[FCU WHAT IF...] Et si… Anna et Elsa avaient été séparées pendant l’enfance ?... Le plan d'Emma Picéaerd

Ultime stratégie


Pour une fois depuis bien longtemps voilà que j’étais de fort bonne humeur. Tout s’était admirablement bien passé, l’erreur de la nature et son imbécile de père avaient trépassé alors que les odieux Picéaerds peinaient à se remettre de la disparition de leur cher ange de l’air depuis des années! Cela signifiait certes que ces idiots étaient désormais dans l’Hellheim mais je devais résister à l’envie d’aller tourmenter l’autre gourde, j’avais des projets bien plus grands. Je ressentais autour de moi une certaine quiétude, du calme. Je n’avais plus ressenti ce doux état depuis des siècles et des souvenirs me revinrent en mémoire. Sans doute les moments de ma vie où j’ai connu de manière éphémère le bonheur. Pierre et moi venions de recevoir nos pouvoirs. Je ne connaissais pas encore sa duperie et nous étions destinés à ne faire qu’un lui et moi. Oui, il était ce qui s’apparentait le plus à une âme sœur à n’en pas douter. Des siècles plus tard, ce balourd était toujours à mes côtés. Il m’avait juré sa fidélité. Peut-être était-il temps que je commence à faire confiance comme me l’avait suggéré la naine. Après tout, avec elle aussi j’ai apprécié mes soirées même si je ne l’avouerai jamais. Et elle s’est fortement compromise auprès des abrutis pour m’avoir fréquenté. Oui au final cette demi portion aura été la seule à m’avoir accordé un peu de sympathie. Peut-être que lorsque j’aurai enfin atteint mon objectif de dominer l’univers, je ne la rabaisserai pas contrairement aux autres… De toute manière, que pourrais-je bien rabaisser auprès de ce microbe ? J’avais décidé de lui faire confiance maintenant qu’elle ne côtoyait plus les cloportes et lui avait même dévoilé l’endroit où j’avais l’habitude de me retirer au point même de créer un passage entre son logis et le miens. Nos soirées dessins et hydromel étaient je devais bien le confesser fort agréable au point que je me risquais désormais à la considérer comme une amie et même à lui confier certains secrets de mes plus noirs desseins.
Au loin, alors que les souvenirs de mon passé avec l’homme que j’ai aimé remontaient je pouvais voir Pierre. Il me fallait le reconnaître il était un allié sur. Un parfait agent double, se faisant passer pour le meilleur ami de mes ennemis, il avait leur confiance ce qui favorisait mes plans. Il était temps que je l’implique, comme j’avais accepté de faire confiance à Ylva !


« Pierre ! Viens, il faut que tu m’assistes !
-Ho Ho Ho, mais tu te radoucis on dirait…
-Quoi ?
-Oui, voilà que tu m’appelles sans aucune insulte pour t’accompagner… Tu te ramollis…
-Pas autant que ta bedaine l’obèse !
-Ah je te retrouve, pendant une seconde j’ai cru que tu avais changé de personnalité pour devenir une personne aimante et douce.
-Tu veux m’assister oui ou non ? Demandais-je agacée, commençant presque à regretter ma décision
-Mais volontiers que puis-je faire pour t’aider à conquérir le monde qui n’est toujours pas à toi malgré les décennies.
-Un plan génial, est un plan sur le temps long, et tu pourras constater que j’avance désormais mes dernières pièces. C’est l’instant le plus jubilatoire de la partie, lorsque tu sais que tu vas prochainement gagner… Tu as l’opportunité d’aller enfoncer toujours plus ton adversaire dans le désespoir et toi mon gros… Tu vas en être le coup de grâce !
-Moi ?
-Mais oui, puisqu’ils ne savent pas que tu es avec moi, voir ton vrai visage sapera définitivement leur volonté !
-Tu souhaites que je me découvre auprès des Picéaerds… N’est-ce pas risqué, je glane des informations pour toi !
-Mais non andouille pas eux, tu peux encore les manipuler comme tu le fais si bien… Non auprès de la plus dangereuse de toutes !


Voyant que cet imbécile heureux ne comprenait pas grand-chose, je me devais d’être plus explicite. Je pris donc sur moi pour ne pas m’énerver et l’insulter de tous les noms. Non, si je devais apprendre à faire confiance à deux amis, je devais aussi me montrer patiente envers eux. Après une longue respiration, je décidais d’ouvrir les entrailles de l’Hellheim, sans doute ainsi allait-il comprendre.


-Les limbes ?... Tu comptes donc m’y emprisonner car tu ne me fais pas confiance ? Me questionna-t-il avec suspicion


Je bouillonnais à l’intérieur, peut être devrais-je faire ce qu’il propose tant sa bêtise était aussi énorme que son ventre !


-Mais non ! Il est temps de te dévoiler auprès de sa pensionnaire !
-Ah… Et pourquoi donc se donner cette peine ? Elle est enfermée là-dedans depuis un temps incroyablement long, que veux-tu qu’elle fasse ?
-Parce que depuis tout ce temps elle suscite malgré tout un semblant d’espoir chez les idiots. Ils sentent encore par je ne sais quel moyen son optimisme, il est temps de le détruire ! Allez saute, j’ai fait une entrée assez large exprès !
-Tes désirs sont des ordres Emma ! Fit-il avant de disparaître dans le gouffre.
-Excellent ! Vraiment excellent ! Jubilais-je avant à mon tour de sauter vers les abysses.


Une fois le sol sous mes pieds, il ne me fallu guère de temps pour retrouver ma captive, les années faisaient leur œuvre et de plus en plus, le cocon l’enveloppait pour que la grande Anna Picéaerd ne fasse désormais plus partie que du néant des limbes. D’un geste je fis comprendre à Pierre qu’il devait se tenir caché pour l’heure. Une jubilation, ça se savoure, autant garder le dessert pour la fin !


-Allez la chamane on se réveille !!! Fis-je en m’approchant de ma prisonnière.
-Tiens donc, quelle charmante visite… Emma que viens-tu faire ici ? Tu as décidé de venir me reparler depuis que j’ai réussi à faire évader ta créature ?
-Oui, je viens voir comment tu es depuis que ce plan a lamentablement échoué Anna
-Echoué ? Mais pourquoi donc… Ma petite fille est partie d’ici !
-Mais pas toi ! Tu as tenté ton évasion, mais tu n’es pas assez forte pour quitter ma prison !
-Mais encore une fois Emma, comme je te l’ai déjà dit des dizaines de fois, à quel moment ai-je suggéré le fait que je veuille partir d’ici
-Tu ne me feras pas croire que faire partir Anna n’était pas un plan d’évasion !
-Non… Je voulais seulement la faire partir elle ! J’apprécie le calme depuis son départ, et toi, la demoiselle ne te pose pas trop de soucis maintenant que tu l’as dans ton monde ? Me lança-t-elle avec un léger sourire malgré la fatigue qui l’envahissait.


« Elle veut m’énerver… Non elle n’y arrivera pas ! Cette garce est déjà morte de toute manière, il ne lui reste plus beaucoup de temps » Pensais-je en me mordant la lèvre pour ne pas m’énerver. Non, me voir perdre mes nerfs serait une mince victoire pour elle, hors de question de lui offrir quelque réconfort.


-Aucun… Elle n’est allée que d’une prison vers l’autre et ce grâce à mon allié… Tu veux le voir ?
-Ton allié ?
-Mais oui, tu le connais bien !... Eh ! C’est le moment ! Montre-toi qu’on s’amuse un peu !


J’observais heureuse Pierre se dévoiler et le visage d’Anna se décomposer.


--Pierre ?! Fit-elle catastrophée
-Bonjour Anna…
-« Bonjour Anna ! » Oh Pierre tu es génial ! « Bonjour ! » Comme si pour elle cela pouvait être un bon jour de découvrir après toutes ces années que tu l’as trahie ! Hurlais-je en riant aux éclats.


J’aurai tant souhaité pouvoir arrêter le temps mais peu importait, les yeux embués de larmes d’Anna seraient à jamais gravés dans mon esprit. Ma victoire était totale !


-Il… est plaisant de voir qu’en tant qu’époux tu es un véritable soutien pour ton épouse, comme Elysia le fut et l’est toujours pour moi… Se contenta-t-elle de répondre.
-Oh je t’en prie Anna, évite les faux semblants, c’est pathétique, pleure donc ! capitule ça sera plus digne.
-Capituler Emma ? Et pourquoi donc ? Tu as gagné ça y est ? Voilà qui est étonnant, toi qui parles de dignité pourquoi ne comptes-tu pas avouer directement que tu ne souhaites pas réellement gagner.
-Alors là Anna, je te savais brisée mais je ne pensais pas que je t’aurais eu à ce point… c’en est presque décevant… Comme si je ne voulais pas gagner ! Heureusement qu’il n’y a pas d’hydromel ici, ou j’aurai pu croire que tu en avais abusé !
-Ah oui ? Alors pourquoi n’as-tu pas déjà gagné ? Quand tu m’as emprisonné, que tu as coincée ma petite fille, que ma famille était totalement désemparée. D’un claquement de doigt tu aurais pu tous les mettre à genoux et tu n’en as rien fait, à les faire à nouveau vivre une vie. Cela fait des dizaines d’années que tu les observes et pourtant tu n’agis pas…. Ça n’est pas ce que j’appelle vouloir gagner.
-Bien sur que j’aurai pu faire cela… Mais c’est bien mieux de vous laisser le temps d’espérer et souffrir ! Ta famille pensait que tout irait mieux…. C’est à ce moment là que j’ai tué ta fille ! Ils ont mis des années à s’en remettre, ta précieuse petite fille Anna semble penser qu’elle est guérie… Elle va déchanter en découvrant que je viens de faire disparaître sa chère erreur de la nature ainsi que son abruti de père. Lui je n’en ai que faire, mais sa perte plongera ta jolie reine des neiges dans la dépression. Je leur offre une vie de malheur pour que finalement, ma victoire ne soit pour eux… Qu’un acte de miséricorde !
-Ma fille et Helga sont de retour chez les morts ? Fort bien, tu ne fais donc que grandir notre équipe pour lutter contre toi. Bonne idée !


Ah comme il était doux de sentir encore dans sa voix, au plus profond ce semblant de défiance qui peu à peu s’éteignait, rongé par le remords d’avoir été vaincue et par les limbes qui l’aspirait peu à peu dans le néant. J’étais si fière de mon plan, la voir s’éteindre ainsi à petit feu était tellement plus jouissif !


-Et je n’en ai pas terminé ! Tu sais que ta chère marraine Ylva est en réalité une de mes amis ?! C’est vrai, j’ai oublié de venir te voir pour te le dire quand ta famille a découvert le pot aux roses ! Et ne t’en fais pas je n’ai pas terminé ! Tu sais la mort de l’erreur de la nature… Elle est due à un voyage qui avait été ordonné par la rejetonne d’Elsa, tu sais la jolie madame je sais tout je suis si parfaite ! Elle aussi va désespérer d’avoir causé un si pitoyable échec ! Il n’y a plus personne qui sera apte à gouverner correctement Arendelle, comme c’est déjà le cas en pays Northuldra avec la gouvernance de cet étranger stupide à moustache ! Les Iles du Sud ? Je n’en parle même pas, c’est la pagaille depuis la mort des souverains…. Le cher continent que tu as tant aimé Anna finira par s’embraser et symbolisera l’échec ultime des Picéaerds ! Et lorsque cela arrivera… Je laisserai ta famille regarder impuissante avant de les annihiler ! Si tu me supplies… Alors peut être que je te libérerai juste avant la fin pour que ta famille voit également ta défaite et comme ça, tu disparaîtras dans les bras de ton Elysia ! Tu vois Anna, ta vieille ancêtre n’est pas si cruelle finalement !

-Mais encore une fois Emma, si je n’ai pas déjà quitté cet endroit, pourquoi voudrais-je que tu m’en libères ? Je suis bien ici… Mais quand je sortirai, tu as raison sur un point : c’est toi qui me délivreras Emma ! Lança-t-elle de sa voix la plus convaincante.
-Même pour toi Anna ce mensonge est pathétique. Mais tu sais quoi, je respecte ça. Après tout, tu auras été une adversaire… disons digne d’intérêt. Même si j’aurai adoré te voir pleinement capituler devant moi… Au fond je comprends que tu ne le fasses pas et… oui c’est assez logique. Tu chercheras à garder la tête haute jusqu’au bout, c’est honorable. Mais peu importe Anna, maintenant tu sais que tu as perdu ! Que tu as tout perdu. Toi et moi, nous n’allons pas être amené à nous revoir et puisque tu me provoques, non je ne te délivrerai pas comme je te l’avais proposé ! Je te dis adieu et vais te laisser, que tu puisses pleurer seule, avant de disparaître dans le néant… Pierre ! il est temps d‘y aller ! Fis-je voyant que le gros balourd n’avait pas bougé.
-Nous verrons Emma… Nous verrons mais n’oublie pas… Tu me délivrera ! Fit Anna d’une voix fatiguée.
-Pars devant Emma… Elle se moque de toi et va le regretter ! Je vais me charger de la faire pleurer comme tu le désires ! Je te dois bien cela !
-Plait-il ?
-Oui… Elle a appris à te détester depuis si longtemps que tu ne peux la briser, mais moi qui devait être son allié… Comment veux-tu que sa carapace ne cède pas. Répondit-il alors que je voyais mon ennemi baisser la tête, au bord de la capitulation.
-Ma foi pourquoi pas. C’est vrai que tu débutes dans les plans machiavéliques… Il faut aussi que tu te fasses la main dans l’aspect jubilatoire… Alors ne traine pas trop, je ne te laisserai pas le passage ouvert très longtemps !
-Allons Emma… Moi aussi je sais l’ouvrir au besoin. Contesta-t-il taquin alors que je haussais les épaules avant de disparaitre vers le monde des morts, prête à continuer mes tourments.


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Alors qu’Emma avait disparu, le premier des Sappos se tourna vers la prisonnière. Rapidement son visage se radoucit alors qu’il sortait de sa besace une bouteille d’hydromel.


-La réserve secrète Pierre c’est bien cela ? Fit Mamie alors que le premier des Sappos tendait un verre à la matriarche en perdition.
-Non… Elle se vide mais heureusement Antoine est arrivé… Il ne sait pas que je sais que la sienne se situe derrière la planche de son pied de lit, et le moins que l’on puisse dire Anna, c’est que ton second gendre a plus de palais que le premier !
-Je l’ai toujours bien aimé ce gamin ! A sa santé !
-Hélas Anna sa réserve est bien moins fournie que ne l’était la mienne… J’ai bien peur de ne pas réussir à te maintenir encore très longtemps avant que les limbes ne te dévorent à jamais.


Le premier Sappos s’empressait de remplir à nouveau le verre d’Anna qui semblait regagner un peu de force vitale à chaque gorgée.


-Cela n’aura que peu d’importance Pierre… J’ai passé bien plus de temps ici que je n’en passerai, en as-tu encore ?
-N’est-ce pas déjà suffisant Anna ? Si la réserve se tarit tu sais que…
-Je t’ai dit ça n’a aucune importance, mais il me faut intervenir une nouvelle fois… Et j’ai besoin du peu d’énergie que je peux encore mobiliser
-Penses-tu qu’il soit sage de contacter Anna d’Arendelle ?
-Cela fait bien longtemps que je n’apparais plus dans les songes de ma petite Picéaerd… Non, c’est sa sœur ainée qui doit être mon interlocutrice. Fit la matriarche en prenant un nouveau verre servi.
-Veux-tu que je transmette un message à Elysia en partant ?
-Non ! Comme d’habitude, rien du tout. S’il pense à mes propos, il ne sera plus aussi concentré à former Rocco. Rassure-moi, Ylva se charge de lui dire ce qu’il doit savoir lorsqu’il va chez les vivants?
-Sois tranquille, elle connait les plans d’Emma et se charge de le mettre en garde.
-Fort bien, dans ce cas Pierre, je pense qu’il est temps que tu rejoignes Emma avant qu’elle ne se doute de quelque chose. Tu as déjà été bien imprudent en lui disant que tu pouvais ouvrir les limbes…
-Sois sans crainte, tu l’as vu, elle est tellement aveuglée par ses ambitions qu’elle ne voit plus rien.
-Nous verrons cela… Veille bien sur mon mari… Au plaisir de nous revoir en un autre lieu car je pense que plus jamais tu ne redescendras ici m’apporter de l’hydromel !
-Nous aurons l’occasion en d’autres circonstances de trinquer ensemble ! Conclut l’être céleste.
-Oh Pierre, une dernière chose !... Pense à aller aider Yuma à délivrer ma petite Picéaerd du Niflheim, et préviens Ylva qu’elle va avoir de la visite, il est impératif que notre amie sache alors exactement où se trouve Emma ! Mais avant de faire tout ça, pense à regarder mes directives se mettre en place sur terre.
-Je connais ma partition Anna ! A très bientôt… bien loin de cet endroit sinistre !


Anna Picéaerd ne demeura pas pour autant inactive et morose. Enfin seule elle mobilisa son énergie pour se libérer du cocon qui l’entravait avant de se concentrer pour partir en voyage astral, avec la volonté ferme de pénétrer l’esprit tourmenté de sa petite fille ainée. En quelques instants, et avec toute l’expertise de chamane, Anna parvînt sans difficulté à s’immiscer dans l’esprit de la reine des neiges. Immédiatement elle frissonna. Sa petite fille laissait ses angoisses la gagner, si la température autour d’elle était glaciale, c’était également le cas dans son esprit au grand déplaisir de la chamane, elle savait qu’elle devait faire vite. Sans aucune hésitation, la matriarche s’empressa d’appeler la reine des neiges qui finit par se matérialiser devant elle.


-Eh bien ma grande Picéaerd… D’ordinaire tu m’accueilles avec plus de chaleur.
-Mamie… Le… Il… Il est arrivé le… le drame. Sanglota la blonde.
-Allons… Toi et moi savions que cela devait se passer ainsi. Répondit la Northuldra en étreignant sa petite fille.
-Pourquoi Mamie ? Pourquoi moi et pas quelqu’un d’autre.
-Allons Elsa nous en avons déjà parlé des centaines de fois depuis des années… Depuis que ta sœur s’est fait empoisonner son cœur par Emma je ne puis m’adresser à elle… Mais toi aussi tu sais ce qu’il se passe. Toi aussi tu es cinquième esprit et je veux bien te plaindre un instant mais si nous sommes réellement objectives, n’est-ce pas plutôt ta fille ainée qu’il faudrait plaindre, elle qui depuis sa plus tendre enfance sert nos desseins ?
-Kirsten est forte mamie ! Elle sait faire face aux drames !
-Kirsten… est une jeune femme humaine… avec sa sensibilité. Une jeune femme qui doit pleurer son père et sa sœur tout en portant la responsabilité de la décision prise… Décision que tu as induit dans son esprit ma grande Picéaerd !
-Mamie mais… c’est toi qui…
-Je ne te reproche rien Elsa ! Tu as su parfaitement bien agir depuis des années ! Tu as veillé sur ta sœur, tu as fait en sorte que ta fille soit formée au mieux, aussi bien par toi que par mon ange de l’air pour en être là où elle est désormais. Je suis venue te voir Elsa pour te dire qu’il faut que tu fasses, un dernier effort, pour que tout se passe comme prévu….
-Que veux-tu dire mamie ?
-Je veux dire, que c’est la dernière fois que je viendrais perturber ton repos ma grande Picéaerd. Je n’ai plus la force de le faire à nouveau après toutes ces années dans les limbes. J’ai fait tout ce qui était en mon pouvoir pour tous vous guider, afin que vous soyez tous prêts à lutter contre Emma quand viendra le moment… Elsa, le moment est venu. Alors, une nouvelle fois, applique le mantra de ton père : Pas d’état d’âme, pas de tourments ! Reprends le contrôle et va remplir ton rôle de reine, mais surtout de mère ! Va consoler ta fille, et persuade-la de faire ce qui doit être fait ! Cette jeune femme est brillante, tout comme ta seconde fille, dans son domaine. Sois fière de tes enfants qui contribueront à faire gagner notre famille ! Ensuite, tu te chargeras de veiller à ce que ta sœur reprenne également le dessus.
-Comment pourrais-je le faire si tu ne me viens plus en aide ?
-Fais ce qui est à faire Elsa… Et d’ici peu nous vaincrons nos démons, dès lors tu n’auras pas besoin de moi pour vieillir heureuse… et de là où nous sommes, je te donne ma parole que ton mari et moi attendrons ta venue auprès de nous comme l’héroïne que tu es.
-Est-ce une manière de me flatter mamie ?
-Bien sûr que ça l’est Elsa ! Tu as toujours aimé qu’on te dise que tu es la plus grande… c’est ton défaut certes, mais aussi ta force alors autant l’utiliser… Et si j’en crois la température ici, cela fonctionne n’est-ce pas ?
-C’est vrai.
-Parfait… Je dois partir maintenant, je n’ai plus de force ma grande Picéaerd…. Embrasse bien ta petite sœur pour moi, dis-lui que « Mamie Anna veille sur vous tous »… même si je n’apparaîtrais plus.
-Mamie ! Attends ! J’ai encore des questions…
-Tu sauras y répondre seule… Tu es une grande reine, tu sais déjà quoi faire ! Mais une dernière chose… Termine la formation de Kirsten ! Dis-lui ce qu’elle doit entendre même si c’est dur…
-Quoi ?


Mamie Anna leva les yeux au ciel, sa petite fille n’avait pas l’air de tout comprendre mais la matriarche ne pouvait se permettre que tout ne soit pas explicite désormais et préféra détailler ce qu’elle attendait d’Elsa qui au fur et à mesure des paroles de la grand-mère devenait de plus en plus diaphane.


-As-tu compris désormais ?
-Oui… Je… Je ferai ce qui doit être fait mamie ! Pour toi… Pour toute la famille !
-Tu seras à la hauteur…Adieu ma grande Picéaerd !


L’instant d’après l’image de la matriarche disparut et la reine des neiges ouvrit les yeux, constatant qu’elle se trouvait seule dans la chambre royale. La visite nocturne de sa grand-mère avait sans doute eu l’effet escompté alors qu’elle remarquait qu’il n’y avait plus aucune trace de givre dans la pièce. Avec dignité, elle se para d’une nouvelle tenue royale dont elle avait le secret de fabrication avant de se draper d’un châle noir en signe de deuil. Sans un bruit, elle traversa le palais endeuillé. La curiosité la fit s’approcher des appartements de sa cadette et d’y croiser Kristoff qui s’apprêtait à lui apporter du thé. Après une brève conversation, la reine des neiges fut soulagée, Anna n’était pas retombée dans un état léthargique suite à l’affreuse nouvelle, bien aidé par Kirsten mais plus encore par Rita qui, aux dires de Kristoff avait passé une bonne partie de la journée à ne pas tarir d’éloges auprès de sa tante sur sa fille disparue tragiquement. Elsa se mordilla la lèvre face à cette information. Elle, tout au long de la journée n’avait su que dresser un mur de glace entre elle et le monde alors que ses filles ont su vaincre leur détresse pour se montrer digne de leur rang de princesses royales. La reine des neiges tachait d’y trouver une source d’orgueil et de courage, si elle avait su faire de ses jumelles des personnes si dignes et courageuses, elle-même saurait agir comme elle le devait.


De son pas altier, la reine des neiges continua son périple vers les appartements de sa fille et fut surprise, à l’approche de la porte close d’entendre des sanglots étouffés. Elsa en fut particulièrement surprise, qui donc pouvait bien pleurer dans la chambre de Kirsten ? Sans réfléchir, la souveraine s’empressa d’ouvrir la porte sans même s’annoncer. Instantanément elle se figea. Face à elle, Kirsten, les yeux gonflés de larmes sursauta, furieuse d’être vue en si piètre présentation. La maîtresse de l’hiver pouvait sentir le flot de sentiments forts et contradictoires dans les yeux de sa fille. Elle, la princesse héritière si parfaite qui soudain s’était laissée aller à être submergée par ses émotions, elle, incapable de se présenter digne, ni même faire une révérence protocolaire auprès de la reine qui apparaissait.


-Kirsten…
-V… Votre Majesté… Je… Pardonnez ce… Balbutia-t-elle en tentant une révérence qui pour la première fois de sa vie était risible, digne de celles de sa sœur ainée disparue.
-Kirsten… Il n’y a personne, ne pense pas au protocole, il ne sert à rien.


Sans réfléchir, et malgré sa réserve naturelle, Elsa s’empressa de s’approcher de sa fille pour la prendre dans ses bras. La princesse elle aussi baissa ses défenses et se laissa aller de longues minutes au désespoir et à la recherche du réconfort maternel. La princesse parfaite, modèle de dignité et de prestance avait disparu, pendant cet instant hors du temps il n’y avait qu’une petite fille désemparée qui n’avait besoin que de la présence maternelle pour extérioriser toute sa détresse. Elsa aussi se laissa aller. Mère et fille pleurèrent ensemble la disparition d’un père et d’un mari, d’une sœur et d’une nièce. Au bout de très longues minutes, la jeune femme se détacha de sa mère, s’essuyant avec grâce les yeux avant de replacer sa coiffure elle se redressa de sa posture altière héritée d’Elsa.


-Pourquoi mère ? Pourquoi vous être déchargé de ces décisions ? Pourquoi m’avoir laissé envoyer ma sœur et père à la…


Elle ne put terminer sa phrase, elle qui se pensait forte pour tenir comme elle l’avait fait toute la journée pour réconforter Rita ou ses propres enfants ne pouvait se contenir. Elle voulait hurler, s’autoriser une crise que tout être humain aurait eu en pareil circonstance pourtant elle luttait pour se retenir… Aidée par Elsa qui plaqua la main contre sa bouche.


-Allons Kirsten ne prononce pas un mot de plus ! Tu n’as rien fait de tel ! Tu as agi comme une dirigeante, tu as pris des décisions pour le royaume que personne ne peut contester, ni même critiquer. Tu as fait ce qui devait être fait…
-Et ils ne sont plus là maman ! Hurla Kirsten d’une voix non maitrisée avant de se reprendre : Plus là ! Comment pourrais-je désormais regarder dans les yeux Frantz et Maëlle, alors qu’à cause de ma décision ils…
-Ils sont adultes désormais, et ce sont des enfants assez intelligents pour savoir que tu n’es pas responsable de cet accident Kirsten… Tout le monde sait à quel point ton père pouvait compter pour toi…
-Et Helga maman ? Et Helga ?!... Ma sœur ! Votre nièce que vous avez tant dénigrée !
-J’ai été distante et sévère envers elle pour les raisons que tu connais… Toi plus que quiconque sait que l’avoir forcée à être poussée dans ses derniers retranchements l’aura aidé à s’améliorer car elle n’en avait pas eu la volonté par elle-même… Ta grand-mère Iduna n’a eu de cesse de te le répéter pendant les leçons qu’elle te donnait, tout comme moi. Pourtant, oserais-tu dire que ta grand-mère dénigrait ta sœur ?
-Non mère…
-Mais tu as raison sur un point… Je n’ai pas su dire, ni faire ressentir à Helga que je l’aimais, comme j’aime chaque personne de mon sang et pour cela Kirsten, auprès de toi je te demande de me pardonner de m’être montrée si dure envers ta sœur.
-Et moi mère ? Vous n’avez pas d’excuses pour moi ? Moi, la princesse à qui on a obligé à être la fille absolument parfaite en tout point depuis qu’elle sait marcher ? La princesse qui doit tout savoir ? La princesse qui doit tout décider… même d’envoyer son père et sa sœur vers…


A nouveau la voix de Kirsten se mit à dérailler, le masque tombait. Elsa de son côté demeurait impassible.


-Allez Kirsten… ça te fera du bien. Dis-le ! Tu es un grand chef… Un grand chef est capable de finir ses phrases. Termine-la ! Accuse-moi de ce que tu veux m’accuser !
-Les envoyer à la mort alors que cette décision d’envoyer des représentants devait revenir au monarque en exercice ! Vociféra la jeune femme.
-Une décision que j’aurai prise exactement comme tu l’as fait. Kirsten tu as fait ce qui devait être fait. Je t’ai laissé le faire, car il fallait que tu le fasses, pour que tu sois la grande dirigeante que nous attendions tous… Ce pourquoi depuis ta plus tendre enfance je t’ai fait suivre l’enseignement de ta grand-mère Iduna.
-Parce que tu étais incapable de prendre cette décision toi-même maman ?!... Tu… Tu savais ce qui allait arriver c’est ça ?!


Elsa tressaillit et ne répondit pas. Les nombreux songes où Mamie Anna lui était apparu pour lui annoncer des événements repassaient devant ses yeux et elle se mordit la lèvre de manière imperceptible pour tout un chacun, sauf pour sa fille qui le prit pour un aveu.


-Tu le savais !!! Tu sais quoi maman… Terminé la princesse parfaite ! Ta couronne je n’en veux pas ! Trouve quelqu’un d’autre pour régner ! Hurla-t-elle en jetant le diadème qu’elle portait aux pieds de la reine des neiges.
-Voilà une très bonne nouvelle que tu ne veuilles pas la couronne Kirsten… Nous avons fait en sorte que tu sois une grande dirigeante… Mais en aucun cas que tu deviennes une reine !
-Attends quoi ?!


La colère de la jeune femme disparut aussitôt pour laisser place à une intense surprise. L’espace d’une seconde elle avait pensé qu’Elsa avait répondu ceci par provocation, pourtant le regard de sa mère était on ne peut plus sérieux. Tout à coup, le monde que Kirsten s’était construit commençait à s’écrouler.


-Je ne suis pas fait pour être la reine d’Arendelle ? Et comment espérez-vous que ce royaume survive sans moi ? Vous avez vu les troubles partout ? Vous êtes contesté en tant que reine par vos sujets qui vous trouve absente, le pays Northuldra n’accepte pas forcément Yohan comme chef. Les Iles du Sud menacent de faire un coup d’état pour renverser la famille Westergaard…. Dois-je continuer ?
-Oh non Kirsten tu n’en as pas besoin… Ton arrière-grand-mère Anna m’a dit mot pour mot que tu allais sortir cette tirade furieuse… et que ça serait à cet instant précis que je pourrais savoir si avec maman, nous avons réussi notre mission pour toi…
-Quoi ? Mais vous perdez la tête mère…. Comment pourriez vous avoir parlé à Mamie Anna qui est morte depuis…
-Tu sais bien qu’elle est capable de pratiquer les voyages astraux depuis le monde des morts…. Tu côtoies suffisamment de chamanes pour savoir que cela existe ! Même ta sœur dont je souhaite le repos à son âme arrivait à en faire malgré son niveau très médiocre sans offenser sa mémoire.


Elsa dévisagea sa fille, c’était assez rare mais sur l’instant, Kirsten ne trouvait rien à répondre. Avec douceur, Elsa prit la main de sa fille et l’invita à prendre place à ses côtés sur le lit.


-Et si nous pouvions réellement oublier les couronnes et titres le temps de cette conversation ? Je ne souhaite pas parler à la princesse, ou que tu t’adresses à ta reine. Non, parlons-nous comme mère et fille… C’est d’accord Kiki ?
-Non maman… Kiki ce n’est pas possible ! Déjà je le tolère pour Rita mais… Commença Kirsten en esquissant un timide sourire.
-Comme tu voudras Kirsten… Tu dois savoir déjà que ta sœur et toi, vous êtes ma plus grande fierté. Je suis fière de ce que vous avez su accomplir, de ce que vous êtes devenues toutes les deux, avec vos victoires et vos erreurs. Ta sœur a de l’avance sur toi… Elle sait déjà qui elle est et ce qu’elle doit faire. Elle a succédé à Ylva Nordlys. Pour cela, elle a dû tomber très bas, faire une terrible bêtise certes, pour mieux la réparer. Toi, c’est différent… Tu n’avais pas besoin de faire une bêtise pour savoir qui tu devais devenir… Non, tu devais en revanche passer par ce moment terrible que tout dirigeant doit affronter. Celui d’avoir pris une décision… Une bonne décision, mais que celle-ci ait des conséquences terribles. Et pour ce faire Kirsten, tu n’avais pas besoin d’avoir une couronne sur la tête. Nul besoin d’être un monarque pour être un dirigeant.
-Comment cela ?
-Allons Kirsten, à ton avis, pourquoi ne me suis-je pas chargée de t’enseigner tout ce que tu as appris mais ai laissé ma mère le faire… Tu as vu ta grand-mère diriger le royaume parfois à ma place, alors qu’elle n’avait pas la couronne. Et de qui t’inspires-tu pour être qui tu es… de moi ? Une reine, ou de ta grand-mère qui ne l’était pas et pourtant dirigeait ? N’as-tu pas longtemps conversé avec ta grand-mère et auprès d’elle critiqué ma gouvernance ?
-Si… Je l’ai fait maman. Fit Kirsten en baissant la tête comme si elle confessait une bêtise.
-Tu étais donc bel et bien une dirigeante et non une reine ! Je te parlais de ton arrière-grand-mère Anna. Jamais elle n’a été cheffe, pourtant elle aurait sans doute pu l’être si elle l’avait voulu… Mais en son temps elle dirigeait, au moins autant que la cheffe Yelena. Ylva également. Par son influence avait quoi qu’il arrive un pouvoir décisionnaire bien qu’elle ne fut jamais une cheffe…. Il en est de même pour toi Kirsten. Tu diriges, mais tu ne règnes pas ! Et comme dirigeante, tu prends les décisions qu’il faut prendre. Comme celle de confier cette mission à ton père et ta sœur. Oui je savais ce qu’il risquait de se passer… J’ai tout fait pour me dire que ça serait différent et comme toi dans la solitude de cette chambre j’ai craqué en apprenant la vérité. Tu as même été bien plus courageuse que moi, avouons-le !
-Du courage, un pouvoir de décision… Maman, depuis que mamie est partie, je ne prends que des mauvaises décisions ! Renifla Kirsten.
-Ne sois pas trop dure avec toi-même… Tu fais ce qui doit être fait.
-Oui mais… Sans l’avis de mamie… je suis perdue.
-Ta grand-mère lorsqu’elle nous a quitté n’avait plus rien à t’apprendre Kirsten… Tu sais déjà tout ce qu’il faut savoir. C’est même pour ça qu’elle est partie pour son dernier voyage sereine, elle savait qu’elle avait terminé sa mission avec toi.
-Quoi ?... Tu es en train de sous-entendre que tu savais aussi que mamie allait mourir ?! Comment peux-tu faire injure à leur mémoire ainsi maman et dire que tu savais tout… Si tu savais il fallait l’empêcher !
-Je ne pouvais pas l’empêcher Kirsten… Je peux avoir les pouvoirs de l’hiver. Mon frère Kaspian peut avoir tous les pouvoirs de la nature, ta tante, ta sœur ainée, ta nièce peuvent être des chamanes, il n’y aura jamais assez de pouvoir pour tout empêcher… C’est vrai dans notre vie, c’est vrai dans toutes les vies que nous vivons ! Et même au-delà !
-Toutes les vies… Foutaises et inventions.
-Tu sais très bien que non Kirsten.
-Très bien maman, alors prouve-le que ces différentes vies existent !
-Mais la preuve Kirsten, tu l’avais à tes côtés depuis ta naissance ! Ta sœur ainée. Te rends tu compte qu’Helga se trouvait être plus âgée que ta tante de quelques années alors qu’elle était sa fille ainsi que celle de ton père avec qui jamais ici ta tante n’a eu de relation. Ta sœur Helga, provenait d’une autre vie et tu le sais depuis longtemps en réalité. Peut-être as-tu voulu te voiler la face mais tu le sais… Quant à moi, j’en sais bien plus encore. Avant de revenir ici, j’ai eu le temps de déjà vivre une autre vie et même une mort, je sais quels dangers bien au-delà des menaces qui pèsent ici-bas nous guettent et je sais que nous avons pourtant tous un rôle à jouer… Beaucoup ont terminé leur partition mais toi… Toi c’est en réalité maintenant ton moment. C’est maintenant que la dirigeante que nous avons tenté de former toutes ces années doit agir… Pour notre salut à tous.
-Que veux-tu dire ?


Elsa préféra garder le silence et sortit de sa poche une enveloppe cachetée d’un sceau.


-Tu le reconnais n’est-ce pas ?
-Ton sceau
-Ne remarques-tu rien ?


Kirsten se concentra et comme Elsa s’y attendait le regard expert de sa fille était sûr.


-ça n’est pas l’actuel, celui-ci paraît avoir dans les vingt-cinq ans, ton symbole des esprits n’est plus le même désormais.
-exact… Tu ne seras donc pas surprise de la date écrite sur cette lettre.


Intriguée Kirsten décacheta la missive et observa la date


-Tu as écris ça alors que j’avais 5 ans ?
-Lis…


« Ma chère petite Kirsten, aujourd’hui tu commences ton enseignement avec ta grand-mère Iduna. J’espère qu’au cours des nombreuses années à venir tu sauras devenir la dirigeante sereine et éclairée que nous souhaitons tous, pour Arendelle, mais aussi pour le continent et plus encore, pour notre famille. Lorsque tu liras cette lettre, j’ose croire que tu seras adulte et devenue une femme accomplie. Sans aucun doute, ta grand-mère aura su t’inculquer toutes les valeurs et les qualités nécessaires pour que tu sois devenue je le souhaite, la plus grande dirigeante de ce siècle. En lisant ces quelques mots, tu devras donc commencer ta mission, comme ta jumelle aura sans doute commencé la sienne en suivant un jour les pas d’Ylva Nordlys. Pour l’heure vous êtes d’innocentes jeunes filles, j’espère que ta sœur ne commencera pas avant quelques années. Maintenant que tu es grande, tu auras sans doute dû affronter des malheurs, probablement qu’en ce moment même, tu devras affronter de terribles épreuves que tu sauras surmonter car désormais tu es sans doute la grande Kirsten d’Arendelle Picéaerd, celle sur qui tout le monde compte alors ma très chère fille pour qui j’ai tant d’admiration, maintenant que tu es prête, il est temps pour toi d’observer, sous la latte de ton troisième pied de lit et découvrir la véritable mission pour laquelle tu as commencé ta préparation ce jour, dans ta jolie robe bleue auprès de ta grand-mère. Cette mission sera difficile à accepter mais j’ai confiance en toi ma fille.

Ta Maman, Elsa d’Arendelle »
…
Sous mon lit ? Maman est-ce sérieux ?
-Vois par toi-même !


Peu convaincue, Kirsten se décida néanmoins à observer et fut surprise de sentir la latte indiquée légèrement plus creuse que les autres. Intriguée, elle glissa ses doigts et la fit pivoter délicatement. A tâtons elle chercha et découvrit une enveloppe. Elle la porta à ses yeux et reconnu le sceau de sa mère, un sceau récent cette fois.


-Tu… Tu savais ?
-Bien sûr que je le savais…c’est moi qui ai écrit la lettre ! J’ai simplement attendue que tu sois prête pour te faire parvenir cette missive…Souhaites-tu la lire seule, ou que je reste à tes côtés ?


Kirsten ne répondit pas mais Elsa comprit le désir de sa fille. Elle l’observa ouvrir le courrier et parcourir attentivement la lettre. La reine des neiges prit alors lentement la main tremblante de sa fille qui terminait de prendre connaissance de sa mission. Pâle après sa lecture silencieuse, elle reposa dans un état second le papier.


-Alors… c’est… C’est vraiment sérieux ? Je… Je ne dois pas être reine ?
-Non Kirsten…Tu dois agir pour tous nous sauver, pour diriger mais tu ne dois pas être reine, et par cette action tu nous sauveras tous… Car ainsi, tu rachèteras le plus grand pécher des Picéaerds.
-Quoi ? Lequel ?
-L’orgueil ! Nous savons très bien que je tire une grande fierté de mes pouvoirs et de ma couronne… Ton arrière-grand-mère Anna, même si elle ne disait pas se savait on ne peut plus brillante dans son domaine et en tirait grand honneur, ta grand-mère Iduna si elle n’a pas embrassé une carrière de chamane avait néanmoins de grandes dispositions et connaissances dans le domaine au point d’avoir écrit les livres références dessus en se vantant de savoir sans avoir étudié sérieusement… Et nous pourrions ainsi multiplier les exemples de vanité de notre famille avec la plus orgueilleuse de toutes, la fondatrice Emma Picéaerd en personne !
-Mais maman… Soyons lucides ! Je suis moi-même orgueilleuse ! Je me vante de mes compétences, c’est un secret pour personne !
-Et pour autant, tu sauras t’effacer et laisser la couronne comme on te le demande pour quelqu’un d’humble ! Kirsten, je savais que cela était ta mission dès le jour où j’ai écrit cette missive… J’aurai pu te la faire parvenir dès que tu as démontré tes qualités de dirigeante donc avant même ta majorité, pourtant je ne l’ai pas fait, j’ai au contraire laissé passer le temps, attendu que tu deviennes mère, que tes enfants grandissent quelque peu, que tu perdes ta grand-mère qui était ton modèle mais c’est un autre événement que j’ai attendu…
-Lequel ?
-Que tu te rapproches de ta sœur
-Mais… J’ai toujours été proche de Rita !
-Pas Rita !... Helga ! Tu te moquais de sa médiocrité pendant ton adolescence, mais en prenant de l’âge, tu as su voir en elle ce qu’il y avait de plus beau. Son humilité. Tu as su voir ses qualités. Bien sûr tu as cherché à la pousser à se dépasser, comme nous tous, mais tu ne l’as plus rabaissé. Comme tu as accepté les mariages de tes cousins avec des demoiselles de plus basse extraction avec qui tu n’entretiens plus de rapports de domination. Ainsi toi aussi tu as appris les vertus de l’humilité, sans forcément te les appliquer mais tu as su reconnaitre ces gens comme tes égaux, c’est ce qui m’a convaincue de penser que tu étais prête. Maintenant que tu sais faire ça… Avec ton sens du devoir, je sais que tu prendras la bonne décision…. Pour nous sauver tous.
-Donc… Je dois parler à Kaspian !
-Oui… Et pense à le faire en étant accompagné par Rita et Arnvald, cela t’aidera ! Eux aussi ont leur mission après tout…
-Mon oncle et sa femme arriveront dans quelques heures pour assister aux obsèques de père… Je leur en toucherai mot avant.
-je te reconnais bien là ma chère fille. Et pourras-tu également dire à ta tante Anna que je souhaite qu’elle parte s’installer en pays Northuldra pour ses fonctions de chamane ?... Elle pourra aussi faciliter la mission ne penses-tu pas ?
-Certes, mais je doute que tante Anna apprécie la nouvelle.
-Justement, insiste bien pour dire que c’est moi… Ne t’en fais pas je le lui redirai et lui expliquerai, mais il vaut mieux qu’elle ait entendu la nouvelle une première fois avant que je ne la répète.
-Et après il faut que je dise que je n’ai pas la couronne sur la tête. Soupira Kirsten.
-Mais tu as bien mieux… Car tous te demanderont conseil… C’est toi qu’ils consulteront, à chaque fois ! Au final, c’est bien toi qui dirigeras…. Et ce, même bien au-delà d’Arendelle !


Elsa finit par déposer un tendre baiser sur le front de sa fille avant de la laisser à sa solitude. La reine des neiges savait bien que Kirsten ne se reposerait pas mais lirait à nouveau des dizaines de fois les missives dont elle avait pris connaissance.
La princesse parfaite fut en effet on ne peut plus prévisible et relut la lettre jusqu’à l’aube mais aussi s’était mise au travail et épluchait tous les documents et traités utiles au projet qui lui avait été confié. Puis, sans rien laisser paraître, de son allure royale elle allât frapper à la porte de sa tante pour l’informer de la décision de la reine des neiges. Sans plus de cérémonial, Kirsten s’empressa ensuite de tirer sa sœur Rita et son galant du lit afin que tous deux l’accompagnent accueillir l’arrivée de leur oncle Kaspian et sa femme Emma. D’un ton courtois mais autoritaire elle les invita à la suivre dans un cabinet de travail réservé à la famille royale.


-Bien, mon oncle, ma tante, prenez place je vous en prie, nous serons plus à l’aise pour discuter…
-Je te remercie Kirsten et, je te présente toutes mes condoléances pour ton père…


La jeune femme n’avait cependant moins prêté attention à la politesse de son oncle que par son choix de prendre place où Elsa avait l’habitude de siéger.


-Quel… curieux choix de siège oncle Kaspian
-Pardon Kirsten, tu le voulais ?
-Non… pas du tout… ça n’est qu’un siège après tout. Fit Kirsten d’une voix pincée.
-Fort bien, alors dis-moi, de quoi voulais-tu nous parler ? Demanda Kaspian, qui usa de son pouvoir pour allumer un feu dans la grande cheminée.
-Je souhaitais mon oncle, discuter avec toi, au nom de ma mère la reine d’Arendelle…
-Oui d’Elsa… Que veux donc ma grande sœur chérie ?
-C’est important mon oncle je t’en prie un peu de solennité, il s’agit de l’avenir des royaumes !


Tout le monde connaissait le ton autoritaire de Kirsten mais curieusement il fut incroyablement efficace car le caractère d’ordinaire très enjoué et détendu de Kaspian disparut aussitôt. En l’espace d’une seconde c’est un homme nouveau qui semblait avoir pris sa place, un véritable homme d’Etat.


-Je suis tout ouïe Kirsten
-Eh bien voilà… J’ai ici en ma possession une missive de la reine qui nous pouvons dire fait office de testament et… disons qu’il est question de succession et
-Oh je vois… Nous devons officialiser le fait que je suis l’héritier du trône d’Arendelle.
-C’est… Attends quoi ?! Mais… Mais comment le sais-tu ? Demanda Kirsten médusée, à la fois par la révélation, mais aussi par l’absence de réaction de la part de sa jumelle et son époux.
-Cela te surprend tant que ça Kirsten ? Allons, pourquoi penses-tu que je sois venu aujourd’hui alors que je ne quitte normalement jamais les esprits ?
-Tu… Tu le savais ?
-Bien sûr Kirsten que je le savais… Pendant que toi tu suivais l’enseignement de mère, tu ne t’étais jamais demandé pourquoi moi, au lieu de suivre le même, c’était au contraire ta mère qui se chargeait de mon éducation ? On m’a toujours préparé à prendre la couronne un jour, bien que je ne la veuille pas… Tu es donc prête à me conseiller Kirsten ? Je ne peux gouverner un jour et prendre la suite de ma sœur sans tes lumières…
-Hum… Prendre la couronne d’Arendelle n’est en réalité mon oncle… Qu’une partie du dessein projeté. Afin que l’ordre soit pleinement rétabli, il faut qu’un gouvernant qui fasse consensus et soit légitime nous représente tous et c’est justement…
-Pour cela que je dois prendre la couronne… car je suis le fils d’Agnarr pour Arendelle, et d’Iduna pour le pays Northuldra… et mon épouse est princesse des Iles du Sud.
-Et tu as le statut de cinquième esprit avec les pouvoirs qui vont avec ce qui te confère une légitimité supplémentaire auprès du peuple du soleil. Poursuivit Kirsten.
-Une légitimité ?... Comment ça une légitimité auprès du peuple du soleil?
-Justement Kaspian, il n’est pas seulement question que tu prennes la couronne d’Arendelle, à vrai dire, pour pacifier le continent, le projet est que ton épouse et toi soyez sans délai nommé à la tête de toutes les contrées… Tu l’as compris pour Arendelle, mais tu seras aussi le chef des Northuldra qui voient en toi un chef bien plus légitime que ton beau père qui, s’il a leur sympathie demeure un étranger du sud. Et par toi Emma, tu es l’héritière désignée des Iles du Sud… Aucun de tes oncles n’a engendré de descendance alors que Rita et moi, nous sommes les héritières, du dernier frère… Ton père est plus âgé après tout. La couronne des iles te revient. Ainsi, à vous deux, vous allez centraliser la couronne des trois royaumes et unifier le continent sous la bannière des Picéaerds. Vassar et Vesterland sont des royaumes vassaux que nos époux respectifs à Rita et moi ajouterons à cette grande coalition, unie sous ta bannière mon oncle.
-Attends Kirsten… Tu vas trop vite. Arendelle, d’accord. Non pas que ça m’enchante mais, cela fait depuis mon enfance que l’on me fait comprendre qu’il me faudra prendre le trône… Mais le pays Northuldra ? Et les Iles du Sud ?!
-Il n’y a pas d’autres solutions mon oncle, tu es sur place en pays Northuldra, tu sauras sans doute bien mieux interpréter que moi les derniers rapports des princes Elysia et Pieter à propos des soulèvements contre le chef Yohan au sujet de sa légitimité. Evénements certes sporadiques mais ton beau père a malgré tout des difficultés à asseoir son autorité, surtout depuis la disparition de ta mère la reine Iduna. D’autre part, voici les rapports des ambassadeurs Sudilliens, de plus en plus de tentatives de coups d’Etat contre mes oncles qui se partagent tous les ans la couronne, dans l’attente d’un héritier. Ces dizaines d’années d’instabilité ont fait naître de l’insécurité sur le royaume insulaire. Voici tous les dossiers des menaces d’instabilité politique que nous pourrions régler par votre nomination comme héritiers. Termina Kirsten posant un dossier presque aussi épais qu’un bloc de glace sur la table.
-Kirsten… Tu… Tu as lu toutes ces pages ? Demanda Kaspian blême.
-Bien sur mon oncle, cela fait des années qu’on me demande de me substituer à la couronne et gérer les affaires courantes de ces différentes régions du continent, néanmoins, sans l’autorité du monarque de plein droit, je ne peux complètement résoudre les problèmes.
-Et tu penses qu’en nous nommant monarques de tout le continent nous pourrons le faire ? Demanda Kaspian peu convaincu.
-Non… En tout cas pas sans l’aide de ma sœur !
-Plait-il ?
-Par sa fonction certes moralement discutable… Rita sait toutes les histoires compromettantes sur toutes les personnes qui projetait de nuire au pouvoir.
-Oui enfin je n’ai pas de mérite… C’est surtout grâce à Arnvald qui m’indiquait toujours à l’avance qui complotait.
-Je le savais grâce à Ylva que je voyais en rêve… A croire quelle savait avant tout le monde qui pouvait comploter pour nous nuire. Fit le jeune homme en rougissant.
-Kaspian, l’heure est venue… Une fois nommé, ma mère pourra alors se dégager plus de temps pour la tache de cinquième esprit qu’elle a délaissé. Ma tante pourra aller en pays Northuldra former ma nièce comme nouvelle chamane. Elysia et Kaspian pourront te seconder en pays Northuldra, eux qui y ont établi leur vie désormais. Rita fera de même avec Arnvald par sa fonction et moi aussi, je continuerai de loin à diriger ce qui doit l’être… comme l’a fait mamie DuDu tout au long de sa vie. Tiens mon oncle, voici un acte royal que j’ai pu rédiger cette nuit pour qu’une fois la période de deuil terminé, tu sois officiellement intronisé… il ne manque plus que ta signature avant que la reine n’y appose son sceau !


Kirsten continua une bonne partie de la matinée à matraquer son oncle d’arguments si bien qu’il finit par rendre les armes.


-Très bien Kirsten… Tu as gagné, donne-moi ce papier !
-Pas trop tôt mon oncle
-Mais… Tu ne me fais pas de blague, tu restes avec moi ? Demanda Kaspian inquiet.
-Bien sûr… toutes les décisions passeront par moi je le sais bien…

Le fils d’Iduna, de sa belle écriture, identique à celle de sa mère apposa sa signature pour faire de lui l’homme le plus puissant du continent. Immédiatement, Arnvald se mit à applaudir. Kirsten le fusilla du regard face à cette faute protocolaire.


-Pardonne-moi Kirsten, c’est sans doute l’émotion mais j’ai soudainement face à cette nouvelle et l’assurance de voir la paix s’installer et nos contrées prospérer un soudain fourmillement dans les mains qui m’a donné envie d’applaudir. Se justifia Arnvald.
-Il a raison… C’est une grande nouvelle n’est-ce pas Kiki ? Ajouta Rita en applaudissant à son tour.
-Si fait… Se contenta de répondre la jumelle en offrant quelques applaudissements polis et discrets.


Kirsten n’éternisa pas cette réunion plus longtemps et finit par rejoindre sa mère qui la félicita avant de signer à son tour l’acte royal. Mère et fille se chargèrent ensuite d’accompagner comme il se devait la dépouille du prince Hans vers sa dernière demeure. Kirsten ne vit pas le temps passer et fut comme à son habitude pratiquement parfaite en tout point avant de rejoindre, à une heure avancée de la soirée sa couche. La princesse d’Arendelle ne tarda pas à fermer les yeux mais pourtant rapidement, elle crut apercevoir une vieille femme apparemment affaiblie au milieu du néant.


-Kirsten ?... C’est bien toi petite ? Allons approche-toi je n’ai pas beaucoup de temps.
-Mais ?... Qui… Qui êtes-vous Demanda Kirsten
-Oh… Je sais que je ne suis pas à mon avantage mais je pensais tout de même que ta mère, ta tante et ta grand-mère t’auraient assez parlé de moi pour que tu me reconnaisses…
-Vous… Vous êtes… Mamie Anna ?!
-Ah, on ne m’a donc pas trompé quand on m’a parlé de ton intelligence !
-Mais… Mais pourquoi êtes-vous si faible ?
-Et toi pourquoi me dis-tu vous ?... Tutoie moi et appelle-moi Mamie comme tout Picéaerd !
-Mais…
-Ne parle pas… Je n’ai plus de force je ne tiendrais pas longtemps. Sache que je suis fière de toi, tu as accompli ta mission… Et grâce à cela, nous allons pouvoir accomplir la notre dans notre monde. Peut être qu’un jour tu me reverras dans tes songes. Dans ce cas j’aurai meilleur mine… Autrement, je te souhaite de me revoir le plus tard possible, quand à ton tour tu auras quitté le monde des vivants après une belle et longue vie !
-Attendez… Vous… Enfin… Tu… Tu pars déjà Mamie
-Je ne tiens plus, mais ne t’en fais pas… Notre bataille commence. Je voulais néanmoins rencontrer celle qui aura contribué par son action avec les autres à racheter les pêchers de notre famille ! Je vais bientôt voir ton père dans le monde des morts ainsi que ta sœur et ta grand-mère mais crois moi, je ne mens sans doute pas en disant qu’ils sont fiers de toi… Et, avant que je ne te laisse à tes songes, pourras tu dire à ta mère et ta tante qu’elles ont réussi leur mission et que désormais… Le reste de la famille s’occupe de vaincre Emma…
-Emma ?
-Trop long à t’expliquer… Mais t a mère le fera ! Tu lui transmettras le message
-Je…
-Promets le moi Kirsten…
-Je… Je te le promets Mamie.
-Formidable… Tu es bien digne d’être une grande Picéaerd… Sois heureuse dans ta vie, Kirsten d’Arendelle Picéaerd… Et n’oublie jamais que depuis le monde des morts… Ta mamie Anna veillera sur toi !


Kirsten chercha à se concentrer mais l’image de la matriarche se dissipa et peu à peu, la princesse d’Arendelle bascula dans un songe plus léger, fait de glaces au chocolat.