’était la phrase de trop. Dans le fond, Elsa avait raison, elle aurait dû la prévenir bien plus tôt de ce qui se passait à Arendelle, mais elle ne voulait pas gâcher le bonheur de sa sœur d’avoir enfin trouvé sa place. Tout du moins, jusqu’à ce qu’elle apprenne à l’instant que le cinquième esprit se trouvait elle aussi dans une posture délicate. Mais après tout, l’aînée non plus n’avait pas alerté la cadette de la situation ! Si elle avait su plus tôt, elle aurait effectivement suivi ses instructions à la lettre, plutôt que de vouloir innocemment la rendre fier en lui montrant qu’elle prenait au sérieux son rôle de reine. Et pourquoi avoir essayé de lui cacher que certains Northuldras en voulait toujours à Arendelle pour la trahison du roi Runeard, puisque tôt ou tard elle l’aurait apprit lors de sa venue ! On pourrait croire que l’éloignement leur avait fait plus de mal que de bien, même en ayant trouvé leur place.



« Mesdemoiselles, coupa Yélana avant que la discussion ne s’envenime d’avantage. Le temps n’est pas à la discorde, vos opposants respectifs n’attendent que cela et vous aurez tout le temps de remettre en cause votre manière d’agir plus tard. N’oubliez pas qu’il faudra du temps avant que les vieilles rancunes ne se taisent. En libérant la forêt, vous avez posé la première pierre d’une nouvelle relation entre nos deux peuples et c’est à vous de mener à bien la construction de cette paix renouvelée. Mais vous n'y arriverez pas en vous querellant, bien au contraire.»



Les deux sœurs hochèrent la tête d’un commun accords, la colère ayant fait place à la culpabilité. Elles se sentaient aussi idiote l’une que l’autre face à leur comportement puérile. Ni l’aînée ni la cadette ne pouvait s’expliquer pourquoi elles avaient agit ainsi. Un excès de confiance suite à l’apaisement de la colère des esprit ? Une certaine naïveté quand à la réconciliation de leur deux peuples ? Elles auraient tout le temps d’y réfléchir plus tard, car elles arrivaient enfin à destination. La scène qui se découvrit sous le regard d’Anna était des plus insolite : des morceaux éparses de ce qui devait être autrefois une charrette étaient éparpillé un peu partout, tantôt brisés, tantôt broyés. Le plus étrange était sans aucun doute que les marchandises étaient resté sur place, sans aucune trace de leur propriétaire. Si cela avait été des bandits, la situation aurait été l’inverse, alors qu’est-ce que cela pouvait signifier ? Pendant que la reine inspectait les débris, Honeymaren lui raconta comment elle avait faites cette mystérieuse découverte :

« Elsa vous l’a sûrement déjà écris, expliqua la pisteuse, mais ces derniers temps les animaux ont développé un comportement étrange : les rennes sont devenus de plus en plus méfiants envers nos éleveurs, même Ryder ne peut plus les approcher.

– Puis se furent au tour des oiseaux de proies, continua Yélana. Avant, nous pouvions à peine les apercevoir caché à la cime des arbres, maintenant ils fixent de manière menaçante tout ceux qui croisent leur regard. Puis, ce fut au tour des loups.

– Il n’y a pas eu de blessé ? s’inquiéta Anna.

– Non, loué soit les esprits aucune attaque n’a eu lieu jusqu’à présent. Mais les enfants sont terrifiés et n’osent plus sortir de leur huttes. Chaque nuit, c’est le même concert de hurlement qui se répètent, comme si quelque chose se préparait.

– C’est justement en cherchant des réponses dans la forêt que j’ai découvert ces débris. Impossible de savoir comment ils ont put se retrouver ici : il n’y pas de route à proximité et de toute façon les arbres ne sont pas assez espacés pour qu’une charrette aussi large ne puisse passer.»



Tout en écoutant les deux Northuldras, Anna continuait d’examiner les débris et les sacs de marchandises éventrés. En voyant les épices et les fruits secs qui jonchaient le sol, un doute commença à germer dans son esprit, doute qui se transforma en conviction quand la reine vit le nom sur l’une des planches brisées qui devait être sur le côté du véhicule.

« Je ne saurai dire comment notre mystérieux voyageur c’est retrouvé ici, mais je pense avoir une idée de qui il pourrait s’agir.

– Vraiment ? s’étonna Elsa.

– Toutes ces provisions me rappellent celles que m’avait décrite Bjarne et Bjorn parmi les ingrédients qu’ils devaient recevoir. Et le nom que je peux lire ici correspond au marchand qui devait les livrer et qui n’ait jamais arrivé. Je me souviens aussi qu’ils parlaient d’un raccourci dans la forêt, mais vu où nous sommes ce serait plutôt un sacré détour ! Il faudrait que je vérifie sur une carte le chemin qu'ils nous ont indiqués, mais il est impossible que ce soit le même. Je n'ai cependant aucun doute sur le fait que c'est bien le même marchand à qui appartenait cette charrette.

– Voilà qui est déjà une belle avancé ! Vous aviez raison Elsa, c’était une merveilleuse idée de demander à votre sœur de venir, s’enthousiasma Honeymaren dans une tentative maladroite d'aider à les réconcilier.

– Je vous en pris, rougis Anna, cela ne nous indique toujours pas comment il a réussi à se rendre ici. Elsa tu as essayé de reconstituer ce qui c’est passé avec tes pouvoirs ?

– En effet, cependant cela n’a fait qu’épaissir un peu plus le mystère.

– Que veux tu dire ?»



Joignant le geste à la parole, Elsa fit apparaître des statues gelées représentant une meute de loups dont les pas correspondaient aux empreintes que l’on pouvait voir sur le sol. Même pour des animaux aussi habitués à chasser en meute, leur comportement semblait assez inhabituelle. En effet, quatre d’entre eux tenait fermement dans leur gueule le marchand inconscient pour le porter plus facilement, tandis que les autres surveillaient les alentours. Une attitude d’autant plus étrange par rapport aux récits d’agressivité croissante chez la faune de la forêt, car le pauvre homme ne portait aucune marque de morsure apparente. Non seulement les loups, si cela avait été pour se nourrir, auraient dévoré leur proie sur place, mais surtout pourquoi prendre autant de peine à l’emmener dans leur tanière ? Surtout que personne n’avait d’idée de l'emplacement de cette dernière car la piste s’enfonçait dans les profondeurs de la forêt. Honeymaren expliqua qu’elle n’avait pas put suivre les empreintes à cause du risque de se perdre, le chemin menant à une zone bien trop méconnu du peuple du soleil.



Alors que les quatre femmes argumentaient sur les raisons qui poussaient la meute à cette inexplicable comportement, Olaf eut la désagréable sensation d’être observé, sans savoir où et par quoi. Il plissa les yeux, essayant d’apercevoir ce qui, dissimulé derrière les troncs, pouvait lui provoquer cette impression. Face à sa tentative infructueuse, il tira sur la robe d’Elsa pour l’alerter que quelque chose n’allait pas, continuant de scruter à travers la forêt. Son interrogation devint de la peur quand il crut distinguer une silhouette massif dissimulé derrière un tronc. Voyant que le cinquième esprit ne réagissait pas à ses appels et devant la présence inconnue, il réitéra son geste jusqu’à attirer son attention.

« S’il te plait Olaf, pas maintenant, s'agaça Elsa.

– Mais Elsa, je suis sûr qu’il y a quelque chose qui...»



Le bonhomme de neige n’eut pas le temps de s’expliquer qu’un hurlement rauque résonna dans toute la Forêt Enchantée. Un cri inhumain, semblable au craquement provoqué par le tronc du chêne qui se brise sous la puissance de la tempête. Quand Olaf chercha de nouveau la mystérieuse silhouette, elle avait disparue. Pendant quelques instants, le silence écrasa tout le monde de sa présence pesante, avant que ne retentisse le chant des loups et les battements d’ailes des rapaces dans une cacophonie bestiale, qui se rapprochait inexorablement du camps des Arendelliens où attendaient Mattias et Kristoff.

A l’instar d’Elsa, Kristoff ne pouvait se résoudre à repartir à Arendelle après l’attaque des animaux de la forêt. Si le montagnard pensait avant tout à la sécurité d’Anna, cette dernière ne voulait pas laisser sa sœur gérer seule la situation au camps Northuldras, qui avec la présence des soldats blessés risquait de devenir encore plus tendu qu’elle n’était déjà. Mattias quand à lui refusait d’abandonner ses hommes, même sous la protection du cinquième esprit. Non pas qu’il n’avait aucune confiance en Elsa, bien au contraire, il s’agissait surtout d’une question d’honneur et de responsabilités envers ceux qui se trouvaient sous son commandement. Malheureusement, la décision des anciens étaient sans appel. Au moins, le plus âgé d’entre eux avait retrouvé son calme et il était lui-même venu rassurer Mattias sur le sort de ses hommes, sa franchise rassurant un peu plus le général. Sans compter qu’il fit remarquer que leur retour devrait être paisible, la Forêt Enchantée étant le centre des attaques plus ils s’en éloignaient, moins ils prendraient de risque. Il finit de convaincre tout le monde en argumentant qu’ils seraient plus en sécurité dans leur foyer à Arendelle, même si l’arrière pensé d’éviter d’agacer plus longtemps les autres anciens sonnait comme une évidence devant leur hostilité grandissante.


Finalement, l’heure du départ arriva trop vite pour les deux sœurs, qui un peu l’écart se disaient déjà au revoir :

« Je m'excuses Anna, commença Elsa.

– Nous aurons d’autre occasion tu sais, rassura Anna, ce n’est pas comme si nous n’allions plus nous revoir.

– Non ce n’est pas ce que je voulais dire, je suis désolé pour ce que je t’ai dis tout à l’heure. Je suis la première à savoir ce que cela fait de porter la couronne et je te traite comme une enfant alors que tu essai juste d’en être digne. Oui il y a cette histoire avec les anciens, mais oublions là un instant, car je suis vraiment fière de toi. Et je suis certaine que papa et maman le seraient aussi.

– Je suis désolé moi aussi, c’était vraiment mesquin de t’accuser après tout ce que tu as traversé. Tu ne peux pas savoir à quel point je suis heureuse que tu te sentes enfin à ta place.

– Le suis-je vraiment si nous ne sommes plus ensemble ?»



Aucune d’elle n’osa répondre. Même si elles essayaient de surmonter ce sentiment, l’éloignement leur pesaient beaucoup plus qu’elles ne voulaient le montrer. Leur lien fraternelle était trop fort pour qu’elles ne s’habituent aussi vite à ne plus se croiser régulièrement dans les couloirs du château, comme pendant ces trois années de paix et de prospérités. Prenant les mains d’Anna dans les siennes, Elsa essaya de lui remonter le moral :

« Dès que cette histoire de Grand Cornu sera tiré au claire, je viendrai t’aider à Arendelle.

– Tu es sûr ? Les anciens ne vont pas désapprouver que tu te rendes au royaume qu’ils détestent tant ?

– Yélana saura les remettre à leur place, nous venons d’en avoir la preuve. Et puis, tant que les esprits sont de notre côté, nous n’avons rien à craindre tu peux me croire.»



Anna retrouva le sourire, mais quelque chose sonnait faux dans leur réconciliations. Un malaise plus profond, que les non-dits trop longtemps gardés venaient de faire naître. Chacune d’elles avaient eu des mots durs envers l’autre, à croire que la situation de leur deux peuples commençait à déteindre sur leur relation. La culpabilité laissait place au questionnement sur leur parole respective et pour la première fois, leur dernier câlin avant le départ eut un goût très différent des autres fois, plus amer et moins sincère. Elles espéraient que cela ne dureraient qu’un temps. Mais lorsqu’elles se firent signe alors que le traîneau de Kristoff s’éloignait, l’aînée comme la cadette continuèrent de sentir le goût âpre de cet abcès de vérité qu’elles n’avaient pas put crever.


Une fois que le convoi royal, amoindrie de quelques membres, ne fut plus qu'un point à l’horizon, les Northuldras s’attelèrent à transporter les soldats Arendelliens jusqu’à leur camp, comme promit. Cependant, Yélana fit signe à Elsa de la suivre.

« Où allons-nous ? demanda intrigué la jeune femme.

– Je vous ai promit des réponses et vous allez en avoir besoin, répondit la matriarche. Le Grand Cornu n’est pas une menace à prendre à la légère, vous le comprendrez bien assez tôt.»



Elsa se tut pendant le reste du voyage, se rendant compte que la matriarche n’avait rien manqué de sa discussion avec Anna. Laissant les blessés aux bons soins du peuple du soleil, la cheffe conduisit le cinquième esprit jusque dans les cavernes près de la rivière où dormait habituellement les géants des pierre. Yélana avait prit des torches avec elle, se doutant que Bruni ne répondrait toujours pas aux appels d’Elsa. Toujours guidé par la cheffe, le jeune femme s’enfonça profondément dans les grottes au parois humides, bien plus loin que l’endroit où Anna c’était retrouvé piégé. L’obscurité lui donna l’impression qu’elle marchait depuis des heures au milieu du sombre dédale de pierre quand enfin elles arrivèrent dans une immense cavité, beaucoup plus sec que le reste des autres cavernes. Chaque tunnel façonné par le temps et l’eau semblait débouché dans cette grotte où les parois de pierre étaient recouvertes de peinture rupestres. Au centre, un cercle de pierre attendait que l’on y dépose de quoi faire un feu, ce que Yélana s’empressa de faire, relevant à Elsa l’étendue de l’œuvre qui sembla s’animer sous la lumière dansante des flammes. Le cinquième esprit contempla émerveillé la fresque gigantesque :

« Quel est cet endroit ?

– C’est ici que nous conservons l’histoire de notre peuple depuis sa création, expliqua Yélana. Le devoir d’un chef n’est pas seulement de diriger, il est aussi de préserver l’histoire de son peuple afin que son successeur puisse les transmettre aux générations suivantes. La culture et les traditions d’un peuple ne sont rien sans les évènements qui ont conduit à leu création. Le jour où nous les oublions, notre culture est voué à disparaitre : à quoi bon suivre des préceptes dont on ne se souvient plus de leur raison d’exister ?

– Je comprends, j’imagine qu’Arendelle ne serait plus Arendelle si nous venions à ne plus enseigner le récit de la fondation du royaume. Nous avons des bibliothèques, vous avez ce sanctuaire. Je n’ose imaginer le travail que cela représente.

- Ne croyez pas que nous ignorions ce qu’est un livre, nous pensons simplement qu’une image vaut mieux que mille mots. Mais je reconnais qu’avec votre famille, je n’ai pas de quoi m’ennuyer.»



La matriarche désigna l’endroit où se terminait la fresque, qui semblait encore à l’état de croquis. Elsa n’eut cependant aucun mal à reconnaître les événements qui avait suivi son arrivé avec Anna dans la Forêt Enchantée. En s’approchant, la jeune femme constata que même si l’ensemble gardait un style très similaire au reste de l'œuvre, à quelques détails près. Ces légers changements permettait de se rendre compte du moment où l’ancien chef avait laissé sa place à son successeur. Mais si la jonction entre deux générations n’était pas évidente au premier coup d’œil, la démarcation était nette quand on se penchait sur le moment de la trahison de roi Runeard. Elsa fixa cet instant figé dans le temps, revivant les visions cauchemardesques des souvenir sous le dôme gelée d’Ahtohallan. Comprenant la raison de son trouble, Yélana s’approcha et posa une main bienveillante sur son épaule :

« C’est notre ancien chef qui l’avait commencé. Il espérait pouvoir dessiner d’heureux événements à la suite de la rencontre avec votre grand-père. Mais je suis certaine que malgré les actes du roi Runeard, en voyant ce que vous et votre sœur avez accompli, il retrouverait espoir comme moi je l’ai fais. Mais si vous voulez nous assurer un futur paisible, il vous faut comprendre notre passé tumultueux.»



Yélana invitant Elsa à la suivre au commencement même de la fresque. Le temps en avait terni les couleurs, mais ce qu’elle représentait était toujours d’une netteté étonnante. On pouvait y admirer une représentation assez fidèle des terres Northuldras, où était disséminé dans tout ses recoins, des plages grises au prairie de lichens en passant par la forêt, un nombre conséquentes de petits tipis aux motifs différent, rappelant chacun ceux des quatre esprits de la nature. Après avoir laissé Elsa s’imprégner de ce qu’elle voyait, la cheffe commença son récit :

« Il fut un temps reculé où nous n’étions pas le peuple uni et pacifique que sommes aujourd’hui. Le peuple du soleil se divisait en une myriade de petite tribus, vénérant chacune un seule et unique esprit de la nature. Deux tribus différentes pouvaient même honorer le même esprit, mais de façon totalement opposé. Régulièrement, des conflits éclataient entre ces tribus pour assurer la domination de l’esprit qu’elles servaient, sans se rendre compte que ces derniers n’avaient que faire de leur querelle. Cependant, ces batailles ne se réglaient jamais dans d’inutile bain de sang, mais lors de duel cérémonieux. Chaque tribus avaient son champion attitré et bien souvent, l’issue d’un combat n’était pas la mort du vaincu, mais simplement l’assimilation de sa tribu à celle du vainqueur. Ainsi, jamais le sang d’un innocent ne fut versé, du moins jusqu’au jour où émergèrent les grands chefs de guerre.»



La matriarche guida Elsa devant la représentation de quatre homme, chacun ayant un des esprits de la nature derrière lui. Leur visage laissait peu de doute quand à leur intention, sauf un qui semblait plus réserver et tournait le dos à ses compères, comme un signe de son refus de participer au conflit qui s’annonçait.

« Ces quatre chefs rassemblèrent sous leur bannière les tribus de leur esprit respectifs, précipitant la Forêt Enchantée dans une guerre sanglante où leur soif de conquête embrasa leur terres, sans épargner personne. Homme et femme, enfant et vieillard, tous périrent dans une escalade de violence qui semblait ne pas vouloir cesser. Jusqu’au jour où le Grand Cornu apparut, lorsqu’au cours d’une nouvelle bataille  l’un des chefs fut laissé pour mort par ses rivaux.»



La jeune femme l’écoutait religieusement alors qu’elle se laissait guider vers une nouvelle peinture qui représentait le chef en question, celui là même qui précédemment ne voulait pas se battre, blessé à terre alors qu'on le laissait agoniser seul et que la forêt l’entourait de ses branches.

« L’ironie du sort fut qu’il s’agissait du plus honorable des quatre, continua Yélana. Contrairement aux autres, il ne faisait que se défendre face aux attaques de ses ennemis, ce qui malheureusement lui valu d’être le premier d’entre eux à périr. La légende raconte que devant cette injustice, la Forêt Enchantée créa le Grand Cornu. C’est une malédiction né du sang des innocents versé sur son sol et du corps mutilé du chef agonisant, dont l’esprit n’allait plus connaître qu’une colère vengeresse. Son arrivé fut d'abord annoncé par les animaux qui commencèrent à attaquer sans relâche les guerriers de la tribus. Mais ce que voulait par dessus tout le Grand Cornu, c’était la tête des chefs de guerre, seul sacrifice qui pouvait apaiser sa rage. La forêt est bien moins clémente  que la rivière des souvenirs : tout ceux qui se mettait en travers de son chemin furent massacrer, au point que le Grand Cornu devint plus dangereux que ceux qu’il devait exécuter. Devant cette menace inéluctable et après que deux autres chefs de guerre est rejoint le monde des morts,  le peuple Northuldra se tourna vers le dernier encore en vie. Pour la première fois de leur histoire, ils étaient unis face à un ennemi commun. Ce nouvel espoir fut malgré tout insuffisant.»



Le fresque continuait, montrant les Northuldras réunit arme aux poings face à une silhouette informe dont seul les cornes étaient clairement discernables. Ce n’est pas temps l’apparence incertaine du Grand Cornu qui attira son attention, mélange étrange entre un homme et une bête, mais les quatre esprits de la nature qui se tenait à leur côté.

« Ahtohallan leur a offert leur salut, comprit immédiatement Elsa.

– En effet, acquiesça Yélana. La rivière des souvenirs était jusque là resté insensible au massacre, puisque les seuls à périr étaient des guerriers qui avaient choisi de mourir au combat. Jusqu’au moment où la femme du chef survivant se sacrifia pour sauver ce dernier, qui en profita pour fuir comme un lâche. Ahtohallan ne fut pas seulement touché par l’acte d’amour sincère de cette femme, mais aussi choqué par la cruauté dont faisait preuve le héraut de la forêt, dont la colère avait aveuglé le jugement. La forêt elle-même voulut rappeler son enfant pour que cesse l'hécatombe, mais il était déjà trop tard et elle n’avait plus aucun contrôle sur la bête. Pour le vaincre, les esprits et les Hommes avait besoin d’un meneur, une passerelle pour les unir et les mener à la victoire.»



Un peu plus loin, Ahtohallan et les quatre esprits entourait une jeune Northuldra portant une robe blanche, de la même manière que sur le symbole des tenus du peuple du soleil. Elsa ne mit pas longtemps à découvrir de qui il s’agissait :

« Vous voulez dire qu’il s’agit du tout le premier cinquième esprit ?

– C’est exact. Ahtohallan a choisi la fille du dernier chef encore en vie, dont la bonté et la générosité n’avait d’égal que la soif de conquête et la lâcheté de son père. Le combat contre le Grand Cornu fut le plus terrible depuis le début du conflit et nombreux furent ceux qui périrent sous ses assauts. Mais ce n’est pas le plus tragique, car ce n’est pas la puissance combiné des cinq esprits qui eut raison de ce monstre, alors même qu’il en fut grandement affaibli.

– Dans ce cas comment a t’il été vaincu ? s’étonna la jeune femme qui ne pouvait détacher les yeux de celle qui la première avait hériter de sa tâche.

– Le dernier chef était beaucoup trop orgueilleux pour supporter que sa fille ne prenne sa place à la tête des Northuldras. Il s’est caché au plus profond de la forêt, persuadé d’être hors d’atteinte. Mais le Grand Cornu, même à deux doigts d’être vaincu, ne cessa jamais de traquer sa proie. Après avoir échappé aux esprits, il le retrouva et à l’issu d’un bref combat finit par le tuer, accomplissant ainsi son œuvre vengeresse. La bête ne laissa derrière elle que deux corps inanimés : celui du chef couard et celui de l’hôte de la malédiction, enfin en paix car libéré de sa damnation.»



Yélana laissa Elsa contemplé les peintures un peu plus longtemps, la laissant s’imprégner du récit alors qu’elle fixait la représentation du premier cinquième esprit combattant vaillamment face à la silhouette informe du Grand Cornu, faisant jaillir neige et glace de la paume de ses mains. La matriarche la conduisit alors à la scène suivante du peuple du soleil et des esprits réunis autour de la jeune femme :

« Après ces sombres événements, les Northuldras s’unirent définitivement pour ne former qu’une seul et même peuple, qu’ils nommèrent le peuple du soleil en hommage au symbole de la famille du cinquième esprit qui les avait sauvé. De même, plutôt que de vénérer les esprits comme des divinités, ils apprirent à les respecter et à vivre en harmonie avec eux. Ils développèrent ainsi une philosophie pacifique, pour que le spectre du Grand Cornu ne refasse jamais surface.

– Qu’est devenu le premier cinquième esprit ? Même après que le Grand Cornu est disparue, elle a continué à être cinquième esprit ?

– En effet, elle garda ce lien spécial avec les esprits jusqu’à sa mort. Cependant, la magie de l’hiver l'a quitta en même temps que le monstre et ses enfants n’héritèrent d’aucun pouvoir, puisque la menace était écarté. De plus, la passerelle avait fait son office : les Hommes et les esprits vivaient désormais en harmonie. La paix était durablement établie et les descendants du cinquième esprit veillèrent, génération après génération, à ce qu’elle reste intacte. Des traces de ce conflit, il n’en reste que ces peintures et le vieil arbre qui ne fleurit jamais.

– Le vieil arbre qui ne fleurit jamais ? Je ne crois pas l’avoir déjà vu.

– C’est parce qu’il se trouve dans les profondeurs les plus reculé de la forêt, au milieu d’une clairière où l’herbe ne pousse plus depuis longtemps. On raconte que c’est sous cet arbre qu’est enterré le chef de guerre qui servi d’hôte à la malédiction du Grand Cornu et que c’est depuis ce jour que ses branches n’ont jamais put retrouver leur feuillage d’antan. Dernière et cruelle ironie du sort, car le lâche eut droit à une magnifique sépulture, là où le malheureux damné n’eut droit qu’à la terre comme seul tombeau, sans aucune autre forme de cérémonie.»



Elsa se recula afin d’avoir une vue d’ensemble de la fresque. Les tableaux et les tapisseries racontant l’histoire d’Arendelle n’était pas ce qui manquait au château, mais cette œuvre rupestre avait quelque chose qu’elle ne saurait décrire. Une sensation enivrante face aux siècles d’histoire qui se dessinait sous son regard à la lumière vacillante des flammes au centre de la grotte qu’aucun tableau, aussi prestigieux qu’en soit le peintre, ne pouvait faire ressentir. Peut-être était face à la pierre qui servait de toile, aussi dure que l’histoire qu’elle venait d’entendre, où de la couleur brut qui rendait cette œuvre aussi mystique. L’enchantement s’essouffla bien vite quand la forme du Grand Cornu s’imposa dans son esprit et que les propos de Yélana aux anciens de la tribus lui revinrent en mémoire.

«Alors le Grand Cornu est revenu à cause de la trahison de mon grand-père.

– J’en ai bien peur, ce n'était qu'une question de temps. Tout les signes relatés dans notre histoire sont là et je crains que votre tâche en temps que cinquième esprit est encore loin d’être terminé.

– Pourquoi Ahtohallan n’a pas donné les pouvoirs du cinquième esprit à notre mère, si c’est en sauvant mon père qu’elle a convaincu les esprits de vous protéger ? Vous n’auriez pas eu à rester prisonnier pendant si longtemps et le Grand Cornu serait déjà vaincu à l’heure qu’il est.

– Le Grand Cornu n’était pas la seul menace à éteindre : quand bien même Iduna aurait hérité de cette puissance, tant que le conflit entre Northuldras et Arendelliens brûlerait, l’esprit vengeur de la forêt reviendrait inexorablement. Cela aurait été un cercle de mort et de destruction sans fin, jusqu’à ce que le Grand Cornu ne finisse par s’attaquer aux esprits de la nature eux-mêmes. Notre emprisonnement était un sacrifice nécessaire en attendant votre naissance, puis celle de votre sœur. Il fallait que vous soyez deux pour définitivement le vaincre : l'ainée pour les esprits, la cadette pour les Hommes. La Northuldra et l’Arendellienne, unissant deux peuples à la culture différentes face à la bête vengeresse qui les menace. Voilà pourquoi Ahtohallan vous a choisi, pour réparer la paix qui a été brisé et vaincre le Grand Cornu. Libérer la Forêt Enchantée n'était que la première étape, mais je n'ai aucun autre indice que cette fresque pour vous aider à accomplir votre destin.»



Elsa hocha la tête. Avec Anna elles avaient déjà réalisé l’impossible, pourquoi ne pourraient-elles pas réitérés l’exploit ? Peut-être à cause de leur échange houleux plus tôt dans la journée. La jeune femme était à la fois blessé et inquiète. Blessé par les propos de sa sœur qui lui rappelait durement sa nature renfermé contre laquelle elle luttait, inquiète en imaginant à quel point Anna pouvait lui en vouloir pour en arriver à de tels propos. Au fond d’elle-même, Elsa savait qu’elle avait raison. Anna avait été tellement enthousiaste à l'idée de prendre sa place pour qu'elle s'installe avec les Northuldras qu'elle en avait à peine discuter. L'idée de liberté, sans le poids de la couronne et la fardeau de ses pouvoirs, était tellement enivrante qu'elle avait accepté sans réfléchir. Sans réfléchir à ce que désirait réellement sa petite sœur.


Soudain, alors qu’Elsa encore plongé dans ses pensés suivait Yélana sur le chemin du retour au camps, un bruit sourd de roulement de pierre familier se fit entendre. Le sol trembla légèrement et la matriarche attrapa sa canne pour se défendre, avant que le cinquième esprit ne lui fasse signe de se détendre quand Grand Pabby sortit des fourrés. Yélana s’adoucit immédiatement alors que l’air affolé du vieux troll ne rassura pas Elsa :

« Grand Pabby ?  s'étonna la jeune femme. Quelle surprise de vous voir si loin de la plaine des trolls.

– Surtout après toutes ces années, sourit Yélana en direction du vieux sage. Vous n’avez pas changé d’une brindille.

– Je vous remercie Yélana, répondit le troll d'un signe respectueux de la tête, même si je suis désolé de ne pouvoir vous retourner le compliment. J’aurai aimé pouvoir vous aider d’avantage lorsque le brouillard est tombé il y a trente ans, j’espère maintenant pouvoir me racheter. Mais ne traînons pas, nous devons immédiatement retourné au camps. Vous devez rassembler les esprits et tout vous pisteurs les plus chevronnés. Elsa, est-ce que vous avez un moyen de contacter Anna ? Plus nous aurons de bras, mieux nous pourrons nous préparer.

– Anna est partit il y a peine quelques temps, je vais essayer d’appeler Courant d’Air pour la prévenir. Mais pas avant que vous nous ayez dit ce qui se passe.

– Je sais où se trouve la tanière du Grand Cornu.» affirma Grand Pabby d'un air grave.


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Au même moment, le traîneau de Kristoff filait à travers la plaine. Anna restait silencieuse, soucieuse pour les soldats resté avec les Northuldras et surtout pour Elsa. Alors que le convoi traversait un petit bosquet, son fiancé se tourna vers elle :

« Tu t’inquiètes pour Elsa, n’est-ce pas ? demanda le montagnard.

– Est-ce si évident que ça ? soupira la reine.

– Si moi je m’inquiètes pour elle, je n’imagine pas ce que tu dois ressentir.

– Vraiment monsieur Bjorgman, vous vous inquiétez plus pour votre future belle-sœur que pour votre fiancée ? taquina Anna.

– Allons, Anna, tu sais bien que quand il s’agit de la famille je ne peux pas m’empêcher de m’en faire. Et puis si Elsa ne se sent pas bien, alors toi non plus.»


La reine en pouvait nier que la situation de sa sœur la préoccupait plus qu’elle ne le laissait paraître. La Elsa souriante à l’idée  de s’installer dans la Forêt Enchantée semblait bien loin face aux problèmes qu’elle rencontrait face aux ressentiment des anciens Northuldras résonnaient beaucoup trop en écho à ceux des conseillers d’Arendelle. Les espoirs de réconciliation s’effondraient aussi vite que ne l’avait fait le barrage. Plus elle y réfléchissait, moins elle trouvait de solution. Et si même un jour cela devait réussir, dans combien de temps ? Car si chaque partie voyait désormais d’un mauvais œil que les deux sœurs se retrouvent, pouvaient-elles un jour en arriver au point où il leur serait impossible de se revoir sans déclencher d’incident diplomatique ?


Sentant son trouble, Kristoff la rapprocha de lui en essayant de la réconforter, même si il se doutait que quelque chose d’autre tracassait sa bien aimée :

« Tu t’en veux pour ce que tu lui as dit ?

– Même si je me suis excuser, je sais que ça l’a vraiment blesser. Après tout ce qu’elle a traversé pour essayer de s’ouvrir aux autres... je sais qu’elle ne voulait pas m’inquiéter, mais...

– Toi non plus tu ne voulais pas l'inquiéter. A force de vouloir protéger l’autre, vous avez fini par vous faire plus de tort qu’autre chose.

– Kristoff nous avons chacune nous responsabilités maintenant, je ne peux pas appeler Elsa à la rescousse à chaque fois qu’un obstacle se dresse devant moi.

– Peut-être qu’Elsa aussi voulait te demander de l’aide mais n’a pas oser ?» interrompit Olaf.


Anna resta bouche bée face à la remarque du bonhomme de neige. Il venait de frapper en plein dans le mille et la jeune femme s'étonnait de ne pas y avoir pensé. Les deux sœurs voulaient absolument protéger l'autre, alors si Elsa savait à quel point il était difficile d'être reine, elle n'avait probablement pas voulu ajouter un poids de plus sur les épaules de la cadette et avait préféré essayé de résoudre seul les problèmes avec les anciens, de la même manière qu'Anna n'avait pas voulu gâcher la joie de l'ainée d'avoir enfin trouvé sa place. La jeune femme ne put s'empêcher de sourire en se disant que lorsqu'elles s'y mettaient avec autant d'ardeur, elles pouvaient être aussi bornés l'une que l'autre. Mais ce n'était pas en repartant chacune de leur côté que la situation pourrait s'arranger.

« Kristoff, fait demi-tour, tout de suite ! ordonna Anna.

– Est-ce que tu es sûre que c’est une bonne idée ? s'inquiéta faussement le jeune homme. Je ne pense pas que les conseillers comme les anciens...

– Peu m’importe, qu’ils essayent seulement de m’arrêter ! Je dois parler à Elsa, cette situation n’a que trop durer. C’est ensemble que nous avons apaiser les esprits, alors c’est ensemble que nous pourrons réconcilier nos peuples.»



Le montagnard hocha la tête, cachant son sourire satisfait alors qu'Olaf lui envoya un clin d'œil. Leur plan pour qu'Anna et Elsa se réconcilie semblait fonctionner. Kristoff fit signe à Mattias, qui ne discuta pas les ordres car lui aussi avait discrètement mit dans la combine. Tous étaient certain d'une chose : si les deux sœurs d'Arendelle étaient en mauvais termes, la paix ne pourrait jamais s'établir. Soudain, un craquement sourd de bois brisé ce fit entendre entre les arbres. Personne n’eut le temps de se rendre compte de ce qui se passait que le traîneau s’envolait dans les airs avant de s’écraser lourdement contre le sol. Anna était complètement sonné, incapable de voir ce qui les avait attaqué. Sa vision était flou et seul ne restait qu’un brouhaha infernal où chaque cri résonnait douloureusement dans sa tête. Elle crut reconnaître Mattias hurler des ordres à ses hommes et celle de Kristoff qui appelait son nom. Elle essaya de ramper sur le sol, mais ses forces l’abandonnaient à chaque nouvel effort. Peu à peu, le vacarme se tut et elle se sentit délicatement soulever du sol, avant que ne l’obscurité ne voile sa vision et qu’elle ne sombre dans l’abîme de l’inconscience.

Anna se réveilla dans une partie de la Forêt Enchantée qu’elle était incapable de reconnaître. Encore un peu sonnée et engourdie, elle se releva difficilement. Par miracle, elle semblait ne souffrir d’aucune blessure apparente et elle commença à chercher des indices sur le lieu exact où elle se trouvait. La végétation était beaucoup plus dense que dans le reste de la forêt et ses couleurs printanières n’en étaient que plus éclatantes, malgré les nuages sombres que l'on pouvait percevoir à travers le feuillage. Si le décor en devenait féerique, il en était tout autant impraticable à cause des buissons touffus et des arbustes qui bloquaient toute forme de sentier. Préférant prudemment ne pas s’aventurer plus avant pour le moment, la jeune femme préféra continuer d'inspecter l’endroit où on l’avait déposer. Il était difficile de le qualifier d’un abri de fortune tant il était précaire, puisqu’il n’y avait même pas de toit, juste un moelleux lit de mousse et la canopée pour la protéger des intempéries. Un détail plus étrange encore la frappa soudain : aucun lien ne la retenait. Certes d'une part, si celui qui les avait attaqué avait vraiment voulu la tuer, il aurait terminé sa besogne bien plus tôt. Mais d'autre part, si il avait voulu la faire prisonnière, il ne l’aurait pas laisser ainsi totalement libre de ses mouvements.


Anna finit par retrouver toute sa tête quand elle se rendit compte qu’elle était seule. Aucune trace de Kristoff, d’Olaf, de Mattias ou de tout autre personne qui constituait son escorte. Elle était saine et sauve, mais que leur était-il arrivé ? Cherchant les alentours du regard, elle ne trouva rien qui pourrait lui indiquer leur présence dans les environs.

« Kristoff ? Kristoff !» appela t’elle.



Son cri résonna en écho entre les arbres, sans recevoir de réponse. Du moins, c’est ce qu’elle crut au début, avant d'entendre une voix qui lui répondait, si faiblement qu’il aurait pu s’agir d’un murmure porté par le vent. Retrouvant son courage, Anna s’enfonça  à l’aveugle dans la végétation dense, avec pour seule boussole la direction dans laquelle elle pensait avoir entendu son nom. Heureusement, lorsqu’elle essaya une nouvelle fois d’appeler le montagnard, la réponse se fit plus audible, signe encourageant qu’elle se rapprochait. Finalement, elle finit par déboucher sur une clairière à l’aspect des plus austère. Comme une tâche sombre au milieu de la forêt verdoyante, son sol n’arborait aucune plante, pas la moindre petite touffe d’herbe qui serait venu apporté un peu de couleur à la terre terne. Au centre, plus menaçant encore, un épicéa mort à l’écorce sombre trônait comme un roi déchu dans son royaume en ruine. Ses branches tordues se dressaient vers le ciel, comme à la recherche de la lumière réconfortante du soleil à travers les nuages dans l’espoir qu’elle lui redonne vie. Au pied de l’arbre, un trou était creusé dans le sol d’où semblait venir la voix. Anna se précipita dans sa direction pour y trouver tout au fond Olaf, emprisonné au milieu des racines de l’arbre qui le retenait fermement.

« Anna tu vas bien ! s’écria joyeusement le bonhomme de neige à la vue de la jeune femme.

– Olaf c’est bien toi ! soupira Anna soulagé. Tu n’as rien ?

– Non, enfin je crois, répondit le bonhomme de neige en s’inspectant rapidement.

– Ne t’inquiètes pas je vais te sortir de là. Est-ce que tu sais où est Kristoff ?

– Non, la grosse bête l’a surement emmené autre part.

– La grosse bête ? s’inquiéta la reine. Tu parles du Grand Cornu ? C’est lui qui nous a attaqué ?

– Je ne sais pas comment il s’appelle, mais je suis sûr que c’est la bête même que j’ai vu près de la charrette cassé.

– Est-ce qu’elle est toujours dans les environs ?»



Comme une réponse menaçante à sa question, des grognements se firent entendre : la meute de loups était de retour, encerclant rapidement Anna et la forçant à s'éloigner de la fosse où se trouvait Olaf. Elle n’avait aucun moyen de se défendre, si ils décidaient d’attaquer maintenant, son destin était scellé. Heureusement, un craquement sourd les stoppa dans leur élan. Le soulagement fut cependant de courte durée quand la reine vit apparaître entre les arbres la silhouette massive du Grand Cornu que le bonhomme de neige lui avait décrit. Le monstre s’avança dans la clairière pour enfin se montrer dans toute sa magnificence.



Après avoir vu la terreur que la simple énonciation de son nom avait provoqué chez les Northuldras, Anna s’attendait à ce que son apparence soit plus monstrueuses que tout ce qu’elle s’était imaginé. Quelle ne fut pas sa surprise quand la majestueuse créature apparut enfin au grand jour. Si son apparence était semblable à celle d’un satyre, aux jambes de chèvre et au buste d’homme, sa taille était beaucoup plus importante que ceux des légendes antiques. Si l’on s’en rapportait à la cime des arbres, l’esprit de la forêt devait faire près de dix pieds de haut, ce qui ne lui donnait que plus de majesté. Dire que ce n’était pas le plus étonnant dans son apparence, puisque c’était de l’écorce qui se trouvait à la place de sa peau et de la mousse en guise de fourrure. La longue tresse qui descendait jusqu’au bas de son dos était faite de lierre et les deux immenses cornes qui lui avait valu son nom était en réalité  un amas de branche qui c’étaient entremêlé en poussant, pour former cette ramure impressionnante qui complétait la silhouette enchanteresse de l’esprit sylvain.



Le Grand Cornu ne semblait pas non plus agressif et il s’approcha d’Anna d’un pas surprenamment léger pour sa taille, au point que la jeune femme se demanda si c’était bien lui qui avait attaqué leur convoi. Malgré tout, elle recula instinctivement alors que la créature se baissait doucement à sa hauteur, lui permettant de mieux contempler son visage. Comme le reste de son corps, il était fait d’écorce dont les veinures et les bosses formaient un faciès que l’on aurait presque put qualifier d’humain. Les traits de cette esquisse de visage semblèrent d’ailleurs presque familiers à Anna, de même que la couleur des yeux qui lui rappelait ceux de son père. Lorsqu’une voix sortit de l’imperturbable masque de bois, la jeune femme commença à douter de sa véritable identité :

« Mon enfant, comme je suis heureux de pouvoir enfin te rencontrer en personne, dit l’esprit sylvain.

– Attendez, vous me connaissez ? s’étonna Anna en écarquillant les yeux.

– Bien sûr j’ai toujours gardé un œil sur ma famille. Même si j’étais loin de vous, je vous ai vu naître et grandir ta sœur et toi, et j'ai regretté chaque instant où je ne pouvais me tenir à vos côtés.»



Avant qu’Anna ne puisse demander par quel moyen il avait pu les observer durant toutes ces années, un oiseau vint se poser sur l’épaule de l’homme arbre. Si il était capable de commander à toutes les bêtes de la forêt, il ne serait pas étonnant qu’il est des yeux et des oreilles partout. Mais ce ne n’est pas ce qui la préoccupait le plus face au Grand Cornu : devait-elle être effrayé ou rassurer ? Car à force de l’observer, le visage qu'elle voyait se dessiner dans l’écorce lui ressemblait de plus en plus à s’y méprendre à quelqu’un qu’elle n’aurait jamais imaginé rencontrer :

«Grand-père ? demanda timidement la jeune femme.

– C’est bien moi Anna, acquiesça Runeard.

– Comment...comment est-ce possible ? Vous êtes mort en tombant de la falaise pendant la bataille contre les Northuldras !

– Crois bien que je fus le premier surprit d’avoir survécu à cette chute mortelle. Mais il semble que la forêt a comprit qu’un roi ne peut trouver le repos tant qu’il sait son royaume en danger.»



Dire qu’Anna était confuse par la situation était loin de la réalité. Trop de questions se bousculaient dans sa tête alors qu’elle essayait de se remettre les idées en place. Tout d’abord, était-ce réellement son grand-père réincarné en esprit de la forêt ? Si sa raison lui disait qu’il devait exister bon nombre de sortilège pour lui donner cette illusion, son cœur ne pouvait mentir sur le fait qu’il s’agissait bel et bien de l’ancien roi. Maintenant  si c’était bien lui, il ne fallait pas oublier qu’il avait déjà trahi les Northuldras par le passé. Pourtant il semblait calme et posé, sans aucun intention belliqueuse à son égard. La question la plus importante restait de savoir comment il avait survécu à la bataille avec le peuple du soleil et surtout comment il en était arrivé à devenir l’un de leur esprit :

« Que vous est-il arrivé exactement ? commença à questionner la reine.

– Je ne saurai l’expliquer de manière rationnelle, expliqua Runeard. Tout ce dont je me souviens, c’est de ma chute, puis de la douleur. Alors que je sentais mon âme vaciller, une seule pensé m’obsédait : qu’allait-il advenir de mon fils Agnarr ? De mon peuple ? Je ne pouvais me résoudre à les abandonner, que ce soit en temps que père ou temps qu’en temps que roi. Mais la volonté d’un souverain, aussi forte soit-elle, n’est rien face à la mort.

– Pourtant, vous êtes bien devant moi en ce moment même.

– C’est parce que quelqu’un m’a sauvé. Ou plutôt quelque chose, je suis incapable de l’expliquer, tout ce que je peux affirmer c’est que dans l'obscurité qui me gagnait, j'ai eu une vision. J'ai vu les esprits de la nature enfermer la Forêt Enchantée sous un dôme de brume, piégeant à la fois Arendelliens et Northuldras. C’est à ce moment que j’ai compris ma terrible erreur d’avoir attaqué le peuple du soleil.»



La reine resta bouche bée en entendant les paroles de Runeard. Se pourrait-il qu’il dise la vérité ? Si c’était bien le cas, il avait fallu qu’il meurt pour comprendre à quel point il était dans le faux pour les Northuldras durant toutes ces années ! Ses paroles semblaient sincères et Anna voulait croire en sa bonne foi. Après tout, elle pouvait témoigner de ce que la peur de l’inconnu pouvait provoquer chez l’Homme, les événements du couronnement d’Elsa en était une preuve suffisante. Bien entendu, pardonner les fautes de l’ancien roi était une chose difficile, mais qu’il admette qu’il était dans le tort était un premier pas très encourageant, car très peu aurait eu le courage d'entreprendre la même chose. Cependant, les leçons d’Elsa sur la diplomatie lui revinrent en mémoire : il faut toujours se méfier des belles paroles et écouter sa raison, pas ses émotions. En effet malgré son apparente honnêteté, était-ce là une nouvelle ruse pour l’amadouer ? Elle ne pouvait se permettre de baisser sa garde, même si sa nature bienveillante gardait un petit espoir au fond d'elle :

« Vous regrettez vraiment d’avoir provoqué la guerre avec les Northuldras ?

– Dire que je regrette serait à peine effleurer la surface des remords qui me ronge, se désola l'ancien roi. La peur m’a aveuglé il y a trente ans et par ma faute trop d’innocents ont souffert. Mais je sais désormais pourquoi j’étais dans le faux et maintenant, je suis prêt à tout réparer.

– Ce ne sera pas facile, laissa échapper Anna, dire qu’avec Elsa nous avons beaucoup de mal à trouver un moyen d’enfin réconcilier nos deux peuples... quelle serait votre solution ?

– Détruire Athohallan, la source de toute magie. Les esprits de la nature disparaîtront avec elle et nous pourrons tous vivre enfin en paix. »



Toute l’espérance d’Anna vola en éclat face à la volonté de Runeard. Pendant un bref instant, elle avait oublié ses crimes, mit de côté que c’était probablement lui à l’origine des attaques des animaux sauvages. Tout ce qu’elle avait voulu voir, c’est que son grand-père avait prit le chemin de la rédemption en leur apportant enfin un moyen de réconcilier Northuldras et Arendelliens. Malheureusement, la réalité se révélait bien plus sombre et cruelle. L’ancien roi regrettait vraiment ses actes passé, cela ne faisait aucun doute et il voulait que la paix s’installe. Mais pour ce faire, il avait plongé tête la première dans les profondeurs de sa peur viscérale de la magie et des esprits. Peut-être finalement que derrière son raisonnement, il ne faisait que chercher un bouc émissaire aux atrocités qu'ils avaient commises par le passé ? Dans tout les cas, son ton ne faisait aucun doute qu’en à sa détermination, même si Anna tenta tant bien que mal de le raisonner :

« C’est de la folie ! Vous dites vouloir réparer vos fautes, mais vous êtes toujours aveuglés par vos craintes. Les esprits et Athohallan sont essentielles au bon équilibre du la nature et ils protègent les Northuldras !

– Quel genre de protecteur punit de cette manière le peuple qu’il est censé protéger ? Quand j’ai vu le sort qu’il leur était réservé, alors qu'ils étaient les victimes,  j’ai compris que les Northuldras étaient eux aussi en danger à cause de la magie. Je me suis trompé d’ennemi il y a trente ans, je ne ferai pas cette erreur une nouvelles fois.»



La reine devait réfléchir au plus vite à un nouvel angle d’attaque. Runeard était inébranlable sur ses convictions, aussi enracinées dans son esprit qu’un chêne centenaire dans le sol de la forêt. Au mois, il était rassurant de le voir aussi ouvert, d’autres souverains auraient déjà adopté un ton plus agressif, là où lui restait serein. Anna espérait qu’il le resterait lorsqu’elle décida d’énoncer l’évidente dissonance de son discours face à sa nature nouvelle :

« Vous qui avez si peur de la magie, vous semblez bien enclin à l’accepter quand elle sert vos intérêt.

– Certains sacrifices sont nécessaires quand il s’agit du bien commun.»



Au grand désarroi d’Anna, l’être sylvain resta de nouveau inébranlable, bien évidemment qu’il s’attendait à cette réflexion tant elle semblait prévisible. La jeune femme sentit d’autant plus à quel point elle restait inexpérimenté face à l’ancien roi qui n’avait rien perdu de la maîtrise du débat qui sciait à son rang. Malgré tout, Anna perçut  une faille dans son discours  jusque là si bienveillant envers les deux peuples :

« Vous parlez de sacrifice : comme celui de ceux que vos meutes de loups ont attaqués ? Que leur est-il arrivé exactement ?»



L’instinct de la jeune femme avait vu juste, car l’homme-arbre fut bien moins prompt à répondre qu’auparavant. Les leçons d’Elsa avaient finalement porté leur fruit, surtout que la riposte fut très évasive, preuve qu’il préférait éviter le sujet.

« Leur sort n’est que temporaire et tout rentrera dans l’ordre une fois mon œuvre accompli.»



Prenant confiance en elle, Anna repartit à l’assaut avec un nouvel argument qui lui semblait totalement imparable :

« Une œuvre irréalisable puisque seul le cinquième esprit peut se rendre jusqu’à Athohallan.

– Rassures-toi mon enfant, Elsa m’a, sans le savoir, offert un moyen de palier à ce problème. Tu devrais te réjouir toi aussi, car vos querelles n’auront bientôt plus lieu d’être.»



L’assurance de la reine s’effondra de nouveau. Elle ne fit pas attention au regard du Runeard tourné vers Olaf, car il venait de toucher un point sensible. Pendant un court instant, le cœur d'Anna l’emporta sur la raison face à l’évocation de la réconciliation avec Elsa :

« Que voulez-vous dire ?

– Quand la magie aura disparu, les pouvoirs de ta sœur s’en iront eux aussi. Elle sera libéré et n’aura plus aucune raison de rester dans la Forêt Enchantée.

– Mais ses pouvoirs sont un don, rétorqua immédiatement Anna, ils font parties d'elle vous ne pouvez pas les lui arracher de cette manière !

– Un don ? Ne devrait-on pas parler de malédiction face à tout ce qu'elle a dû traverser à cause d'eux ? Elle sera bien plus heureuse sans ce fardeau et elle pourra reprendre le trône qui lui revient de droit. Ainsi plus rien ne t’empêchera de vivre pleinement ta vie avec ton fiancé, sans te soucier du fardeau du pouvoir.»


Une nouvelle fois, Runeard avait visé en plein cœur. Il c’était vite rendu compte qu’il serait difficile de convaincre Anna sans lui montrer les bénéfices que chaque personne qui lui était chère pourrait en tirer. Même si lui rappeler à son souvenir que son amant pour l’heure disparu n’était probablement pas la meilleure chose à faire face à la colère qui rougit les joues de la reine :

« Où est-il ? Où est Kristoff ? interrogea sèchement la jeune femme.

– En lieu sûr, rassura l'homme arbre, il a lui aussi un rôle à jouer dans la bataille qui se prépare, comme tout ceux que mes loups m’ont amenés. Ne t’inquiètes pas, tu le retrouvera sain et sauf une fois qu’Athohallan ne sera plus.

– Pourquoi devrais-je croire votre parole ? Vous avez déjà trahit tout un peuple par le passé, vous seriez bien capable de faire de même avec votre famille.»



Cette fois, les yeux de l’esprit sylvain trahirent à quel point cette remarque le blessait. Pourtant il devait se douter qu'il y face ferait à un moment ou un autre, il ne pouvait espérer que ses belle paroles seules ne puissent réparer la confiance qu’il avait à jamais briser. Tout ce qu’il pouvait faire, c’était continuer d’essayer de convaincre la jeune femme de la nécessité de son projet :

« Je comprends parfaitement que tu ne veuilles pas me croire. Et je ne peux t’en vouloir, ni à qui ce soit, après ce que j’ai fais. Mais j’ai toujours tout fait pour protéger ma famille et mon peuple, mes actions ont toujours été dictés dans ces sens. J’espère seulement que l’héritage que je vous laisserai sera une preuve suffisante de ma bonne foi.

– Un monde sans magie, en voilà un bel avenir ! Revenez à la raison, votre but n’a aucun sens, nous risquons de perdre bien plus que vous ne l’imaginez, autant pour Arendelle que pour le peuple du soleil.

– J’ai eu trente ans pour méditer la question. Trente ans pour imaginer un monde où nous serions libérer de ces forces que nous ne pouvons contrôler et qui pensent pouvoir nous dicter nos vies. Vous pourriez enfin reprendre votre destin en main. Imagines : deux peuples unis main dans la main pour construire un nouvel avenir loin sans la menace des esprits. N’est-ce pas là un sort des plus enviables ?

– Vous voulez libérer tout le monde de la peur, mais ici je ne vois que vous qui êtes terrifié.

– Je le sais, confit Runeard. Autrefois, j’avais peur que les Northuldras n’usent des esprits contre nous. Maintenant, je suis terrifié face à l’idée qu’ils n’ont aucun contrôle sur eux. Combien de temps faudra t’il avant qu’un autre n’emprunte le même chemin que moi ? Qu’à nouveau quelqu’un ne prenne les arme et ne déclenche une guerre qui meurtrira encore Arendelle et la Forêt Enchantée pour plusieurs générations ?

– Tant qu’Elsa et moi seront là, affirmera Anna avec d'un air de défi, cela n’arrivera pas.

– Je n’ai aucun doute sur ce point, mais lorsque vous ne serez plus de ce monde ? Lorsque le cinquième esprit aura disparu, pourra-tu en être toujours aussi certaine ? Nous en connaissons tout les deux la réponse.»



Anna n’avait rien à répondre à cela, au vu de toute les informations que l’ancien roi possédait déjà, il était fort probable qu’il ait eu vent des troubles qui agitaient les Arendelliens. Même sans cela, certains des conseillers étaient déjà en poste du temps de son règne, il était donc aisé pour lui de deviner quel était l’opinion de ces derniers vis-à-vis des Northuldras. La reine aurait voulu de nouveau lui rétorquer qu’avec Elsa elle réussirait avant que ça n’arrives, mais elle ne pouvait prétendre que Runeard n’avait pas tord dans le fond : les deux sœurs pouvait instaurer la paix, mais elles ne pouvaient pas entrer dans la tête de chaque personnes pour en modifier les pensés. Cependant cela ne changeait en rien que la solution de l’ancien roi était de loin la pire envisageable.

« Je sais que ce choix n’est pas facile à appréhender pour vous, profita l'esprit sylvain en voyant le trouble de sa petite fille. Cependant, je te l’assure une nouvelle fois : quand tout sera fini, vous comprendrez pourquoi j'ai fais ce choix. En attendant que j'ai terminé, pour ta sécurité, tu restera ici. Si tu as besoin de quoi que ce soit, mes loups te l'apporteront.»

– Si je refuse, je suppose que j’y serai contrainte de toute manière ?

– Seulement si tu m’y obliges. J’ai déjà dû assister impuissant à la mort de mon fils, je ne supporterai de le vivre à nouveau.» termina l'esprit sylvain d'une voix grave teinté de remord.


Avant qu'il ne se parte, la reine lui lança une dernière question qu'elle savait bien vaine face à l'aveuglement fanatique de son grand-père :

« Si la magie disparait, vous disparaitrez. Vous le savez aussi, n'est-ce pas ?

– Je suis déjà mort Anna. Ma condition actuelle n'est qu'un sursis pour me permettre de me racheter et de pouvoir me laisser aller en paix, dans le repos éternel où je pourrai enfin rejoindre Agnarr.»


Sans pouvoir laisser Anna ajouter quoique ce soit d‘autres, Runeard disparu entre les arbres de la même manière qu’il était apparu. La jeune femme n’eut d’autre choix que de retourner à l’abri où elle c’était réveiller, les loups lui bloquant le passage jusqu’au trou où Olaf était retenu. Encore sonné par tout ce qu’elle venait d’apprendre et se promettant de trouver un moyen d'arrêter la folie de son grand-père, la jeune femme ne remarqua pas le bourgeon à l’aura glaciale qui se formait sur l’une des branches de l’arbre mort.

Combien de temps c’était-il écoulé depuis qu’elle était prisonnière du Grand Cornu ? Anna serait bien incapable de le dire tant les heures lui semblaient plus longue, seule à essayer de trouver un plan pour s’échapper. Plusieurs fois elle avait tenter de partir discrètement, mais à chaque fois les gardiens à poils ou à plumes de son grand-père la repérait et la jeune femme préférait rebrousser chemin plutôt que de déclencher l’alerte. Depuis ses retrouvailles avec l’ancien roi, elle ne l’avait pas revu et elle n’avait toujours pas pu retourner s’assurer qu’Olaf allait bien. La jeune femme s’inquiétait de son sort, ainsi que celui des autres disparus. Surtout en ce qui concernait Kristoff.


Kristoff. Anna aurait tout donné pour savoir où il se trouvait. Elle sentait dans son cœur qu’il était en vie, mais connaître les plans de son grand-père vis-à-vis de lui l’inquiétait d’avantage. Que voulait dire l’esprit de la forêt en lui expliquant que le montagnard avait un rôle à jouer dans son plan pour détruire Athohallan ? Il semblait totalement improbable pour la reine que son amant n’accepte de suivre le plan de Runeard, même avec les arguments les plus convaincants. A moins qu’il n’use de sombre maléfice que lui aurait apporté sa nouvelle nature ?  Si pour certain l’ignorance était une bénédiction, à cet instant pour Anna il s’agissait d’une véritable torture.


Le montagnard  n’était le seul pour lequel elle se posait de nombreuses questions, notamment à propos de Runeard et le fait qu’il soit devenu le Grand Cornu. Anna ne pouvait remettre en cause la sincérité de son discours, mais est-ce que sa transformation n'avait pas eu une influence sur ses convictions ? En tout cas, peut-être qu’Elsa serait plus à même de le convaincre ou si nécessaire, de le combattre. Le problème restait le même dans les deux cas : la jeune femme devait trouver un moyen de retrouver sa sœur, ou à défaut de pouvoir lui envoyer un message. Même si cette seconde solution semblait bien vaine quand la jeune femme ne reconnaissait pas la partie de la Forêt Enchantée où elle était prisonnière.


Alors que son nombre d’option s’amenuisait dans ses pensées, un bruissement dans les fourrés attira son attention. L’étonnement se mêla à la joie quand Grand Pabby apparut, lui faisant signe de s’approcher et de parler le plus doucement possible :

« Quelle soulagement de vous retrouver saine et sauve Anna, lui dit-il d’un air rassuré.

– Grand Pabby ! s’exclama Anna avant d’immédiatement baisser la voix. Comment m’avez-vous retrouver ? Et surtout comment avez-vous fait pour ne pas être repéré ?

– J’ai suivi la piste de votre grand-père. Il c’est beaucoup activé depuis que la brume c’est levé, il fut donc beaucoup plus aisé de le retrouver que lorsqu’il se cachait en attendant son heure. Pour ce qui est de ses chiens de garde, j’ai encore quelques sortilèges en réserves pour passer inaperçu.

– Alors vous saviez qu’il était devenu le Grand Cornu ?

– Je le craignais, mais je n’imaginais pas qu’il en viendrait à de tels méthodes. Mais ne vous inquiétez pas, dans peu de temps les renforts vont arriver : Elsa et les esprits sont déjà en marche.»


Anna poussa un long soupir de soulagement. L’espoir lui était revenu plus vite qu’elle ne l’aurait espéré, l’arrivé du troll et de ses bonne nouvelles tenait du miracle. Malgré tout, dans le ciel de ses pensées qui venait de s’éclaircir, une nuage sombre continuait de flotter et l’empêchait de totalement se réjouir :

« Est-ce que vous avez trouvé Kristoff ?»



Grand Pabby hésita à répondre, ce qui renforça d’autant plus l’inquiétude de la jeune femme. Devant son visage qui devenait de plus en plus anxieux  à l’idée qu’il soit arrivé malheur à son amant, le vieux troll tenta de la rassurer :

« Il va bien, dit le patriarche en voulant se montrer le plus calme possible,  ne vous inquiétez pas.

– Vraiment ? s’étonna la jeune femme suspicieuse. Grand-père a dit qu’il avait des plans pour lui, comme tout ceux que ses loups avaient enlevés.

– Il ne vous en a pas révélé plus ?

– Il est resté très flou sur ce qu’il voulait dire exactement. Un peu de la même manière que vous... qu’est-ce que vous essayez de me cacher ?»


Le patriarche resta silencieux face au regard accusateur de la reine. Cette dernière comprit sans difficulté qu’il essayait de la protéger et que Kristoff était bel et bien en danger. Même si Elsa était en chemin, Anna ne pouvait se résoudre à rester les bras croisé face au sort incertain de son amant : il lui avait par deux fois sauvé la vie dans le passé, c’était à son tour de sauver la sienne.

« Si vous ne voulez rien me dire, déclara la reine dune voix ferme, j’irai le cherché moi-même.

– Anna c’est trop dangereux, vous devez resté à l’abri ! Quand Elsa et les esprits vont arrivés...

– Le combat sera violent et je risque d’être blessé ? Si vous voulez vraiment me protéger, aidez-moi à secourir Kristoff. Plus vite je le saurai en lieu sûr, plus vite je pourrai me mettre à l’abri, n’est-ce pas ?»


Grand Pabby n’avait pas d’autre choix. Il connaissait le caractère d’Anna, quand elle était déterminé à accomplir quelque chose, rien ni personne ne pouvait se mettre en travers de son chemin. Mieux valait la conduire discrètement jusqu’à l’endroit où le montagnard était gardé afin de lui montrer qu’il n’y avait rien à faire pour le moment, si ce n’est d’attendre qu’Elsa ne vienne à bout du Grand Cornu. Il sortit un petit sachet en toile et lança une poignée de poudre verte sur la jeune femme, lui demandant un court instant avant de se mettre en route pour être certain que le sort fasse effet.


La magie du vieux troll se révéla particulièrement efficace et ils purent éviter sans problème les gardes bestiaux qui patrouillait sur le domaine de Runeard. Après un cours parcours à slalomer entre les arbres sans se faire repérer, Grand Pabby guida Anna jusqu’à une partie moins dense de la forêt, non loin de la clairière de l’arbre mort. La reine y découvrit d’étranges chrysalide faites de mouse et de lierre. Maintenues par les racines des arbres au pied desquels ils se trouvaient,  elles étaient suffisamment grandes pour y garder un homme adulte. Quand cette pensé lui traversa l’esprit, Anna comprit pourquoi Grand Pabby ne voulait pas l’amener ici : dans un de ses cocons, se trouvait probablement Kristoff, ainsi que tout ceux qui avait disparus, y comprit Mattias et ses soldats. Elle retint un haut la cœur tant bien que mal, avant de demander :

« Vous... vous savez dans laquelle se trouve...

– Oui, mais avant que vous ne posiez la question : j’ai voulu essayé de l’en sortir, cependant je ne veux pas non plus prendre de risque. Le libérer risquerait d’alerter votre grand-père de ma présence.

– Est-ce que je peux le voir ?

– Vous le pouvez, mais êtes-vous certaine de le vouloir ?

– Je dois m’assurer qu’il va bien.

– Comme vous voudrez.»


Le patriarche la conduisit jusqu’à la chrysalide où se trouvait Kristoff. Une membrane fibreuse plus fine à certains endroit permit à Anna d’avoir un aperçu de ce qu’il se trouvait à l’intérieur. Le montagnard était recroquevillé en position fœtale, les yeux fermés et la mine paisible. Son corps ne portait aucune blessure, ce qui aurait dû rassurer la jeune femme si elle n’avait pas remarqué la fine couche d’écorce qui commençait à recouvrir sa peau, semblable à celle qu’arborait l’esprit sylvain.  

« Qu’est-ce qui lui arrive ? Nous devons le sortir de là immédiatement !

– Anna s’il vous plait, tenta Grand Pabby pour l’arrêter, n’agissons pas sans réfléchir.

– Vous connaissez un moyen ? demanda Anna sans prêter attention à ses avertissements.

– Cela ne sera pas nécessaire : quand le Grand Cornu sera vaincu, Kristoff et tout ceux prisonniers de ces cocons seront libérés de ce maléfice.»


La phrase de Pabby résonna en écho avec les dires de Runeard. Ce dernier n’avait donc menti à Anna quand il lui avait déclaré haut et fort que lorsque la magie disparaîtrait, elle retrouverait son amant sain et sauf comme si rien ne c’était passé. Après tout, si toute la magie disparaissait, cela englobait aussi celle du Grand Cornu. Toutefois, même si elle avait la réponse sur ce qu’il était advenu de tout les disparus enlevé par les loups, cela ne lui révélait pas ce que l’ancien roi avait en tête.

« Qu’est-ce que mon grand-père recherche en transformant tout ces gens en ces... choses ? demanda t’elle.

– Ce sont des soldats. Il ne veut pas simplement détruire Athohallan, il veut lui déclarer la guerre.

– Quelle différence cela fait ? Dans les deux cas le résultat sera le même.

– Un souverain qui meurt au cours d’une défaite peut-être tourné en ridicule par les langues les plus vils si la mort n’est pas héroïque. D’autant plus lorsque la bataille est le fruit des propres faiblesses de jugement du roi en question, rongé par la peur face à des innocents dont il ne comprend simplement pas les coutumes. Votre grand-père derrière, ses beaux discours, ne cherche pas seulement à éradiquer toute forme de magie : il veut aussi soigner son ego après l’humiliation subit face aux Northuldras. Mais puisque sa haine c’est détourné du peuple du soleil pour se concentrer sur les esprits, il c’est constitué une armée capable de leur faire face. Des soldats à son image, comme autant de fragment de son propre pouvoir, mus par sa volonté. Même pour le peu que je peux compter, il sont bien assez à eux seul pour faire pencher le combat de son côté.

– Raison de plus pour ne pas laisser Kristoff ici !

– Sa transformation est loin d’être terminé. Faites moi confiance et surtout, ayez confiance en votre sœur. Elle saura arrêter Runeard avant qu’il n’éveille son armée et...

– Avez-vous perdu la tête ? s’emporta la jeune femme. C’est de votre fils adoptif dont nous parlons ! De mon futur mari ! Si vous savez comment le libérer, vous devez essayer, sinon vous ne valez pas mieux que celui qui lui a fait ça !»


Grand Pabby hésita, voulant attendre encore un peu l’arrivé des renforts, mais les paroles d’Anna était juste malgré la colère qui les animaient : il ne pouvait laisser ainsi celui qu’il avait élevé comme son propre fils. Le libérer alertait probablement le Grand Cornu, le mieux qu’il pouvait faire serait donc d’offrir une chance aux deux jeunes gens de s’enfuir. Ils étaient le véritable espoir face à la menace de Runeard, alors si le patriarche devait se sacrifier pour leur permettre d’accomplir leur destin, ainsi soit-il.


« Très bien, écartez-vous. Dès que ce sera terminé, fuyez. Avec de la chance, vous trouverez les Northuldras sur votre chemin. Mais partez le plus loin possible pour que Runeard ne puisse exercer son emprise sur son esprit.»


Anna acquiesça avant de laisser le vieux troll commencer à utiliser ses pouvoirs sur la chrysalide qui emprisonnait Kristoff. Petit à petit, les fines couches végétales se délièrent et Anna eut juste le temps de rattraper son amant avant qu’il en touche terre. Ce dernier commença lentement à ouvrir les yeux, complètement déboussolé :

« A...Anna ? Où sommes-nous ? questionna le montagnard d‘une voix endormie.

– Chut, lui intima Anna, ne t’inquiètes pas Kristoff, tout vas bien. Nous allons te ramener à Arendelle.

– Qu’est-ce qui c’est passé ? Je me sens étrange...

– Tu iras mieux quand nous t’aurons soigné, assura le vieux troll. Maintenant partez, avant que...»


Un croassement rauque les interrompit. Perché sur une branche au dessus d’Anna, un corbeau noir de jais fixait Grand Pabby d’un œil mauvais. Cela ne pouvait dire qu’une chose : le Grand Cornu savait que le troll était entré sur son domaine. Le sortilège qui l’avait jusque là dissimulé jusqu’à présent ne faisait plus effet, fort heureusement Anna continuait d’en bénéficier puisqu’elle l’avait reçu beaucoup plus tard. D’un geste discret, le patriarche fit signe aux deux jeunes gens de partir alors qu’il allait devoir faire face à l’ancien roi.


Runeard se tenait silencieux face à l’arbre mort, observant avec attention le fruit bleus à l’aura glaciale qui y avait poussé. La voix d’Olaf ne résonnait plus au fond du trou où il était retenu, indiquant que le fruit serait bientôt mûr pour les sombres desseins de l’esprit de la forêt. Ce dernier se tourna vers Grand Pabby et l’accueilli chaleureusement :

« Je ne pensais pas jamais vous revoir, mon vieil ami.

– J’aurai préféré que ce soit dans d’autres circonstances, répondit poliment le vieux sage. Comment avez-vous pu vous laisser...

– Oh assez, ma petite fille m’a déjà assez sermonné avec ces sornettes. Le temps n’est plus au discours, mais aux actes.»


Le vieux trolls comprit aussitôt que l’ancien roi avait été très affecté par le refus de sa petite fille de le rejoindre dans sa cause, en tout cas plus qu’il n’osait le dire où le montrer. Était-ce par fierté ou avait-il été réellement touché ? Grand Pabby savait très bien comment le savoir et fit appel à des souvenirs enfouis dans les tréfonds de la mémoire de l’ancien roi :

« Où est le petit garçon qui venait écouter mes histoires quand ses parents s’en allaient en voyage diplomatique dans un autre royaume ? Où est l’enfant émerveillé par la magie qui l’entourait ?

- Il est partit le jour où on a posé une couronne sur sa tête, soupira l’ancien roi avec mélancolie. Le jour où il a tenu son fils dans ses bras pour la première fois. Quand il a comprit le poids des responsabilités d’un peuple, d’une famille, et les sacrifices nécessaires pour les protéger. »


L’homme arbre leva les yeux au ciel, cherchant à se remémoré un temps plus heureux qu’il aurait aimé retrouvé. Une période insouciante où il allait jouer dans la plaine des trolls quand il s’enfuyait du château à la faveur de la nuit, pour ne revenir qu’au petit matin complètement exténué par ses escapades nocturnes. Il avait été tellement obnubilé par la part sombre de la magie qu’il en avait oublié tout ce qu’elle pouvait avoir de bons à apporter. Mais dans la balance, ce bien faisait-il une différence face à tout le mal qui avait été fait irrémédiablement ? Les souvenirs d’enfance sont éphémères, la perte d’un fils reste à jamais, voilà ce qu’il pensait pour continuer à se persuader qu’il était dans le droit chemin.


Voyant une opportunité inespéré de le ramener à la raison, Grand Pabby reprit :

« Vous qui pensez la magie si dangereuse, vous ignorez sans doute que sans elle ,vous n’auriez pas put parler avec votre petite fille ?

– Que voulez dire ? demanda Runeard qui ne comprenait pas de quoi il parlait.

– Quand elles étaient enfant, expliqua le vieux troll, Elsa blessa accidentellement Anna avec sa magie. Elle n’aurait peut-être pas survécu si son père ne me l’avait pas amené.

– Encore une bonne raison de libérer cette pauvre enfant de ces pouvoirs maudits ! Cependant... j’ai longtemps lu à Agnarr un livre de conte racontant les nombreuses légendes qui vous entoure, mais de là à ce qu’il puisse y croire...

– L’entrain de son père l’a sûrement aidé à y croire, ainsi que la carte que vous aviez laissé dans ce livre.

– Vous voulez parlé de ma carte ?

– Celle la même que vous aviez prit si grand soin à tracer pour garder à jamais le chemin menant à la plaine des trolls, le jour où vous auriez besoin de notre aide. Vous l’aviez oublié depuis longtemps quand vous vous laissiez submerger par vos craintes face aux esprits.

– Qu’est-ce que cela aurait changé ? Absolument rien ! s’entêta l’esprit de la forêt.

– Au contraire, rétorqua le sage, peut-être que cela vous aurait évité de suivre le chemin de la peur et de commettre cette erreur irréparable. Vous accusez la magie d’être responsable de tout les maux qui frappe votre famille et son peuple, alors que vous êtes le seul par vos actes qui leur avez infligé ce lourd fardeau.»


Runeard commença à enrager intérieurement. Des reproches, toujours et encore des reproches et des accusations. Était-il donc le seul à avoir ouvert les yeux ? Il leur montrerait, il leur montrerait à tous ! Bien évidemment qu’enfant il ne s’en était pas rendu compte, il était trop naïf. Plus jamais, il ne se laisserait aveugler de la sorte !

« Il n’est pas trop tard pour renoncer, continua Grand Pabby. Le seul moyen pour vous d’être en paix est d’accepter que la magie n’a rien de dangereux, si ce n’est par le prisme de votre propre peur.

– Bien sûr que je suis terrifié, avoua l’ancien roi, qui ne le serait pas ?

– Dois-je comprendre que les trolls comme moi vous terrifie ?

– Ne soyez pas idiot, vous êtes différents des esprits de la nature, vous êtes bons par rapport à eux.

– Nous sommes pourtant issu de la magie, vous nous condamneriez donc à disparaître nous aussi ?

– La magie n’a jamais rien apporter de bon à personne, elle n’a servi qu’à créé la discorde et à semer la mort partout où elle apparaît. Je regrette sincèrement que vous ne deviez en subir les conséquences.»


Grand Pabby n’était pas dupe, il savait très bien ce qui se passait dans la tête de l’ancien roi. Sa solitude n’avait fait que renforcé les certitudes de Ruenard sur le bien fondé de sa cause, sans jamais personne pour le contredire. Plus il attendrait des gens, qui plus est de sa propre famille, aller contre sa volonté et la remettre en cause, plus sa rage grandirait et c’est à ce moment qu’il deviendrait le plus dangereux.

« Rien ne pourra vous faire changer d’avis, n’est-ce pas ? Après tout, si Anna n’a pas réussi, je vois mal qui d’autre le pourrait. Cette petite a toujours eu un don pour toucher le cœur des gens, il faut croire que le votre a bien cesser de battre lorsque vous êtes tombé la falaise.»


Runeard ne répondit pas. Il savait que Grand Pabby avait raison, mais il ne pouvait l’admettre, persuadé que ce serait perdre le peu d’honneur qu’il lui restait. Triste ironie, alors qu’abandonner son projet dément était le seul moyen pour lui de se libérer de la malédiction du Grand Cornu. Le vieux troll soupira devant sa détermination :

« J'accomplirai mon devoir.

– Vous essaierez.»


Pendant un court instant, le temps se figea. Ce fut Runeard qui attaqua le premier, bondissant vif comme l’éclair sur Grand Pabby qui eut à peine le temps de le repousser d’un sort puissant. L’homme arbre fut projeté à l’autre bout de la clairière dans un fracas tonitruant. Il se remit sur pied immédiatement alors que le vieux troll restait immobile, prêt à contrer ses nouveaux assauts imminents.  Cependant, Grand Pabby savait que son pouvoir ne serait pas suffisant très longtemps. Tout ce qu’il pouvait espérer, c’est qu’Anna et Kristoff étaient déjà loin et qu’Elsa arriverait bientôt.


Comme il l’avait prédit, l’esprit de la forêt n'avait aucune égratignure. Le ballet de ses attaques continua plusieurs fois alors que Grand Pabby avait de plus en plus de mal à le repousser. Les craintes du troll se confirmaient : plus la colère l’envahissait, plus Runeard perdait la raison au profit d’une fureur bestiale semblable à celle de son prédécesseur. Et si il  transmettait cette rage à ses soldats endormis, le carnage lors de la première apparition du Grand Cornu ne serait rien face à massacre sanglant que mènerait l’ancien roi. Malheureusement, la magie du patriarche s’estompait à mesure qu’il se fatiguait et finalement, après une ultime tentative, son dernier sort échoua à contrer le coup de l'esprit de la forêt. Runeard l’attrapa par la tête et l’écrasa violemment contre le sol. N’importe quel être humain aurait succombé, mais la résistance du troll lui fut salutaire bien qu’elle ne l’empêcha pas d’être assommé par sa puissance . L’être sylvain le souleva et commença à écraser sa tête de sa poigne de fer. Un craquement sourd se fit entendre alors que la peau de pierre du troll commençait à se fissurer.


Au moment où le Grand Cornu s’apprêta à porter le coup de grâce, une lance de glace traversa la clairière pour venir lui transpercer le bras, le faisant lâcher Grand Pabby qui s’écrasa lourdement sur le sol. Tout deux se tournèrent vers Elsa qui était apparu, chevauchant fièrement le Nokk avec toute la prestance que son rang de cinquième esprit pouvait lui apporter. .


« Bonjour grand-père.» lança t’elle en direction de Runeard avec un air de défi.

Elsa observa sans sourciller la blessure du Grand Cornu se soigner d’elle même alors que les tissus végétaux et sa peau d’écorce se refermait. Grand Pabby l’avait mit en garde contre les pouvoirs de l’esprit de la forêt, tout comme sa véritable identité, mais elle ne s’imaginait pas qu’il était aussi puissant. Plus étonnant encore, alors qu’elle s’attendait à une attitude hostile face à son regard dur, Runeard ne fit même pas attention au fait qu’elle venait de l’attaquer et lui ouvrit grand les bras de manière accueillante :

« Elsa ! Quel bonheur de te voir ! Et quelle allure ! Une véritable souveraine, digne de succéder à son père.

- Où est Anna ? demanda sèchement le cinquième esprit sans prêter attention au flatterie de son aïeul.

- En sécurité, cela va de soit.» répondit Runeard le plus naturellement du monde.



L’homme arbre fut stoppé par des pics gelés qui jaillirent du sol pour le clouer sur place. L’ancien roi se heurta de nouveau au ton froid de la jeune femme, visiblement déterminé à avoir une réponse plus concrète que ses divagations. Elsa usait de toute ses années à cacher ses émotions pour ne pas montrer sa peur quand Runeard s’extirpa une nouvelle fois de la glace qui le retenait comme si de rien n’était, avant de reprendre sa marche vers elle.

«  Je ne lui ai fais aucun mal, ne t’inquiètes pas, rassura de nouveau l’homme-arbre.

- Je continuerai jusqu’à ce que vous répondiez, rétorqua Elsa qui s’apprêtait de nouveau à le stopper dans son élan.

- J’admire ta détermination, mais tu vois bien que c’est futile face à moi.» s’agaça Runeard.


L’ancien roi sentait sa patience s’amenuir à chaque nouvelle défiance de la part de sa petite fille. La cadette lui avait déjà tenu tête suffisamment longtemps, son ancien mentor lui avait fait les mêmes reproches, voilà maintenant que l’aînée de la famille royale allait lui tenir le même discours. Cependant son cas était particulier, car le fait qu’elle chevauche le Nokk avec une telle aisance impliquait qu’elle avait totalement embrassé sa fonction de cinquième esprit, ce qui signifiait qu’elle serait la plus difficile à convaincre. Du moins, seulement si elle ne restait pas insensible à ses paroles. L’esprit de la forêt se tourna vers celui de l’eau qui le défiait du regard et pointa son doigt crochu dans sa direction, en le menaçant d’une voix tonitruante :

« Toi, créature maudite ! Éloignes toi de ma petite fille !

- Le Nokk n’est pas celui qui me menace en ce lieu, objecta la jeune femme.

- Vraiment ? Si je l’avais voulu, j’aurai déjà pu me défendre contre chacun de tes assauts, pourtant j’ai encaissé sans jamais riposter. Alors que ce démon que tu chevauche est le même qui tua ton père et ta mère en les noyant dans les eaux de la mer sombre. Mais tu le savais déjà, n’est-ce pas ?»

Elsa se figea devant les accusations de l’homme arbre alors que le Nokk restait impassible. Évidemment que l’esprit n’en avait que faire, au contraire du cinquième esprit. Le souvenir figé des derniers instants de ses parents dans l'épave dans leur navire lui revint en mémoire. Le cheval d’eau n’y était pas apparu, rien ne prouvait donc qu’il était responsable de leur trépas, pourtant il n’était pas insensé d’imaginer qu’il y avait participer. Pourtant, même si cette pensé lui était cruelle, le Nokk n’avait fait qu’accomplir son devoir de protéger Ahtohallan. Si il y devait y avoir un responsable, ce serait Runeard lui-même, après tout c'était sa trahison qui avait tout déclenché.

« Mes parents sont morts lors d’une tempête, rien ne prouve que le Nokk était responsable, répliqua Elsa.

- Allons mon enfant, se navra Runeard, ne soit pas aussi aveugle : cette créature de l’enfer règne sur la mer sombre, la tempête n’est qu’un de ses nombreux artifice pour empêcher qui ce soit de s’approcher d’Ahtohallan. Si il c’est attaqué à toi alors que tu étais seul, imagines les moyens qu’il serait prêt à déployer pour arrêter un tel navire. Tu aurai subi surement le même sort que tes pauvres parents si tu n'étais pas cinquième esprit. Elsa, je ne suis pas ton ennemi, j’essai de tous vous sauver. Imagines un instant ce qu’il pourrait arriver si d’autres devait subir le même sort, nous ne connaissons que trop bien la douleur de perdre un être cher. Aides moi, je t’en conjure.»


Aussi paradoxale que cela puisse paraître, les folles paroles de Runeard n’était pas totalement dénué de sens. Grand Pabby avait longuement expliqué à Elsa les réels desseins de l’ancien roi pour la rivière des souvenirs, ainsi que la sincérité de ses bonnes intentions. Ceci étant dit, cela en devenait d’autant plus déroutant quand elle y faisait directement face, pourtant ses arguments lui laissaient un goût amère, quelque chose sonnait faux dans ses paroles. Cette manière de marteler pourquoi l’homme-arbre pensait avoir raison, de se servir ainsi de la disparition tragique du roi Agnarr et de la reine Iduna pour la convaincre... l’ancienne reine avait suffisamment côtoyé les grands de ce monde pour se rendre compte que l’ancien roi se répétait tout cela pour lui: il avait déjà prit sa décision depuis longtemps.



Le cinquième esprit se tourna vers Grand Pabby qui était resté à terre jusqu’à présent. Elle voulait encore gardé un peu d’espoir de faire changer d’avis son grand-père, même si au fond elle savait que c’était peine perdu. Tout ce qu’il fallait désormais, c’était essayer de gagner un peu de temps dans une dernière tentative de la ramener à la raison, même le vieux troll lui aurait surement déconseillé :

« Comment le pourrais-je ? demanda t'elle faussement intéressé.

- Tu l’as dit toi-même, tu es la seule qui puisse te rendre à Ahtohallan. Conduit moi là-bas et je te promet que tu n’aura pus jamais à craindre de blesser qui ce soit avec tes pouvoirs. Cette malédiction qui te hante depuis ta naissance ne sera plus qu’un lointain souvenir.

- Vous arrivez un peu tard. Vous qui plaidez à qui veut l’entendre que les esprits sont une menace, c’est grâce à eux que j’ai trouvé ma place en tant que cinquième esprit et que mes pouvoirs ne me font plus peur.

- Je conçois que tu as fais d'énorme progrès depuis ton couronnement, mais un tel excès de confiance pourrait mener à un nouvelle accident... comme quand toi et ta sœur étiez enfant.»



L’ancien roi pensait avoir sortit sa carte maîtresse en rappelant à la jeune femme ce douloureux souvenir, mais ce fut sa plus grave erreur car au lieu de la convaincre, il venait de provoquer la colère du cinquième esprit :

« Comment êtes-vous au courant ?

- Grand Pabby a essayé de me convaincre en arguant que c’est grâce à sa magie qu’Anna avait été sauvé. Cela n’aurait pas été nécessaire si tu n’avais jamais eu de pouvoirs, n’est-ce pas ?

-  Et à qui dois-je mes pouvoirs selon vous ?

- Quelle question, aux esprits évidemment !

- En effet, nous sommes au moins d’accord sur ce point. Ce que vous semblez oublier, c’est que je n’aurai jamais eu à porter ce fardeau si vous n’aviez pas trahi la confiance des Northuldras.

- Je suis conscient de ma faute, mais par la suite ce sont les esprits qui ont enfermé la forêt dans le brouillard et qui ont...

- Maudit notre famille ? En trente ans vous n’avez donc toujours pas comprit : les esprits n’agissent jamais par cruauté, ils ne font que répondre à nos actions. En d’autres termes, le seule responsable c’est vous et vous seul, grand-père.

- Je te le répète Elsa, je sais que mes craintes m’ont...

- Non ! Vous ne le savez pas et vous ne voulez pas vous en rendre compte ! Vous accusez les esprits d’être responsable de tout nos malheurs, mais c’est vous qui avez infligé à votre famille le fardeau de réparer vos crimes et ses conséquences.»



cette dernière phrase fit l’effet d’une bombe dans l’esprit de Runeard. Le dernier rempart entre ses convictions et sa raison se brisa sous les coups de ce mot qu’il avait trop ressasser durant ses années de solitude. Son crime. En quelques jours, tout ceux dont il avait espéré le soutien l’avaient rejeté sur cette seule faute, sans vouloir écouter son désir de se racheter, oubliant tout ce qu'il avait fait de bien dans son règne et l’étouffant sous les reproches et les accusations. Sa volonté était une nouvelle fois ébranlée, remplacé par une rage bestiale qui l’envahissait face à la détermination de l’aînée des sœurs d’Arendelle.

« Vous êtes tous si prompt à me rappeler mes erreurs passés... je craignais que vous ne vouliez pas voir la nécessité de détruire la magie, mais je ne pensais que pas que vous seriez tous aussi aveugle. Je n’en ai que faire désormais ! J’ai commencé seule, je terminerai seul ! Ce n'est qu'alors que vous comprendrez que j'avais raison !»


Furieux, Runeard bondit jusqu’à l’arbre mort pour se saisir du fruit gelée arrivé à maturité avant qu’un mur de flamme mauve ne l’en empêche, l’obligeant à reculer. L’ancien roi venait de sceller son destin en laissant sa colère prendre le dessus. Courant d’Air vint prêter main forte à Bruni, attisant les flammes qui se refermait sur l'esprit de la forêt et se transformant en un tourbillon flamboyant. L’homme-arbre fulminait intérieurement et sa fureur devenait plus ardente encore que le brasier qui l’encerclait. Tout cette mascarade n'était donc qu'un piège grossier que la jeune femme et le vieux troll avait mit en place contre lui. Après tout ce qu’il avait sacrifié, tout ce qu’il avait voulu accomplir, on lui avait systématiquement refusé toute chance de rédemption. Était-ce donc son destin d’être une nouvelle fois arrêté par les esprits ? D’être renié par sa famille ?


Non. Pas cette fois. Il avait rejeter jusqu’à son humanité pour achever son œuvre et s’était ainsi qu’on le remerciait ? Lui qui voulait simplement les sauver de leur tragique destin de servitude face à une magie trop puissante pour eux ? S’en était trop, cet ultime affront fut le dernier clou sur le cercueil du peu de santé mental qui lui restait. Au diable ce que ses petites filles pouvaient penser de ses actions, au diable ceux qui se trouveraient désormais sur son chemin. Si les esprits voulaient l’obliger à faire couler le sang, qu’il en soit ainsi : ce soir, la lune serait de écarlate et l’aube rouge, quand ceux qui soutiennent les esprits tomberaient avec eux ! Il réussirait à les libérer de l’emprise de la magie, même si cela devait être dans la mort !


Si Elsa ne pouvait voir au milieu des flammes les sillons dans l’écorce du Grand Cornu qui se teintait d’une lueur écarlate, Grand Pabby, qui avait retrouvé ses esprits, pouvaient sentir le changement qui s’opérait dans le cœur de l’ancien roi. Le patriarche avait déjà ressenti cette aura bestiale assoiffé de sang dans sa jeunesse, alors que le premier Grand Cornu massacrait les tribus Northuldras. Il se refusa à assister de nouveau à un tel carnage. Sa tête le faisait terriblement souffrir, mais il n’avait pas un instant à perdre. Il était déjà trop tard pour l’esprit de Runeard, Elsa devait lui donner le coup de grâce au plus vite, sinon sa rage le consumerai avant les flammes.

« Elsa ! cria t’il en direction du cinquième esprit. Il faut en finir maintenant !»


Le sol se mit à trembler, annonçant l’arrivé des géants de pierre et couvrant les appels désespéré de Grand Pabby. Apercevant le patriarche blessé s’avancé péniblement vers elle, la jeune femme s'approcha de lui et essaya de le faire se rasseoir, s'inquiétant d'autant plus en voyant les fissures qui ciselaient le crane de pierre du patriarche :

« Restez calme Grand Pabby, lui intima t'elle d'une voix douce, votre plan est en train de fonctionner. Quand les géants seront là, grand-père ne sera plus un danger pour personne et nous pourrons à nouveau essayer de le sauver.

- C’est trop tard Elsa... j’ai voulu garder espoir mais... ses pensées sont resté trop longtemps corrompus par la peur et la haine...»


Au milieu du brasier, le Grand Cornu c’était transformé : le satyre était devenu minotaure. Sa carrure effilé était devenu massive et le masque impassible c’était fendu d’une gueule béante dont chaque écharde formait autant de dents acérés. Les longs doigts effilé tenaient désormais bien plus des griffes tranchantes et ses cornes c’étaient courbé vers l’avant, prêtes à empaler tout ceux qui se trouverait devant lui. Sa peau d’écorce avait prit une teinte cendré alors que les sillons rougeoyant pulsaient au rythme de son cœur enragé. Même les esprits présents en restèrent figés de peur face à cette incarnation de la colère de la forêt, plus terrifiante encore que lors de la sa première apparition.


Runeard observa chacun des esprits élémentaires avant de fixer longuement Elsa d’un œil mauvais. La jeune femme eut à peine le temps de se protéger derrière un mur de glace qu’il avait sauté sur elle toute griffe dehors. Sans effort, il brisa la surface gelée et tenta de la saisir. Le Nokk bien plus agile permit à la jeune femme d’esquiver ses attaques effréné alors qu’elle ripostait avec autant de vigueur. Bruni et Courant d’Air continuait d’attiser ls feu autour de lui pour le contenir au maximum, mais la peau de l’homme arbre était devenu si dur que les flammes en léchaient l’écorce pour ne laisser que pauvres traces noircis. Chacun de leur assaut ne faisaient qu’augmenter la rage du grand Cornu, qui vociférait à chaque fois qu’il manquait son coup, repartant à l’attaque avec toujours plus de hargne.


Grand Pabby assistait impuissant à la scène. Il était déjà assez difficile de rester conscient, intervenir lui était donc totalement impossible. Au milieu de ce combat des titans, il vit une ombre gigantesque passé au dessus de sa tête. Elsa l’aperçut aussi et le Nokk s’écarta au dernier moment alors que la main du géant de pierre s’abattit sur le Grand Cornu. Le sol trembla sous la puissance de l’impact, soulevant un important nuage de poussière. La jeune femme lança un regard soulagé en direction du vieux troll, qui pendant un instant se surprit à reprendre espoir en voyant le sourire satisfait de l’esprit de la terre qui avait écrasé leur adversaire avec une facilité déconcertante.


Hélas, tous se rendirent vite compte qu’ils avait criés victoire trop tôt quand l’immense main de pierre commença soudainement à s’ébranler. Surpris et paniqué, le géant de pierre tenta d’ajouter plus de poids avec son autre main, mais c’était peine perdu : la rage de Runeard ne faisait qu’augmenter son pouvoir et plus il enrageait, plus sa force en était décuplé. Même dans les pires cauchemars de Grand Pabby, il n’avait imaginé que le Grand Cornu puisse devenir aussi puissant et pour la première fois,  il vit les esprits de la nature commencé à reculer face à leur opposant. Pendant ce temps, Elsa continuait d’essayer de le ralentir, mais sa magie était désormais tout aussi inefficace que les pouvoirs des autres esprits. Leurs efforts conjoint réussissaient tout de même à le ralentir, mais il n’y avait aucun doute sur le fait que ce serait insuffisant pour le vaincre. A tout moment, il pouvait réussir à se dégager de l’emprise du géant et qui sait alors les ravages qu’il pourrait faire sur son passage. Non, ce n’était même pas envisageable pour le cinquième esprit, ils devaient l’arrêter coûte que coûte.


Soudain, une voix familière interpella Elsa:

«Elsa ! Par ici !»


Le cinquième esprit tourna la tête pour apercevoir Anna qui aidait Grand Pabby à monter dans le traîneau de fortune de Ryder et Honeymaren. Écarquillant les yeux, à la fois heureuse et surprise da la voir saine et sauve, la première pensé d’Elsa fut malgré tout que sa sœur ne devait pas rester une seconde de plus près du champ de bataille. Si elle était soulagé que les deux Norhuldras l'est retrouvé, elle se demanda pourquoi diable elle avait pensé que c'était une bonne idée de l'amener ici, si ce n'était de la mettre en danger inutilement :

« Anna tu dois partir, c’est trop dangereux !

- Et vous abandonnez toi et Grand Pabby ? Hors de question ! Nous repartirons tous ensemble !»


Alerté lui aussi par l’appel de la reine, Runeard se tourna vers Anna, s’énervant d’avantage en voyant que la jeune femme n’avait pas respecté ses ordres. Mais ce fut la lueur bleu dans un sac en toile posé à côté de Kristoff qui lui provoqua un accès de rage bien plus violent : d'un regard, il constata que le fruit gelé avait disparu de la branche de l’arbre mort. Était-ce de l’inconscience ou de la témérité de la part d’Anna ? Peut-être un peu des deux, mais le résultat était le même : elle avait profité du chaos de la bataille pour subtiliser ce fruit qui semblait si précieux au plan du Grand Cornu. Ce dernier vociféra de plus belle, essayant de repousser la main du géant de pierre qui continuait de le maintenir au sol, non sans de plus en plus de difficulté. Elsa dû se rendre à l’évidence : le plan de Grand Pabby avait échoué et il valait mieux battre en retraite le temps de trouver un moyen de mettre Runeard définitivement hors d’état de nuire.  


Cependant, le Grand Cornu ne comptait pas les laisser partir aussi facilement. Si il ne pouvait pas les poursuivre lui-même, sa légion bestiale le ferait. L’esprit de la forêt poussa un hurlement assourdissant de rage teinté de désespoir qui résonna dans toute la forêt Enchanté, invoquant de leur chrysalide ses soldats endormis. Les créatures d’écorces s’extirpèrent en grognant des coquilles végétales, leur maître leur ayant insufflé dans leur réveil toute sa colère. Certains étaient totalement métamorphosés, d'autres seulement en partie, mais tous étaient animés par la même haine et le même but. Heureusement, Kristoff, resté allongé dans le traineau, avait été sauvé à temps et l'appel du Grand Cornu n'eut aucun effet sur lui.


Se joignant aux loups et aux corbeaux qui avaient prit en chasse le traîneaux qui filait désormais entre les arbres, les dryades furieuses se rapprochaient inexorablement, leurs griffes labourant la terre à chacun de leur bond gracieux, passant des branches au sol avec une agilité que n’aurait pas renié les Northuldras. Alors que la horde poursuivait sa chasse, Elsa déchaînait ses pouvoirs pour les arrêter, dressant d’immense mur de glace ou gelant le sol pour les faire tomber. Les autres esprits attaquaient de concert avec elle, fauchant homme arbre et bête dans un torrent d’éléments qui, malheureusement, ne semblait pas suffisant pour tous les contenir. Si l’instinct des animaux finit par reprendre le dessus et les fit fuir le combat, les soldats transformés ne répondaient qu’à la haine de leur maître et franchissait chaque nouveaux obstacles qui se dressaient devant eux, chaque coup se soldant par un échec lorsque leur blessure se régénéraient. Pourtant, les efforts d’Elsa et des esprits commençaient à enfin payer, en effet la légion sylvestre commençait à perdre du terrain car leur blessures ne se régénéraient pas aussi vite qu’ils les subissaient. Rattrapant le traîneau, le cinquième esprit bondit à son bord aux côté de sa sœur, laissant le Nokk libre de ses mouvements alors que les esprits de la nature continuait sans relâche d’assaillir leur poursuivant.


Dans la clairière, le Grand Cornu sentant ses troupes incapable de rattraper leur proie, finit par se dégager de l’emprise du géant de pierre. Roulant sur le côté, il se releva immédiatement et chargea tout droit dans la direction des deux sœurs, pulvérisant tout ce qui se trouvait sur son chemin, arbre comme rocher. Dans une ultime tentative, les esprits tentèrent de le retenir, en vain : il encaissa les coups sans broncher, fixé sur le seul objectif qui se trouvait devant lui.

«Elsa, il se rapproche ! s'inquiéta Anna en désignant le colosse qui les chargeait.

- Je sais Anna, je sais !» répondit Elsa qui tentait toujours de le stopper dans sa course.


Les efforts du cinquième esprit étaient admirables mais inutiles alors que Runeard déviait chaque pic de glace d’un revers de la main, laissant la bête prendre totalement le dessus sur l’homme au point qu’il courait à présent à quatre patte comme un animal sauvage. Grand Pabby quand à lui ne pouvait détourner le regard du Grand Cornu, plongeant son regard dans le sien à la recherche d’une dernière trace d’humanité. Après quelques instants, il finit par sourire en soupirant et se tourna vers Anna :

« Anna, écoutez-moi bien, il faut...

- Grand Pabby allongez-vous vous n’êtes pas en état de vous lever. Elsa va l’arrêter, ne vous inquiétez pas.

- Nous savons tout les deux que la situation nous dépasse, Elsa y comprit. Ses pouvoirs ont atteint leur limite face à votre grand-père, j’en ai bien peur. Dès que vous serez en sécurité, emmenez Kristoff à la plaine des trolls. Bulda saura quoi faire, elle vous guidera. Je ne sais pas combien de temps je pourrai les retenir.»


Anna et Elsa comprirent en même temps où le patriarche voulait en venir. Elles essayèrent en vain de l'empêcher d'accomplir cette folie :

« Non, vous ne pouvez pas nous laisser maintenant. Comment saurons-nous l’arrêter sans vos conseils ? commença Elsa.

- Vous ne pouvez pas faire ça, vous aviez promis d'assister à notre mariage ! continua Anna au bord des larmes.

- Je vous ai déjà apprit tout ce que je pouvais mes enfants, rassura Grand Pabby en prenant leur main. N’ayez pas peur pour moi, mon temps était arrivé à l’instant où je suis entré dans cette clairière.»


Le vieux trolls leur offrit un dernier sourire chaleureux et avant de sauter du traineau lancé à vive allure, il tendit à Anna un petit paquet.

« J’allais oublier : j'aurai aimé vous remettre votre cadeau de mariage en main propre le jour de la cérémonie, mais je crains de ne pas en avoir l’occasion. Je suis navré de ne pouvoir tenir ma promesse. Dites à Kristoff que vous avez ma bénédiction et que... je suis fier d’avoir eu un fils comme lui. Je vous souhaite tout mes vœux de bonheur.»


Grand Pabby se tourna ensuite vers Elsa, anticipant ce qu’elle allait lui dire :

« Vous n’avez pas échoué Elsa. Le seul a l’avoir fait, c’est votre grand-père. N’oubliez jamais : tant qu’il y a de la vie, il a de l’espoir. Et puisque rien ne meurt vraiment, alors il y a toujours de l’espoir. Vous trouverez un moyen de l’arrêter, j'en suis certain.»


anna tomba en pleurs dans les bras d'Elsa alors que cette dernière ne pouvait contenir ses larmes quand Grand Pabby atterrit lourdement sur le sol, bien décidé à offrir un dernier coup d’éclat dont seul le vieux trolls avait le secret. Il n’avait plus à rien à perdre, il ne se retiendrait plus face à Runeard. Devant lui arrivait la horde vociférante, le Grand Cornu en tête, premier à arriver à sa porté. Il bondit de toute sa hauteur afin de lui assener le coup de grâce que l’arrivé d’Elsa lui avait auparavant refusé. Les dernières paroles de Grand Pabby furent à l’attention de l’âme de l’ancien roi, qu’il savait caché quelque part au fond des hurlements enragés :

« Adieu, mon vieil ami. Puissiez-vous trouver la paix.»


Le vieux trolls tendit les main et une lumière aveuglante jaillit de ses paumes. L’onde de choc repoussa l’armée d’homme arbre dans un fracas tonitruant. Même Runeard fut projeté sur plusieurs mètres, s’écrasant contre un rocher avec un craquement sourd. Devant l’esprit de la forêt, se dressait un mur de lumière infranchissable. Lui et ses soldats essayèrent de le détruire, en vain : ils étaient tous repoussés de la même manière. Il se tourna furieux vers le vieux trolls dont les yeux étaient maintenant clos : Grand Pabby s’était s’éteint à l’ombre de l’éclatante lueur, offrant aux prix de sa vie un peu de répit aux deux sœurs auxquelles il avait donné toute sa confiance. La horde restait enfermé derrière le mur de lumière, frustré de ne pouvoir poursuivre leur traque alors que le traîneau s’éloignait à l’horizon. Pourtant, au milieu des grognements colérique, le cri de Runeard n’était pas empli de rage, mais de tristesse face à la statue de pierre au visage serein de celui qu’enfant il appelait affectueusement "Papy".

Le silence de mort qui c’était installé dans le traîneau ne se brisa pas avant le retour au camps des Northuldras. La joie de voir Anna et Kristoff sains et saufs disparue au prix d’un tristesse endeuillé quand se répandit la nouvelle de la disparition de Grand Pabby. Même les anciens préférèrent garder leur grognements face au retour de la reine d’Arendelle sur leur terre, par respect pour la mémoire du vieux sage qui avait toujours gardé les deux sœurs en haute estime. Pendant que tout le camps se recueillait silencieusement, Anna demanda à Yélana si Kristoff pouvait être transporté discrètement dans un endroit sûr, lui assurant qu’il valait mieux que le reste des Northuldras ne voit pas son état au risque de provoquer un vent de panique. La cheffe accepta devant l’urgence de la requête et leur indiqua sa hutte. Honeymaren et Ryder transportèrent le montagnard endormis alors que la matriarche proposa à Anna d’aller voir les soldats d’Arendelle blessé s qui étaient resté au camps pour être soigné. La reine accepta, non seulement parce qu’elle s’inquiétait de leur état mais aussi car un peu d’espoir lui ferait le plus grand bien après les derniers jours qu’elle venait de vivre.


Elsa les accompagna et sur le chemin la cadette lui demanda comment elle l’avait retrouvé aussi vite. La gorge du cinquième esprit se serra quand elle dut prononcer le nom de Grand Pabby. Ni l’une ni l’autre n’arrivaient à croire que le vieux trolls avait rejoint le monde des morts. Le cinquième esprit parvint tout de même à lui expliquer que si le vieux troll était bien venu la chercher pour aller combattre leur grand-père, il ignorait tout de l'attaque du convoi. Ce n'est que lorsque Sven les avait retrouvé, épuisé et affolé, qu'ils avaient compris que quelque chose de grave c'était produit. Sur ces mots, le renne arriva pour accueillir les deux femmes à grand coup de langue, trop content de les revoir saine et sauve. De même, Anna se rassura de voir qu'il n'avait rien, même si Sven chercha bien vite Kristoff du regard, inquiet de savoir où se trouvait son ami de toujours. La jeune femme lui indiqua la hutte de Yélana et elles continuèrent jusqu'aux tentes aménagées pour les blessés arendelliens.


Les soldats furent heureux de retrouver leur reine saine et sauve. Malgré le ressentiment des anciens, ces derniers avaient tenu parole et les blessures des malheureux étaient en bonne voie de guérison. Après tout, plus vite ils seraient remis, plus vite ils partiraient de ces terres. Cependant, la joie fut de courte durée quand ils demandèrent pourquoi le général Mattias n’était pas avec elle. Anna n’eut pas la force de leur raconter la vision cauchemardesque du visage déformé du général transformé en dryade au milieu de l’armée du Grand Cornu. D’un commun accord silencieux, les deux sœurs préférèrent tout de même leur raconter la vérité : tôt ou tard, il faudrait quitter le camps et leur cacher ce qui était arrivé au général ne ferait que tous les ralentir.


En effet Anna et Elsa étaient parfaitement consciente que, si le sacrifice de Grand Pabby leur avait fait gagner un temps précieux, ce n’était qu’un sursis avant que Runeard ne les rattrape et ne déchaîne sa fureur. La question de la suite des événements était encore leur sujet de discussion quand les deux sœurs rejoignirent la tente de Yélana, qui les accueillit d’un teint blême.

« Qu’est-ce...qu’est-ce qui lui est arrivé ?! bégaya la chef qui avait découvert l’écorce qui recouvrait la peau du montagnard alors qu’elle avait voulu vérifier qu’il n’était pas blessé.

- Ne vous inquiétez pas, rassura immédiatement Anna, d’après Grand Pabby nous trouverons un moyen de le guérir à la plaine des trolls.»


Les deux jeunes femmes s’empressèrent d'expliquer à la matriarche tout ce qui c’était passé depuis le départ de la reine. Tandis qu’Elsa racontait à sa sœur l’histoire des Northuldras qu'elle avait découverte dans les profondeurs des grottes, Anna leur répéta le discours que Runeard lui avait tenu. Apparemment, Grand Pabby connaissait déjà son plan, mais l’attaque du convoi l’avait prit au dépourvu et obligé à trouver en catastrophe un plan de secours. Tout reposait maintenant sur les épaules des sœurs d’Arendelle, qui n'avaient comme seul indication que de se rendre à la plaine des trolls.

« Espérons que leur connaissances seront suffisantes pour nous donner un moyen de l’arrêter, soupira Elsa.

- Leur magie est différente de celle des esprits, répondit Yélana, de même que leur lien avec la nature. Si Grand Pabby vous a demandé de nous rendre là-bas, c’est sûrement pour une bonne raison.

- Ils sont incroyables ces trolls, ils sont non seulement expert en amour mais aussi en gros montre !» s’exclama Olaf d'une voix étouffée.


Les trois femmes écarquillèrent les yeux et cherchèrent autour d’elle, mais ne purent apercevoir le bonhomme de neige. Anna était persuadé qu’il avait disparu du trou dans lequel il était enfermé, peut-être donc avait-il réussi à s’échapper ? Mais alors comment avait-il put les rejoindre aussi vite sans traineau et surtout en passant à travers le mur de lumière qui retenait Runeard et sa horde ?

« Olaf ? Où es-tu ? appela Elsa.

- Je n’ai aucune idée, il fait tout noir là-dedans. Et puis je n’arrive pas à bouger, c'est très étrange.

- Continue de parler, ta voix vas nous guider. Tu n'es pas blessé ?

- Non je ne crois pas. En tout cas je n'ai pas mal.»


Soudain une lueur bleuté attira le regard du cinquième esprit dans le sac en toile qui contenait le fruit bleu qu’Anna avait dérobé au Grand Cornu. A leur grande surprise, c’est de lui que venait la voix d’Olaf et il s’illuminait au rythme de ses mots à chaque fois qu'il parlait.

« Quel est ce prodige ? s'émerveilla Yélana, non sans une pointe de crainte.

- Olaf était prisonnier dans un trou au pied de l’arbre où j’ai récupéré le fruit, expliqua Anna, ce qui voudrait dire...

- ...qu’il a absorbé sa conscience avec mon pouvoir, conclut Elsa. Mais pourquoi faire cela ?

- Grand-père m’a dit que sans le savoir tu lui avais apporté le moyen de se rendre à Athohallan. C’est surement de cela dont il voulait parlé !

- Olaf est un fragment de ma magie, il doit sûrement pensé que grâce à lui il pourra traverser la mer sombre sans encombre. En d’autres termes, sans lui, son plan n’a aucune chance de fonctionner.

- Et cela ne fait qu’augmenter sa colère, croyez-moi.» fit remarquer une voix grave.


Kristoff c’était relevé péniblement en se tenant la tête. Anna courut à son chevet alors que le montagnard avait reprit tout ses esprits, non sans quelques grimaces à cause de la migraine qui lui brouillait l’esprit.

« Que voulez-vous dire Monsieur Bjorgman ? s'inquiéta la matriarche.

- Je l’entend dans ma tête. C’est comme... des bribes d’ordres emplis de rage qui résonnent en échos encore et encore.

- Grand Pabby m’avait pourtant dit que nous t’avions libérer à temps et que grand-père n’avait aucune emprise sur toi, rétorqua Anna.

- Qu’il possède un lien entre leur deux esprits est une chose, dit Elsa en réfléchissant à haute voix, cela n’implique pas forcement qu’il puisse le contrôler. Restez tout de même vigilant Kristoff, si vous pouvez ressentir ses émotions, grand-père doit pouvoir faire de même avec les vôtres. Faisons en sorte que cet avantage ne devienne un fardeau.

- Attendez, il y a autre chose. Il est... triste ? Je crois ? Tout est confus, j'ai du mal à savoir si ce sont ses pensés ou les miennes.

- Ne vous forcez pas à entrer en contact avec lui, nous ignorons tout de l’étendue des pouvoirs du Grand Cornu et si il pourrait reprendre son contrôle sur vous.»


Tous acquiescèrent d’un commun accord, même si un autre problème venait se présenter : que faire du fruit tant convoité ? Car au vu de son importance capitale dans les plans de Runeard, ce dernier ferai absolument tout pour le récupérer, ce qui était loin d’être rassurant au vu de ses nouvelles méthodes plus agressives. Le temps leur manquait et il fallait au plus vite trouver une solution.

« Je vous ai déjà apprit tout ce que je savais sur notre passé Elsa, se désola Yélana, je doute qu’il y est un autre endroit qu’Athohallan qui puisse nous offrir de meilleurs réponses.

- Mais nous devons nous rendre à la plaine des trolls pour trouver un remède pour Kristoff, rappela Anna. Et quand est-il des Northuldras ? Ils ne peuvent pas rester ici avec la menace qui approche.

- Il n’y a qu’à Arendelle qu'ils seraient en sécurité.

- Les anciens n’accepteront pas de s’y rendre, leur décision entrainera surement une partie de notre peuple à rester.

- Je refuse de laisser qui que ce soit derrière nous ! tonna Elsa.

- Quand est-il des Arendelliens ? demanda la cheffe en direction de la reine.

- Il y aura probablement des protestations de la part de certains, mais il devront l’accepter d’une manière ou d’une autre.

- Pouvez-vous être certaine que nous serons en sécurité ?

- Avec tout le respect que je vous dois Yélana, vous serez sans aucun doute plus en sûreté entre nos murs qu’au milieu de la forêt.

- Certes, je pensais surtout aux idées belliqueuses que pourraient avoir à notre égards les dissidents dont vous parliez à l’instant.

- Ils ne se soucieront sûrement plus de vous quand ils verront une armée d’hommes-arbre enragés s'attaquer à eux.»


De longue minutes s’écoulèrent pendant que le reste des Northuldras attendaient silencieusement à l’extérieur de la tente de leur cheffe. La rumeur de l’apparition du Grand Cornu c’était répandu comme une trainée de poudre dans tout le camp et les anciens en avaient déjà profités pour accuser de nouveau la présence arendellienne comme seul coupable du malheur qui les menaçaient. Et ils n’allaient pas en démordre quand Yélana se présenta à son peuple pour déclarer d’une voix ferme :

« Nous ne pouvons rester ici plus longtemps, nous devons nous réfugier à Arendelle avant que le Grand Cornu et son armée n’arrivent. Prenez le minimum nécessaire avec vous et...

- Nous n’abandonnerons pas nos terres ! vociféré l’un des anciens.

- Surtout pas pour aller dans le repère de ceux qui ont voulus nous exterminer ! renchérit un autre. Qu’est-ce qui les empêchera de nous égorger dans notre sommeil ?»


Comme Anna et Elsa l’avaient craint, les paroles alarmistes des anciens commençaient à convaincre d’autres Northuldras qui montrèrent rapidement leur refus de partir. D'un pas décidé, la reine d'Arendelle s'avança à son tour pour leur répondre :

« Parce que vous avez ma parole que les soldats d’Arendelle donneront leur vie pour vous protéger.

- Pour ce que vaut votre parole, au vu de celle de votre grand-père...»


L’ancien n’eut pas le temps de terminer que Courant d’Air le souleva du sol. Même les esprits de la nature semblaient en avoir autant assez de leur discours empli de ressentiments et leur entrain semblaient c’être envolé aussi vite que le vieillard était retombé lourdement sur son postérieur. Profitant de l’aide providentielle de l’esprit de l’air, Elsa prit la suite de sa sœur :

« Peuple du soleil, je comprends votre peur : à peine libérer du brouillard, voilà qu’une nouvelle menace vient toquer à votre portes. Mais cette fois, vous n’êtes pas les seuls en danger : partout où le Grand Cornu ira pour accomplir son œuvre il fera couler de sang, peu importe le peuple auquel vous appartenez.  Je me doutes que vous auriez préférer de ma part un discours plus optimiste, mais je ne peux vous mentir face à la gravité de la situation.»

Les paroles alarmistes du cinquième esprit ne semblaient pas convaincre le peuple du soleil, au contraire les murmures inquiets ce firent de plus en plus insistant parmi la foule. Yélana elle-même voulut intervenir, mais Anna la retint avec un sourire rassurant : la cadette était persuadé que son ainée savait ce qu'elle faisait. Elsa reprit de plus belle en affichant l'air le plus sereine possible au vu de la situation :

« Cependant, je peux vous l’affirmer : tant que ma sœur Anna sera reine d’Arendelle, vous serez toujours en sécurité entre les murs de son royaume. Et pour ceux qui ne veulent pas lui faire confiance, alors fiez-vous à moi et aux esprits qui eux lui ont déjà donnés sa confiance.»


Les Northuldras semblèrent reprendre confiance quand inévitablement les anciens décidèrent de venir s'en mêler une nouvelle fois :

« Pourquoi devrions-nous fuir nos maisons alors que les esprits et vous-même êtes censés nous protéger ? N’est-ce pas votre devoir ?

- C’est parce je sais que c’est notre devoir de vous protéger que je vous demande de vous rendre à Arendelle. Je me demande seulement si vous, vous n’avez pas oublié que c’était également le vôtre ?

- Comment osez-vous remettre en doute notre...

-...jugement ? N’est-il pas censé être guidé par la raison et non les émotions ? Si jamais vous restez et que d’autres Northuldras vous suivent, que leur direz-vous quand le Grand Cornu viendra pour accomplir son œuvre macabre ? Je ne vous demande pas de pardonner aux Arendelliens pour leur crime ou d'oublier la trahison du roi Runeard. Je vous demande de mettre de côté pendant un instant votre ressentiment et de penser, en toute honnêteté, à la meilleure solution à prendre pour notre peuple face au danger qui le menace.»


Les Anciens pestèrent de plus belles, mais à leur grande surprise celui qui était autrefois le plus virulent d’entre eux c’était tut. Devant son étrange comportement, ses camarades se turent et attendirent son verdict qui ne tarda pas. Après un long soupir de frustration, le vieil homme demanda d'une voix légèrement frustrée :

« Quand devons-nous partir ?

- Tu ne vas pas quand même pas croire à ce discours ?! pestèrent les autres.

- Bien que j’ai encore du mal à l’admettre, pour la première fois depuis son arrivé parmi nous, elle a parlé sagement : la sécurité de notre peuple passe avant tout. Surtout, nous ne pouvons pas oublier notre plus vieil coutume : quand la nature parle, nous l’écoutons. Et si les esprits de la nature sont à ses côtés, alors c’est que sa décision est la bonne à prendre.»


Bruni avait en effet rejoint l’épaule d’Elsa tendit que Courant d’Air voletait au dessus de sa tête. Les protestations c’étaient tut parmi les Northuldras et l’évacuation put enfin commencer sous les ordres de Yélana. La première partie de leur plan était en place, fallait-il maintenant qu'Anna puiss réitérer l'exploit face aux anciens du peuple du soleil avec les dissidents d'Arendelle. Et le plus tôt serait le mieux car à plusieurs lieux de là, les premières fissures étaient apparus sur le mur de lumière qui retenait le Grand Cornu.