- Le Royaume d'Arendelle -
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Ansa
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La Reine des Neiges 3  - Page 9 Empty Re: La Reine des Neiges 3

Sam 25 Mai 2024, 12:58
Euh les gars...Y a pas de "c'est pas prévu pour l'instant" pour fonder une famille ! Surtout dans un milieu royal au XIXieme siècle ^^ objectif avoir un héritier pour maintenir la lignée est primordiale puisque de toute façon celui d'Elsa, qui de toute façon a abdiqué, ne compte pas ! 😉

Bon et du coup, je pense que Kristoff sera plus attentif à ces prochaines sessions de plaintes 😜


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La Reine des Neiges 3  - Page 9 Empty La Reine des Neiges 3 (Chapitre 100)

Mer 29 Mai 2024, 19:00
Chapitre 100
Elsa
 
Cinq mois plus tard…


« Elsa ? Réveille-toi. On nous attend en bas…
— Hmmm…
— Allez ! Il est déjà dix heures… Je sais que tu dors pas beaucoup en ce moment mais il faut que tu te lèves…
— En ce moment ? Depuis des mois tu veux dire… » soupirai-je.
Je me tournai sur le côté et enfouis ma tête dans l’oreiller. Je sentis alors sa main se glisser sur mon ventre.
« Qu’est-ce que tu fais ?
— Je demande à ton bébé s’il veut bien m’aider à faire sortir sa maman du lit. »
Je me redressai d’un coup et lançai un long regard à Honeymaren.
« Ne m’appelle pas comme ça…
— Mais…
— Ne m’appelle pas comme ça ! » répétai-je plus sèchement.
La jeune femme retira immédiatement sa main de mon ventre.
« Je suis désolée… souffla-t-elle. Je pensais que tu avais fini par l’accepter avec le temps… Je pensais que j’avais réussi à te faire comprendre que je serais toujours là pour toi et que tu ne devais pas avoir peur du rôle que tu vas bientôt endosser…
— J’y arrive pas… C’est trop dur…
— Comment tu fais alors ?
— S’il te plaît… J’aimerais qu’on parle d’autre chose…
— Non pas cette fois. Elsa… Tu changes toujours de sujet dès qu’on parle de ça… Tu es à ton huitième mois de grossesse… Que tu le veuilles ou non, tu ne peux plus fuir.
— Je ne peux plus fuir mais je fais tout pour ignorer ce qui m’arrive. »
Je sentis un petit coup de pied, puis un deuxième. Honeymaren remarqua que je m’étais soudainement figée. Elle baissa les yeux vers mon ventre et soupira :  
« C’est impossible, tu le sais bien. Il vaut mieux que tu te prépares psychologiquement à ce qui va bientôt arriver plutôt que de refuser de voir la réalité en face. Le médecin te l’a dit un nombre incalculable de fois… On s’inquiète tous pour toi tu sais. Tu as un bébé qui paraît minuscule alors que tu arrives à terme de ta grossesse… Ce n’est pas normal. C’est comme si tu refusais de le laisser davantage exister. »
J’haussai les épaules. Elle leva les yeux au ciel, désespérée, et se leva.
« Je vais rejoindre les autres en bas. Ils vont finir par se demander ce qu’on fabrique.
— Et alors ?
— Elsa… »
Je l’attrapai par le bras et dis :
« Tu sais… Depuis que tu es ici, tu m’as habituée à des réveils bien meilleurs que celui auquel j’ai eu le droit ce matin. »
Honeymaren tenta de dissimuler le sourire qui apparut aussitôt sur ses lèvres.
« A quoi tu penses ? demanda-t-elle d’un air détaché.
— Je crois que tu vois très bien de quoi je parle. »
Je l’attirai vers moi, la fis asseoir sur le lit et passai ma main dans ses cheveux. Je saisis brusquement sa nuque et approchai son visage du mien. Alors que je m’apprêtais à l’embrasser, elle murmura :
« Ça fait plus d’une heure qu’ils sont levés… Je ne crois pas que ce soit le moment pour…
— Ils peuvent bien nous attendre encore un peu tu ne crois pas ? »
Je posai délicatement mes lèvres sur les siennes et resserrai un peu plus mes doigts autour de sa nuque. Je sentis alors un frisson parcourir tout son corps.
« Qu’est-ce que tu en penses ? » murmurai-je en souriant.
Honeymaren attrapa mes épaules et m’allongea complètement.
« Le médecin a dit pas de mouvements brusques ni d’émotions fortes, me rappela-t-elle.
— On n’est pas obligée de faire des mouvements brusques. Pour les émotions fortes, je ne te garantis rien… »
Elle se pencha au-dessus de moi et embrassa mon front.
« Pour une fois, j’aimerais qu’on agisse en tant qu’adultes… murmura-t-elle en éloignant son visage du mien.
— C’est ce que je demande aussi…
— Elsa… »
La jeune femme traça lentement du bout des doigts une ligne sur mon ventre, de haut en bas, passant par mon nombril. Je soupirai et me redressai.
« Pourquoi j’ai l’impression que toute cette histoire nous rapproche et nous sépare à la fois ? soufflai-je.
— Tout redeviendra comme avant, je te le promets.
— Mais quand ?
— Quand… Quand tu auras accouché. Je ne veux pas qu’il t’arrive quoi que ce soit d’ici là. »
On frappa à la porte.
« Madame, votre petit-déjeuner est servi depuis un moment… » fit la voix de Kai depuis le couloir.
Je lançai un regard à Honeymaren.
« Il ne sait pas que tu es là, lui chuchotai-je.
— Madame ?
— Oui, j’arrive », lançai-je à haute voix cette fois-ci.
Je crus entendre le majordome s’éloigner et fis signe à la jeune femme de me suivre. Mais, quand j’ouvris la porte de ma chambre, le domestique était toujours derrière et nous lança un regard surpris en nous découvrant.
« Qu’est-ce que… Qu’est-ce que vous faites-là ? s’étonna-t-il en voyant Honeymaren.
— Euh… Je…
— Elle m’aidait à me coiffer. »
Kai jeta un rapide coup d’œil à la longue tresse que je portais sur le devant de mon épaule.
« Très bien… Le roi et la reine vous attendent dans la salle à manger. »
Je le remerciai d’un signe de tête. Le regard du majordome se déplaça alors sur la porte que j’avais refermée derrière moi. La lueur de curiosité dans ses yeux me dérangea. Il a découvert la vérité, pensai-je. J’hésitai quelques instants mais choisis de bloquer la serrure avec du givre, m’assurant ainsi qu’il ne rentrerait pas à l’intérieur.  Restant la plus naturelle possible, je me dirigeai vers les escaliers et les descendis, Honeymaren sur les talons.
« Comment tu fais pour ne pas paniquer quand il te pose ce genre de question ? me demanda-t-elle alors.
— Ce n’est pas compliqué. Depuis que je suis née c’est comme ça. Il surveille tout en permanence, mes moindres faits et gestes, les personnes que je côtois… Absolument tout. Avec le temps je m’y suis faite et j’ai appris à taire ses soupçons.
— Ça ne te gêne pas qu’il s’immisce dans ta vie privée ?
— Je ne crois pas que ce soit malveillant de sa part. Il est très protecteur envers Anna et moi, surtout depuis le décès de nos parents… Il a été notre père de substitution en quelque sorte. Mais je pense qu’il ne s’habitue pas encore au fait qu’on soit adultes maintenant. »
Le rez-de-chaussée était étangement calme. Depuis le mariage d’Anna et Kristoff, toute l’agitation qui remplissait les couloirs du palais les quelques mois précédents avait disparu, laissant place à un silence apaisant. Nous entrâmes dans la salle à manger. Ma sœur et son mari nous y attendaient, assis autour de la grande table.
« Eh bien ! Vous en avez mis du temps ! Qu’est-ce que vous faisiez ? »
Honeymaren et moi nous regardâmes. Un sourire timide apparut en même temps sur nos visages.
***   
« Elsa ? Ça fait un moment que je repense à cette clé… Je crois que ça fait suffisamment longtemps qu’on attend, je pense être prête à découvrir ce qui se trouve dans ce bureau… Et toi ? »
Je pris la serviette en tissu posée sur mes genoux et essuyai doucement ma bouche avec.  
« J’attendais que tu me dises ça, répondis-je. Tu es ma sœur, je ne pouvais pas me permettre d’y aller sans toi. Si tu es prête, je le suis aussi. »
Anna sourit et se tourna vers Kristoff.
« Tu ne nous en veux pas si…
— Pas du tout, vous avez le droit d’avoir votre intimité, surtout concernant vos parents.
— Tu peux venir avec nous si tu veux, on ne t’en empêche pas.
— Je vais rester là, je dois parler avec Kai. »
Ma sœur leva un sourcil interrogateur.
« J’ai une question à lui poser, fit le jeune homme.
— Je vais rester ici aussi, dit alors Honeymaren. Je ne veux pas vous embêter si…
— Non, je veux que tu viennes, la coupai-je. Il y a peut-être des choses dans ce bureau concernant les Northuldra qui pourraient t’intéresser.
— Mais…
— S’il te plaît. »
Elle soupira mais finit par hocher la tête en signe d’approbation. Nous nous levâmes toutes les trois et, avant de quitter la salle à manger, Anna alla déposer un rapide baiser dans les cheveux de Kristoff et lui murmura quelque chose à l’oreille. Le jeune homme ne répondit rien et se contenta d’un léger sourire. Nous traversâmes le couloir et montâmes les escaliers jusqu’à ma chambre. Le givre qui bloquait la poignée de la porte était craquelé, signe que l’on avait tenté d’y pénétrer sans toutefois y parvenir. J’avais eu raison, Kai se doutait de quelque chose. D’un geste de la main, je retirai la fine couche de glace, entrai dans ma chambre et pris la clé qui se trouvait dans le tiroir de ma table de nuit. Je ressortis aussitôt et nous marchâmes d’un pas hésitant jusqu’au bureau de notre père, au fond du couloir. Arrivée devant la porte, je cherchai l’approbation d’Anna dans ses yeux. Quand la jeune femme me rendit mon regard, j’enfonçai la clé dans la serrure et la tournai à l’intérieur jusqu’à entendre le petit cliquetis significatif. J’inspirai profondément et actionnai la poignée. La pièce sentait le renfermé et était plongée dans l’obscurité ; les volets étaient restés clos depuis la disparition de nos parents. Je m’avançai jusqu’à la fenêtre et les poussai pour faire entrer la lumière. Ils s’ouvrirent dans un grincement inquiétant. Anna et Honeymaren me rejoignirent à l’intérieur. Les étagères autour de nous, le bureau, les livres… Tout était recouvert de poussière et de toiles d’araignée dont certaines pendaient du plafond. Je m’approchai du pupitre. Une feuille de papier y traînait encore, à côté de laquelle étaient posés un encrier et une plume. Le liquide noirâtre s’était asséché depuis un moment, laissant des copeaux se détacher des bords en porcelaine de l’encrier. Je levai les yeux vers la page en face de moi.
« Regarde, dis-je à Anna, il y a quelque chose d’écrit dans le coin en haut à gauche.  
— 18 octobre 1840. Départ d’Arendelle, destination : inconnue, lut-elle à voix haute. Cette date… C’est celle de leur départ pour la Mer Sombre et pour Ahtohallan. »
J’acquiesçai en ne quittant pas la feuille des yeux. Le mot Rapport était marqué juste en dessous de ce qu’avait lu ma sœur mais rien ne venait compléter la suite. Il n’est jamais revenu pour le faire… me dis-je alors.
« Il faudrait… Il faudrait trouver un carnet, un journal intime ou quelque chose comme ça », repris-je.
Nous nous mîmes à fouiller partout, sur les étagères, sur le bureau… Soudain, Honeymaren en ouvrit l’un des tiroirs et dit victorieusement :
« Je crois que j’ai trouvé ! »
Anna et moi nous précipitâmes vers elle et nous ouvrîmes en même temps l’épais livre que la jeune femme avait déniché. La couche de poussière qui recouvrait la couverture s’envola alors dans les airs. Sur la première page était soigneusement écrit à l’encre noire le prénom de notre père. Ce Agnarr était certainement le premier mot d’une longue descente dans le passé que nous allions feuilleter page après page.
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Mer 29 Mai 2024, 19:21
Ah chouette ! Ça y est Elsa et Honeymaren sont à nouveau ensemble ! Cool ! I love it

Par contre Elsa ça va lui faire tout drôle après l'accouchement...Le post partum est en vue surtout qu'elle a l'air d'avoir l'antepartum (que j'ai eu au premier trimestre par peur de perdre le deuxième jumeau...)...Courage Elsa ! Moins de 10 semaines pour toi Razz... La chance ! Elle a la ligne sur le ventre ! Je désespère de l'avoir mais je crois que c'est fichu pour cette grossesse-là 🤣😂

Bon ! Et mon bébé aime ton chapitre il a donné pleins de coups ! (Non en vrai il en donne tout le temps tout le temps tout le temps ! Razz pas très pratique pour dormir mais je ne raterai ce moment privilégié pour rien au monde 💙 )

Bon on a toujours pas le sexe...Mais je parie sur un garçon qu'elle nommera Ryder Razz à voir !

Bon et maintenant...Quand est-ce qu'on va en apprendre plus sur le résultat de leurs recherches ?! bravo

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La Reine des Neiges 3  - Page 9 Empty La Reine des Neiges 3 (Chapitre 101)

Dim 02 Juin 2024, 10:30
Chapitre 101
Agnarr
 
23 novembre 1814
Je ne pensais pas revenir seul. Nous sommes partis à deux et il n’est pas revenu. Il ne reviendra plus jamais. Je n’ai que seize ans et on me demande déjà d’agir comme un adulte, comme quelqu’un qui sait ce qu’il fait. Ce n’est pas mon cas. Je n’ai qu’une envie : disparaître. Je ne peux pas être roi. Pas maintenant. Je n’ai personne pour me guider. Personne, sauf peut-être cette fille… Mais je ne sais rien d’elle, à part son prénom : Iduna. Aucun habitant du royaume et aucun membre du personnel ne le sait mais elle fait partie de nos ennemis. Je suis le seul à le savoir. Mais il y a plus étonnant encore, elle m’a sauvé la vie. Pourquoi ? Je ne sais pas. Aurais-je fait la même chose pour elle ? Peut-être, je n’en sais rien. Nous sommes tous deux dépassés par la situation. On nous a toujours inculqué que nos peuples ne pourraient jamais s’entrendre l’un avec l’autre et on a voulu  nous le prouver, une fois de plus dans le sang. Mon père est mort, ses parents le sont peut-être aussi, et pourtant nous devons agir comme si nous n’avions rien en commun. Je ne ressens pas les choses comme ça. J’ai la sensation que cette fille pourrait m’apprendre beaucoup, peut-être même plus que je ne l’imagine. Elle m’a sauvé, maintenant c’est à moi d’assurer sa survie parmi nous.
 
1er février 1815
Iduna fait partie de ces filles qu’on m’a toujours interdit d’approcher. Elle est espiègle et imprévisible. Elle agit comme bon lui semble et se fiche de ce qu’on peut bien penser d’elle. C’est tout mon opposé en réalité. A chaque fois que je la regarde, je suis rempli d’admiration et de peur. Je ne peux pas vraiment l’expliquer, c’est quelque chose qui me dépasse. Tout ce que je sais, c’est qu’elle m’intrigue de plus en plus. Je fais tout pour passer le plus de temps possible avec elle, dans le château ou dans le jardin, son endroit préféré. Elle n’aime pas les murs qui le bordent, elle préférerait voir la mer, elle me l’a déjà dit plusieurs fois. Moi aussi je préférerais la voir. Ça m’apaise de regarder les vagues aller et venir sans cesse, créant des moutons d’écume sur les rochers contre lesquels elles s’échouent. Cette même écume qui floconne et qui crée des stries blanches enchevêtrées sur la mer bleue me rappellent ses cheveux bruns. Ils sont libres et flottent dans les airs au gré du vent. Rien ne les retient ou ne les empêche de s’emmêler. Elle n’est pas comme ces autres filles qui passent leur temps à faire des chignons parfaitement tirés, au contraire, elle les laisse retomber dans son dos, attirant tous les regards sur elle. D’ailleurs, il faudrait que je me préoccupe de son apparence. Elle ne doit pas attirer l’attention.  
 
17 juin 1815
Iduna n’est plus comme avant. Elle a changé, ou plutôt, je l’ai changée. Elle commence à entrer dans les codes et à faire ce qu’on attend d’une jeune fille vivant dans un château. Je sens que les siens et la forêt enchantée lui manquent. Elle n’aime pas Arendelle, elle s’y sent oppressée. Je la comprends, mais a-t-elle vraiment le choix ? Il n’y a plus rien là-bas. Plus rien à part un épais brouillard qui empêche quiconque d’entrer et de sortir. J’y ai envoyé des troupes, elles sont revenues aussitôt, incapables de transpercer cette étrange brume. Iduna s’y est également rendue. Je l’y ai accompagnée en cachette. Il ne fallait pas qu’on nous surprenne. Le résultat a été le même. Nous sommes restés coincés à l’extérieur de la forêt. Je l’ai alors entendue hurler de douleur, comprenant qu’elle ne pourrait certainement plus jamais revoir son peuple, à moins d’un miracle. Elle s’est débattue de toutes ses forces, martelant des deux poings le brouillard qui lui faisait face. Mais il n’a pas cédé et l’a repoussée à chaque fois qu’elle s’en est approchée. Je l’ai regardée faire pendant de longues minutes, le regard triste, les bras ballants, ne sachant que faire. Elle s’est jetée une énième fois contre cette brume infranchissable et je n’ai pas pu résister, je l’ai attrapée par la main et l’ai serrée contre moi. A ma grande surprise, elle s’est laissée faire et a fondu en larmes dans mes bras. Cela a été la première fois qu’elle acceptait que je la touche pour la réconforter. Son côté sauvage s’est brusquement envolé, me rappelant qu’elle n’était qu’une adolescente de douze ans, perdue et seule, comme moi.
 
5 août 1815
C’est la première fois que je vois Iduna porter une robe, une vraie robe. C’est sa femme de chambre qui l’a lui a faite sur mesure. Elle est magnifique. Depuis deux mois, elle s’est aussi habituée aux chignons. Elle en fait tous les jours, mais à sa manière, refusant de brosser ses cheveux ondulés et se contentant de les rassembler à l’arrière de son crâne, laissant toujours deux petites mèches retomber de chaque côté de son visage. Ça lui va très bien. Parfois, je me surprends à penser à elle en pleine leçon de danse ou au beau milieu d’un cours d’histoire. Mon instructeur se met souvent en colère quand il remarque que je ne l’écoute pas. Mais à quoi bon ? On me force à entendre son flot ininterrompu de paroles depuis que je sais parler et marcher. Je préfère penser à elle et à nos jeux de fin d’après-midi. Il me semble qu’elle a les yeux bleus mais n’en suis pas sûr. Je vérifierai la prochaine fois que je la verrai. J’adore le bleu. J’ai toujours été fasciné par cette couleur.
 
14 septembre 1817
Je viens de fêter mes dix-neuf ans. Iduna en a eu quinze à la fin du mois dernier. Malgré toutes mes insistances, elle refuse toujours de changer de chambre et d’en prendre une plus grande. Je ne peux m’empêcher de penser qu’elle a vraiment quelque chose de spécial. N’importe qui aurait depuis longtemps accepté de quitter la chambre des invités pour en choisir une autre. Mais elle non. Elle n’en démord pas. Les autres la mettent mal à l’aise. C’est bien la première fois qu’on me le dit. Mais je me plie à sa volonté. Elle a déjà tout perdu, je ne veux pas bouleverser le peu de repères qu’elle a su trouver dans ce château.
L’autre jour, j’ai entendu le majordome lui poser des questions sur sa famille. Je sais que tous les domestiques s’interrogent sur ses origines, et ils ne sont pas les seuls… Après tout, ils l’ont vue arriver du jour au lendemain dans le palais et n’ont jamais eu davantage d’explications sur sa venue et sur son long séjour parmi nous. Il va falloir que je trouve quelque chose pour taire leur curiosité, quelque chose pouvant pleinement justifier sa présence. Iduna répond toujours la même chose à leurs questions : elle n’a pas connu sa mère et son père est resté coincé dans la forêt enchantée après s’être battu aux côtés des soldats d’Arendelle. En général, on la laisse tranquille une fois qu’elle a répondu cela. Mais je ne peux m’empêcher de penser qu’on ira toujours plus loin dans les interrogations, jusqu’à la piéger en découvrant la vérité. Que puis-je faire ? Pas grand-chose à part peut-être dire que je ne peux me résigner à laisser une jeune fille dans la même situation que moi errer seule dans les rues d’Arendelle. Me croiront-ils ? Je n’en sais rien. Est-ce la seule raison pour laquelle je souhaite qu’Iduna reste le plus longtemps possible au château ? Non, pas vraiment…
 
26 décembre 1819
Je suis officiellement roi d’Arendelle. J’ai décidé de me faire couronner le jour de Noël, parce que j’en ai toujours rêvé. On est parfois venu de loin pour assiter à la cérémonie. L’église était remplie. Certains ont même dû rester debout, faute de bancs. La seule personne qui compte réellement pour moi était assise au premier rang, à droite. C’est moi qui l’y ai installée. Je voulais qu’Iduna ait la meilleure place possible. C’était la première fois qu’elle assistait au couronnement du roi d’Arendelle. Aucun Northuldra ne l’a jamais fait, m’a-t-elle dit, ils n’y sont pas autorisés. J’ai la sensation qu’elle s’en veut d’être venue… Elle doit avoir l’impression de renier son peuple d’origine, je le vois dans ses yeux remplis de tristesse et de douleur. Elle ne m’en parle jamais, mais je sais que la forêt enchantée lui manque. Je ne veux pas qu’elle soit malheureuse, mais au fond de moi, j’espère secrètement que le brouillard ne se lèvera jamais. Je ne veux pas la perdre… Je n’ai jamais su me faire d’amis avant de la connaître. Si elle partait, je ne serais plus rien.  
 
30 juillet 1820
La nuit dernière, il s’est passé quelque chose que je n’arrive pas encore à comprendre. Un violent orage a éclaté et Iduna est entrée en courant dans ma chambre. Je me suis réveillé en sursaut et ai tout de suite vu qu’elle pleurait. Ses poumons se soulevaient de façon incontrôlable et semblaient être écrasés par ses sanglots. Au début, j’ai cru que c’était l’orage qui l’avait effrayée. Je me suis levé et l’ai prise dans mes bras pour la rassurer. Elle tremblait et était gelée. J’ai pris ses mains dans les miennes pour tenter de la réchauffer. Je me rappelle encore de ses moindres paroles. Elles sont gravées à tout jamais dans ma mémoire.
« Qu’est-ce que… Qu’est-ce que vous faites ? » a-t-elle murmuré entre deux sanglots.
Ses grands yeux bleus remplis de larmes luisaient dans la pénombre. Mon cœur s’est soudainement emballé. J’ai commencé à comprendre pourquoi je ne voulais plus jamais la quitter. Son regard est le seul dans lequel je peux me plonger inlassablement. Je ne me suis jamais aussi bien senti qu’à ses côtés. Malgré le décès de mon père, je ne me sens plus seul. C’est elle qui me l’a fait comprendre.
J’ai alors passé une main dans ses cheveux et ai doucement attiré son visage contre ma poitrine. J’ai senti que c’était le moment.
« Je vous aime », ai-je soufflé.
Si je n’avais rien dit, je m’en serais terriblement voulu. Iduna n’a pas tout de suite décollé sa tête de moi. Elle est restée immobile quelques secondes, comme pour digérer ce que je venais de lui avouer. Et c’est là qu’elle m’a dit quelque chose que je n’ai pas tout de suite compris.
« Je dois vous parler de mon passé, vous dire d’où je viens. »
J’ai alors réalisé que l’orage n’avait rien à voir avec sa venue dans ma chambre. Il y avait autre chose. Elle a posé une main sur mon torse et m’a doucement repoussé. 
« Je sais déjà tout, ai-je dit en enroulant mes bras autour de sa taille pour la ramener contre moi.
— Non, il y a bien plus que ce que vous pensez…
— Je vous écoute. »
Elle a levé ses yeux vers moi et je n’ai pas pu m’empêcher de caresser tendrement sa joue. Contrairement à ce que je pensais, elle s’est laissée faire et a posé sa main sur la mienne. Je pouvais encore sentir ses larmes chaudes sous mes doigts.
« Ma mère est vivante. Elle devient complètement folle à force de me chercher.
— Comment pouvez-vous le savoir ?
— J’en ai rêvé.
— Vous avez dû faire un cauchemar, rien de plus… »
Iduna s’est soudainement libérée de mon emprise et m’a jeté un regard étrange.
« Ce n’était pas un cauchemar, c’était la réalité.
— Vous savez bien que ce n’est pas possible…
— C’est uniquement ce que vous croyez. Vous et votre peuple n’avez jamais voulu croire en la magie ou aux choses qui sortent de l’ordinaire. Mais ce n’est pas pour autant que cela n’existe pas. »
Je suis resté muet. Il n’y avait rien d’autre à faire de toute façon. Je l’ai entendue soupirer et elle s’est assise sur le bord de mon lit. Je suis allé la rejoindre.
« Je peux… Je peux voir le passé, le présent et le futur, a-t-elle repris.
— Comment ça ?
— J’ai hérité ce don de ma mère. Je ne peux pas vraiment l’expliquer, c’est comme ça depuis ma naissance… Elle ne m’a jamais dit grand-chose là-dessus, je pense qu’elle voulait que j’en découvre davantage par moi-même, mais je ne sais pas comment…    
— Je n’ai jamais cru en la magie ou aux choses de ce genre, vous avez raison. Mais… Ça ne m’a pas empêché de m’y intéresser. Il y a une bibliothèque dans le château, à côté de mon bureau, dans laquelle se trouvent des centaines de livres. Certains pourraient peut-être vous éclairer sur quelques points. En ce qui concerne votre mère…
— Elle s’est crevé les yeux. Je l’ai senti.
— Je ne comprends pas… Comment…
— Je ne peux pas la voir, le brouillard m’en empêche, mais je ressens tout ce qu’elle ressent, que ce soit sa douleur physique ou psychologique. »
A vrai dire, je ne lui ai pas posé plus de questions. Je n’aurais pas  davantage compris, c’est quelque chose qui dépasse mon entendement. Tout ce que je sais, c’est qu’Iduna m’a paru terrorisée à l’idée d’avoir rendu sa mère folle de chagrin en la quittant. Contrairement à moi, il lui reste une famille.
« Vous m’aimez toujours ? m’a-t-elle demandé d’une petite voix.
— Bien sûr que oui. »
J’ai attrapé doucement son menton et l’ai embrassée pour la première fois. Elle ne m’a pas repoussé, au contraire, elle m’a presque aussitôt rendu mon baiser.
 
2 juillet 1822
Le moment que nous redoutions avait fini par arriver. Nous avions conscience des risques que nous prenions, cela avait été notre choix et nous nous étions promis d’en assumer les conséquences.
Les premiers doutes ont émergé suite à des nausées régulières, et lorsque le ventre d’Iduna a commencé à s’arrondir, nous avons immédiatement compris.
Ce n’est pas tant la future arrivée d’un bébé qui nous inquiètent, mais la réaction des autres. Nous savons que les domestiques, notamment sa femme de chambre, risquent de le découvrir rapidement. Il nous faut le leur cacher le plus longtemps possible. S’ils le découvrent, Iduna sera obligée de mettre un terme à sa grossesse, sinon, nous serons déshonorés jusqu’à la fin de notre vie. N’étant pas mariés, nous n’avons pas le droit au moindre rapprochement physique. Ce bébé en est pourtant la preuve. Nous n’avons plus qu’une seule issue : organiser notre mariage le plus rapidement possible en évitant d’attirer les soupçons.
 
21 décembre 1822
Iduna a ressenti les premières contractions au beau milieu de la nuit. Je l’ai sentie s’agiter à côté de moi et l’ai entendue pousser plusieurs gémissements de douleur. Quand j’ai compris ce qu’il se passait, j’ai immédiatement fait venir le médecin royal. Quelques minutes après qu’il soit rentré dans notre chambre, elle a perdu les eaux, premier signe de son accouchement. Ensuite, tout m’a paru terriblement long. On m’a demandé à plusieurs reprises d’attendre dans le couloir, mais j’ai refusé. Je n’ai pas pu laisser ma femme seule dans ce moment si important. Gerda, la femme de chambre, nous a rejoints pour aider le médecin. Elle n’a fait aucun commentaire et s’est tout de suite mise à la tâche. Les larmes et les cris de douleur d’Iduna m’ont retourné le cœur à plusieurs reprises. A chaque nouvelle contraction, alors qu’on lui demandait de pousser de toutes ses forces, elle fermait les yeux, hurlait et repoussait sa tête en arrière contre l’oreiller, prise de violents spasmes. J’ai immédiatement attrapé sa main. Elle était moite.
« Tu peux le faire… » lui ai-je murmuré en me penchant à son oreille.
Je l’ai vue reprendre courage et écouter attentivement ce que lui disait le médecin. A chaque fois que ses muscles se contractaient, je sentais ses doigts se resserrer autour des miens. Je savais que je ne pouvais pas comprendre la douleur qu’elle éprouvait en cet instant, mais je devais lui apporter tout mon soutien.
« On commence à voir la tête. Continuez, c’est bien. »
 Je ne me souviens plus exactement de qui a dit cette phrase, si c’était le médecin ou la femme de chambre, tant j’étais concentré sur la main tremblante d’Iduna. J’ai lancé un rapide regard à son visage. Des gouttes de sueur perlaient à son front et la douleur qui traversait tout son corps se reflétait dans ses yeux entrouverts. Soudain, j’ai senti ses doigts me relâcher, comme si toutes ses forces l’abandonnaient.
« Elle s’épuise ! » me suis-je écrié, pris de panique.
Le médecin s’est redressé, les mains couvertes de sang, et a regardé l’horloge au fond de la pièce.
« Ça ne fait qu’une demi-heure… Vous devez impérativement continuer. »
Puis, s’adressant à Gerda :
« Apportez-moi une bassine d’eau. »
La domestique s’est immédiatement exécutée et a quitté la chambre en courant. J’ai entendu ses pas rapides s’éloigner dans le couloir. Quand elle est réapparue, le médecin a aussitôt plongé ses doigts ensanglantés dans la bassine qu’elle tenait pour les rincer. Il s’est ensuite approché d’Iduna et a posé une main sur son front.
« Elle a de la fièvre. C’est à cause de la douleur, il faut se dépêcher. »
Il s’est alors replacé entre les cuisses de ma femme et lui a demandé de poursuivre ses efforts. Voyant qu’elle ne réagissait pas, je lui ai doucement pressé la main pour lui rappeler que j’étais à ses côtés, qu’elle n’était pas seule pour affronter cette épreuve. Elle a eu comme un regain d’énergie et a su puiser dans ses dernières ressources, jusqu’à ce qu’un cri de bébé déchire l’air.
« Les ciseaux s’il vous plaît. »
Gerda les a tendus au médecin. J’ai déposé un délicat baiser dans les cheveux d’Iduna et, du coin de l’œil, j’ai vu la domestique attraper l’enfant, le plonger délicatement dans la petite bassine qu’elle avait posée au pied du lit, et l’envelopper une fois propre dans un linge blanc. Elle l’a immédiatement déposé sur la poitrine de ma femme et nous a dit d’une voix tremblante :
« C’est… C’est une petite fille. »
 
18 février 1823
Je ne saurais dire ce qui me préoccupe le plus. Le fait qu’Iduna s’isole de plus en plus ou Elsa. Ce n’est pas un bébé comme les autres. Elle est… différente. Des choses étranges se produisent à chaque fois qu’elle rit ou qu’elle pleure. Je n’arrive pas vraiment à l’expliquer. Sa peau est glacée, ses cheveux sont blonds, bien plus blonds que les miens, presque blancs, et… chacune de ses émotions conduisent à l’apparition de minuscules flocons de neige au-dessus de son berceau ou bien à d’immenses gerbes de glace traversant la chambre de part en part. Iduna me cache quelque chose depuis la naissance d’Elsa, mais je ne sais pas quoi, elle refuse de m’en parler. Tout ce que je sais, c’est que ma fille n’est pas normale.  
 
4 novembre 1824
Iduna est de nouveau enceinte, nous venons de l’apprendre. Nous n’avons pas sauté de joie, contrairement à la première fois. Et si la même chose se produisait ? Si nous avions un deuxième enfant comme Elsa ? Elle va bientôt fêter ses deux ans et nous n’avons vu aucune amélioration, bien au contraire. La glace accompagne chacune de ses émotions fortes, qu’elles soient bonnes ou mauvaises. Elle s’est même renforcée depuis sa naissance. Le médecin du palais n’y comprend rien. Moi non plus. Seule Iduna reste de marbre. Elle sait quelque chose de plus que nous. Mais quoi ? Je lui ai posé la question hier soir. Elle n’a d’abord rien répondu et s’est contentée de fixer le sol, assise dans un fauteuil du salon. Puis, au bout de plusieurs secondes, elle m’a finalement dit :
« Je pensais qu’Elsa aurait le même don que moi, c’est mon premier enfant. Mais je me suis trompée. Le sien est tout autre. Il est bien plus puissant.  
— De quoi tu parles ?
— Le don que j’ai hérité de ma mère se transmet de génération en génération. Seul l’aîné l’obtient. Je croyais que ce serait son cas… »
Je me suis tus et l’ai longuement regardée.
« Qu’est-ce que c’est alors ? » ai-je demandé après un moment.
Elle ne m’a rien répondu. Je me suis dirigé vers la fenêtre, les mains croisées dans le dos, et ai posé mes yeux sur le village d’Arendelle plongé dans l’obscurité de la nuit.
« Je ne veux pas un deuxième enfant comme Elsa… » ai-je alors dit.   
La lumière tremblottante de la bougie faisait danser l’ombre d’Iduna sur le mur à mes côtés.
« Ce ne sera pas le cas, a-t-elle affirmé.
— Tu n’en sais rien, soupirai-je. Moi, ce que je sais, c’est que personne ici n’acceptera un deuxième bébé aussi étrange. Les Northuldra en ont peut-être l’habitude, mais à Arendelle… c’est la première fois que ça arrive. Je veux que tu gardes ta grossesse secrète jusqu’à ton accouchement. Et seulement là, nous verrons si ce que tu dis est vrai. Suis-je clair ?
— Tu n’as pas confiance en moi, n’est-ce pas ?
— Suis-je clair ? » ai-je répété.
Je l’ai entendue soupirer mais elle a fini par accepter.
 
22 juin 1825
Iduna avait dit vrai. Anna est un bébé parfaitement normal. J’étais si heureux en découvrant hier ses cheveux roux, sa peau chaude et en constatant que rien ne se produisait quand elle éternuait. La rencontre entre Elsa et sa sœur s’est mieux passée que je ne le pensais. Elle est si contente de voir qu’elle ne sera plus obligée de jouer seule à la poupée. Pour la première fois, rien ne s’est passé quand elle a exprimé son bonheur. C’est comme si la présence d’Anna la tempérait et la rendait capable de maîtriser cette glace et cette neige jusqu’ici envahissantes.
Iduna est en bonne santé. Son accouchement s’est déroulé plus facilement que le premier, mais j’ai tout de suite senti qu’elle ne partageait pas mon enthousiasme concernant la normalité d’Anna.  Quelque chose la gênait toujours. Alors je le lui ai une nouvelle fois demandé ce matin, à son réveil, alors qu’elle commençait à allaiter son bébé.
« Je crois… Que les esprits sont liés à Elsa et réciproquement.
  — Ceux de la forêt enchantée ?
— Oui. Et… c’est sûrement de ma faute…
— Qu’est-ce que tu veux dire ?
— J’étais aussi liée aux esprits… Je n’aurais pas dû quitter les Northuldra. C’est à cause de moi si ce brouillard les a recouverts et si les esprits ont physiquement disparu de la forêt… Ils me punissent en donnant des pouvoirs magiques à ma fille, dans un monde où personne ne l’acceptera telle qu’elle est, à commencer par son père. »
Je me suis brusquement figé.
« Comment ça ?
— Tu ne crois pas en la magie, donc tu ne peux pas croire en elle. »
 
26 septembre 1837
« Il faut que je sache Agnarr. Je dois connaître la vérité. »
C’est ce qu’Iduna n’arrête pas de me dire depuis des années. Mais qu’est-ce que je peux faire ? Rien du tout. Elsa est née comme ça, il n’y a pas d’autre d’explication à mes yeux. Mais ma femme voit ça d’un autre œil, surtout depuis l’incident. Séparer mes filles a certainement été la décision la plus difficile que j’ai dû prendre dans ma vie, mais je ne peux plus revenir en arrière, pour le bien de notre famille, et surtout pour le bien d’Anna. Il ne faut pas qu’elle sache. Il ne faut pas qui que ce soit sache. Seuls Kai et Gerda gardent précieusement ce secret. Je leur fais entièrement confiance.
Depuis l’incident, je passe des heures par semaine dans la bibliothèque du château. Des dizaines de livres sur la magie en ont disparu au fil des ans. Je suppose qu’Iduna les a gardés pour elle quelque part dans le palais. En revanche, ceux sur les esprits de la forêt enchantée y sont toujours. C’est là-dedans que j’ai découvert qu’ils avaient des liens plus étroits avec les humains que je ne le pensais. L’un des livres mentionne des relations privilégiées entre les esprits et des êtres humains particuliers, qu’ils choisissent. La page suivante, celle qui m’aurait intéressé, a été arrachée, m’empêchant de découvrir de quoi il s’agissait. Je sais qui en est la responsable. Mais je n’ai pas tellement besoin d’en savoir plus. Iduna m’a déjà parlé de cette passerelle entre la nature et les Hommes. Elle semble tout savoir. Je n’arrive pas encore à m’expliquer ce don, malgré tout ce qu’elle m’a raconté, mais je commence à comprendre qu’elle sait toujours ce qu’elle dit. Elle n’avance jamais rien au hasard. Tout est prédestiné.  
 
17 octobre 1840
Il y aurait donc une île, un endroit où une multitude de secrets serait précieusement conservée. Iduna m’en parle depuis un moment et j’ai longtemps hésité avant de finalement céder.
« Ahtohallan, m’a-t-elle dit, c’est là que je découvrirai la vérité sur Elsa.
— Mais que veux-tu savoir de plus que ce que tu sais déjà ? lui ai-je demandé.
— Je ne sais pas d’où viennent ses pouvoirs. Les esprits m’en empêchent. Ils ne veulent pas que je sache quoi que ce soit sur Elsa. Je ne peux pas voir son avenir comme pour nous. Tout est flou la concernant, c’est comme si une force supérieure m’interdisait de connaître l’histoire de ma propre fille, et je ne peux rien y faire… Je ne sais pas ce que lui réservent les esprits mais il ne faut pas qu’elle s’en approche. C’est à moi de découvrir ce qu’ils me cachent en me rendant à Ahtohallan.
— Je viens avec toi. »
Je n’ai pas réussi à décrypter le regard qu’elle m’a lancé à ce moment là. Il était à la fois rempli de surprise et de peur.
« Tu ne peux pas venir, c’est trop dangereux.
— Et tu penses que je vais te laisser y aller seule ?
— Agnarr… Ahtohallan n’est peut-être qu’une légende qu’on raconte aux enfants… Personne n’a jamais su si elle existait ou non.
— Où se trouve-t-elle ?
— Dans la Mer Sombre.
— C’est une mer très dangereuse dit-on…
— C’est pour ça que je ne veux pas que tu m’accompagnes…
— S’il t’arrivait quoi que ce soit, je m’en voudrais jusqu’à la fin de ma vie.
— Tu ne peux pas venir.
— Pourquoi ?
— Parce que… Tu n’es pas comme moi.
— Je sais, c’est ce que je me suis toujours dit. Quand nous nous sommes mariés, on s’est promis de toujours tout faire ensemble. Il a fallu être deux pour avoir Elsa. Et je veux aussi que l’on soit deux pour découvrir la vérité sur elle. Tu n’as pas le choix, je t’accompagne. Quand nous reviendrons, nous dirons à notre fille ce que l’on a appris sur elle. Elle a le droit de savoir. »
Je l’ai prise dans mes bras et l’ai tendrement embrassée sur le front. Elle n’a pas réagi et s’est contentée d’appuyer sa tête contre mon épaule.
« Je ne suis pas sûre que l’on puisse la revoir, a-t-elle murmuré, moi peut-être, mais…
— Je serai toujours à tes côtés, quoi qu’il arrive. »
J’ai fini par convaincre Iduna de l’accompagner. Cela fait presque un mois que nous préparons notre départ. Demain, nous partirons demain du port d’Arendelle. Et nous rentrerons dans deux semaines.
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La Reine des Neiges 3  - Page 9 Empty La Reine des Neiges 3 (Chapitre 102)

Mer 05 Juin 2024, 10:05
Chapitre 102
Kristoff

 
« Je suis désolé Votre Altesse, je n’ai pas plus d’informations que ce que je vous ai dit. Le nom Bjorgman ne figure pas dans la liste des personnes étant rentrées dans le château. Vous devez certainement faire erreur…
— Non, elle était forcément là…
— Qui ça Monsieur ? »
Je levai les yeux vers Kai et soupirai.
« Laissez-tomber, vous ne pouvez pas comprendre. J’aimerais juste que vous me donniez cette liste. 
— Je ne peux pas.
— Pourquoi ?
— Elle n’est pas en ma possession. Ce sont les gardes du palais qui la détiennent. »
Je me levai et me dirigeai vers la porte. Au moment où je posai ma main sur la poignée, le majordome m’arrêta :
« Je vous déconseille de vous préoccuper autant de détails qui ne vous mèneront nulle part. Vous feriez mieux de porter votre attention sur des choses plus concrètes et plus utiles que cette nouvelle lubie complètement folle et irréalisable. 
— Vous n’avez plus rien à me dire, vous n’êtes plus en position de force. »
J’ouvris la porte et laissai Kai seul dans le Grand Salon. Je marchai d’un pas décidé à travers le couloir, me dirigeant vers la salle des gardes. Il me fallait cette liste, coûte que coûte.
J’entrai sans frapper. Deux hommes en armure se trouvaient à l’intérieur. En entendant la porte s’ouvrir, ils portèrent instantanément la main à leur épée, prêts à la dégainer en cas de danger. Quand ils m’eurent reconnu, ils baissèrent immédiatement leur garde. 
« Que venez-vous faire ici Votre Majesté ? s’étonna l’un d’entre eux. Ce n’est pas au roi de venir à nous, mais à nous de venir au roi. »
Je souris. Ce n’était pas ma façon d’entrevoir les choses. Ni eux ni moi n’étions encore habitués à ce changement.
« J’ai besoin de la liste des personnes qui sont rentrées dans le château le lendemain de mon couronnement. »
Les soldats se lancèrent un étrange regard. Je compris que quelque chose les dérangeait dans ma demande.
« Pourquoi la voulez-vous ?
— Ça ne vous regarde pas je crois. J’en ai besoin, c’est tout.
— Ce sont des informations normalement confidentielles Monsieur. Si nous vous la donnons, nous rompons le droit d’anonymat à votre égard des personnes présentes, surtout lorsqu’il n’y a eu aucun incident.
— Si, il y en a eu un.
— Lequel ? »
Je lui lançai un regard glacial. Je ne savais pas encore grand-chose sur mon statut, mais une chose était sûre, il n’avait pas à remettre en cause mes propos.
« Je suis votre roi, si je vous dis qu’il y a eu un incident c’est qu’il y en a eu un, et si je vous demande cette liste, c’est pour que vous me la donniez sans discuter et sans poser de question indiscrète. »
Je vis l’hésitation partagée dans les yeux des deux hommes. L’un deux finit tout de même par se diriger au fond de la pièce et ouvrit un placard renfermé dans le mur. Une multitude de longs parchemins, plus ou moins récents y était conservée. Il prit l’un d’entre eux, le plus bas, et me le tendit.
« Je ne suis pas censé faire ça, alors je vous demande de conserver tous les noms que vous y découvrirez secrets, dit-il.
— Je le ferai. Merci. »
J’attrapai le rouleau de papier et sortis de la salle des gardes. Le couloir était toujours aussi silencieux. C’en était presque effrayant. Je longeai tranquillement les murs. Soudain, un mouvement en face de moi me tira de mes pensées. Il y avait un jeune homme assis sur les marches d’escaliers. Il portait une chemise blanche et un pantalon large noir. C’était un domestique. Son air mi-renfrogné, mi-nonchalant me disait quelque chose. Je m’approchai de lui. Il me bloquait le passage. Il fallait que j’aille à l’étage. Je me râclais la gorge pour lui faire comprendre qu’il me gênait. Le jeune homme se leva lentement mais ne s’écarta pas. Il enfouit ses mains dans les poches de son pantalon et me regarda de haut en bas. Je vis alors son regard s’attarder sur le parchemin que je tenais.
« C’est quoi ? » demanda-t-il en le désignant du menton.
Je restai bouche-bée. Au moins, il ne manquait pas de culot.
« On ne vous a jamais appris à vous occuper uniquement de ce qui vous concernait ? »
Il haussa les épaules.
« C’est la liste des personnes qui sont venues dans la salle du trône l’autre jour nan ? »
Comment pouvait-il savoir ? C’était impossible…
« Votre nom ? demandai-je en gardant mon calme.
— Daven », soupira-t-il.
Il y avait définitivement quelque chose chez ce garçon qui me perturbait. Oui, je l’avais déjà vu, il était présent lors de mon mariage avec Anna. Mais ce n’était pas ce détail qui m’interpellait, c’était sa façon d’être et d’agir avec moi. Il semblait vouloir me dire quelque chose. Son regard passait trop souvent au-dessus de mon épaule pour que je ne me doute de rien. C’était comme s’il craignait d’être surpris.
« Qu’est-ce que vous voulez ? » lâchai-je alors.
Daven plongea ses yeux noirs dans les miens.
« J’peux vous aider, dit-il.
— Comment ?
— J’sais plus de choses que vous l’pensez. »
Je soulevai un sourcil d’un air dubitatif.
« Vous m’croyez pas hein ? On s’fie toujours à mon apparence mais en réalité… j’cache tout c’qui m’traverse l’esprit. Vous par exemple, votr’ nom c’est Bjorgman. Et votr’ mère s’appelle Helene. J’me trompe ?
— Comment…
— C’est bien elle qu’vous cherchiez nan ? »
Je me tus et le regardai longuement.
« Faites pas cette tête. J’m’en suis douté quand j’vous ai entendu demander cette liste à Kai. Et puis, ici on a pas connu des milliers de famille qui abandonnaient leur gosse à un Northuldra.
— Comment pouvez-vous le savoir ?
— J’ai jamais dit que c’était par vous que j’l’avais appris.
— Par qui alors ? »
Le jeune homme regarda autour de lui d’un air inquiet.
« Suivez-moi, on peut pas discuter tranquillement ici. On sait jamais, les murs ont parfois des oreilles. »
Il sauta de la marche où il était perché depuis un moment, me contourna et se dirigea vers le fond du couloir où se trouvait la cuisine. Je lançai un regard au haut des escaliers, hésitant. Puis, je finis par suivre Daven, réalisant qu’il était peut-être la seule personne qui pourrait me donner davantage de renseignements.
La cuisine était vide mais n’allait pas tarder à être remplie de domestiques car l’heure du déjeuner approchait.
« On doit faire vite avant que quelqu’un arrive. »
Le jeune homme ouvrit une nouvelle porte et m’invita à entrer dans la pièce d’à côté.
« Qu’est-ce que c’est ? demandai-je en approchant.
— Là où on entrepose la nourriture. Y a surtout d’la viande. J’ai pas l’droit d’y venir normalement. Mais si j’suis avec vous ça devrait aller. »
Il referma la porte derrière nous.
« Alors ? Qu’est-ce que vous deviez me dire de si confidentiel ?
— Votre liste là, elle vous servira à rien. Si vous vous attendez à c’que le nom Helene Bjorgman figure dedans vous vous trompez. Par contre vous trouverez Artur Bøe à sa place. C’est mon père.
— Je ne comprends rien à ce que vous dites… 
— Peut-être que si vous m’laissiez terminer mon explication ça irait mieux. Je disais qu’c’est mon père qui est venu au château, pas votre mère comme vous l’croiyiez. C’était pas gagné, il a jamais mis un pied dans un endroit comme ça, il vient d’la ferme comme moi mon père. Mais j’ai réussi à l’convaincre de venir et d’apporter c’bonnet. Il est chez nous depuis des années vous savez. On a jamais trop compris pourquoi elle nous l’avait laissé. Vous savez, votr’ mère était assez bizarre. Elle parlait quasiment pas, elle mangeait jamais avec nous… Elle se contentait de travailler dans notr’ ferme et d’y dormir, comme c’était convenu au départ.
— Comment ça comme c’était convenu au départ ?
— Ben oui, c’était notre arrangement.
— De quel arrangement vous parlez ?
— Ouais c’est vrai, j’aurais dû commencer par l’commencement et pas vouloir faire comme vous en brûlant les étapes. J’ai jamais connu mes parents ensemble, ils se sont séparés avant ma naissance. J’suis resté vivre et travailler avec mon père à la ferme parce que ma mère pouvait pas s’occuper de moi. Un jour, j’devais avoir huit ou neuf ans, mon père m’a demandé d’aller acheter des carottes dans l’centre du village parce qu’on en avait plus, notr’ récolte avait été trop mauvaise. Il m’a donné des pièces de monnaie en m’disant de faire très attention et d’pas les perdre. C’était la première fois que j’en tenais dans mes mains. A l’aller, j’ai pas fait attention, j’étais trop excité à l’idée d’avoir d’l’argent dans mes poches. C’est uniquement sur l’chemin du retour que j’l’ai vue votre mère. Vous savez elle m’a fait de la peine. Elle était assise sur les pavés, les genoux recroquevillés contre sa poitrine et elle tendait la main dans l’espoir qu’on lui donne un sou. Moi j’avais plus rien, j’venais de tout dépenser en achetant mes carottes. Et quand on est gosse et qu’on a pas l’habitude d’voir des choses comme ça, ça nous touche p’t-être plus que les autres. En plus c’était une blonde assez jolie votr’ mère. J’comprenais pas c’qu’elle faisait toute seule dans la rue. Alors j’ai pas pu résister, j’lui ai dit de venir avec moi. Quand mon père m’a vu revenir avec des carottes et une femme au bras il a pas pu s’empêcher d’me dire que j’étais plus efficace en une demi-heure que lui en quarante ans d’existence. Ça m’a fait rougir mais j’lui ai rapidement expliqué la situation. Il a pas lâché votr’ mère du regard pendant que j’parlais et il a rien dit jusqu’à ce que j’termine d’raconter mon histoire. Quand j’ai fini, il a dit qu’elle pouvait rester à une condition : fallait qu’elle travaille avec nous à la ferme pour pouvoir y dormir. Vous vous rendez compte ! On a même pas eu besoin de l’supplier, ni elle ni moi.
— Et elle a accepté ?
— Sur l’coup j’en savais rien, elle a rien dit. Mais d’toute façon elle avait pas trop l’choix, elle avait rien d’autre. J’ai compris qu’elle acceptait l’offre d’mon père quand j’ai vu qu’elle restait l’soir, et l’soir suivant, et tous les autres soirs pendant sept ans.
— Qu’est-ce qui s’est passé au bout de sept ans ?
— On en sait rien. Elle a disparu du jour au lendemain, sans laisser d’trace à part l’bonnet. J’ai jamais compris pourquoi c’était marqué Kristian dessus, elle nous l’a jamais dit. D’toute façon elle nous adressait jamais la parole. Par contre elle parlait souvent la nuit. On l’entendait discuter toute seule dans sa chambre. Elle répétait tout l’temps la même chose, qu’elle était une mère indigne parce qu’elle avait laissé son fils  entr’ les mains d’un Northuldra.
— Mais… Il y a quelque chose que je ne comprends pas… Comment avez-vous pu savoir qu’il s’agissait de moi ?
— Et bien un jour je lui ai demandé son nom. Ça faisait des mois qu’elle vivait avec nous mais elle nous l’avait jamais dit. J’me souviens encore du regard qu’elle m’a lancé quand j’lui ai posé cette question. C’est comme si elle hésitait à me le dire. Et finalement elle m’a répondu Helene Bjorgman. Au son de sa voix j’ai tout de suite compris que c’était la vérité, qu’elle me mentait pas. C’était à la fois sec et froid pour me montrer qu’elle voulait pas en dire plus, mais y avait aussi une pointe d’émotion quand elle a prononcé son nom de famille, c’était presque du regret. C’est uniquement lors des préparatifs de votr’ mariage que j’ai entendu votr’ nom pour la première fois. C’est pas un nom commun. J’me suis dit qu’il y avait forcément un lien entre cette femme et vous. Et j’ai eu raison non ? C’est quand vous avez vu l’bonnet qu’vous avez commencé à douter…
— Vous dites qu’elle a laissé ce bonnet chez vous et qu’elle a disparu, c’est bien ça ?
— Ouais. Il était sur son lit. On l’a cherchée partout mon père et moi, dans les rues du village, dans les collines, dans la forêt… On l’a jamais retrouvée. J’peux pas vous dire c’qu’elle est devenue. C’était bien votre mère ?
— Je ne me souviens plus comment elle s’appelait… Je crois qu’elle était blonde, comme vous le dites. Mais c’est tout ce dont je me souviens. Ça et… »
La porte s’ouvrit brusquement sur le cuisinier. Il nous lança un regard surpris.
« Votre Majesté ! Qu’est-ce que vous faites ici en compagnie de ce… de ce gamin ?! »
Je lançai un regard à Daven. Je crois qu’il sentit dans mes yeux toute la gratitude que j’avais envers lui.
« Ne vous en faites pas, répondis-je, c’est moi qui lui ai demandé de m’accompagner. »
***   
Enfermé dans ma chambre, je caressai du bout des doigts les lettres brodées sur le bonnet. Je n’avais aucun souvenir de ma mère hormis ses cheveux et ce malheureux bout de tissu gris. Je la voyais encore s’éloigner de moi en le gardant précieusement dans sa main. Où qu’elle puisse être, j’avais la sensation qu’elle était proche de moi grâce cette image que je conservais d’elle et à ce que je tenais entre mes mains. Je savais que je ne le reverrai plus, je m’étais fait à cette idée depuis longtemps, mais savoir qu’elle avait regretté de m’avoir abandonné me soulageait, étrangement. Je n’allais pas me lancer à sa recherche. J’avais une autre famille à présent et l’avais compris le jour où les trolls m’avaient renommé Kristoff.

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La Reine des Neiges 3  - Page 9 Empty La Reine des Neiges 3 (Chapitre 103)

Sam 08 Juin 2024, 16:48
Chapitre 103
Honeymaren
 
Nous restions toutes les trois muettes devant le livre ouvert, fixant la dernière date qui y était inscrite. 17 octobre 1840, le dernier jour où le destin des parents d’Elsa et Anna aurait pu radicalement changer s’ils avaient pris une autre décision, celle de ne pas partir pour la Mer Sombre. Pour la première fois de ma vie, j’étais exposée à une version différente du départ d’Iduna, et elle était bien loin de la trahison que l’on m’avait si souvent racontée. Cette version au contraire mettait en avant son rêve d’harmonie entre Arendelle et les Northuldra et montrait la naissance d’une histoire d’amour, parfois chaotique mais au fond passionnelle. Elsa et Anna en étaient les fruits, mais leurs parents les avaient vues complètement différemment l’une et l’autre. Alors que la première avait suscité leurs craintes et leurs angoisses quant à une potentielle malédiction, la deuxième, bien qu’inattendue, avait subitement effacé leurs doutes sur leur capacité à avoir un enfant normal, comme le répétait si souvent Agnarr. Cette normalité semblait le rassurer, lui et tous les habitants d’Arendelle. Ils étaient tous paniqués à l’idée de découvrir quelque chose hors du commun. Je n’avais jamais connu cette peur, au contraire, c’était plutôt l’excès de normalité qui pouvait m’effrayer. Je m’étais toujours dit que cela cachait quelque chose. Je n’arrivais pas à comprendre que dès sa naissance, Elsa ait autant terrifié tous ceux qui la côtoyaient, au point de l’enfermer dans sa chambre pendant des années pour la maintenir à l’écart du monde extérieur.
C’était les conséquences de cet enfermement et les craintes de son père qui se reflétaient depuis toujours dans la personnalité de la jeune femme. Son côté réservé, son air toujours inquiet et sa peur de l’autre étaient révélateurs des traumatismes qu’elle avait subis. Elle n’avait pas grandi dans le bon milieu pour s’épanouir pleinement. C’était surtout Agnarr qui l’avait restreinte, parfois malgré lui car uniquement guidé par sa peur de l’extraordinaire. Il n’avait pas dû se rendre compte des conséquences que ses décisions pouvaient avoir sur sa fille aînée. Il voulait faire d’elle son double en étouffant ses pouvoirs et donc ce qui la définissait, alors qu’elle était complètement différente de lui. Anna, elle, semblait avoir une personnalité beaucoup plus proche de celle de sa mère. Comme Iduna, elle avait un côté un peu fou, se fichant de ce que l’on pouvait penser d’elle. Sa joie de vivre permanente était une réminiscence de celle de sa mère quand elle vivait toujours dans la forêt enchantée. On m’avait raconté des dizaines d’histoires sur elle quand elle habitait encore au village Northuldra. Elle était toujours d’humeur joueuse, affichait un grand sourire en permanence, et s’entendait avec les esprits mieux que personne. C’était Courant d’Air son préféré, comme pour beaucoup. Elsa avait hérité du don de sa mère pour les apaiser. Maintenant qu’Iduna n’était plus là, elle était la seule à pouvoir le faire.
Je ressentais à travers les mots d’Agnarr tout l’amour qu’il avait porté à sa femme. Il n’avait jamais voulu croire en la magie et elle avait réussi à le changer, elle aussi. Dans son livre, il semblait regretter quelques fois d’avoir modifié l’apparence de la jeune femme pour qu’elle passe inaperçu, mais Iduna avait réussi à toucher à quelque chose de bien plus fort, de bien plus profond chez son mari : son cœur. Elle n’avait certainement pas réussi à lui faire croire en la magie, mais elle était parvenue à la lui faire accepter dans le monde qui l’entourait. On n’avait pas besoin de croire en la magie pour la faire exister. Le lien qui les avait rassemblés autour de cette même conclusion, c’était Elsa.  
Je me tournai vers la jeune femme. Ses doigts étaient encore posés sur les pages du livre. Elle ne semblait pas vouloir s’en détacher. Soudain, une larme vint tacher le papier qui commençait à jaunir. Je levai les yeux. Elle pleurait, mais son visage n’affichait aucune émotion. Elle semblait déconnectée de la réalité. Je m’approchai et posai une main sur son épaule. Elle ne réagit pas.
« C’était leur choix, murmurai-je. Tu n’as pas à t’en vouloir, tu n’y es pour rien.
— Si je n’étais pas née avec ces pouvoirs, jamais ils ne seraient partis…
— Tu n’y es pour rien, répétai-je. Tu n’as pas décidé de naître avec. Ce sont les esprits qui l’ont voulu parce qu’ils savaient que tu serais capable de sauver la forêt enchantée et de maintenir un équilibre entre les Northuldra et Arendelle. Et ils ont eu raison.  Ta mère a fait le premier pas pour l’harmonie de nos peuples, ton père l’a suivie, et Anna et toi venez terminer ce qu’ils ont commencé. »
Elsa ne répondit rien et se contenta de sourire faiblement.
« Il y a quelque chose que je ne comprends pas… dit-elle enfin. Notre mère savait qu’ils allaient mourir en mer… Alors pourquoi s’y est-elle quand même aventurée ?
— Je crois que je sais pourquoi… » fit soudain Anna.
Nous nous tournâmes vers elle.
« Dans sa bibliothèque au rez-de-chaussée, reprit la jeune femme, il y a un livre qui évoque la mort, ou plutôt la disparition, du chamane. Il ne meurt jamais complètement. Il disparaît physiquement mais son âme reste. Et… tout ce qu’il sait – ses souvenirs, ses craintes, ses visions – se retrouve alors sur un lieu choisi par les esprits de la nature. Je crois que ce lieu… est Ahtohallan. Notre mère savait qu’en mourrant, tous les secrets qu’elle a précieusement gardés au  cours de sa vie se retrouveraient là-bas. C’est pour ça que sa voix t’y a guidée. Elle voulait que tu saches la vérité, toute la vérité sur son peuple et le nôtre.
— Elle n’avait pas besoin de mourir pour ça… Il suffisait qu’elle me dise tout ce qu’elle savait.
— Elle ne pouvait pas, ça aurait tout compromis. Et… Elle avait besoin de se rendre à Ahtohallan. Regarde ce que notre père a écrit, quelque chose l’empêchait de connaître ton avenir. C’était ça qui l’inquiétait, c’était de ne pas savoir ce qui allait arriver à sa fille aînée, surtout en sachant que tu étais différente et que tu vivais et que tu vis toujours dans un monde où on n’aime pas la différence. Tous les secrets que détiennent les esprits sont cachés à Ahtohallan. C’était son seul moyen de découvrir la vérité à ton propos.
— Ce n’était pas à elle d’y aller, je l’aurais découvert un jour ou l’autre, comme ç’a été le cas…
— Elle ne pouvait pas le savoir… Et… Elle avait aussi peur pour toi Elsa. Elle ne voulait pas que tu ailles dans la forêt enchantée, ni que tu rencontres les Northuldra, parce qu’elle savait qu’un jour ou l’autre, certains te voudraient du mal à cause de son passé et de tes pouvoirs. Tu es considérée comme trop humaine pour vivre parmi les esprits et comme pas assez pour vivre parmi les Hommes. C’est ce que notre mère a toujours su. Elle voulait te protéger de ce que le monde extérieur te réservait. Et… je crois que sa peur a déteint sur notre père. Ils savaient tous les deux que tu ne rentrais dans aucune case, mais ils n’ont pas compris que c’était ça ta force.
— Iduna devait avoir peur de la réaction des Northuldra s’ils te rencontraient Elsa, dis-je alors. Et elle n’a pas eu complètement tord… On est souvent resté bloqué sur sa soi-disant trahison envers nous et on n’a jamais essayé de comprendre pourquoi elle était partie. En sauvant votre père, elle a sûrement fait ce que tout le monde aurait fait à sa place. Elle a agi en tant qu’enfant et qu’être humain qui ignore la guerre et tous ses travers, mais je crois qu’aucun Northuldra ne comprendra jamais cette version de l’histoire s’ils n’ont pas lu ce qu’a écrit Agnarr dans son journal. Moi heureusement je l’ai fait et je pourrai rétablir la vérité auprès d’eux. »
Elsa sourit.
« Merci », dit-elle en nous regardant tour à tour, sa soeur et moi.
***  
« Tu sais, on a beau me dire que je n’y suis pour rien, que c’était leur choix, une partie de moi se sent toujours responsable de leur mort… »
Nous étions retournées dans la chambre d’Elsa, laissant la clé du bureau d’Agnarr sur la porte de celui-ci. Anna nous avait quittées et était partie rejoindre Kristoff, nous laissant seules.
« Je comprends ce que tu ressens… »
La jeune femme se tourna vers moi.
« Je n’ai pas poussé Ryder à s’interposer, il l’a fait de lui-même, et pourtant je ne peux pas m’empêcher de me dire qu’il est mort par ma faute. Si je m’étais méfiée plus tôt d’Erik ou si j’avais parlé à quelqu’un de sa véritable personnalité qu’il cachait derrière ses airs mystérieux, peut-être qu’on ne lui aurait pas laissé l’occasion de tuer. Et tu sais ce qui est encore pire ? »
Elle secoua la tête en signe de non.
« Le sentiment de culpabilité est horrible, repris-je, mais ce qui me ronge jour après jour c’est de me dire que mon frère est mort en pensant ma relation avec lui brisée. Je ne suis jamais revenue vers lui après notre dispute, et je ne me suis jamais excusée pour ce que je lui ai dit. Je sais que je l’ai horriblement blessé, et… c’est la dernière image de moi qu’il a eue. Je m’en veux parce que… je n’ai réalisé qu’après coup qu’il m’avait consacré sa vie entière depuis le décès de nos parents. Il a tout fait pour me redonner goût à la vie quand je me sentais responsable de leur mort, il m’a dit des choses que personne ne m’a jamais dites pour me remonter le moral et il a su me faire rire dans les pires moments de ma vie. Et moi qu’est-ce que j’ai fait en retour ? Je l’ai accablé de reproches plus horribles les uns que les autres parce qu’il a voulu vivre la seule et unique histoire d’amour de sa vie… »
Ma voix se brisa soudain, m’empêchant de continuer à parler. Je levai mes yeux remplis de larmes vers Elsa. Elle semblait figée sur place. Je compris immédiatement que quelque chose n’allait pas.
« Qu’est-ce qu’il y a ? » demandai-je alors.
Elle ne répondit rien et porta instinctivement une main à son ventre en grimaçant.
« Elsa ? » fis-je, de plus en plus inquiète.
Je quittai son lit où je m’étais assise, attrapai une chaise et l’approchai de la jeune femme. Je la pris par le bras et l’invitai à s’y asseoir. Dès son premier pas, je remarquai à ses pieds un liquide transparent, semblable à de l’eau. Il n’y en avait qu’une petite quantité mais, lorsqu’elle se pencha pour s’installer sur la chaise, le même liquide vint tacher sa robe et le parquet de façon bien plus importante cette fois-ci. Nous nous jetâmes un regard paniqué. C’était le moment.
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La Reine des Neiges 3  - Page 9 Empty La Reine des Neiges 3 (Chapitre 104)

Mer 12 Juin 2024, 18:22
Chapitre 104
Yéléna
 
Silja était partie et elle ne reviendrait pas. J’étais seule désormais, comme je l’avais peut-être toujours été finalement. Seule à affronter les critiques et les fantômes qui m’assaillaient de toute part. Et c’était moi qui m’étais mise dans cette situation depuis toujours en refusant toute aide extérieure. Je m’étais rapprochée de Silja parce que nous avions mutuellement besoin de quelqu’un pour nous soutenir dans notre solitude. Nous avions toutes les deux perdu un être cher en l’espace d’une journée. C’était notre seul moyen de panser nos blessures respectives. Elle avait toujours su me conseiller et je l’avais écoutée, malgré quelques désaccords parfois. Maintenant qu’elle n’était plus là, c’était à moi de me débrouiller.
J’étais restée enfermée dans ma tente depuis le début de la matinée et avais empêché les rayons du soleil d’y pénétrer en bloquant tous les interstices. Allongée sur mon lit, dans le noir, j’essayai de faire le vide dans ma tête. Je n’y étais jamais parvenue, c’était impossible. Et pourtant, j’essayai sans relâche. Soudain, des cris à l’extérieur m’en empêchèrent une nouvelle fois. Je fronçai les sourcils et m’interdisai d’ouvrir les yeux pour ne pas ruiner tous mes efforts. Cependant, je sentais les battements de mon cœur qui accéléraient petit à petit. Ma respiration n’était plus aussi calme.
« Calme-toi, ce n’est rien », murmurai-je à moi-même.
J’essayai de nouveau de me détendre, en relâchant tous mes muscles qui s’étaient soudainement crispés. Mais les cris reprirent aussitôt. J’inspirai profondément et tentai de comprendre ce qu’ils disaient. Ce n’était qu’un flot de voix désorganisé qui partait dans toutes les directions. Je me concentrai davantage et compris soudain. C’était mon nom qu’ils hurlaient tous. J’ouvris brusquement les yeux, attrapai mon bâton que j’avais laissé au pied du lit et me levai. J’écartai doucement les pans de ma tente. Il y avait tout un attroupement de Northuldra au centre du village. Même de loin je pouvais voir leurs poings se lever rageusement vers le ciel.
« Ton heure est venue Yéléna, tu ne peux plus rien faire maintenant. 
— Oh si, je peux encore en faire des choses », répondis-je.
Je sortis et avançai d’un pas lent vers eux. Des murmures fusèrent dans tous les sens à mon arrivée.
« Silence ! » hurlai-je pour les faire taire.
Ils m’obéirent. Il n’y avait plus personne pour clamer mon nom. Leur soi-disant courage s’était brusquement dissipé. Ils semblaient ne plus avoir aucune réclamation à me faire. Eh bien quoi ? Qu’est-ce qu’ils veulent au juste ? me demandai-je. Personne ne m’en donna la réponse. Soudain, je vis un jeune homme avancer vers moi. C’était Erik. Il traînait un sac de toile derrière lui. Tout le monde le regardait. Il s’en moquait. C’était justement ça qu’il recherchait, c’était ce qu’il avait toujours voulu après tout. Attirer l’attention. Personne ne l’avait jamais admiré comme il l’aurait souhaité. On l’avait toujours considéré comme un gamin capricieux et rebelle. Mais était-ce vraiment de sa faute ? Il avait été privé tout petit de son père, le seul qui aurait pu lui apporter l’admiration et la reconnaissance qu’il recherchait. Ou plutôt… JE l’avais privé de son père. Cela avait été ma décision de l’époque. Si Aksel voulait s’occuper de cet enfant d’Arendelle – blond qui plus est – il devait partir. Je ne l’avais pas forcé à le prendre en charge, c’était son choix. Mais si j’avais su à quel point cette décision aurait des conséquences néfastes pour son fils aîné, jamais je ne l’aurais autorisé à quitter le village. Il nous en voulait à tous les deux, même au-delà de la mort de son père. Et peut-être au-delà de la mienne…
Erik grimpa sur un rocher. Je le regardai faire, sans un mot. Ce fut seulement là que je remarquai la présence d’Anna et Kristoff. La foule venait de s’écarter pour les amener de force aux côtés du jeune homme. Il y avait également Honeymaren et Ryder. Je lançai un regard rapide à la jeune Northuldra. La voir ainsi séparée du reste du groupe me faisait comprendre que ce contre quoi je l’avais avertie était en train de se produire. On les mettait à l’écart, elle et son frère, pour avoir été différents des autres. On ne les considérait plus comme faisant partie des nôtres mais comme ayant rejoint le camp adverse.  
« De quoi parlions-nous déjà ? » fit soudain Erik en se tournant dans ma direction.
Je le regardai longuement. Il semblait si sûr de lui. Le petit sourire en coin qu’il affichait me faisait comprendre à quel point il pouvait être insolent envers moi. Mais je n’écoutais pas ce qu’il me disait, j’étais concentrée sur autre chose, sur une voix qui n’arrêtait pas de résonner dans ma tête :
« A quoi est-ce que tu t’attendais ? Après avoir trahi tout ton peuple, il ne pouvait que se rebeller contre toi ! »
Ma mâchoire se crispa. Je resserrai mes doigts autour de mon bâton.
« Fais attention à ce que tu dis… répondis-je posément.
— Tu ne peux rien faire, reprit Erik. Nous sommes tous contre toi. Tu es seule, comme tu l’as toujours été. 
— Voilà tout ce à quoi tu as droit ! Des reproches. Et des reproches parfaitement justifiés. J’ai longtemps cru que ma fille aurait la sagesse d’épouser un homme capable de diriger correctement les Northuldra… Mais non, tu as préféré n’en faire qu’à ta tête, et voici le résultat ! Tout ce que tu as su faire, c’est de ramener nos ennemis parmi nous ! »
Je lançai un regard à Kristoff. Il me fixait lui aussi, attendant une réaction de ma part. Mais il n’en aurait pas. Soudain, les murmures reprirent autour de moi. Ils regardaient tous dans une seule et même direction. Je ne tournai pas la tête, je savais qui faisait l’erreur de venir. C’était la seule personne qui manquait à l’appel. Je l’entendis protester. Deux hommes la ramenèrent de force à l’intérieur du cercle qu’avaient formé les Northuldra. Je jetai un coup d’œil à Elsa. Elle ne semblait pas comprendre ce qu’il se passait.   
« C’est pourtant évident que c’est de ta faute… et de la sienne ! Si tu n’avais pas toléré que la petite-fille de celui qui a tué ton père vive parmi les Northuldra, jamais tout ceci ne serait arrivé ! Tu aurais encore leur respect entre tes mains ! 
— Je ne l’ai jamais tolérée ! rétorquai-je à voix haute. Ce n’était qu’un test pour voir comment Elsa se comporterait une fois intégrée à notre peuple. Maintenant j’ai ma réponse. 
— Vous m’avez menti ! » cria la jeune femme à ma droite.
Je ne lui adressai pas un regard. Elle ne savait pas dans quelle position je me trouvais. Je vis alors Erik sauter de son rocher et s’approcher d’elle d’un air menaçant. Il saisit son menton et lui dit quelque chose que je ne parvins pas à entendre.
« Ne la touche pas ! hurla Honeymaren.
— Tu es jalouse peut-être ? ironisa le jeune homme en détournant son attention d’Elsa. Tu comprends enfin ce que c’est de se sentir… »
Une énorme gerbe de glace le repoussa violemment de plusieurs mètres en arrière, ne le laissant pas finir sa phrase. Déséquilibré, il s’écroula dans l’herbe sèche, laissant tomber le sac de toile qu’il tenait dans un bruit métallique. La foule poussa des cris. Je baissai les yeux, fixant le sol, et restai de marbre quand je devinai que les Northuldra s’en prenaient à Elsa.
« Eh bien quoi ? Tu choisis de ne pas secourir ta protégée ? Sage décision. Tu commences peut-être enfin à prendre conscience de tes erreurs passées. Tu te ranges finalement aux côtés des tiens, c’est bien. »
Mon cœur rata un battement. J’entendais autour de moi des cris rageurs et le craquèlement de la glace qui les faisait immédiatement taire. Des paroles de Silja me revinrent en tête :
« Jamais je n’ai dû faire face à de tels pouvoirs. Jusqu’ici ils ont été une force pour nous tous, y compris pour elle. Mais nous ne savons pas jusqu’où elle est capable d’aller. Sa puissance pourrait être bien plus importante que tout ce que nous avons connu jusqu’ici Yéléna, j’en ai bien peur. Elle nous a protégés mais elle serait tout aussi capable de nous nuire. »
Mais je réalisai quelque chose. Ce n’était pas Elsa qui nous nuisait, c’était le contraire. J’avais pensé pendant des mois que ce serait elle qui nous conduirait tout droit à notre perte, mais en réalité, c’était nous qui la tuions à petit feu, tout comme nous avions tué les quatre autres esprits.
« Yéléna… Ce qui t’effraie, c’est qu’elle devienne plus puissante que toi, que sa magie soit plus puissante que la tienne. »
Silja avait raison, cela m’effrayait plus que tout. Nous avions toutes deux été désignées par les mêmes forces de la nature, sans véritablement savoir pourquoi. Mais contrairement à Elsa, j’avais réussi à toujours cacher ce qui m’avait été donné. Peut-être parce que je n’étais pas née avec et parce que personne n’était au courant. Ils pensaient tous à une légende et à superstitions dépassées alors que tout cela était bien réel.
« Tu t’es toujours crue supérieure aux autres… mais en réalité tu n’es rien ! »
C’était faux, et il le savait. De nous deux, c’était mon père qui avait rasé la médiocrité toute sa vie. Il s’était toujours soumis aux décisions d’Arendelle, quitte à rabaisser notre peuple. Moi, j’avais tenté de l’élever de nouveau, pas par la guerre comme il le souhaitait à présent à travers mon esprit, mais par la confiance mutuelle. Elle avait toujours été fragile certes, mais au moins j’avais fait l’effort de faire un pas vers nos ennemis en acceptant qu’Elsa vive dans la forêt enchantée. Le problème était que j’avais peu à peu laissé la peur et mes vieux démons m’envahir, réduisant à néant le peu de lien qui nous unissait. Et surtout, ce que je n’avais pas vu au début, c’était que personne ne m’avait suivie dans ma démarche d’approcher de nouveau Arendelle. J’avais pris la décision seule, sans concerter les autres, comme un véritable chef ne devrait jamais le faire. Je leur avais imposé la venue d’une étrangère parmi eux, sans davantage leur expliquer pourquoi je le faisais. Ils l’avaient tous pris comme un affront et, quand j’avais commencé à regretter mon choix, ils m’avaient prise pour une folle, pour quelqu’un qui ne savait pas ce qu’il voulait. Et c’était vrai, je ne savais pas ce que je voulais à l’époque. Maintenant, tout ce qui m’importait, c’était la paix et la sécurité de tous.
Un coup de feu retentit. Je levai la tête. Ryder était étendu au sol, mort. Sa sœur se précipita vers lui.
« Je t’en supplie, regarde-moi. Dis-moi quelque chose… Ryder ! »
Sa voix se brisa. Elle pleurait et criait à s’en déchirer les poumons. Je regardai cette scène qui me paraissait irréaliste. J’étais là, incapable de bouger, fixant le corps inerte du jeune homme. Erik tenait un fusil entre ses mains. C’était lui qui avait tué un des nôtres.
« Regarde ce que tu as fait ! Si tu n’avais pas introduit la haine dans le cœur des Northuldra à cause de cette fille, ce ne serait jamais arrivé ! »
Mes mains se mirent à trembler. Ce n’était pas à cause de moi que Ryder était mort, mais à cause d’Erik. Ce n’était pas moi qui avais introduit la haine dans le cœur des Northuldra, mais Erik. Je n’y étais pour rien, je n’avais rien fait, c’était lui qui reversait toute la colère qu’il contenait depuis son enfance sur nous. Je le vis alors se diriger vers Elsa, pointant son arme vers elle. Un flash apparut soudainement dans mon esprit. C’était les yeux de Silja, avant qu’elle ne se les crève de douleur. Ils étaient bleus, comme ceux de sa petite-fille. Je regardai mon bâton. Le seul symbole gravé que j’aperçus à ce moment-là fut le soleil. Je fermai les yeux, priant intérieurement que les esprits, où qu’ils puissent être, entendent ma volonté. Ils m’avaient sauvé la vie une fois, maintenant, c’était elle que je voulais qu’ils sauvent. Si je ne le faisais pas, la guerre entre nos peuples serait déclarée à tout jamais et… elle était, avec Anna, le seul souvenir vivant de Silja. Je rouvris les yeux. Un éclat de lumière éblouissant s’abattit sur nous tous. Des cris de panique fusèrent dans la foule. Je fixai Erik. Il abaissa son arme, l’air inquiet. J’étais la seule à rester parfaitement calme, sachant que ma famille et le soleil étaient liés depuis toujours et qu’il ne pouvait qu’obéir à ma demande. Alors qu’Erik s’apprêtait de nouveau à pointer son arme vers Elsa, quelque chose le stoppa tout à coup. Il resta figé sur place, les yeux écarquillés de stupeur. Je levai les yeux vers le ciel. Les nuages s’étaient tous écartés. Je n’eus qu’à faire un léger geste de la main pour confirmer ce que je voulais. Au même instant, le corps tout entier du jeune homme se mit à trembler.  
« Qu’est-ce… Qu’est-ce qui se passe ? » s’écria-t-il.
Il s’embrasa soudainement sous les yeux horrifiés des autres Northuldra et hurla de douleur au milieu des flammes qui le rongeaient. Je restai calme et posai de nouveau mes mains sur mon bâton, contemplant la scène qui se déroulait sous mes yeux sans rien dire.
« Sorcière ! »
C’était certainement à moi qu’il s’adressait. Il avait enfin compris que tout ce qu’on lui avait raconté à mon propos n’était pas que des légendes, il y avait une part de vérité.
Je sentis tout d’abord la puissante douleur qui me transperça le ventre. Etrangement, je n’entendis la détonation qu’après. Mes jambes s’écroulèrent, je tombai à genoux. Je tentai de me relever en m’appuyant sur mon bâton. Mais impossible, on m’en empêcha. Je levai tant bien que mal les yeux vers Erik. Son corps n’avait plus aucune forme, ce n’était plus qu’un brasier.
« Tu n’as jamais été capable de rien Yéléna ! Regarde-toi. Tu vas mourir pitoyablement sans avoir réalisé quoi que ce soit de grand, comme un vrai chef devrait le faire. »
Je ne répondis rien. A quoi bon ? Ce n’était qu’une voix dans ma tête. Je n’avais pas besoin d’elle pour connaître ma véritable valeur. Mon père avait laissé la mort d’innocentes victimes derrière lui à cause de ses décisions. Moi au moins, j’avais sauvé le maximum de vies possible. C’était peut-être pour cela finalement que les esprits m’avaient désignée…
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La Reine des Neiges 3  - Page 9 Empty La Reine des Neiges 3 (Chapitre 105)

Lun 17 Juin 2024, 11:41
Chapitre 105
Kai
 
Je les avais vues ressortir du bureau d’Agnarr. Elles y avaient été toutes les trois. J’aurais pu condamner la serrure ou récupérer la clé comme je l’avais prévu à l’origine mais je m’étais rendu compte que ce n’était pas la chose à faire. Cela ne servait à rien de les empêcher de découvrir la vérité. C’était leur père, elles avaient le droit de savoir. Il y avait dans ce bureau toutes les réponses aux questions qu’elles se posaient, j’en étais convaincu. Bien qu’en possession de la clé depuis des années, je m’étais toujours refusé d’y entrer et de violer la vie privée du roi. Les seules que cela pouvait intéresser étaient ses filles et je les avais laissées faire. Quand elles étaient reparties chacune de leur côté, je m’étais discrètement avancé jusqu’à la porte du bureau. La clé était toujours dessus, enfoncée dans la serrure, comme une invitation à entrer à l’intérieur. J’avais posé mes doigts sur l’anneau et lui avais fait faire deux tours sur la gauche, verrouillant de nouveau la porte. J’avais ensuite enfoui la clé dans une des poches de ma veste et étais tranquillement reparti à travers le couloir. Soudain, Honeymaren était apparue, sortant de la chambre d’Elsa. Elle s’était précipitée vers moi, complètement affolée.
« Il faut que vous veniez ! Vite ! »
J’avais alors couru jusqu’à la porte de chambre de la princesse et m’étais brusquement arrêté sur le seuil de la pièce, m’autorisant simplement à passer la tête à l’intérieur. J’avais tout de suite compris.
« Vous devez aller chercher un médecin ! » s’était écriée la jeune Northuldra.
Je n’avais pas attendu une seconde de plus et m’étais précipité à travers tout le château pour le trouver à l’infirmerie.
***   
Nous étions deux à avoir été autorisés à rester : Honeymaren et moi. Les autres attendaient dans le couloir. Je pouvais entendre leurs voix qui s’inquiétaient et s’impatientaient. Cela faisait presque quatre heures que le médecin était arrivé et rien n’avançait. Elsa était allongée sur son lit, simplement recouverte d’un drap blanc, et souffrait de plus en plus. Ses cris de douleur à chaque contraction me serraient le cœur et me rappelaient ceux de sa mère, vingt-six ans auparavant. Je me sentais si impuissant. Honeymaren était à côté de moi et ne lâchait pas la jeune femme des yeux. Je devinais de l’anxiété dans son regard. Ce n’était pas seulement l’accouchement qui la terrorisait, il y avait autre chose mais qu’elles seules semblaient partager. La Northuldra retenait tant bien que mal les larmes qui lui montaient aux yeux. Je posai une main sur son épaule pour tenter de la rassurer. Elle sursauta et me lança un regard de détresse.
« Vous pouvez sortir prendre l’air si vous voulez, lui murmurai-je.
— Non, je reste là. Je ne quitterai pas cette chambre tant qu’Elsa…
— Ça commence ! hurla soudain le médecin. J’ai besoin de l’un de vous pour surveiller son rythme cardiaque et m’avertir en cas de problème. »
Honeymaren et moi nous regardâmes. La jeune femme se proposa immédiatement et alla se positionner à côté d’Elsa. Je jetai un rapide coup d’œil à cette dernière. Les contractions étaient de plus en plus fortes et de plus en plus régulières. Son corps tout entier se tordait de douleur. Je n’osais la dévisager trop longtemps, par pudeur. Elle avait le droit à son intimité, même lors de son accouchement.
« Il faut que vous poussiez à chaque contraction Votre Majesté », dit alors le médecin.
La jeune femme se mit à pleurer.
« Je… Je ne peux pas, sanglota-t-elle.
— Bien sûr que si vous pouvez. Pensez à votre bébé, vous devez le faire pour lui.
— Ce n’est pas… Ce n’est pas mon bébé. »
Le docteur lança un regard à la fois surpris et inquiet à Honeymaren. Elle ne lui dit rien.
« J’ai besoin de vous, dit-il en s’adressant de nouveau à Elsa. Je ne peux rien faire si vous ne m’aidez pas. »
La jeune femme plongea ses yeux remplis de larmes dans ceux du médecin en face d’elle. Elle hocha la tête sans dire un mot. Je la vis alors pousser de toutes ses forces, malgré la douleur qui l’assaillait. Tous ses muscles se contractaient en même temps sous nos yeux inquiets. Je n’avais jamais assisté à un accouchement, c’était la première fois. D’habitude, c’était la femme de chambre qui s’en occupait. Mais Elsa avait réclamé ma présence. J’étais le seul domestique qu’elle connaissait depuis suffisamment longtemps pour me confier une telle tâche.
Une contraction plus violente que les autres la fit hurler et déclencha une nouvelle crise de larmes. La jeune femme referma brusquement ses jambes par réflexe. Je détournai le regard, de plus en plus mal à l’aise, et posai mes yeux sur la fenêtre. Le Soleil était en train de se coucher, laissant de jolies trainées rose sur le ciel.
« Venez m’aider à maintenir ses cuisses ouvertes, me cria alors le médecin, me tirant de ma rêverie.
— Vous êtes sûrs ? Je ne…
— Vite ! »
Je me précipitai vers Elsa, posai mes mains sur ses genoux et les écartai. Elle tenta de me résister mais lâcha rapidement prise.
« Continuez s’il vous plaît. »
Elle poursuivit tous ses efforts jusqu’à ce que le médecin s’écrie qu’il commençait à voir le bébé. Une pensée me traversa soudain. Et si cet enfant avait les mêmes pouvoirs que sa mère, comme le redoutaient certains domestiques ? Cela ne changerait rien, je veillerais sur lui comme j’avais veillé sur Elsa, quoi qu’il m’en coûte.
« Elle commence à fatiguer ! » cria Honeymaren qui tenait la main de la jeune femme.  
Le médecin leva les yeux d’un air inquiet.
« Non, pas maintenant. Vous devez tenir bon Votre Majesté, vous avez fait presque la moitié du travail. Je ne pourrai pas vous aider tant que la moitié du corps ne sera pas sortie. »
Je sentais qu’Elsa ne s’opposait plus à moi. Ses jambes se relâchaient, complètement abandonnées par leur force. Mon cœur se serra dans ma poitrine. Je me sentais si impuissant, je ne pouvais rien faire pour elle, à part peut-être…
« Pensez à votre mère, lui dis-je alors, elle a toujours tout donné pour ses deux filles. Je suis sûr qu’au fond de vous, vous vous dîtes que vous ne pouvez pas abandonner maintenant, pas après avoir passé neuf mois à attendre ce bébé. »
Elle inspira profondément entre deux sanglots et ferma les yeux.
« Veillez à ce qu’elle ne perde pas connaissance », dit le médecin à Honeymaren. 
Elsa ne réagit pas pendant plusieurs secondes. C’était comme si elle essayait d’oublier tout ce qui l’entourait pour ne plus faire qu’un avec elle-même.
« Il faut que vous vous dépêchiez Madame… s’exaspéra le docteur. On ne peut pas laisser le bébé dans cette position, c’est trop dangereux. Si vous ne réagissez pas rapidement, je serai obligé de passer à l’incision… 
— Laissez-la faire, faites-lui confiance, rétorquai-je. Elle sait ce qu’elle fait. Enfin, je crois… »
Je la sentis reprendre des forces et recommencer une nouvelle fois ce qu’on lui demandait de faire. Elle poussa pendant de longues minutes jusqu’à ce que les épaules du bébé soient complètement sorties, permettant au médecin d’accompagner la jeune femme dans ses derniers moments d’efforts intenses. Un cri de nouveau-né emplit alors la pièce. Elsa avait réussi, elle était allée jusqu’au bout. Je lançai un regard au minuscule bébé que tenait le docteur entre ses mains. Il était encore tout sanguinolent et recouvert de liquide amniotique.
« Prenez les ciseaux dans ma malette si vous voulez bien », me dit alors le docteur.
J’acquiesçai et obéis. Il n’eut pas besoin de me le proposer, je coupai moi-même le cordon qui liait encore la mère et son enfant, les larmes aux yeux. Le médecin plongea délicatement le nourrisson dans la bassine d’eau tiède qu’il avait apportée et le nettoya en quelques minutes. Il hurlait et pleurait tout en se tortillant. Je ne pus voir qu’une chose : c’était un petit garçon. Quand il fut propre, je pris une serviette et l’enroulai autour de lui. Je le conservai quelques temps dans mes bras pour le regarder. Le dernier rayon du Soleil s’infiltra dans la pièce et se posa sur son minuscule visage. L’enfant se mit à gesticuler de plus belle et ne se calma que lorsque je le posai sur sa mère.  
« Je vous présente votre fils », murmurai-je.
Honeymaren sourit et caressa doucement la tête de l’enfant. Il poussa un minuscule gazouilli quand ses doigts l’effleurèrent. Elsa, elle, ne lui lança pas un regard. Je tournai la tête. Le médecin, qui estimait avoir accompli sa mission, venait d’ouvrir la porte de la chambre d’Elsa. Les deux premières personnes à entrer furent Kristoff et Anna. Cette dernière se précipita immédiatement vers sa sœur.
« Comment tu vas ? J’ai eu si peur, j’ai cru que…
— Doucement, elle a besoin de se reposer, fit le docteur en posant une main sur l’épaule de la jeune femme. Vous pourrez la serrez dans vos bras et faire autant de bisous que voudrez au bébé demain. Pour l’instant, ils ont tous les deux vécu une épreuve très difficile et ils ont besoin de repos.
— Ils ?
— C’est un petit garçon. »
Anna alla alors rejoindre Kristoff au fond de la pièce. Ils regardèrent la scène qui se déroulait sous leurs yeux sourire aux lèvres et main dans la main. Je vis ensuite un jeune homme entrer dans la chambre. Daven. Il était suivi par plusieurs domestiques. Je m’approchai d’eux. Tous regardèrent longuement le bébé qui était posé sur Elsa.
« De quelle couleur sont ses cheveux ? me demanda-t-on.
— Bruns », répondis-je.
J’entendis des soupirs de soulagement autour de moi.
« Heureusement, fit une femme, s’ils avaient été blancs ça aurait été…
— Exactement pareil », l’interrompit Daven d’un ton ferme.
Je lançai un regard surpris au jeune homme.
« Quoi ? C’est pas vrai ?
— Si, si… Je suis simplement étonné par votre réaction.
— Faut savoir écouter c’qu’on nous dit m’sieur. J’ai p’t-être fait une erreur de jugement, j’le reconnais. Alors j’essaye d’faire comprendre aux autres qu’ils ont parfois tord de considérer quelqu’un uniquement en fonction de c’qu’on leur raconte et du premier regard qu’ils portent sur cette personne. »
Je souris. Il avait fini par comprendre.
« J’aimerais que vous sortiez tous s’il vous plaît, dit alors le médecin. La princesse Elsa doit se reposer. »
Quelques uns protestèrent mais l’on finit tous par se retirer, excepté Honeymaren qui restait au chevet de la jeune femme. Le docteur ramassa ses affaires et partit également tout en lançant :
« Si vous avez besoin de moi, je reste à votre disposition. »
Alors que je  m’apprêtai à fermer la porte, étant le dernier à sortir, je me rappelai que j’avais oublié de demander le plus important.
« De quelle couleur sont ses yeux ? » m’écriai-je alors.
Honeymaren se pencha au-dessus du bébé et répondit :
« Marron ! »
Elsa sembla surprise et, pour la première fois, je la vis poser son regard sur son enfant.
« Comme son père… » souffla la Northuldra en déposant un baiser sur le front de la jeune femme.
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La Reine des Neiges 3  - Page 9 Empty La Reine des Neiges 3 (Chapitre 106)

Mer 19 Juin 2024, 13:08
Chapitre 106
Iduna
 
La nuit commençait à tomber, il faisait de plus en plus froid. Nous approchions, je le sentais, mais je ne voyais toujours rien à l’horizon. Mes mains posées sur le bastingage depuis plus d’une demi-heure étaient gelées.
« Votre Majesté, vous devriez retourner à votre cabine. Le vent se lève, ce n’est pas prudent de rester sur le pont. »
Je ne répondis rien. L’avant du bateau tanguait depuis plusieurs minutes déjà et les vagues étaient de plus en plus fortes, mais cela ne m’effrayait pas. Je fixais la mer, imperturbable. Des gouttes d’eau salée venaient régulièrement s’écraser sur ma peau et le vent défaisait petit à petit mon chignon. Je n’avais qu’une idée en tête, trouver Ahtohallan, et je m’y tiendrai, coûte que coûte.
« Iduna ! »
Mes doigts se resserrèrent si fort autour de la rambarde que mes ongles rentrèrent dans la paume de ma main.
« Iduna ! Qu’est-ce que tu fais ? Tu vas attraper la mort si tu restes ici ! »
Je sentis une main puissante se poser sur mon épaule. Toute la chaleur qu’elle contenait se diffusa à travers mes vêtements.
« Viens, nous devons rester à l’intérieur, c’est plus prudent. »
Je tournai la tête. Le visage inquiet d’Agnarr n’était qu’à quelques centimètres du mien. Soudain, une goutte vint s’écraser sur son nez, puis une autre dans ses cheveux. Une pluie glacée ne tarda pas à s’abattre sur nous. Il enroula ses bras autour de ma taille et me força à lâcher la rembarde. Je ne résistai pas et le suivis dans l’escalier qui menait aux cabines. Une violente secousse me propulsa contre Agnarr. Il me rattrapa au dernier moment et m’aida à me redresser.
« Ça va ? » me demanda-t-il, inquiet.
J’hochai la tête comme toute réponse. Deux marins nous croisèrent dans le couloir.
« Restez bien à l’abri, il devrait y avoir une tempête… » nous lança l’un d’entre eux.
Agnarr ouvrit la porte de notre cabine et me fit signe de passer la première. J’entrai et m’assis immédiatement sur mon lit. Ce n’était qu’une petite pièce tout juste assez grande pour y mettre deux lits individuels et quelques meubles de rangement. Il n’y avait qu’un hublot et il y faisait toujours très sombre, ce pourquoi je n’aimais pas y rester enfermée. Agnarr attrapa la petite lampe à huile posée sur la table de nuit et l’alluma.
« Regarde-toi… Tu es trempée ! dit-il en rangeant une mèche de cheveux mouillés derrière mon oreille.
— Tu es dans le même état que moi », répliquai-je.
Il se jeta un rapide coup d’œil dans le miroir au fond de la pièce.
« Nous devrions… Nous devrions nous changer avant d’attraper froid. »
Je le vis farfouiller dans un placard et en ressortir une chemise et une veste propres. Je le regardai retirer un à un ses vêtements mouillés et ne pus détacher mes yeux de lui quand il fut torse nu. Je ne le voyais que de dos, mais contempler ses larges épaules me suffisait.  
« Tu ne te changes pas ? » fit-il en se retournant brusquement.
Je détournai immédiatement le regard et rougis, gênée qu’il m’ait surprise. Mes yeux se posèrent alors sur le hublot. Des filets d’eau recouvraient la vitre, nous empêchant de voir quoi que ce soit à l’extérieur. La pluie redoublait en puissance, je pouvais l’entendre s’abattre en torrent sur le pont au-dessus de nos têtes.
« Si… Si, bien sûr », répondis-je enfin en me levant.
Je pris la première robe que je trouvais et retirai celle que je portais. Je devinai le regard d’Agnarr posé sur moi. Mes mains se mirent à trembler alors que je défaisais les derniers liens qui retenaient mes vêtements. Pourquoi tu réagis comme une adolescente ? Ce n’est pas la première fois que nous nous retrouvons seuls dans une pièce bon sang, loin de là ! pensai-je. Je le vis se lever à travers le miroir et s’approcher de moi. Il posa ses mains sur mes hanches et me serra contre lui.
« Je ne savais pas que tu en portais toujours… me murmura-t-il.
— De… De quoi tu parles ? »
Ses doigts se glissèrent dans mon dos, entre les lanières de mon corset. Il les desserra les unes après les autres.
« S’il te plaît, arrête… » soufflai-je.
Il ne m’écouta pas et continua jusqu’en haut de mon dos.
« Agnarr ! »
Cette fois, il se stoppa immédiatement et me lança un regard étonné.
« Excuse-moi, je pensais que…
— Non. Tu ne comprends pas ce qui est en train de se passer…
— Si je sais, nous sommes là pour Elsa… »
Il m’aida à enfiler ma nouvelle robe, sans rien dire de plus.
« Ce n’est pas de ça dont je parlais… soupirai-je. Si je ne voulais pas que tu viennes c’est parce que… j’ai eu une vision. Une vision de notre bateau se faisant emporter par les vagues.
— Iduna… ce n’était peut-être qu’un mauvais rêve et pas une vision.
— Mes rêves sont des visions Agnarr. Depuis que je suis arrivée à Arendelle, je ne fais que ça. Je pressens tout ce qui va nous arriver. Je te l’ai déjà dit mais tu ne veux pas me croire. »
Le bateau tangua brusquement sur la droite. Nous fûmes tous les deux projetés contre l’une des parois de la cabine. Des cris retentirent au-dessus de nos têtes. C’était l’équipage qui hurlait.
« Si je ne voulais pas te croire, je ne serais pas là avec toi, cria Agnarr pour couvrir le tumulte. C’est parce que je sais ce qui va nous arriver que je suis venu. Nous nous sommes dits oui pour le meilleur et pour le pire tu te souviens ? Ce n’est pas maintenant que je vais rompre ma promesse. Si tu vas quelque part, je viens avec toi, quelque soit le danger.
— Mais nos filles…
— On doit le faire pour elles tu te souviens ? On leur doit la vérité, on ne peut pas laisser Elsa dans l’ignorance et dans la souffrance jusqu’à la fin de sa vie. Tu nous vois emportés par les flots n’est-ce pas ? Ce ne sera peut-être qu’à notre retour, après que l’on se soit rendu sur Ahtohallan. Si c’est le cas, tu pourras lui faire connaître la vérité n’est-ce pas ? »
J’acquiesçai, le regard perdu dans le vague. Je n’en savais pas plus sur ma vision, il n’avait peut-être pas tord. Agnarr m’attrapa par la main et me rapprocha de lui. Je le sentis glisser son visage dans le creux de mon cou et y déposer de tendres baisers. Je passai mes doigts entre les siens et serrai sa main le plus fort possible contre mon ventre. Nos alliances s’entrechoquèrent. Nous étions liés l’un à l’autre, il avait raison, et nous le serions jusqu’au bout. Les larmes me montèrent aux yeux. C’était peut-être les derniers instants que je passais avec lui. Je ne voulais pas les gâcher. Une puissante lumière éclaira brusquement la pièce. Nous nous retournâmes en même temps et regardâmes par le hublot. L’eau qui ruisselait dessus nous empêchait toujours de distinguer correctement ce qu’il se passait à l’extérieur. Soudain, un grondement sourd retentit. Il y avait de l’orage.
« Non… » murmurai-je.
Je m’échappai des bras d’Agnarr, ouvris la porte de la cabine et partis en courant dans le couloir.
« Iduna ! Qu’est-ce que tu fais ? Reviens ! »
Il y avait de l’eau partout, les planches en étaient recouvertes et commençaient à être poisseuses. J’attrapai ma robe et montai les escaliers le plus rapidement possible. Les vagues étaient bien plus importantes que quelques minutes auparavant et le pont était petit à petit submergé. Les marins couraient dans tous les sens et ne me remarquèrent pas.
« Affalez la grand voile et hissez-moi les tourmentins ! Bon sang, pourquoi ce n’est pas encore fait ? » hurla le capitaine.
Je traversai d’un pas rapide le pont, jusqu’à arriver à l’extrémité avant du bateau. Je regardai l’horizon. Il faisait sombre et les vagues de plus en plus hautes m’empêchaient de voir quoi que ce soit. Soudain, une nouvelle secousse me fit perdre l’équilibre. Je fus projetée contre le bastingage et une partie de celui-ci céda sous mon poids. Je tentai de me rattraper à un morceau toujours intact de la rembarde mais l’eau salée l’avait rendue bien trop glissante. Mes doigts dérapèrent et je faillis passer par-dessus bord quand une main puissante m’attrapa par le poignet.
« Iduna ! »
Je levai les yeux. C’était Agnarr qui m’avait retenue au dernier moment. Il parvint à me remettre immédiatement debout et m’attira contre lui.
« Qu’est-ce qui te prend ? Tu es complètement folle ! » hurla-t-il.
Je fondis en larmes. Une première vague déferla sur le pont, fracassant une nouvelle fois le bastingage. Un marin fut happé et emporté dans les flots. Ses cris furent rapidement masqués par le grondement du tonnerre. 
« Un homme à la mer ! cria un autre membre de l’équipage.
— On ne peut plus rien faire pour lui, laissez-tomber ! » répondit le capitaine.
Je vis deux hommes remonter en courant l’escalier qui menait aux cabines. L’un d’eux glissa. Son corps tomba sur les marches et roula jusqu’en bas. Le second se mit à hurler :
« On prend l’eau ! La cale est submergée et les hublots de certaines cabines n’ont pas tenu le choc ! »
Le capitaine tourna la tête dans notre direction et nous remarqua enfin.
« Votre Majesté, me dit-il, nous ne pouvons pas continuer, nous devons faire demi-tour et trouver le port le plus proche pour espérer s’en sortir…
— Regardez ! » cria un marin.
Je suivis des yeux la direction qu’il pointait du doigt. Au loin, on pouvait voir une île apparaître. Elle ressortait sur le fond noir du ciel et de la mer. Elle recouverte de glace bleutée qui luisait à chaque fois qu’un éclair zébrait le ciel.
« Ahtohallan est la source de sa magie… » soufflai-je.
La main d’Agnarr se posa sur mon épaule.
« Il faut qu’on aille jusqu’au bout, pour Elsa. »
J’acquiesçai.
« Maintenez le cap ! » hurlai-je au capitaine.
Je vis son visage se décomposer, mais il m’obéit malgré tout. La proue du bateau était régulièrement déviée par la puissance du vent et nous avions de plus en plus de mal à nous maintenir debout, tant nous étions secoués. Mais je parvenais à maintenir mes yeux rivés sur la petite île de glace. Elle était bien réelle. Je sentais mes cheveux mouillés collés contre mon visage. Je levai la tête. Les nuages noirs du ciel ne cessaient de grossir. L’orage ne faisait que se renforcer, déchaînant un peu plus la mer.
« On n’y arrivera pas, les vagues sont trop hautes », murmurai-je.
Le bateau pencha brusquement en avant et dévala plusieurs mètres. Ahtohallan disparut soudainement. Il n’y avait plus qu’un mur d’eau devant mes yeux.
« Reculez Votre Majesté ! » m’hurla le capitaine.
Je fis un pas en arrière et me figeai sur place. Nous étions au pied d’une vague immense.
« Iduna ! »
Je tournai la tête.
« Agnarr ! » criai-je en venant me blottir dans ses bras.
Il me serra de toutes ses forces contre lui.
« Je t’aime, souffla-t-il.
— Je suis désolée… »
Un craquement sourd retentit. Le bateau entier tangua et ne se redressa plus jamais.
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La Reine des Neiges 3  - Page 9 Empty La Reine des Neiges 3 (Epilogue)

Mer 19 Juin 2024, 13:14
Epilogue

 
Je ne pensais pas revenir et pourtant je le fais. Je me suis jurée de ne plus me rendre à Ahtohallan, elle ne conserve que le passé et il me faut aller de l’avant. Mais je n’ai pas pu m’en empêcher, il y a encore une chose dont je ne suis pas sûre. Alors je marche à travers le long corridor de glace qui amène au centre du glacier. La nuit est tombée dehors, je n’ai pas beaucoup de temps, je dois faire vite avant d’être prise par le froid et de ne plus pouvoir rentrer. J’ai quelque chose dans ma main. Un morceau de tissu. Je l’ai gardé pendant tout ce temps. Il y a une phrase écrite dessus :
FERME LES YEUX ET LA REPONSE A TA QUESTION APPARAÎTRA DANS TON CŒUR
C’est ce que j’ai fait, j’ai fermé les yeux et j’ai senti sa présence. Plus je me rapproche, plus je la sens. Elle est là, quelque part. Le cœur du glacier s’ouvre alors à moi. Toutes les visions et les souvenirs de ma mère y sont toujours. Tout est exactement comme je l’avais laissé. Je me tourne dans toutes les directions et la cherche désespérément du regard.
« Silja ! Silja, tu es là ? »
Pas de réponse. Elle est forcément quelque part, elle ne peut être qu’ici, j’en suis sûre. Mon cœur ne peut pas me tromper. Je lève les yeux vers l’immense paroi de glace du fond. Le visage de ma mère y est toujours. Ses yeux et son sourire reflètent de la tristesse. Je sais qu’elle aurait voulu m’accompagner le plus loin possible pour avoir la possibilité d’enfin connaître ce qui allait advenir dans ma vie. Cela n’aura jamais été possible, Silja l’aura fait pour elle. Je remarque soudain que le regard de ma mère n’est pas dirigé vers moi, c’est autre chose qu’elle fixe. Quelque chose derrière moi. Je me retourne et vois immédiatement de quoi il s’agit.
« Silja… »
Ce n’était qu’un murmure, je n’ai pas pu le dire plus fort. La vieille femme n’est plus de mon monde, elle est incrustée à tout jamais dans la glace. Ce n’est plus qu’un souvenir, elle aussi. Je passe mon doigt sur la surface gelée sur laquelle est imprimée sa silhouette. Son visage semble tendu et ses yeux sont fermés.
« Tu sais, dis-je alors, ma mère a tenté de revenir te voir… Tu lui manquais, la forêt enchantée aussi. Mais elle n’y est jamais parvenue… Ce n’était pas de sa faute, tout ce qu’elle voulait c’était la paix. Elle t’aimait tu sais, elle t’aimait beaucoup, comme tout enfant aime sa mère. Ce n’est pas à elle que tu dois en vouloir, c’est à la guerre qui vous a séparées… »
Je sens un vent glacial s’engouffrer à l’intérieur de la petite île. Une tempête de neige risque bientôt de se lever. Je dois partir le plus vite possible, avant d’être coincée sur Ahtohallan.
« Je t’aime grand-mère… »
Je fais quelques pas vers la sortie et me retourne pour lui lancer un dernier regard. Elle sourit et a les yeux ouverts. Ils sont bleus. Comme ceux de ma mère, et comme les miens.
***
Je me tourne vers le côté opposé du lit, toujours perdue dans mes pensées. Il est tôt. Le soleil ne s’est pas encore tout à fait levé mais le ciel est déjà suffisamment clair pour me laisser apercevoir distinctement chacun des objets de la pièce dans laquelle je me trouve. Le petit bureau en face du grand lit, la penderie à ma gauche, le miroir au fond… Je me redresse légèrement dans l’espoir d’apercevoir les aiguilles de la petite horloge posée sur le bureau. Cinq heures cinquante. Je me laisse retomber dans le lit, enfonçant ma tête dans mon oreiller. Aucun bruit ne vient troubler ce doux instant de silence. J’observe longuement le plafond et les murs de bois. Je passe doucement ma main contre celui derrière ma tête. Sentir la rugosité des planches sous mes doigts me plait. Je baisse les yeux et souris en contemplant la masse de cheveux bruns d’Honeymaren à quelques centimètres de mon visage.
Soudain, un cri déchirant brise le silence. Un cri plaintif, mêlé à des pleurs. Je me lève précipitamment et me dirige en courant vers la provenance du bruit. A peine ai-je poussé la porte m’en séparant que tout s’arrête, faisant retomber l’endroit dans le calme. Seul un petit gazouillis s’échappe du berceau au centre de la petite chambre. Je m’immobilise dans son entrée et regarde par la fenêtre se trouvant face à moi. Les premiers rayons du Soleil pénètrent dans la pièce. Ils l’ont désigné dès sa naissance, c’est lui leur nouveau descendant. Je souris. Une nouvelle journée commence.



FIN 


Merci à celles et ceux qui auront pris le temps de me lire Smile
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