La Reine des Neiges 3
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La Reine des Neiges 3 (Chapitre 43)
Ven 22 Sep 2023, 20:13
Chapitre 43
Kristoff
Cela faisait bientôt dix minutes qu’Anna et Elsa avaient disparu dans le couloir, me laissant seul avec Sven dans le salon. J’avais entendu leurs voix pendant un moment mais depuis quelques secondes, tout était calme. Trop calme. Je me levai, inquiet, et ouvris la porte. Les deux jeunes femmes étaient là, se tenant face à face sans un mot. Je n’osais m’avancer davantage, évitant ainsi de me retrouver au milieu du conflit naissant. Elsa croisa ses bras par-dessus sa poitrine et se détourna d’Anna. Celle-ci restait figée sur place, sans un mot, sans un geste à l’adresse de sa sœur. Je compris. Elle était au courant. Elsa lui avait dit.
La température avait subitement chuté. L’ancienne reine d’Arendelle semblait essayer d’étouffer ses émotions et ses sentiments face au visage déconfit de sa sœur. En vain. Ses mains tremblaient, trahissant une soudaine peur qui s’emparait d’elle. Celle du rejet. Ses doigts s’enfonçaient dans la chair de ses bras toujours croisés, tentant par ce procédé de contrôler la neige et le givre apparaissant autour de nous. Je la voyais cette fois-ci perdre son sang froid sous mes yeux.
Face à ce vieux réflexe de la jeune femme, Anna avala difficilement sa salive avant d’arriver à prononcer en direction de son aînée :
« Dis-moi simplement qui c’est… »
Elsa ne se retourna pas, n’osant pas la regarder.
« Honeymaren », chuchota-t-elle, au bord des larmes.
Le froid se fit plus rigoureux. Nos haleines formaient un petit nuage de vapeur d’eau à chacune de nos expirations. Je pris Anna dans mes bras. Je ne m’attendais pas à ce qu’elle soit aussi choquée par ces propos. Elsa non plus visiblement. La jeune femme semblait vivre ce peu de réaction comme une déchirure intérieure, ne se sentant pas soutenue par sa propre sœur. Elle voulut s’éloigner, ne supportant plus ce mutisme. Elle n’eut pas le temps de faire un pas. La main d’Anna saisit brusquement l’une des siennes et la retint.
« Quels que soient tes choix, tu es ma sœur et je t’aime », dit-elle posément en regardant Elsa dans les yeux.
L’ancienne reine lui sourit et la serra contre elle. Je vis qu’elle pleurait sur l’épaule de sa sœur. Ce n’était pas des larmes de tristesse mais de soulagement. Elle n’était plus seule.
Elsa finit par regagner sa chambre, me laissant seul dans le couloir avec Anna.
« Je ferais mieux de rester un petit moment avec elle… Tu ne m’en veux pas ? me demanda la jeune femme.
— Bien sûr que non. Tu me rejoindras plus tard », dis-je en caressant sa joue.
Elle me sourit, se mit sur la pointe des pieds et m’embrassa tendrement avant de partir retrouver sa sœur.
***
Retrouver ma chambre me procura un sentiment de soulagement. J’étais de nouveau dans un cadre familier, entouré d’objets et de personnes que je connaissais et que j’aimais. Bien sûr, il y avait Ryder dans la forêt enchantée. Mais j’avais été vexé qu’il ne m’avoue pas son attirance pour Elsa. Je le connaissais comme mon propre frère, j’avais bien remarqué que ses réactions à mes questions sur le sujet trahissaient ce qu’il ressentait pour elle. Il n’avait jamais osé nier le moindre de mes propos concernant mes hypothèses sur Elsa et lui en me regardant droit dans les yeux et en m’affirmant sincèrement le contraire. J’étais convaincu qu’il l’aimait. Sa colère après la découverte de l’homosexualité d’Honeymaren ne faisait que cacher sa déception face à celle de l’ancienne reine. Ryder devait savoir tout aussi bien que moi qu’une éventuelle relation avec la jeune femme était inenvisageable. Il tentait donc de dissimuler sa profonde tristesse à travers le rejet, la haine et le dégoût qu’il montrait face au couple que formaient Elsa et sa sœur. Mais pourtant, il doit lui dire qu’il l’aime, pensai-je. Tant qu’il ne le lui aura pas avoué, il n’arrivera pas à passer à autre chose.
***
Je soupirai en attendant patiemment Anna dans mon lit. Allongé sur le dos, je mis mes mains sous l’oreiller derrière ma tête pour me surélever légèrement. Mes doigts effleurèrent soudain un morceau de papier.
« Je t’avais oublié toi », murmurai-je en l’attrapant.
Anna ne l’avait donc pas trouvé… Je fus subitement pris d’un sentiment de déception. Se pouvait-il que je n’aie pas réellement manqué à la jeune femme ? Qu’elle n’ait pas songé, ne serait-ce qu’une fois, à venir dans ma chambre en mon absence ? Je dépliai machinalement le bout de papier, sans vraiment penser à ce que je faisais. Soudain, j’aperçus une écriture aux lettres arrondies et soignées, bien différente de la mienne. Je me redressai vivement en position assise, le cœur battant.
Si tu te retrouves à lire ce mot, c’est que tu devais certainement être désespéré au point de penser que tu ne m’as pas manqué, que je ne suis pas venue chercher du réconfort dans ta chambre, et tu t’attendais à retrouver ton écriture sur ce papier… Eh bien, j’ai l’honneur de t’annoncer que si, si, je suis bien venue pleurer dans ton oreiller dès le premier soir !
PS : Promis je ne suis pas venue tous les soirs… juste tous les jours ! Tu devras te débrouiller pour te débarrasser de moi !
Je t’aime !
Anna
A peine eus-je fini ma lecture que la porte de ma chambre s’ouvrit. Anna entra, une bougie et une robe de nuit à la main.
« Oh ! Excuse-moi de te déranger. Je peux te laisser encore un petit moment avec le morceau de papier si tu veux ! me taquina-t-elle en me voyant serrer son petit mot dans ma main.
— Je pense que ce n’est pas la peine. Je préfère rester avec son auteure ce sera un lien plus direct ! »
Anna gloussa. Elle était si mignonne quand elle riait ainsi. Je mourrais d’envie de me lever pour aller l’embrasser mais me retins.
« Qu’as-tu fait de ma lettre ? » lui demandai-je alors.
Je la vis sortir une feuille soigneusement pliée de la poche de sa longue robe.
« Je l’ai précieusement gardée avec moi ».
Je souris. La jeune femme déposa la bougie sur le haut de la cheminée et alla derrière le paravent, emportant sa robe de nuit avec elle. Je la vis y accrocher un à un les vêtements qu’elle portait jusqu’alors, et devinai qu’elle se déshabillait. Je rougis quand j’aperçus son corset se joindre au reste de ses habits déjà retirés.
Quelques minutes plus tard, Anna ressortit de derrière le paravent, vêtue d’une robe de chambre vert pomme qui lui allait à ravir.
« Pourquoi me regardes-tu comme ça ? me demanda-t-elle en riant et voyant que je ne la lâchais plus du regard.
— Je ne sais pas, je me dis que j’ai beaucoup de chance de t’avoir. »
Elle me fit un magnifique sourire avant de se positionner devant l’immense miroir de ma chambre. Elle retira chacune des épingles qui retenaient son chignon tressé. Bientôt, deux longues nattes s’en dégagèrent et tombèrent le long de son dos. Anna les ramena d’un geste sur le devant de ses épaules. Enfin libérée de tous les artifices qu’elle était forcée de porter à longueur de journées, elle vint s’allonger à côté de moi. Je la pris dans mes bras et déposai un baiser dans ses cheveux. Elle sentait si bon, son odeur m’avait tant manquée. Je saisis une de ses tresses et l’enroulai doucement autour de mon index. La jeune femme me regarda faire silencieusement.
« Pourquoi as-tu cru qu’Elsa et moi puissions être en couple ? fis-je posément, brisant le silence.
— C’est à cause de ce rêve… murmura-t-elle.
— Quel rêve ?
— Celui que j’ai fait il y a plus d’une semaine maintenant… Tu embrassais ma sœur sous mes yeux et vous ne sembliez pas me remarquer… Cela paraissait tellement réel…
— Anna… Ce n’était qu’un rêve…
— Oui mais vous aviez l’air proches quand vous êtes rentrés tout à l’heure. Vous sembliez me cacher quelque chose alors j’ai pensé que…
— Eh, ça n’avait rien à voir tu le sais bien, la rassurai-je en caressant doucement sa joue. Jamais je ne pourrais te faire une chose pareille. Je t’aime bien trop pour ça ».
Elle me sourit et appuya un peu plus son visage contre ma main. Je l’embrassai alors tendrement, ne pouvant plus résister à la tentation. Quand nos lèvres finirent par se séparer, je la regardai, plongeant mon regard dans le sien. Ses grands yeux bleus étaient magnifiques. Ses pupilles semblèrent se dilater et je réussis à distinguer une lueur en elles que je n’avais jamais remarquée jusqu’alors.
Je me mis au-dessus d’Anna et dégageai une mèche de cheveux de son visage, la calant derrière son oreille. Nos baisers reprirent. Plus intenses et plus longs les uns que les autres. Sans vraiment contrôler mon mouvement, ma main dérapa de son épaule et effleura sa poitrine. La jeune femme se stoppa net, interrompant cet instant. Elle se dégagea de mon étreinte et se mit sur le côté, me tournant le dos.
« Je préfère que l’on s’arrête là, murmura-t-elle. S’il te plait. »
Je ne compris pas sa réaction.
« Comme tu veux… De toute manière nous ne pouvions pas aller plus loin », remarquai-je.
Sans vraiment écouter ma réponse, Anna se leva, récupéra ses affaires et se dirigea vers la porte. Avant qu’elle ne parte, je la rejoignis et pris sa main dans la mienne.
« Je suis désolé si j’ai fait quelque chose qu’il ne fallait pas », m’excusai-je, inquiet de son comportement soudainement froid.
Elle se tourna vers moi, me regarda quelques instants sans un mot, puis finit par déposer un léger baiser sur ma joue avant d’ajouter :
« Bonne nuit ».
Sur ce, la jeune femme partit, me laissant seul dans l’embrasure de la porte. Je la regardai s’éloigner et entrer dans la chambre d’Elsa pour y passer la nuit.
« Bonne nuit », soupirai-je alors qu’elle était déjà trop loin pour m’entendre.
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Re: La Reine des Neiges 3
Ven 22 Sep 2023, 20:30
Je rage quit officiellement...
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La Reine des Neiges 3 (Chapitre 44)
Ven 29 Sep 2023, 21:36
Chapitre 44
Ryder
« C’est une très belle femme. Ne me dis pas que tu as toujours été insensible à son charme ».
Les paroles de Kristoff ne quittaient plus mon esprit. Elles avaient trotté dans ma tête durant toute la nuit et ne cessaient de me hanter. Jamais je n’avais autant douté de moi-même, malgré les périodes difficiles que j’avais vécues. Mais pourquoi ? Je ne savais pas véritablement, je n’avais jamais ressenti de tels sentiments contradictoires. La colère provoquée par la découverte de la relation d’Honeymaren et d’Elsa ne s’était pas dissipée. Je fulminais intérieurement à chaque fois que je me remémorais l’étreinte des deux jeunes femmes sous mes yeux désemparés. Était-ce seulement de la colère cependant ? Cette profonde déchirure qui m’avait scindé la poitrine en deux en les surprenant me faisait croire que non. Une blessure cachée mais qui laissait pourtant une plaie grande ouverte en moi, une entaille ne voulant et ne pouvant pas se refermer malgré toutes mes tentatives.
Depuis le départ d’Elsa, ma sœur semblait anéantie. Elle n’avait plus aucune motivation pour quoi que ce soit et paraissait bouleversée, voire blessée, elle aussi. Par quoi ? Je l’ignorais. Je tentais de faire preuve de compassion auprès d’elle mais impossible de rester sincère en sa présence. Je préférais l’éviter le plus possible pour ne pas à avoir à supporter son regard triste. Les sourires que nous nous échangions n’étaient qu’une façade voulant cacher nos véritables sentiments l’un envers l’autre. Honeymaren avait été profondément touchée de mes mots et de ma réaction après la découverte de sa relation avec Elsa, je le voyais bien. Je ne m’étais pas excusé et ne comptais pas le faire. Tout ce que j’avais dit, je le pensais réellement. J’avais certes été dur mais j’étais le seul de nous deux qui soit vraiment réaliste. Tout couple homosexuel était interdit et détruit immédiatement. Cela avait toujours été comme cela pourquoi ma sœur pouvait-elle imaginer que cela changerait pour Elsa et elle ? Son perpétuel optimisme et sa naïveté me déroutaient parfois. Elle ne pouvait imaginer à quel point je me faisais violence pour garder toute cette histoire pour moi. Je savais que si l’on apprenait leur relation, je pouvais les perdre toutes les deux.
Au fond de moi, j’étais heureux qu’elles soient enfin éloignées l’une de l’autre. La torture psychologique que provoquait d’ordinaire la vue de leur couple, ne m’était désormais plus imposée – du moins jusqu’au retour de l’ancienne reine. Mais cette joie coupable s’accompagnait d’un manque. Le même manque dont souffrait Honeymaren. Le manque d’Elsa.
***
J’avais quitté ma petite cabane très tôt, essayant de rester le plus silencieux possible pour ne pas réveiller ma sœur. Je n’avais pas pris le temps de manger – toute cette histoire m’avait coupé l’appétit – et étais directement sorti. Bien qu’il ne soit que cinq heures du matin, la chaleur extérieure m’avait paru écrasante, m’obligeant à retirer aussitôt la veste que je portais.
Je patientais à présent au bord du ruisseau non loin du camp Northuldra. Mon troupeau s’y désaltérait calmement pendant que je comptais chacune de mes bêtes. Les rennes avaient l’air épuisé. La plupart d’entre eux ne se mouvaient que très lentement, s’arrêtant régulièrement pour boire ou s’allonger dans l’herbe à moitié desséchée. Ce soudain épuisement général m’inquiétait. Les animaux faiblissaient à vue d’œil et souffraient terriblement de la chaleur. Cela faisait plusieurs jours que je n’avais pu leur trouver une zone de pâturage dans laquelle ils pouvaient espérer trouver quelque chose à manger. A vrai dire, aucun éleveur ne trouvait de quoi nourrir son troupeau dorénavant. Cela devenait de plus en plus problématique. Les rennes ne pourraient tenir longtemps dans ce climat alliant chaleur et manque de nourriture. Cela m’inquiétait terriblement. J’avais l’impression de devoir assister à la décadence de mon troupeau en étant parfaitement impuissant. Les femelles attendant des petits arrivaient bientôt à terme de leur gestation. Je m’approchai lentement de l’une d’entre elles et posai doucement une main sur le côté de son ventre. Là, sous cette fourrure, une petite créature fragile et qui tiendrait à peine sur ses pattes allait bientôt vivre l’épreuve la plus difficile de sa vie. Je caressai doucement la femelle qui, semblant parfaitement indifférente à ma présence, recherchait assidûment un restant d’herbe fraîche qu’elle ne trouverait cependant jamais. En sentant son petit réagir au contact de ma main, je souris tristement en réalisant qu’il ne pourrait survivre bien longtemps si la situation ne s’améliorait pas. Dépité, je vins m’asseoir sur un rocher quelques mètres plus loin. Petit à petit, quelques rennes curieux s’approchèrent de moi d’un pas lent et fatigué. L’un d’entre eux s’allongea à mes côtés et vint poser sa tête contre ma cuisse. Je soupirai tout en caressant distraitement l’animal.
« Kristoff a peut-être raison finalement… Je dois certainement… apprécier Elsa plus que je ne le crois », pensai-je à voix haute.
Le renne leva ses grands yeux vers moi.
« Ne me regarde pas comme ça, tu sais très bien ce que je veux dire » lui lançai-je en remarquant son regard rempli d’incompréhension.
L’animal poussa un léger brame et frotta sa tête contre ma jambe.
« Tu penses vraiment que je devrais lui avouer que… je… l’aime ? »
Il se redressa et me donna un petit coup de museau dans l’épaule.
« Oui je sais… Ça m’a coûté de le dire… Mais c’est facile pour toi ! Tu n’as quasiment rien à faire et elles te tombent toutes entre les sabots ! » remarquai-je en désignant du menton les femelles qui se tenaient à quelques mètres de nous.
Le renne parut vexé et me jeta un regard noir. Je soupirai.
« Bon… Excuse-moi de remettre en cause tes techniques de drague mais essaye au moins de me comprendre. Je ne suis qu’un pauvre type n’ayant eu aucune expérience amoureuse mais qui est fou de la femme la plus inaccessible du monde ! Si tu la connaissais tu me comprendrais ! Elle a des cheveux si… Et une odeur tellement… Et ses yeux ! Ils sont magnifiques ses yeux. Elle m’impressionne beaucoup tu sais… Des fois je me sens complètement à côté de la plaque quand je lui parle… Elle me déstabilise à chaque fois qu’elle me regarde et je ne peux rien y faire… Tu sais, quand j’ai découvert qu’elle avait des pouvoirs, ça m’a un peu glacé le sang. Et puis j’ai finalement compris que c’était ce qui faisait d’elle une personne unique. Mais j’ai dû m’en rendre compte trop tard… Ma sœur l’a compris bien avant moi et je n’ai pas pu… je n’ai pas eu… enfin tu vois… Je n’ai eu aucune opportunité. Et je n’en aurai toujours aucune maintenant qu’elles s’aiment toutes les deux… Il faudrait un miracle pour qu’elles se séparent. Oh je sais ! Ce n’est pas la peine de me fusiller du regard j’ai bien conscience que ce n’est pas ce qu’un frère devrait souhaiter à sa sœur. Mais c’est ma seule chance si je veux espérer un jour lui dire à quel point elle me rend complètement dingue, au point de venir parler de tous mes problèmes à un renne qui ne me comprendra jamais ! »
L’animal se remit sur ses pattes et reparti comme si de rien n’était. Je devenais fou. Je devenais complètement fou si bien que je faisais des monologues face à mon troupeau, convaincu qu’il pourrait m’apporter un soutien sans faille dans ces grands moments d’incertitudes. Elsa me faisait perdre la tête. C’était évident à présent. Je n’avais plus aucun doute là-dessus. Kristoff avait su le voir et le comprendre directement. Mais ce n’était que maintenant qu’elle était loin de moi que je m’en rendais compte. Il m’avait fallu du temps, c’était tout. Du temps pour m’avouer que j’aimais une femme qui elle-même aimait ma propre sœur. Mais que pouvais-je faire ? Ce serait de la folie de dire à Elsa toute la vérité. Soit elle me rirait au nez, soit elle s’éloignerait à tout jamais de moi. Dans les deux cas, je la perdrais. Mais après tout, c’était peut-être cela l’aboutissement nécessaire de cet amour non-partagé. Il n’existait peut-être pas d’alternative. Cette relation imaginaire était condamnée à ne jamais exister. Pourtant, je devais tout de même essayer. C’était ma seule chance. Je devais tout avouer à Elsa, dès son retour, quitte à me ridiculiser. Je devais saisir l’opportunité pour la première fois de ma vie.
Des brames retentirent autour de moi. Je levai les yeux vers mon troupeau. Il s’était déplacé le long du ruisseau sans même que je m’en sois rendu compte pour éviter l’avancée progressive du soleil. Cependant, les rennes semblaient soudainement plus agités comme si quelque chose les troublaient. Le groupe ne formait plus qu’une masse indistincte de bois et de sabots. Je me redressai et m’en approchai. Je réussis à me faufiler entre les animaux et me frayai tant bien que mal un chemin jusqu’à ce qui attirait leur attention à tous. Là, sur l’herbe de plus en plus jaunâtre, gisait ce qui allait marquer le début d’un changement radical dans nos vies.
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Re: La Reine des Neiges 3
Sam 30 Sep 2023, 11:15
Je vois le coup venir que Yélana va aller lui parler...
Très bon chapitre comme toujours !
Mais alors @x.a.l.a.n.d.a y a pas de nouveaux chapitres aujourd'hui ?
Très bon chapitre comme toujours !
Mais alors @x.a.l.a.n.d.a y a pas de nouveaux chapitres aujourd'hui ?
- x.a.l.a.n.d.a
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La Reine des Neiges 3 (Chapitre 45)
Sam 07 Oct 2023, 12:04
Chapitre 45
Honeymaren
Les lèvres d’Elsa se posèrent sur les miennes. Elles étaient glacées. Je sentis son souffle sur mon visage. Un souffle frais qui ne me surprenait plus depuis longtemps. Au contraire, j’aimais le sentir sur ma peau et me faire frissonner.
La jeune femme s’écarta de moi et me regarda silencieusement. Ses grands yeux bleus habituellement si beaux et pétillants quand ils se posaient sur moi me parurent soudainement ternes et tristes. Ils ne reflétaient plus aucune âme, comme si toute trace de vie avait complètement disparu en eux. Les battements de mon cœur s’accélèrent brusquement. Quelque chose n’allait pas.
« Elsa ? » me risquai-je à demander.
Elle ne réagit pas, continuant à me fixer impassiblement. Son regard me glaça. Je voulus m’approcher d’elle et caresser doucement sa joue, espérant ainsi changer son attitude étrange et effrayante. Au moment où mes doigts effleurèrent son visage, Elsa me stoppa net d’un geste brusque, emprisonnant mes mains dans les siennes.
« Qu’est-ce que tu fais ? » réussis-je à articuler malgré la panique qui commençait à me gagner.
La jeune femme ne répondit pas. Elle ne me regardait plus non plus. Son visage était tourné vers ses mains qui contenaient toujours les miennes. Ses doigts se crispaient de plus en plus sur ma peau, m’empêchant de me dégager de son emprise. Je vis alors une lumière bleutée apparaître entre ses mains. Quand elle eut complètement disparu, Elsa me lâcha enfin. Un frisson me parcourut. Je me rendis alors compte que j’avais de plus en plus froid. Je levai mes mains à hauteur de mes yeux et découvris avec horreur que mes doigts gelaient petit à petit. Je compris alors. La jeune femme avait retourné ses pouvoirs contre moi.
La glace s’empara entièrement de mon corps, m’immobilisant bientôt totalement. Je réussis à me tourner vers l’ancienne reine et lui lançai un regard suppliant, ne parvenant plus à dire quoi que ce soit. Elsa, se tenant debout à quelques centimètres de moi, me souriait, parfaitement calme et insensible aux claquements de ma mâchoire. Elle m’observait lutter en vain contre le froid glacial qui me submergeait. Une larme coula sur ma joue. J’étais si impuissante…
« Tu sais que cela ne pouvait plus durer », m’asséna-t-elle.
Ses paroles furent un coup de poignard supplémentaire. Non, elle ne pouvait pas me faire ça. C’était impossible. Pas Elsa.
Je la vis alors me tourner le dos, ouvrir la porte de ma chambre et l’entendis me lancer :
« Tu verras, ce sera mieux ainsi… »
Elle referma la porte derrière elle, m’abandonnant à mon triste sort. Elsa je t’en prie, suppliai-je intérieurement. Soudain, un voile noir passa sur mes yeux et mes oreilles se mirent à bourdonner. La pièce tournait autour de moi. Je n’arrivais plus à distinguer quoi que ce soit. Tout était noir. Les sons extérieurs ne me parvenaient plus non plus. Je n’entendais plus que les battements de mon cœur. Ils ralentissaient cependant dangereusement. Depuis combien de temps n’avais-je pas respiré ? Une minute ? Deux minutes ? Honeymaren, tu vas mourir, pensai-je. Deux battements. Deux battements. Un battement. Deux battements… Un battement… Puis, plus rien.
***
Je me réveillai en sursaut, me redressant brusquement sur mon lit. De grosses gouttes de sueur dégoulinaient le long de mon front et venaient finalement s’écraser sur mes draps lorsqu’elles en tombaient. Il faisait chaud. Trop chaud pour un début de matinée. Je savais que ce n’était pas normal. Mais c’était comme cela que nous devions vivre à présent. Je suffoquais, tout en regardant rapidement autour de moi. Je reconnus mon lit, mes meubles, ma chambre. J’inspirai profondément pour tenter de retrouver une respiration et un rythme cardiaque normaux. Le soleil au dehors s’était déjà levé.
« Ce n’était qu’un mauvais rêve », murmurai-je, enfin calmée.
Je me levai et allai m’habiller rapidement.
***
Il était tôt. Malgré l’heure matinale, Ryder avait déjà quitté la cabane pour aller s’occuper de son troupeau. Je soupirai en pensant à lui et au discours qu’il avait tenu après avoir découvert ma relation avec Elsa. C’était terrible de ne pas me sentir soutenue par mon propre frère. J’avais lu de la rage et de la honte dans ses yeux. Honte de m’avoir pour sœur. C’était ce qu’il y avait de plus difficile à supporter. Si même Ryder ne me comprenait pas, qui d’autre le pourrait ? Personne.
Je me dirigeai vers la cuisine et fis bouillir de l’eau dans une casserole. Nul ne te soutient ici, songeai-je en me remémorant les paroles de Yéléna. La chef Northuldra n’avait jamais été aussi dure à mon égard. Elle avait d’ailleurs plutôt cherché à me protéger ainsi que Ryder, après le décès de nos parents. Jamais elle n’avait osé aborder ce drame comme elle l’avait fait avec moi la veille. Jamais elle n’avait évoqué la possibilité que mes parents puissent être déçus par mon comportement actuel s’ils avaient pu être présents. Elle m’avait détruite psychologiquement en quelques mots. Et cela n’avait même pas eu l’air de l’atteindre. Au contraire, elle était repartie pleine d’assurance en me laissant m’apitoyer sur mon sort.
Je savais depuis que j’avais réalisé quels étaient mes sentiments pour Elsa que toute relation homosexuelle avec en plus une personne d’Arendelle me serait formellement interdite. Pourtant, j’avais voulu essayer, convaincue que je pourrais tous les faire changer d’avis. En vain. Yéléna et Ryder les premiers m’avaient prouvé le contraire. Nous venions tout juste de nous avouer ce que nous ressentions l’une pour l’autre et nous devions déjà nous séparer. C’était injuste.
Je versai l’eau chaude dans une tasse et y fis infuser du thé. Après quelques instants, je portai le récipient à mes lèvres et pris quelques gorgées de son contenu encore brûlant. Je ne sentis même pas que le liquide encore bien trop chaud pour être bu me brûlait le palais et la langue. Je n’avais plus qu’une pensée en tête : Elsa. Pourquoi était-ce si compliqué ? Pourquoi ne pouvions-nous pas vivre notre relation normalement sans être en permanence jugées par autrui ? Je voulais tellement que leur mentalité change, qu’ils nous acceptent comme nous étions, nous permettant de nous aimer librement sans avoir besoin de nous cacher. Mais c’était impossible. Le passé et la réputation de notre peuple nous en empêchaient.
Je finis de boire mon thé, déposai la tasse sur la table du salon et allai m’affairer à mon travail. Je saisis une bûche et un couteau et commençai à sculpter. Au bout de quelques minutes de concentration, je soufflai légèrement sur le bois pour en retirer les derniers copeaux inutiles qui y étaient restés accrochés. Je déposai ma nouvelle création sur mon plan de travail en face de moi et l’observai.
« Tu me manques Elsa. Tu me manques beaucoup », chuchotai-je à moi-même.
Mon ventre émis soudain un petit gargouillis, me rappelant que je n’avais pas mangé depuis la veille. J’ouvris rapidement le placard dans lequel Ryder et moi avions l’habitude de ranger le pain. En saisissant le morceau qu’il en restait, je compris immédiatement que je ne pourrai pas en faire mon petit déjeuner. La mie avait complètement durci, devenant immangeable. La croûte quant à elle était recouverte de moisissure formant des taches verdâtres à intervalles réguliers. Je jetai à la poubelle ce vieux croûton en affichant une mine de dégoût. Je voulus me rabattre sur la corbeille de fruit posée sur le plan de travail mais me ravisai presque aussitôt. La pelure habituellement rouge et lisse des pommes était devenue marron et fripée. Elles étaient toutes pourries. Je pris toute la corbeille et fis subir à son contenu le même sort qu’au morceau de pain. Les pommes s’écrasèrent mollement au fond de la poubelle dans un splatch dégoûtant. Quelque chose n’était pas normal. Elles avaient été cueillies à peine mûres trois jours auparavant. Je regardai, inquiète, ce que je venais de jeter. Mon premier réflexe fut d’ouvrir tous les placards de la cuisine pour inspecter le peu de nourriture qui y était stocké. Je fus obligée de me débarrasser de tout ce qui y avait été conservé. La moisissure avait recouvert l’intégralité des vivres.
Soudain, la porte d’entrée s’ouvrit dans un violent claquement. Je me retournai en sursautant et vis entrer Ryder, paniqué, qui me cria immédiatement en m’apercevant :
« Honeymaren il faut que tu viennes vite ! Je viens de retrouver quatre rennes morts. »
***
Les pauvres bêtes n’avaient pas survécu à la chaleur combinée au manque de nourriture dû au peu de végétation encore disponible. Les températures de ce mois d’avril atteignaient déjà celles que nous étions censés avoir au mois d’août. Les animaux n’avaient pu s’acclimater à un tel changement. La chaleur était arrivée subitement, dès la fin de l’hiver. L’esprit du vent ne régulait plus rien. Sa disparition avait bien plus changé nos vies que nous ne le pensions. Celle de l’esprit de la terre était également de plus en plus inquiétante. Les quatre rennes inertes à mes pieds, la bouche et les yeux encore ouverts, en étaient les premières victimes. Tout ce que nous apportait d’ordinaire la nature était en train de disparaître. La vie mourrait petit à petit, ne laissant que de larges traces noires et de la moisissure derrière elle. Tout devenait immangeable.
Je levai les yeux vers mon frère. En un regard, nous comprîmes que si rien ne changeait, nous pourrions bientôt être à la place de ces quatre rennes morts de chaud et de faim.
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La Reine des Neiges 3 (Chapitre 46)
Ven 13 Oct 2023, 19:43
TROISIEME PARTIE
Chapitre 46
Erik
Erik
Comment avait-elle osé ? Elle n’avait eu aucun scrupule à ruiner tout ce que l’on avait difficilement bâti depuis des générations. J’avais fait trop d’efforts. Trop d’efforts pour essayer de maintenir une relation qui n’avait pourtant aucun avenir. Je le savais depuis le début. Mais je m’étais obstiné à poursuivre tout de même, espérant qu’avec le temps tout s’arrangerait. Cela n’avait pas été le cas. Au contraire, cela s’était empiré au fil des jours, des semaines et puis des mois. Nous n’arrivions pas à nous entendre. Il s’agissait en permanence de non-dits qui restaient tus jusqu’à ce qu’ils éclatent au grand jour, nous rappelant à quel point il était impossible que nous nous aimions. Nous avions essayé, nous faisions semblant pour laisser paraître aux yeux des autres un couple modèle vivant en harmonie. En vain. Personne ne s’était laissé berner par notre comédie. On voyait clair dans notre jeu. Mais nul n’osait aborder la question en notre présence, préférant fermer les yeux sur notre relation contrainte. J’avais tout fait pour elle. Tout. Et que m’avait-elle rendu ? Rien. Rien à part des reproches et des regards froids. Elle m’avait quitté. Sur le coup, cela ne m’avait fait ni chaud ni froid. Je n’avais jamais rien ressenti pour elle après tout. Mais au fil des jours, une espèce de colère sourde était née en moi et avait pris de plus en plus d’ampleur. Elle était apparue sans crier gare, comme pour réagir à ce qu’il se passait sous mes yeux : Honeymaren en aimait un autre. C’était ce que j’avais d’abord cru, un peu naïvement. Et puis un jour cette fille aux cheveux d’un blond si clair qu’on pouvait presque les croire blancs m’avait rendu visite. Je ne lui avais jamais parlé et pourtant, je l’avais reconnue aussitôt. C’était Ryder – l’abruti de frère d’Honeymaren – et elle qui avaient tué mon père. Elle était si reconnaissable. Mon frère Isaak m’avait fait tout le descriptif de sa beauté après le drame. Jusqu’à présent, je n’avais jamais prêté attention à elle alors même qu’aucune autre femme du village Northuldra ne lui arrivait à la cheville – Honeymaren inclus. Je l’avais observée longuement, la laissant sur le pas de la porte. Mon regard glacial avait semblé la déstabiliser, si bien qu’elle avait tout fait pour éviter de le croiser.
« Est-ce qu’Honeymaren est ici ? » m’avait-elle demandé timidement.
Elle ne m’avait pas paru au courant de notre rupture.
« Non elle n’est pas là. Que lui veux-tu ? lui avais-je répondu le plus froidement possible.
— Oh… Je pensais que… Peu importe. Je vais trouver Ryder dans ce cas. Il saura certainement me renseigner. »
J’avais tressailli au nom du frère d’Honeymaren. Mes poings s’étaient serrés si fort que mes ongles étaient rentrés dans ma peau. Mon visage avait dû se durcir instantanément car la jeune femme s’était figée face à mon expression.
« Préviens-moi si jamais…
— Elle ne reviendra pas », avais-je sèchement dit en refermant la porte.
J’avais mis du temps à me souvenir de son prénom. Mais il m’était finalement revenu lors de la nuit suivante, me réveillant en sursaut : Elsa.
Elle ne m’avait jamais véritablement intéressé. A vrai dire, je ne l’avais pas vraiment remarquée. Ou plutôt je n’avais pas cherché à la connaître. Mais depuis cette courte discussion, je n’arrivais plus à penser à autre chose qu’à la jeune femme. Je n’avais aucune attirance particulière pour elle, simplement, elle m’intriguait. Je n’avais cessé d’observer ses allées et venues depuis trois mois, rongé par la curiosité. Au début, j’avais cru me lasser rapidement, ne trouvant rien d’extraordinaire dans ses faits et gestes. Pourtant depuis quelques semaines, quelque chose de nouveau était apparu sous mes yeux. J’avais mis du temps à comprendre de quoi il s’agissait. Mais lorsque j’avais vu Honeymaren de plus en plus souvent auprès d’Elsa, j’avais commencé à douter. Leurs comportements étaient étranges. Elles m’avaient tout d’abord semblé vouloir se rapprocher l’une de l’autre sans qu’on les remarque. Puis, au fur et à mesure, tout s’était concrétisé. J’avais bel et bien perdu la Northuldra au profit de quelqu’un d’autre. Mais ce n’était pas tout à fait la personne à laquelle je m’attendais.
***
« Tu fais quoi ? »
Je levais la tête. Mon petit frère venait de s’asseoir en tailleur en face de moi et me regardait avec insistance. Isaak m’en avait confié la garde tout le restant de l’après-midi.
« Je taille une pierre.
— C’est pour quoi faire ? »
Le petit garçon s’avança à quatre pattes jusqu’à moi, appuya ses mains minuscules sur mes genoux et pencha légèrement sa tête sur le côté, curieux. Ses grands yeux bruns ne quittaient pas ce que je tenais fermement entre mes doigts.
« Je ne sais pas encore », lui répondis-je en ébouriffant ses cheveux.
Il afficha une mine perplexe avant de demander :
« Alors pourquoi tu fais ça ?
— Pour que tu me poses des questions ! Maintenant va jouer et laisse-moi un peu tranquille » dis-je en soupirant.
Adrian me lança un regard suppliant.
« Mais je m’ennuie moi ! Je sais pas quoi faire… »
Je levai les yeux au ciel.
« Joue avec moi s’il te plait… insista-t-il en se penchant de nouveau vers moi.
— Va jouer tout seul !
— Je peux pas…
— Bien sûr que si ! Maintenant arrête ta comédie et débrouille-toi ! m’énervai-je en le repoussant violemment.
Le petit garçon fut projeté en arrière et tomba au sol sur les fesses.
« C’est pas juste… T’es vraiment trop méchant ! protesta-t-il, les larmes aux yeux. Papa il jouait avec moi ! Je préférerais que ce soit toi qui sois… »
Je n’attendis pas la fin de sa phrase. Ses paroles furent comme un électrochoc. Je fus pris d’un violent élan de colère à l’évocation de mon père disparu. Je me levai si brusquement que ma chaise fut envoyée au sol dans un bruit fracassant. Je bondis sur Adrian, le saisit par les épaules et lui dis d’un ton ferme :
« Mais parce que tu crois que j’ai choisi ce qui est arrivé ? Tu crois que je ne me suis pas dit que je préférerais moi aussi être au fond de cette p***** de Mer Sombre à sa place ? Et tout ça parce que quoi ? Parce qu’il a croisé le chemin de deux imbéciles incapables de le sauver ! »
Mon petit frère parut choqué face à mes propos. Il me fixait d’un regard vide qui se remplissait peu à peu de larmes.
« Pourtant tu la connais cette histoire ! Je ne pensais vraiment pas que j’aurais besoin de te la répéter ! Tu as vu la scène de tes propres yeux, tu connais le traumatisme que nous avons tous subi et tu oses encore prononcer son nom de cette façon ? Il a toujours été un modèle pour nous tous – y compris toi – et c’est sur lui que c’est tombé… Alors excuse-moi de ne pas être à sa place, si c’est vraiment ça que tu regrettes ! »
Le jeune garçon éclata en pleurs et tenta de me repousser vainement.
« Lâche-moi ! cria-t-il entre deux sanglots. Lâche-moi ! Va-t-en ! »
Je ne relâchai pas la pression que j’effectuais sur ses épaules et continuai en le secouant légèrement :
« Tu peux me reprocher de ne pas être un aussi bon frère que ce qu’il souhaitait pour toi. Tu peux me reprocher de ne pas avoir su m’entourer des bonnes personnes. Mais…
— C’est pas vrai d’abord ! Honeymaren était une bonne personne ! »
La gifle partit immédiatement, sans même que je m’en rende compte. Ce ne fut que lorsque j’entendis le claquement que ma main provoqua sur sa joue que je réalisai ce que je venais de faire. Adrian cria. Son visage était rouge. Il se débattit entre mes mains et finit par se libérer de mon emprise, profitant du vide intérieur qui s’emparait de moi et me faisait perdre toute lucidité.
Le petit garçon se réfugia dans un coin de la pièce. Il se recroquevilla sur lui-même en serrant ses genoux contre sa poitrine. Il continuait à pleurer et enfouissait son visage entre ses jambes.
« Ne me parle plus jamais de cette… de cette… »
Je ne pus achever ma phrase. La porte de la cabane s’ouvrit à ce moment-là. C’était Isaak. A peine fut-il entré que le petit garçon se précipita vers lui et vint se cacher derrière ses jambes en s’agrippant à son pantalon de toile.
« Qu’est-ce qu’il s’est passé ? demanda-t-il en voyant la réaction d’Adrian.
— Rien », sifflai-je entre mes dents en foudroyant du regard mon petit frère.
***
La nuit était tombée depuis un moment. Je n’arrivais pas à trouver le sommeil. Fatigué de me tourner dans mon lit sans parvenir à m’endormir, je me levai et me dirigeai vers la fenêtre de ma chambre. Là, juste en face, se trouvait la cabane de Ryder et d’Honeymaren. Je serrai ma mâchoire si fort que mes dents grinçaient presque les unes contre les autres. Je sentais de nouveau la colère naître au creux de ma poitrine. Elle venait se cramponner à mon cœur, le forçant à accélérer son rythme effréné, puis s’accrochait à ma gorge, m’obligeant à retenir un cri de fureur. Je tournai la tête vers le lit. C’était là que j’avais passé ma dernière nuit avec elle. Je m’en souvenais parfaitement. Un sourire mauvais apparu sur mon visage.
« Je te promets Honeymaren que je m’assurerai personnellement de détruire tout ce que tu aimes comme tu l’as fait pour moi », murmurai-je en ne quittant pas les draps des yeux.
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La Reine des Neiges 3 (Chapitre 46)
Ven 20 Oct 2023, 21:18
Chapitre 47
Anna
Quatre heures du matin. Je ne parvenais pas à trouver le sommeil. J’avais beau me tourner dans tous les sens, aucune position ne me convenait. Epuisée par toutes mes tentatives inutiles, je finis par me redresser en position assise sur le lit. Je transpirais. La sueur de mon front collait mes cheveux sur ma peau. La chaleur m’étouffait depuis des jours déjà. Je n’en pouvais plus. Je me levai et allai ouvrir la fenêtre en grand. Bien qu’aucun air ne rentra dans la pièce, je restai quelques instants immobile, cherchant à me rafraîchir par tous les moyens. Un léger soupir derrière moi me fit tourner la tête. Elsa dormait paisiblement. Je m’approchai d’elle et vins m’asseoir sur le matelas. Ma sœur était allongée sur le côté. Son visage, appuyé sur ses mains, affichait un air serein et détendu. Sa bouche légèrement entrouverte laissait échapper son souffle lent et silencieux. Je souris en l’observant. Elle m’avait tant manqué. Je n’avais pas pu résister et l’avais suppliée pour passer la nuit avec elle, comme autrefois.
En la regardant, je repensai à ce qu’elle m’avait dit l’avant-veille. Elle m’avait fait suffisamment confiance pour m’avouer son secret qui devait pourtant peser lourd dans son cœur. J’étais si heureuse pour ma sœur. C’était la première fois que je la voyais dans cet état et aussi épanouie. Son annonce m’avait pourtant déstabilisée. Il m’avait fallu quelques secondes pour réaliser ce qu’elle m’avait dit. Et durant ces courts instants, j’avais pu voir son regard changer et sombrer brutalement dans une douloureuse tristesse. Néanmoins, j’aurais dû m’y attendre et remarquer qu’Elsa ne pouvait être heureuse que par ce biais là. Après tout, elle n’avait jamais aimé d’hommes et, bien souvent, c’était réciproque. La plupart semblaient attirés par ma sœur puis, lorsqu’ils découvraient ses pouvoirs, fuyaient aussitôt. D’autres ne l’approchaient qu’en vue d’un potentiel statut de roi. Bien sûr, elle les repoussait chaque fois et ne leur laissait entrevoir aucun espoir. J’avais longtemps considéré cette froideur de sa part comme un manque d’envie de s’engager dans une relation qui la priverait par la suite – si cela devenait sérieux – de s’imposer et de conserver son statut de reine indépendante. Une fois mariée, elle n’aurait plus eu le moindre poids dans les décisions royales puisque cela était réservé au roi. Elsa le savait. Et pourtant, cela n’avait pas été ce qui avait primé dans son refus de s’engager. Cela avait dû être quelque chose de plus fort qu’elle, tu au plus profond de son être, qui l’en avait empêchée. Honeymaren était la seule personne à avoir réussi à tirer ma sœur de son enfermement, elle qui ne s’était jamais véritablement ouverte au monde extérieur.
Les lèvres d’Elsa affichaient un sourire inconscient. Elle rêvait, sans doute. Moi, je restais là à la regarder inlassablement. Soudain, mon ventre émis un gargouillis qui brisa le silence. J’avais faim alors que j’avais suffisamment mangé la veille. Je me relevai en prenant garde de ne pas réveiller ma sœur et sortis de la chambre.
***
La cuisine était vide, tous les domestiques l’avaient quittée depuis longtemps. Je me faufilai jusqu’aux fourneaux en me guidant grâce à la faible lumière émise par les reflets de la lune, refusant d’attirer l’attention d’un éventuel curieux en éclairant davantage. J’ouvris les placards dans lesquels était renfermée la nourriture. Il n’y avait presque rien. La grande partie avait dû être jetée. Cela devenait de plus en plus habituel désormais. Il ne restait plus que les restes du dîner de la veille : une part de saumon et quelques navets. Lorsque je pris le plat dans lequel le tout avait été rassemblé, je faillis le relâcher immédiatement tant l’odeur était insupportable. Je grimaçais, dégoûtée. Cela m’avait soudainement coupé l’appétit. Écœurée par ce que je venais de sentir, je préférai me rabattre sur une boisson chaude, persuadée qu’après cela, la température extérieure me paraitrait plus clémente. Je saisis une casserole et la remplis d’eau, puis pris une allumette et la frottai contre son grattoir. Rien. Je fis un deuxième essai. Toujours rien. Pas une étincelle n’apparut. Je retentai à plusieurs reprises. Même résultat. « Je ne comprends pas… » murmurai-je.
Je m’acharnai pendant plusieurs minutes, espérant voir une flamme surgir. En vain. J’eus soudain l’idée d’aller jeter un coup d’œil par la fenêtre de la cuisine qui donnait sur le village. Arendelle n’était pas illuminée. Tous les lampadaires étaient éteints, eux-aussi.
« Comment est-ce possible… »
Je restai médusée derrière la vitre. Pendant tout un moment, j’espérai que les falotiers aient oublié d’éclairer les rues du royaume. Mais je chassai rapidement cette pensée, réalisant que cela ne s’était jamais produit et qu’il était impossible qu’ils aient omis une chose aussi essentielle. Non, cela ne pouvait pas être cela. Les battements de mon cœur accélérèrent subitement. Mes mains devinrent moites. La réalité venait me frapper de plein fouet.
« Oh non… » soufflai-je, désemparée.
Je sortis précipitamment de la cuisine et courus à travers tout le château, ne me souciant plus du bruit que je pouvais causer ni du peu d’éclairage qui m’empêchait de voir correctement devant moi. Au détour d’un couloir, dans le dernier virage qui me séparait de la chambre d’Elsa, je percutai violemment quelqu’un et tombai en arrière. Me retrouvant assise sur le sol, je poussai un cri à la fois d’étonnement et de colère en direction de l’immense masse noire que je ne distinguais pas dans la nuit :
« Eh ! Qu’est-ce qui vous…
— Oh ! Je suis vraiment désolé… Je ne vous avais pas vue et je ne pensais pas que… »
Je reconnus immédiatement sa voix. Mais ce ne fut que lorsqu’il se pencha pour m’aider à me relever que je m’exclamai :
« Kristoff !
— Anna ! Qu’est-ce que tu fais là ?
— Je n’ai pas le temps de t’expliquer. Il faut que je trouve Elsa ! » dis-je en saisissant la main que le jeune homme me tendait.
Remise debout, je me précipitai vers la porte de chambre de ma sœur et l’ouvris si brusquement qu’elle vint heurter le mur. La jeune femme qui était encore endormie se réveilla en sursaut et me dévisagea.
« Anna, qu’est-ce qui te prend ?
— L’esprit du feu a disparu ! criai-je.
— Quoi ? Mais comment…
— Viens voir !
— Mais il n’est même pas cinq heures du matin… Tu as dû faire un mauvais rêve…
— Suis-moi je te dis ! »
Elsa soupira avant de se lever. Lorsqu’elle aperçut Kristoff qui était resté dans le couloir, elle parut gênée d’être en robe de nuit face à lui. Elle croisa ses bras par-dessus sa poitrine avant de lui lancer d’un ton fatigué :
« Vous aussi vous pensez que l’esprit du feu a disparu ?
— Euh… Je ne sais pas… J’ai entendu du bruit alors je… Enfin… Je me suis levé pour voir de quoi il s’agissait, répondit le jeune homme.
— Oui bon ben c’était moi.
— Et qu’est-ce que tu faisais debout ? me demanda ma sœur en levant un sourcil interrogateur.
— J’avais faim.
— Pourquoi ai-je posé la question… » marmonna-t-elle en laissant échapper un petit sourire en coin.
Je levai les yeux au ciel avant d’enchaîner :
« Maintenant que ce mystère est élucidé, suivez-moi je dois vous montrer quelque chose. »
Nous nous rendîmes dans le Grand Salon. Là, je cherchai une nouvelle boîte d’allumettes et, lorsque j’eus enfin ce que je cherchais, je m’avançai vers le grand chandelier posé sur la cheminée. Malgré toutes mes tentatives, ses bougies restèrent éteintes. Kristoff, surpris, s’approcha et essaya à son tour.
« Peut-être que tu t’y prends mal, me dit-il en frottant le petit morceau de bois contre le grattoir.
— Je te remercie… » maugréai-je.
Le jeune homme s’y reprit plusieurs fois mais aucune flamme ne jaillit, comme je l’avais prévu.
« Je vois que Roi du Feu n’y parvient pas non plus… » le taquinai-je.
Kristoff sourit amèrement. Il soupira avant de laisser tomber le paquet d’allumettes, comprenant que c’était inutile de continuer. Je me tournai vers Elsa. Ma sœur était restée derrière nous et semblait observer la scène impassiblement. Malgré l’obscurité, je parvins à voir que son corps tout entier était tendu. Ses poings étaient fermement serrés et son visage paraissait horrifié face à ma triste découverte. Je savais à quoi elle pensait. Tous les esprits disparaissaient un à un. Si rien ne changeait, son tour pourrait venir également. C’était ce que nous craignions tous.
« C’est impossible que Bruni ait disparu… Il est si proche des Northuldra que n’importe qui se serait aperçu de son départ. Il n’a pas pu se volatiliser dans la nature… » murmura ma sœur, désemparée.
Je ne savais pas quoi lui dire. Elle comme moi savions qu’elle ne faisait que s’empêcher d’accepter la réalité.
« Tout ce que je veux… c’est que tu restes ici, lui dis-je d’un ton ferme. Tu ne peux pas retourner dans la forêt enchantée, c’est trop risqué. Les esprits y disparaissent… Tu es certainement plus en sécurité à Arendelle et… au moins, je suis avec toi. »
Elsa leva un regard triste vers moi.
« Anna, tu sais que ce n’est pas possible… Ils comptent sur moi et… »
Elle soupira avant d’achever sa phrase :
« Et Honeymaren compte sur moi aussi. »
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La Reine des Neiges 3 (Chapitre 48)
Ven 27 Oct 2023, 16:58
Chapitre 48
Yéléna
« Que comptes-tu faire ?
— Je ne sais pas.
— Le contraire m’aurait étonné… Tu n’as jamais été capable d’agir !
— Parce que tu m’en as empêchée ! »
Silence.
« Je n’ai pas confiance en toi, reprit mon père.
— Tu aurais dû pourtant…
— Peu importe ! Tes choix nous ont toujours conduits au malheur !
— Je n’y suis pour rien !
— Bien sûr que si ! Tu reproduis le même schéma que par le passé alors que tu sais pertinemment que cela va mal finir !
— Qu’est-ce que tu en sais au juste ?
— Mais regarde-la ! Elle est libre ! Beaucoup trop libre ! Tu la laisses s’enfuir tranquillement vers ses semblables pour qu’elle puisse mijoter la vengeance de son grand-père auprès des siens !
— Et alors ? Que peut-elle faire qui puisse m’effrayer ? Rien.
— C’était aussi ce que je croyais en compagnie de Runeard. Mais on ne peut pas faire confiance à ces gens-là. Depuis qu’elle est ici, rien ne va plus. Nous avons déjà perdu trois esprits. Qu’attends-tu pour réagir ? Qu’elle nous prive également de notre honneur ? Ne t’en fais pas, c’est en bonne voie avec ce qui est en train de se produire entre Honeymaren et elle. »
Je me tus. Trois esprits. Déjà.
***
« Ça va, bien dormi ? »Je me réveillai en sursaut, écarquillant les yeux. Silja était entrée dans ma tente et repliait soigneusement des vêtements que j’avais laissé malencontreusement traîner dans un coin.
« Eh bien c’était… étrange, répondis-je en me massant les tempes.
— Etrange ? Moi j’aurais plutôt dit « croustillant » avec ce que j’ai pu entendre.
— Comment ça ?
— Tu parlais dans ton sommeil chérie. »
Je poussai un grognement, non pas d’agacement mais de lassitude.
« Un autre esprit a disparu n’est-ce pas ? demandai-je en ne quittant pas mes pieds des yeux.
— Oui.
— Lequel ?
— Celui du feu. »
Je soupirai.
« Il y a déjà plusieurs heures de cela Yéléna, reprit la vieille femme. Mais comme tu n’es pas sortie de cette maudite tente, tu n’as pas pu t’en rendre compte.
— Je ne supporte plus le soleil et sa chaleur écrasante.
— Il fait pourtant tout aussi chaud là-dedans.
— Peut-être. Mais au moins je n’ai plus besoin de subir ses rayons brûlants et éblouissants », rétorquai-je.
Il y eut un court moment de pause. Silja vint s’asseoir sur le bord de mon lit.
« Tu devrais mettre le nez dehors. Tu commences à délirer », me reprocha-t-elle.
Je levai les yeux au ciel.
« Si je viens, tu me laisseras enfin tranquille ? » soupirai-je.
Mon amie sourit et acquiesça.
***
L’état de la forêt enchantée me désola. En une semaine, tout me paraissait changé. Les arbres étaient tous morts et recouverts d’une épaisse couche noirâtre. L’herbe habituellement si verte était à présent jaunie, desséchée par la chaleur ambiante. Animaux et êtres humains avaient déserté les lieux, nous laissant seules au milieu de ce paysage chaotique. « Combien de rennes avons-nous déjà perdu ? demandai-je à Silja tout en marchant.
— Beaucoup. Ils ne supportent pas plus que nous ces températures affolantes. Au contraire. »
Je ne renchéris pas et me contentai de regarder silencieusement le sol défiler sous mes pieds.
« A quoi tu penses Yéléna ?
— Comment allons-nous supporter ça dans les jours et les semaines à venir ? »
La vieille femme fronça les sourcils et me répondit :
« Tu sembles oublier un détail important. Il y a un moyen simple pour que nous ne souffrions plus de cette chaleur insupportable… »
Je tournai la tête vers mon amie. Elle s’était soudainement arrêtée et me fixait de ses yeux vides.
« Oh non Silja ! Je sais à quoi tu penses et je me refuse à lui demander quoi que ce soit !
— Et pourquoi donc ?
— Il est hors de question que je montre le moindre signe de faiblesse devant elle.
— En quoi cela te dérange-t-il ?
— Elle n’a pas à se sentir supérieure !
— Alors tu préfères nous voir tous mourir de chaud plutôt que de lui demander de l’aide ? s’énerva la vieille femme.
— Je trouverai une solution SEULE ! » criai-je.
Un raclement de gorge derrière nous nous interrompit dans notre dispute. Nous nous retournâmes au même moment.
« Que se passe-t-il Ryder ? » demandai-je, exaspérée, en voyant le jeune homme.
Il paraissait gêné d’être ainsi intervenu dans notre discussion. Bien qu’essoufflé et affreusement pâle, il se reprit aussitôt :
« Chef, vous devriez venir immédiatement. C’est très grave ! »
Je lançai un regard inquiet à Silja. Cette dernière, au lieu de se préoccuper de ce qui venait d’être dit, s’assit sur un rocher, à l’ombre du tronc mort d’un bouleau ayant déjà perdu toutes ses feuilles. Je compris qu’elle ne bougerait pas.
« Je te suis », dis-je à Ryder en ne quittant pas mon amie des yeux.
***
On me fit entrer dans une cabane, à l’autre bout du village. Plusieurs personnes étaient déjà rassemblées à l’intérieur, dans ce qui semblait être le salon. Leurs visages m’étaient familiers mais je n’en connaissais aucune personnellement. « Merci Ryder », murmura tristement un homme d’une soixantaine d’années au frère d’Honeymaren.
Celui-ci fit un léger signe de tête et repartit vers la sortie, me laissant au milieu de ces gens que je ne connaissais pas. Je leur lançai un regard à la fois inquiet et curieux. L’un des individus ouvrit alors la bouche pour m’éclairer mais, avant qu’il n’ait pu prononcer le moindre mot, un cri strident retenti dans une pièce voisine. L’atmosphère devint de plus en plus pesante alors que le hurlement ne cessait pas. Il était empli d’une douleur déchirante qui me figea sur place. Il s’agissait d’une femme, j’en étais à peu près sûre, mais une femme subissant la plus monstrueuse des atrocités.
« C’est… ma fille », murmura l’homme que j’avais déjà remarqué un peu plus tôt.
Son visage était si marqué que je réussis à sentir toute la détresse qu’il dégageait. Le cri se tut quelques secondes et reprit presque immédiatement, cette fois-ci accompagné de sanglots.
« Que se passe-t-il ? » osai-je demander, à la fois intrigué et effrayée.
Comme pour répondre à ma question, la porte en face de moi s’ouvrit et une jeune femme en blouse blanche apparut.
« Vous êtes là ! me dit-elle en m’apercevant. Suivez-moi, son état est de plus en plus critique. »
Sans savoir de qui elle parlait, je m’exécutai silencieusement et l’accompagnait dans le couloir attenant au salon, y abandonnant les quelques personnes qui s’y trouvaient encore. Lorsque nous nous retrouvâmes seules, j’en profitai pour observer discrètement celle qui m’escortait ainsi à travers la cabane. Sa tenue me fit comprendre qu’il s’agissait d’une infirmière d’Arendelle ayant certainement été appelée en urgence. Comme si nous, les Northuldra, ne pouvions pas régler nos problèmes seuls, sans avoir besoin qu’ils nous viennent en aide, pensai-je en la regardant. Je baissai alors les yeux et remarquai que sa blouse était tachée de sang. Je réprimai un haut le cœur, tentant de faire bonne figure.
« Je dois bien avouer que j’espérais que vous ne viendriez pas seule, me dit-elle sans me lancer un regard. On dit que vous avez de très bons… Comment appelez-vous cela déjà ? Ah oui, des chamanes. Il paraît qu’ils ont des capacités en médecine incroyables même si je doute que l’on puisse avoir un quelconque talent dans ce domaine sans avoir fait un minimum d’études auparavant. »
Je ne répondis rien, de plus en plus agacée par ses propos.
« Enfin, je suppose que celle de votre village avait de bonnes raisons pour ne pas venir. Comment s’appelle-t-elle déjà ? me demanda-t-elle, faussement intéressée.
— Silja », marmonnai-je en desserrant à peine les dents.
L’infirmière ne se préoccupa nullement de ma réponse et poussa une porte qui donnait sur une chambre. Elle y entra et m’invita à faire de même. Je découvris une femme allongée jambes écartées sur le lit au centre de la pièce. Son visage était livide. Des larmes coulaient le long de ses joues. Un homme du même âge qu’elle se tenait à ses côtés, les yeux rougis. Je vis un médecin qui s’affairait imperturbablement au-dessus de cette pauvre femme. Celui-ci, en apercevant l’infirmière, lui dit :
« Emmy j’aurais besoin que vous m’apportiez une bassine d’eau et des serviettes propres ».
Elle repartit aussitôt dans le couloir d’une démarche nonchalante et blasée pendant que son collègue lança dans ma direction :
« Je suis le Docteur Nilsen. J’espère que vous ne m’en voulez pas de vous avoir interrompue dans vos occupations mais j’ai ici un cas des plus inquiétants. »
Il me désignait du menton sa patiente qui semblait en piteux état. Je m’approchai du lit et compris enfin ce qui était en train de se produire.
« Une fausse couche, reprit le médecin, comme lisant dans mes pensées. Cinquième mois de grossesse pourtant… Tout paraissait parfaitement bien se passer d’après ce que j’ai pu comprendre mais il semblerait qu’un manque de nourriture assez conséquent ait provoqué cet accident. »
Ses paroles ne faisaient que résonner dans mon crâne sans que je les assimile véritablement. Je regardais la femme se tordre de douleur. Ses cris ne me parvenaient plus non plus. La pièce semblait tournoyer autour de moi. Seuls les draps imprégnés de sang restaient ancrés dans mon esprit. Pourquoi n’es-tu pas venue Silja ? Tu savais pertinemment ce qui était en train de se passer. Je repensais alors à notre conversation :
« Je trouverai une solution SEULE ! »
Mes propres mots tournaient en boucle dans ma tête. Voilà pourquoi la vieille femme ne m’avait pas accompagnée. Elle m’avait laissée affronter le problème seule, comme je l’avais demandé. Mais à vrai dire, j’en étais incapable. Pourtant, ce n’était que le début d’un long et infernal cauchemar.
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La Reine des Neiges 3 (Chapitre 49)
Ven 03 Nov 2023, 17:31
Chapitre 49
Honeymaren
Le 20 avril 1847
Je t’écris cette lettre parce qu’ici tout va mal. Hier, lorsque Ryder est rentré, j’ai tout de suite compris que quelque chose n’allait pas. Son visage était complètement déconfit. Il m’a paru profondément bouleversé. Il lui a fallu plusieurs minutes avant de pouvoir tout me raconter. Ses mains tremblaient tandis qu’il me parlait. Il semblait encore sous le choc… Mon esprit a mis du temps avant de digérer toutes les informations qu’il me donnait.
« Nous avons perdu une femme et son enfant », m’a-t-il dit.
Elle était enceinte pour la toute première fois, après des années de tentatives infructueuses. Elle avait quarante ans ; son mari quarante-quatre. C’est lui qui m’a dit tout ça. Si tu avais vu son regard quand il me racontait ce que je te relate ici… Je n’avais jamais vu un homme aussi abattu. Il semblait vide, presque mort même. Il était si pâle que je craignais qu’il s’effondre d’un moment à l’autre. Mais non. Après un long moment de silence, il s’est levé et a quitté la chambre dans laquelle nous nous trouvions, disparaissant je ne sais où. Je ne l’ai d’ailleurs pas revu depuis. Il doit certainement vouloir fuir sa sombre existence sans véritablement y parvenir.
Sais-tu ce que j’ai fait quand je me suis retrouvée seule ? Une chose affreuse que je regrette amèrement. Il y avait cette espèce de table recouverte d’un drap blanc au fond de la pièce. Je savais parfaitement ce qu’il y avait en-dessous mais je n’ai pas pu m’en empêcher, la curiosité était bien trop forte. Je l’ai retiré d’un geste. Le corps inerte qu’il y avait là s’est retrouvé découvert aux trois quarts. L’odeur, la vision du visage de cette femme figé à jamais dans la douleur, la pâleur de sa peau, ses cuisses recouvertes de sang séché que personne n’avait pris la peine de nettoyer… Tout. Tout me répugnait au plus haut point et pourtant je n’ai pas su détourner le regard. Et je m’en veux. Je m’en veux car à présent je suis condamnée à ressasser ce que j’ai aperçu. Si tu savais comme la vue du bébé m’a répulsée… Son petit corps immobile et encore ensanglanté gisait à côté de celui de sa mère. Il était encore loin d’être complètement formé. Les médecins n’avaient même pas pris la peine de couper le cordon qui les retenait l’un à l’autre. Ils resteront liés ainsi pour l’éternité. Mais tu sais ce qui m’a fait le plus de mal ? C’est de voir à quel point ce bébé était minuscule et n’avait pas eu droit à la croissance qu’il était censé avoir. Sa mère n’avait pas pu lui apporter ce dont il avait besoin car elle-même avait souffert de ne pas pouvoir manger à sa faim. J’en ai vomi. Je ne pouvais plus me retenir, pas après l’affreux spectacle auquel je venais d’assister.
Forcément, tout le village a été prévenu de ce drame. Les Northuldra étaient tous rassemblés devant cette cabane dont s’élevait un silence de mort. Je suis la seule à y être entrée. Je ne saurais te dire pourquoi j’ai agi ainsi. Peut-être cette impression de comprendre ce que cet homme à présent veuf pouvait ressentir. Il venait de perdre ce qui était le plus cher à ses yeux. Je connais cette horrible sensation…
L’infirmière qui était là m’a regardée étrangement mais a finalement accepté ma requête sans rechigner. Elle venait d’Arendelle, tout comme le médecin… J’ai été surprise de ne voir ni Yéléna ni Silja à l’intérieur. Pourquoi auraient-elles ignoré une telle tragédie alors qu’elles sont d’ordinaire les premières concernées quand quelque chose tourne mal ? Je ne sais pas. Mais j’ai appris plus tard que Yéléna était enfermée dans sa tente depuis plusieurs heures et avait expressément demandé à ne pas être dérangée…
Je t’écris cette lettre parce que lors de ma sortie de cet épouvantable endroit – tu peux te douter que j’étais au plus mal – quelque chose que je n’avais jamais vraiment remarqué jusqu’ici m’a frappée de plein fouet. J’ai découvert l’animosité silencieuse mais perfide que les gens peuvent avoir les uns envers les autres. Ils étaient tous encore là, formant une masse indistincte de personnes. Pas un murmure ne s’élevait de la foule. Chacun se contentait de jeter de temps à autre un coup d’œil inquiet voire soupçonneux à son voisin d’un air de dire : « A-t-il eu plus de nourriture que moi ces derniers jours ? » ou bien « Je suis sûr qu’il a fait des réserves cet hiver et qu’il les garde égoïstement pour lui ». Là, sous mes yeux, j’ai vu et compris à quel point le monde dans lequel nous vivons est de plus en plus rempli de haine. La confiance disparaît peu à peu et laisse place au doute et à la jalousie. Nous, qui avons toujours été un peuple prônant l’entraide et le respect et maudissant la doctrine du « chacun pour soi » que nous pensions réservée aux civilisations différentes de la nôtre, sommes maintenant en train de devenir ce que nous avons si longuement banni. Et pourquoi ? Parce que le fragile équilibre que nous offrait jusqu’alors la Nature est complètement bouleversé par la disparition d’éléments aussi nécessaires que ceux de la terre, du feu et du vent. Mais il nous reste encore le plus vital d’entre eux : celui de l’eau. Cependant, que se passera-t-il lorsqu’il succombera lui aussi à cette affreuse malédiction ?
Je t’écris cette lettre parce que – je n’ose le dire – une guerre est sur le point d’éclater au cœur du village. Plus personne ne se parle. Chacun ne fait que guetter les moindres faits et gestes des uns et des autres. La tension monte dans ce silence qui s’est installé. Je ne reconnais plus le peuple paisible qu’étaient autrefois les Northuldra. On se méfie de son prochain, on se lève aux aurores dans l’espoir d’être le premier à se servir du peu de ressources qu’il reste dans la forêt. Si tu les voyais se précipiter à l’aube au ruisseau qui longe le village pour y récolter un maximum d’eau… Ils sont sur le point d’arracher des mains de leur voisin le seau rempli que celui-ci tente difficilement de ramener chez lui. La compassion n’existe plus. Cette guerre éclatera à coup sûr si l’esprit de l’eau était amené à disparaître. Et que ferons-nous ? Comme tout le monde malgré tous nos efforts pour nous en départir. Nous n’aurons pas le choix si nous voulons survivre ; parce qu’il s’agira bien là d’une question de vie ou de mort.
Je t’écris cette lettre pour t’implorer de revenir. J’ai besoin de toi. Nous avons tous besoin de toi. Tu es celle qui nous a tirés une première fois d’une malédiction. Je suis persuadée que tu peux y parvenir à nouveau. Malgré tout ce qu’ils peuvent dire, tu as été choisie par la Nature elle-même. Elle t’a donné de tels pouvoirs pour aider humains et monde sauvage à cohabiter. Si tu ne reviens pas, ce sera le chaos comme cela l’a déjà été par le passé… mais au sein même de notre peuple cette fois-ci. Cette femme et son enfant en ont été les premières victimes. Comment ferons-nous pour en supporter davantage ? Arendelle a déjà l’une des descendantes d’Iduna. Nous avons besoin de la deuxième. Alors je t’en supplie, reviens vite.
***
J’hésitai quelques instants à ajouter deux mots sur cette fin de lettre. Deux petits mots simples à écrire mais qui pouvaient tant me coûter. Je me mordis la lèvre inférieure. « Une relation homosexuelle de la sorte – qui plus est avec quelqu’un d’Arendelle – n’est jamais à concevoir. Jamais ! »
Je soupirai et signai à contrecœur de mon prénom, sans une parole de plus. Lorsque je rangeai la lettre dans une enveloppe, mes yeux laissèrent échapper une larme qui vint s’écraser sur le papier. Je voulus l’essuyer du bout du doigt mais trop tard elle y était déjà incrustée, laissant une triste marque. Mon ventre émit soudainement un petit gargouillis que je tentais depuis plusieurs jours d’ignorer. C’était dur, de plus en plus dur, et pourtant, je devais tenir et ne surtout pas me laisser emporter par la folie qui semblait prendre toujours plus de personnes au village.
***
La chaleur extérieure était devenue irrespirable. Pourtant, le centre du petit village grouillait de monde. Les Northuldra se précipitaient d’un bout à l’autre, tenant désespérément un seau d’eau calé sous le bras ou bien quelques racines desséchées mais dont on pouvait espérer faire un bouillon, même froid. Je tentai de me frayer un passage à travers la foule quand soudain une jeune femme s’effondra sous mes yeux. Je me précipitai vers elle, comprenant que la chaleur l’avait terrassée. Elle était épuisée et ne semblait même plus pouvoir tenir debout. Je regardai autour de moi et hurlai : « Est-ce que quelqu’un pourrait m’apporter de l’eau ? »
Personne ne s’arrêta. Ils continuaient imperturbablement leur route, sans même accorder un regard à celle qui était allongée là, inconsciente. Mon cœur se serra.
« S’il vous plaît c’est une urgence ! » criai-je de plus belle.
Ma voix se brisa quand je compris que nul ne me prêterait attention. Je ne peux pas m’éloigner d’elle. Si je le fais, ils la piétineront sans même s’en rendre compte, songeai-je. Je remarquai alors un homme à quelques mètres de moi qui venait de déposer son seau à ses pieds, fatigué de tous ses allers-retours. Il épongea son front couvert de sueur d’une petite serviette qu’il décrocha de sa ceinture. Je me jetai sur lui, saisis le morceau de tissu d’un geste vif et le plongeai dans la petite bassine d’eau encore fraîche.
« Eh ! Qu’est-ce qui t’prends ? » rugit-il en me voyant agir ainsi.
Je lui lançai un regard noir et fis un pas en direction de la jeune femme étendue au sol.
« Lâche-ça ! Ça m’appartient ! hurla-t-il en tentant de m’arracher des mains la serviette que je tenais.
— Elle en a besoin ! m’écriai-je en désignant la pauvre femme.
— Et alors ? Qu’est-ce que j’en ai à faire moi ? »
Il renforça son emprise sur l’objet et m’asséna un violent coup de genou dans les côtes. Je lâchai prise, le souffle subitement coupé. Je me recroquevillai sur moi-même, grimaçant de douleur.
« Maintenant dégage ! dit-il en me poussant hors de son chemin.
— Laissez-la tranquille ! Je pense que vous en avez déjà assez fait. »
Je tournai la tête et aperçus l’infirmière d’Arendelle qui faisait face à l’homme qui m’avait laissée ainsi sans le moindre remord.
« Toi ferme-la et retourne parmi les traîtres ! » lui lança-t-il avant de s’éloigner pour de bon.
La jeune femme parut énervée mais réussit à garder son sang froid. Elle s’approcha de moi et me demanda d’une voix douce :
« Tout va bien ? »
Je me redressai péniblement.
« Je survivrai, répondis-je. C’est d’elle dont il faut s’inquiéter. »
L’infirmière suivit mon regard et se retourna.
« Je vais m’occuper d’elle en vous en faites pas », me dit-elle en s’approchant de la Northuldra encore inconsciente.
Je l’aidai à mettre la jeune femme à l’abri et restai quelques instants à l’observer prodiguer ses soins sur sa nouvelle patiente. Elle s’aperçut rapidement de mon regard.
« Je peux faire quelque chose pour vous ? » me demanda-t-elle.
Je levai les yeux vers son visage souriant.
« Eh bien… j’espérais que vous puissiez remettre ceci à la sœur de la reine, avouai-je en lui tendant la lettre que j’avais écrite quelques minutes plus tôt.
— Elsa ? »
J’acquiesçai. Elle saisit l’enveloppe et ajouta d’un ton sarcastique :
« Ne vous inquiétez pas, je m’assurerai de la lui faire parvenir lors de mon retour chez les traîtres. »
J’eus un petit rire gêné, ne sachant que lui répondre.
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La Reine des Neiges 3 (Chapitre 50)
Sam 11 Nov 2023, 14:03
Chapitre 50
Kristoff
« Mais qu’est-ce qui te prend ? »
Je soupirai, les bras croisés, le regard rivé sur le ciel étoilé.
« J’en sais rien, murmurai-je, espérant secrètement que mes paroles ne soient pas suffisamment audibles.
— Comment ça tu n’en sais rien ? »
Je penchai la tête en arrière, exaspéré par ma propre réponse.
« Kristoff ? »
Je me tournai vers Anna. Elle se tenait au centre de la pièce, à côté du lit, et semblait désespérée, effrayée et triste à la fois. Malgré l’obscurité de la nuit, je parvenais à distinguer ses yeux inquiets qui ne me quittaient pas et sous lesquels commençaient à se dessiner de gros cernes. Les muscles de sa mâchoire étaient tendus. Son visage tout entier semblait crispé, retenant le trop plein d’émotions qu’elle tentait de dissimuler. La lueur de la Lune faisait ressortir la blancheur de sa peau. Cette pâleur qui révélait un manque de sommeil évident m’inquiétait un peu plus jour après jour. La jeune femme ne m’avait pas quitté des yeux. Elle paraissait horrifiée par mon silence. Je la fixais également, impassible, incapable de la moindre réaction. Que veut-elle au juste ? Que je lui dise ce qu’elle sait déjà ? Que je lui rappelle la triste réalité dans laquelle nous vivons ?
« Anna… je suis fatigué et…
— Et quoi ? » demanda-t-elle d’une voix aiguë en retenant ses sanglots.
J’ouvris la bouche mais aucun son ne sortit. La main de la jeune femme se resserra alors autour d’un des montants en bois du lit à baldaquin.
« Je ne comprends pas… », murmura-t-elle.
Son regard était soudainement devenu vide, ne laissant transparaître aucune émotion.
« Depuis le début de notre relation, tu n’as jamais été aussi distant avec moi… Et voilà que depuis quelques jours, tu évites mon regard, tu réduis nos conversations au strict minimum et tu refuses catégoriquement de me dire la vérité quand je te demande ce qui se passe. Pire ! Tu me mens délibérément en me regardant droit dans les yeux et en m’affirmant que tu es juste fatigué alors que je sais pertinemment qu’il y a autre chose. Tu ne t’es jamais comporté comme ça avec moi. Jamais ! Alors je te le redemande : Et quoi ?! »
Le ton de sa voix avait brusquement changé. Le début de ses reproches avait été calme et posé tandis que la fin s’était subitement transformée en un hurlement de désespoir se brisant au beau milieu de son envolée, cassé par des sanglots et des larmes qui avaient finalement réussi à noyer ses yeux bleus. Il y eut un nouvel instant de silence au cours duquel Anna s’apprêta à quitter ma chambre, blessée par mon mutisme.
« Oui je suis fatigué, mais je suis surtout inquiet. Inquiet parce que le monde dans lequel je vis est en train de se déchiqueter, de s’effondrer, morceau après morceau. Inquiet parce que je ne sais pas quel avenir j’aurai au milieu d’un tel chaos qui semble difficilement réversible. Inquiet parce que je dois me marier à la femme que j’aime dans moins de deux semaines et lui promettre de la protéger coûte que coûte alors même que j’ignore si j’en suis capable, si JE suis capable de lui offrir une vie correcte dans ce monde détraqué. Parce que oui il l’est, et semble être atteint un peu plus gravement chaque jour. »
Anna s’était arrêtée, la main figée sur la poignée de la porte. Elle me tournait le dos, m’empêchant de voir ses réactions à mes propos. Je m’approchai d’elle et posai la main sur son épaule. Lorsque nos peaux entrèrent en contact, la jeune femme se retourna brusquement, saisit ma nuque et plaqua ses lèvres contre les miennes. Surpris, je perdis légèrement l’équilibre mais réussis à me rattraper sur la porte derrière elle, tout en lui rendant son baiser.
« Je pensais que tu ne m’aimais plus… finit-elle par dire au bout de quelques secondes, encore essoufflée.
— Moi ? Jamais » la rassurai-je tout en passant mon pouce sur ses joues pour essuyer ses larmes.
Elle me sourit et me serra contre elle, la tête posée sur ma poitrine. Ses sanglots s’étaient enfin calmés. Sa respiration était redevenue fluide.
« Pourquoi ne passerions-nous pas la nuit ensemble pour une fois ? »
Anna décolla son visage de moi et fronça les sourcils.
« Tu sais bien qu’on ne peut pas.
— Au diable ce fichu protocole ! Ne me dis pas que le respecter reste dans tes priorités… »
La jeune femme baissa les yeux, affichant un air sombre.
« Anna, je ne sais pas… »
Je soupirai.
« Je ne sais pas combien de temps nous pourrons tenir dans ces conditions ni si le monde qui nous entoure ne s’effondrera pas complètement demain. Si cela devait s’arrêter, si ma vie devait s’arrêter là, maintenant, je regretterais de n’avoir partagé plus de moments privilégiés avec toi. Cela fait trois ans que nous vivons ensemble et pourtant j’ai l’impression que je n’ai jamais passé aussi peu de temps avec toi que depuis que je suis au château. »
Anna continuait à fixer le sol, le regard vide.
« Tu es sûre que le protocole est le seul problème ? lui demandai-je.
— Je ne suis pas prête c’est tout.
— Pas prête à quoi ? »
Elle leva ses grands yeux bleus dans ma direction tout en se mordillant légèrement la lèvre inférieure.
« Eh bien… » hésita-t-elle.
Je lui lançai un regard interrogateur. En voyant sa gêne grandissante, je compris enfin à quoi elle faisait allusion.
« Tu sais que dormir ensemble n’inclut pas forcément… ce genre de choses, n’est-ce pas ? » lui fis-je remarquer.
Elle eut un petit rire gêné et replaça une mèche de cheveux imaginaire derrière son oreille.
« Alors ? Tu préfères passer la nuit seule dans une chambre sombre et froide ou bien en compagnie du plus bel homme dont une femme puisse rêver sur Terre ?
— Présenté comme ça…
— Je peux même proposer un massage de pieds en supplément. »
Le visage d’Anna s’illumina. J’avais touché la corde sensible.
« Eh bien c’est d’accord », dit-elle finalement.
***
Nous étions allongés côte à côte depuis une trentaine de minutes. L’heure défilait sur l’horloge sans même que nous nous en rendions compte. Les discussions battaient leur plein ; tous les sujets étaient abordés sans qu’il y ait le moindre blanc dans la conversation. Seulement, nous évitions d’évoquer les drames auxquels nous étions quotidiennement confrontés depuis quelques semaines. C’était notre moment. Rien ni personne ne pouvait nous le gâcher. Soudain, le ventre d’Anna se mit à gargouiller, interrompant momentanément nos flux continus de paroles. « Tu as faim ? lui demandai-je, amusé dans un premier temps.
— Non, ce n’est rien », répondit-elle en plaçant ses mains sur son estomac à travers sa robe de nuit.
Je me redressai en m’appuyant sur mon avant-bras, subitement inquiet.
« Tu es sûre ? Ça n’a pas l’air d’aller… »
Un nouveau gargouillis s’échappa. La jeune femme ferma les yeux, tentant de se concentrer sur autre chose.
« Anna ! Depuis quand n’as-tu pas mangé ?
— Tout le monde est dans le même cas Kristoff ! Ce n’est pas la peine de… »
Un hennissement au-dehors la coupa net.
La jeune femme se redressa subitement. Elle semblait avoir oublié les bruits de son estomac et écoutait attentivement, assise en tailleur sur le lit. Au bout de quelques secondes passées dans le silence, elle se rallongea, à la fois déçue et suspicieuse.
« Qu’est-ce qu’il y a ?
— J’ai dû me tromper… dit-elle en enfonçant sa tête dans l’oreiller. Tu n’as rien en… »
Le hennissement retentit de nouveau. Cette fois-ci, Anna sauta d’un bond hors du lit et se précipita vers la fenêtre, encore à pieds nus.
« Qu’est-ce que tu as ? Un cheval doit certainement s’exciter dans l’écurie, rien de plus », dis-je en haussant les épaules.
La jeune femme appuya son front sur la vitre et mit ses mains en œillères autour de son visage pour tenter de contrer le reflet de la lumière dansante de la Lune qui l’empêchait de distinguer quoi que ce soit au-dehors, là où il faisait nuit noire depuis plusieurs heures déjà.
« Non c’est autre chose. C’est forcément autre chose. Ils ne font jamais ça d’habitude. »
Je levai les yeux au ciel et soupirai avant de la rejoindre. Je posai une main sur son épaule et l’imitai, jetant un coup d’œil aux écuries en contrebas.
« Il ne se passe rien, dis-je sur un ton exaspéré, il n’y a pas de lumière, tout est éteint. Comment voudrais-tu que… »
Je m’interrompis soudainement, n’ayant pas lâché du regard l’entrée de l’écurie à travers laquelle une ombre venait de se faufiler silencieusement. Je déglutis et clignai plusieurs fois des yeux, persuadé qu’il s’agissait là d’une erreur de ma part, d’un court moment de rêverie durant lequel ma vue m’avait trompé. Anna me jeta un coup d’œil en coin et leva un sourcil, attendant la fin de ma phrase. Je ne devais rien laisser transparaître ; il ne fallait pas l’inquiéter.
« Co… Comment voudrais-tu que l’on entre là-dedans avec cette obscurité ? fis-je d’une voix tremblante malgré tous mes efforts pour garder mon calme.
— Kristoff… On n’a plus de lumière. Et… il suffirait de connaître les lieux, répondit-elle, le front toujours collé contre les carreaux.
— De quoi as-tu peur ? Que l’on vole un cheval ?
— C’est suffisant, non ? »
Je marquai une pause, à court d’arguments.
« En ces temps difficiles où l’on a de moins en moins de nourriture, je t’assure que je préférerais éviter de retrouver un des chevaux du palais en grillade… reprit-elle, de plus en plus tendue.
— Cela dit ce serait…
— Chut ! Ne dis pas un mot de plus ! me coupa-t-elle.
— Et puis de toute façon, nous n’avons plus de feu…
— Chut ! répéta-t-elle en appuyant sa main sur ma bouche pour me faire taire. Tu as très bien compris ce que je voulais dire. »
Je ris pour détendre l’atmosphère. En vain. Soudain, Anna devint toute pâle et balbutia en pointant les écuries du doigt :
« Kristoff… regarde… »
Je suivis la direction qu’elle m’indiquait. A vrai dire, l’obscurité ne rendait pas la chose facile. Tout était si sombre… Il était difficile d’apercevoir quelque chose nettement. Pourtant, je m’y contraignais et plissais les yeux dans l’espoir de voir ce qui l’effrayait tant. Là, dans un coin éclairé par la lune, une ombre se glissait furtivement en dehors de l’écurie. Une ombre qui formait une silhouette humaine. Puis, bientôt, une deuxième silhouette se détacha. Celle d’un cheval dont les sabots clapotaient contre les pavés de la cour, rompant le silence de la nuit.
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Re: La Reine des Neiges 3
Sam 11 Nov 2023, 14:21
Alors je suis pas experte mais un homme qui viendrait dans un écurie pour des chevaux, ça serait pas un certain rouquin des îles du Sud ?!
Sinon c'est quand le prochaine point de vue d'Anna ?! Parce que là j'y ai cru quand ils ont dit qu'ils allaient dormir tous les deux...
Sinon c'est quand le prochaine point de vue d'Anna ?! Parce que là j'y ai cru quand ils ont dit qu'ils allaient dormir tous les deux...
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Re: La Reine des Neiges 3
Sam 11 Nov 2023, 15:26
Le prochain point de vue d'Anna c'est la semaine prochaine !Ansa a écrit:Alors je suis pas experte mais un homme qui viendrait dans un écurie pour des chevaux, ça serait pas un certain rouquin des îles du Sud ?!
Sinon c'est quand le prochaine point de vue d'Anna ?! Parce que là j'y ai cru quand ils ont dit qu'ils allaient dormir tous les deux...
Eheh ça arrivera....
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Re: La Reine des Neiges 3
Sam 11 Nov 2023, 15:27
ça finira bien par arriver !
- FloconnetteLégende du Royaume
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Re: La Reine des Neiges 3
Sam 11 Nov 2023, 19:13
Faut peut être envoyer Ylva pour débloquer tout ça @Ansa!
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Re: La Reine des Neiges 3
Sam 11 Nov 2023, 19:17
Floconnette a écrit:Faut peut être envoyer Ylva pour débloquer tout ça @Ansa!
Tu rigoles ! Mais c'est le premier truc que j'ai dit en lisant xD ah la la pauvre Ylva...C'est peut être pas le bon moment remarque...
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La Reine des Neiges 3 (Chapitre 51)
Ven 17 Nov 2023, 18:32
Chapitre 51
Anna
Je sortis en courant de la chambre, pieds nus et à peine vêtue, et me précipitai à travers les longs couloirs du palais. Je dévalai quatre à quatre les marches de l’escalier menant au rez-de-chaussée et me jetai sur la porte massive aux énormes battants qui donnait sur la cour.
« Anna ! Anna, attends ! »
Kristoff m’appelait. Mais il était trop loin encore. La curiosité et l’inquiétude me poussaient à aller voir ce qu’il se passait dehors. J’entrouvris la lourde porte et me glissai discrètement à l’extérieur. Bien que ce fusse la nuit, une chaleur épaisse qui comprimait la poitrine et les poumons de tous ceux qui s’aventuraient au-dehors régnait dans l’atmosphère. Il faisait sombre ; tous les lampadaires étaient éteints et personne ne pouvait y remédier. Je devais me contenter de la lumière blanche de la Lune qui dominait le ciel dépourvu de nuages. Sa lueur blanchâtre se réverbérait sur les fenêtres du château, rendant impossible toute tentative d’épier ce qu’il se passait à l’intérieur. Avec un peu de chance, ce mystérieux individu voleur de cheval n’avait pas pu nous voir, Kristoff et moi, guettant ses moindres faits et gestes. J’avançai silencieusement, craignant de me faire surprendre. Mes pieds nus caressaient la surface lisse des pavés de la cour. Ils dégageaient lentement la chaleur accumulée durant la journée, si bien que je ne pouvais rester au même endroit trop longtemps, de peur de me brûler.
« Qu’est-ce que tu fais ? »
Je sursautai et lâchai un petit cri avant de me retourner vivement.
« Tu m’as fait peur ! Ne me refais plus jamais ça ! » chuchotai-je en voyant Kristoff derrière moi.
Il lança un regard désespéré vers mes pieds et soupira.
« Tu es complètement folle.
— Oui bon je me suis peut-être un peu précipitée. Mais tu me connais, je veux voir ce que cette personne trame et potentiellement l’arrêter.
— En robe de nuit ?
— Eh bien… euh… j’improviserai ! »
Je pris la main du jeune homme et nous traversâmes prudemment la cour ainsi jusqu’à l’écurie. On avait pris soin de refermer sa petite porte en bois. Je poussai lentement cette dernière, laissant entrer les rayons de la Lune à l’intérieur. Un cheval – le mien – redressa la tête, certainement à nouveau perturbé. Cependant, il n’y avait plus personne. Seul un box vide m’assurait que nous n’avions pas rêvé, que cet individu avait bel et bien existé et n’avait pas été inventé de toute pièce par notre imagination.
« C’est quand même bizarre… chuchotai-je en refermant la porte de l’écurie.
— Que cette personne se soit enfuie dans la nuit ? Moi je trouve ça normal. Généralement lorsque l’on commet un crime, quel qu’il soit, on évite de rester sur son lieu en portant autour du cou une pancarte disant « allez-y arrêtez moi », me taquina Kristoff.
— Haha très drôle ! ironisai-je. Non, ce que je veux dire c’est pourquoi voler un cheval et ensuite tout remettre en ordre et prendre la peine de fermer la porte derrière soi alors que l’on sait pertinemment que ce vol ne passera pas inaperçu ? »
Le jeune homme haussa les épaules, incapable de répondre à ma question. Soudain, les bruits de sabots revinrent. Ils semblaient à peine plus lointains que précédemment.
« Les pavés ! Il est toujours sur les pavés ! Il n’a pas quitté le village ! m’enthousiasmai-je. Suis-moi ! »
Je me mis alors à courir, ignorant la douleur que les pierres jonchant une grande partie d’Arendelle infligeaient à mes pieds nus. Je faillis me tordre la cheville à plusieurs reprises, manquant de m’étaler de tout mon long sur le sol à cause de cet élan d’excitation. Kristoff me rattrapait in extremis en agrippant mon bras par l’arrière, tout aussi impatient que moi de découvrir qui se cachait derrière tout cela. Nous traversâmes quelques rues, prêtant à peine attention à ce qui nous entourait. Je me stoppai soudainement dans ma course folle et m’immobilisai au milieu d’une allée. Le jeune homme qui me suivait de près se cogna de plein fouet contre moi, surpris de cet arrêt.
« Mais enfin qu’est-ce que tu fais ? s’énerva-t-il en s’appuyant contre mes épaules pour reprendre son équilibre.
— Chut !
— Ça y est tu recommences…
— J’essaye d’écouter… Je n’entends plus rien et toi ? » soupirai-je.
Kristoff se figea, les yeux fixés sur le sol, concentré sur les bruits autour de lui. Pourtant, c’était le calme plat, plus rien ne venait fendre le silence de la nuit. Il me lança un regard désespéré ; il en venait à la même conclusion que moi.
« Argh ! Si seulement… »
Je ne pus râler davantage. J’avais tourné la tête vers une autre rue, sur notre gauche, reliée à la nôtre par une petite ruelle plongée dans le noir. Là, dans cette seconde allée, se tenait la silhouette que nous avions aperçue, accompagnée d’un cheval. Je la désignai du menton à Kristoff, ne voulant pas attirer l’attention de cet individu suspect. Le jeune homme m’attrapa par la main, me plaça derrière lui et avança vers l’étroite ruelle dans laquelle nous serions mieux cachés. Je le poussai légèrement et repassai devant.
« Je veux voir ! murmurai-je d’un ton qui se voulait autoritaire.
— Mais Anna !
— Chut ! »
Kristoff se tut et poussa un léger soupir dont le souffle chaud vint se répercuter contre ma nuque. Je souris, satisfaite de cette petite victoire. Nous rasâmes ensuite silencieusement un des murs encadrant la petite ruelle. Il y faisait chaud. Ces murs de pierres rapprochés créaient un espace d’à peine deux mètres de large dans lequel l’air chaud était conservé en permanence. Lorsque nous arrivâmes au bout, nous nous accroupîmes dans l’ombre, espérant que nous serions moins visibles ainsi.
« Alors ? » souffla Kristoff dans mon oreille.
Je distinguais plus nettement la silhouette d’une femme. Elle tenait d’une main la bride du cheval volé, de l’autre une sorte de carte ou tout du moins un morceau de papier usé qui semblait avoir été plié et replié de nombreuses fois qu’elle étudiait attentivement. Elle portait également une longue cape noire dotée d’une capuche qui m’empêchait de voir son visage.
« C’est difficile à dire, il fait trop sombre… » murmurai-je au jeune homme qui semblait suspendu à mes lèvres.
Soudain, mon ventre – que j’avais oublié – se remit à gargouiller bruyamment, rompant le silence qui s’était installé : je mourrais de faim. La femme qui ne se tenait qu’à quelques mètres de nous parut l’entendre et tourna la tête dans notre direction. Kristoff et moi nous écrasâmes un peu plus contre le mur, retenant notre souffle. Mon cœur palpitait si fort dans ma poitrine que je craignais qu’elle ne l’entende. Mais, alors qu’elle lançait des regards effrayés autour d’elle, un détail me frappa. Une mèche de ses cheveux s’était échappée de sa capuche et laissait entrevoir des reflets argentés sous la lumière de la Lune.
« Attends une minute… » murmurai-je.
Je me redressai en repoussant le mur derrière moi et fis un pas vers la femme.
« Qu’est-ce que tu fabriques ? » me demanda Kristoff d’une voix paniquée.
Il saisit ma main pour m’empêcher d’avancer davantage. Je m’échappai de son emprise, sûre de moi, et avançai dans la sombre clarté de la rue. Mes pieds épousaient à présent la surface lisse des pavés. Je jetai un rapide coup d’œil en arrière : le jeune homme, qui s’était redressé, se tenait toujours dans l’ombre et me regardait faire, peu convaincu. Je levai un pouce en l’air pour tenter de le rassurer, ce qui n’eut pas tellement l’effet espéré quand je remarquai les muscles tendus de sa mâchoire.
La femme s’était tournée vers le cheval et ne semblait pas m’avoir aperçue. Ok Anna tu peux le faire, m’encourageai-je. J’inspirai profondément et, quand je fus suffisamment proche, ma main attrapa fermement son épaule, bien décidée à ne pas la laisser s’échapper. Elle sursauta, surprise, et avant qu’elle ne puisse faire quoi que ce soit, je la forçai à se tourner vers moi.
« Elsa ?! C’est… c’est toi ? » hoquetai-je en découvrant son visage.
Je la lâchai immédiatement et restai bouche-bée devant ma sœur. La jeune femme sourit faiblement, visiblement gênée.
« Tu parais déçue.
— Non ! Simplement étonnée… Comment… ? Pourquoi… ? Enfin… Qu’est-ce que tu fais là ? lui demandai-je.
— Eh bien je… »
Elle s’arrêta, levant les yeux vers Kristoff qui courrait me rejoindre.
« Je dois partir, reprit-elle froidement.
— Quoi ? Mais on avait dit que tu resterais ici, à Arendelle !
— Je sais… Je n’ai pas le choix Anna…
— Tu comptais quitter le château comme ça, sans rien dire à personne ? m’énervai-je.
— Non ! Mais je ne savais pas comment te le dire et… la nouvelle est tombée si soudainement… j’ai été prise de court.
— Je ne comprends pas, quelle nouvelle ? »
Elsa déplia le papier qu’elle tenait quelques minutes plus tôt et me le tendit.
« Qu’est-ce que c’est ? soupirai-je en l’attrapant.
— Une lettre. Une lettre d’Honeymaren. »
Au prénom de la jeune femme, je levai les yeux vers ma sœur. Cette dernière me regardait gravement et je devinai qu’elle retenait ses larmes. Je parcourus rapidement le morceau de papier, survolant l’écriture de la Northuldra qui semblait de plus en plus tremblante et hésitante au fur et à mesure de ma lecture.
« Que veux-tu y faire ? Tu n’y peux rien, lâchai-je finalement.
— Je dois partir, je dois y retourner.
— Et alors ? Ça changera quoi ?
— Je n’ai pas le choix…
— Qu’est-ce que ça prouvera ? Que tu préfères mourir dignement parmi eux ?
— Anna…
— A quoi ça te sert de retourner là-bas à part risquer ta vie ?
— Anna ! Quand est-ce que tu comprendras que je fais partie des cinq esprits, des cinq gardiens de la forêt enchantée ? Si je t’ai proposé d’être reine d’Arendelle c’était pour pouvoir veiller sur cette forêt et sur son peuple de mon côté ! » cria Elsa.
Son cri résonna dans les rues vides du royaume. Des larmes de colère étaient apparues au coin de ses yeux. Je tentai de reprendre mon calme malgré ma rage intérieure. Kristoff posa une main sur mon épaule. Je levai les yeux vers lui. Il me regardait tristement mais savait tout comme moi que je ne pouvais retenir ma sœur.
« Très bien », marmonnai-je à contrecœur.
La jeune femme sembla surprise de ma résignation. Elle sourit et me serra dans ses bras.
« Je suis désolée, mais il faut que j’y aille. Ils ont besoin de moi… » me chuchota-t-elle à l’oreille.
Elle m’embrassa sur le front, attrapa la bride de son cheval et monta sur ce dernier, sa longue cape noire tombant sur les flancs de l’animal. Elle le talonna légèrement et partit au galop vers les hauteurs du royaume, là où commençait la piste menant à la forêt enchantée. Kristoff et moi la regardâmes disparaître dans la nuit, sans un mot.
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La Reine des Neiges 3 (Chapitre 52)
Sam 25 Nov 2023, 13:16
Chapitre 52
Elsa
Cela faisait des heures que j’avançais à travers les bois. Le jour commençait tout juste à se lever et laissait d’immenses balafres rosées au travers du ciel. Cela faisait longtemps que je ne l’avais pas vu aussi clair et dégagé que ce matin-là. Peut-être était-ce de bon augure pour le restant de mon voyage… Pourtant, au fur et à mesure que je progressais, je découvrais de plus en plus d’arbres morts, complètement noirs et dénudés de feuilles. Je m’approchais de la forêt enchantée pour sûr, mais ce qui m’inquiétait, c’était que ces arbres et leur terrible maladie ne cessaient de gagner du terrain, s’avançant toujours plus vers Arendelle. Je tentais de les ignorer en ne leur accordant pas plus que quelques regards furtifs. Mais c’était inutile, tout cela trottait dans un coin de ma tête malgré toutes mes tentatives pour me changer les esprits. Je me forçai alors à fixer la crinière de mon cheval qui se balançait lentement le long de son encolure au rythme de ses pas. Cela me permettait de faire abstraction de ce qui m’entourait, du moins pour le moment. Soudain, des cris me firent sursauter. Mon cheval fit un violent écart, pris de peur lui aussi. Je réussis à me retenir à lui, m’empêchant de tomber.
« Doucement… » lui murmurai-je en le caressant d’une main tremblante.
L’écho de ces cris étranges résonnait toujours dans la montagne. Ils venaient de l’est, j’en étais certaine. Je regardai un instant le chemin qui se dessinait au travers les bois devant moi. Je n’avais qu’à le suivre, il me mènerait tout droit au camp Northuldra. Mais ma curiosité était plus forte. Lorsque de nouveaux cris dans lesquels je pouvais clairement percevoir une rage naissante retentirent, je me décidai et forçai mon cheval à partir sur la droite, dans une partie plus rocheuse et escarpée de la montagne.
Ses sabots produisaient un cliquetis sur les énormes pierres qui recouvraient le sol. Je n’étais pas sereine, sentant à chacune des nouvelles foulées de l’animal qu’il dérapait sur cette surface bien trop glissante pour lui. T’es complètement inconsciente Elsa ! pensai-je en me tenant fermement aux rênes. Nous arrivâmes bientôt devant un passage très étroit où se trouvait d’un côté le vide et de l’autre une paroi rocheuse. Je stoppai mon cheval et soupirai. Tout était calme depuis plusieurs minutes.
« Peut-être… Peut-être que ça n’en vaut pas la peine finalement », dis-je en ne quittant pas des yeux le minuscule chemin à flanc de falaise devant moi.
L’animal hennit, paraissant acquiescer, et recula de quelques pas, effrayé. Je m’apprêtai à faire demi-tour quand subitement, les hurlements reprirent de plus belle, bien plus proches cette fois :
« Donne-moi ça idiot !
— Tu vois pas que c’est pas le moment là ?!
— Oh la ferme ! »
Je levai la tête et me penchai légèrement pour tenter de voir ce qu’il se passait au-delà du passage escarpé. En vain, des arbres immenses me cachaient la vue. Des pins. Je ne connaissais pas cette partie de la forêt, cela pouvait être dangereux. Je descendis de mon cheval et inspirai profondément tout en ôtant mes chaussures à talon. Je saisis d’une main peu sûre ses rênes et avançai vers le sentier rocheux.
« Ok… murmurai-je en posant un pied sur la première pierre qui se présentait à moi. T’es complètement folle ! »
Mon cheval commença à s’affoler et me tira en arrière. Je l’ignorai et continuait ma lente progression, une main posée sur la paroi rocheuse, l’autre toujours fermement agrippée aux rênes. L’animal recula de nouveau, manquant de me faire tomber.
« Je t’en prie j’ai besoin de toi ! » lui lançai-je pour essayer de le rassurer comme je pouvais.
Il hennit bruyamment, secoua la tête et finit par avancer timidement vers moi. Je soupirai de soulagement et repris ma route en essayant de ne pas jeter le moindre coup d’œil en contrebas. Je savais pertinemment que si mon cheval glissait, il m’entraînerait avec lui dans sa chute sans que je puisse le retenir, et vu ce qui nous attendait en bas, nous aurions peu de chance de nous en sortir intacts. Mes pieds nus sur les pierres me faisaient terriblement souffrir. T’as vraiment choisi le bon jour pour mettre des chaussures à talon… Qu’est-ce qu’Anna dirait ? Je souris en songeant au visage affolé de ma sœur. Mais cette pensée me fit perdre un instant ma vigilance : mon pied dérapa et, en tentant de me rattraper, il rencontra le bord d’un rocher saillant. J’étouffai un cri de douleur quand je sentis que ce dernier s’enfonça dans ma chair. Je devins blême en voyant le sang s’échapper de la plante de mon pied. Mon cheval s’était brusquement arrêté derrière moi. Je sentais son souffle chaud sur ma nuque. Nous ne pouvions pas rester là, c’était trop dangereux. Alors, je pris sur moi et réussis à marcher en boitillant et en retenant ma respiration. Chaque fois que je posais mon pied blessé sur une nouvelle pierre, j’y laissais une trace rouge vif qui paraissait indélébile. Lorsque j’arrivai enfin de l’autre côté de ce terrible chemin je relâchai enfin la pression et repris mon souffle. Je remis rapidement mes chaussures, préférant encore cela à marcher pieds nus. Soudain les voix reprirent. Des voix d’hommes, accompagnées de terribles grognements. Sans plus attendre, je montai sur mon cheval et le lançai au galop à travers les pins.
Nous débouchâmes rapidement sur une petite clairière. Je tirai d’un coup sur les rênes de ma monture qui s’arrêta subitement. Trois hommes s’y trouvaient, tous armés de piques de bois ou de lances. Ils n’étaient pas seuls. Un loup leur faisait face. L’animal paraissait paniqué et était devenu très agressif. Cependant, les trois individus devant lui formaient un trio bien plus menaçant encore. En voyant leurs vêtements et leurs armes, je devinai qu’ils étaient Northuldra. Mon cœur s’emballa dans ma poitrine.
« Qu’est-ce que vous faites ?! » leur hurlai-je d’une voix paniquée.
L’un d’entre eux me jeta un regard glacial tandis que les deux autres ne quittaient pas leur cible des yeux.
« Oh mais regardez qui revoilà ! » me lança le premier d’un air moqueur.
Ses deux compagnons ne m’accordèrent qu’un rapide coup d’œil. Le loup profita de ce court instant d’inattention pour tenter de s’échapper. L’un des hommes lui barra la route et l’attaqua de sa lance. La lame de cette dernière transperça alors la fourrure de l’animal. Celui-ci poussa un cri et fit un bond en arrière. J’étais comme paralysée, incapable de faire le moindre mouvement face à cet affreux spectacle.
« On a décidé de revenir hein ? C’était pas assez bien dans ton château ? »
J’essayais de ne pas prêter attention au ton railleur de cet étranger. Mes yeux étaient rivés sur le pauvre animal au centre de la clairière. Ce dernier sembla soudainement redoubler de rage. Il se mit à grogner si fortement que l’on pouvait voir apparaître ses crocs entre ses babines retroussées. Il se jeta d’un bond sur l’homme m’ayant adressé la parole et referma sa mâchoire puissante autour de son bras. Le Northuldra hurla, surpris du soudain regain de vivacité de l’animal. Plus il tentait de se dégager, plus les crocs pointus du loup se resserraient autour de lui. Après un court instant de réaction, les deux autres hommes se précipitèrent vers leur ami pour l’aider. Ce ne fut que lorsque je les vis tous les trois s’acharner sur l’animal que j’eus enfin le déclic. Je descendis d’un bond de mon cheval et m’avançai d’un pas rapide et décidé vers le groupe. L’un des Northuldra dégaina vivement sa lance, prêt à achever le loup. Je l’en empêchai in extremis en projetant un jet de glace rapide et puissant dans sa direction. L’animal, effrayé, lâcha soudainement prise. Les trois hommes me regardèrent, interloqués.
« Sorcière ! » siffla l’un d’eux.
Ce mot retentit douloureusement en moi. J’entendis mon cheval pousser un hennissement inquiet dans mon dos. Le loup fit une nouvelle tentative de fuite. Un des Northuldra jeta alors sa lance dans sa direction et l’atteignit en pleine épaule. L’animal s’effondra au sol, encore vivant.
« Tue-le ! » lui ordonnèrent les deux autres.
Prise de colère, je les attaquai sans plus hésiter, retournant mes pouvoirs contre eux. J’en projetai un violemment contre un arbre, l’entourant d’énormes piques de glace pour m’assurer qu’il ne s’échapperait pas. Ses compagnons, terrifiés sur le moment, tentèrent de s’échapper en courant. Je créai une immense plaque de verglas sous leurs pieds pour les en empêcher. Quelque chose en moi se réveillait. Quelque chose que j’avais tu depuis des années. Une rage terrible s’emparait de moi mais je tentais de la contenir car je savais qu’elle pouvait devenir dévastatrice.
Les deux hommes rampaient tant bien que mal sur la glace. J’en profitai pour me précipiter vers le loup, toujours au sol. Il se mit à grogner férocement lorsque je m’approchai de lui. Prenant mon courage à deux mains, je saisis la lance et la retirai d’un coup sec de son épaule. L’animal poussa un jappement aigu mêlant douleur et surprise, puis se releva difficilement. Je me retournai vers les deux Northuldra que j’avais laissés au sol. Il n’y en avait plus qu’un, celui au bras ensanglanté qui visiblement n’avait pas pu se relever à cause de sa blessure. Je levai les yeux. Le second courait vers le fond de la clairière où se trouvait une petite cabane en bois que je n’avais pas remarquée jusque là. Il y entra précipitamment et en ressortis quelques secondes plus tard, tenant entre ses mains un objet que je ne parvenais pas à distinguer. Lorsqu’il se rua de nouveau dans ma direction, je compris – trop tard – de quoi il s’agissait. Un fusil. En une fraction de seconde, il braqua son arme vers le loup et tira sans hésiter, ne me permettant aucune réaction. L’animal sauvage s’effondra, mort cette fois-ci.
« NON ! » hurlai-je.
Mon cheval, qui était resté sur le côté, hennit et se cabra de peur avant de partir au galop vers le fond de la clairière. Je jetai un dernier regard au Northuldra qui tenait toujours fièrement le fusil entre ses mains. Ses deux amis – qui s’étaient finalement dégagés de mes entraves – se tenaient à ses côtés et me lançaient des sourires malsains. Il était inutile que je fasse le moindre mouvement dans leur direction, ils étaient armés, moi non. Je n’avais plus rien à défendre maintenant. Alors, je partis en courant à la poursuite de mon cheval, contournant la petite cabane en bois. Je continuai à courir sur plusieurs dizaines de mètres avant de m’arrêter net devant une immense paroi rocheuse qui formait une impasse infranchissable. Mon cheval se trouvait devant et semblait s’être calmé, broutant tranquillement l’herbe jaunie. J’avançai jusqu’à lui et caressai tristement son encolure. Soudain, un grondement étrange retentit. L’animal ne parut pas s’en inquiéter et continuait d’arracher machinalement l’herbe qui se présentait à lui. Le sol commença à trembler sous mes pieds. Je levai lentement les yeux vers le haut de la paroi rocheuse. Elle tremblait, elle aussi. Une énorme pierre s’en détacha sans crier gare, entraînant d’autres rochers dans sa chute. Dans un geste de pur réflexe, je voulus nous protéger en créant une voûte de glace au-dessus de nous. Mais rien ne se produisit.
***
Je suffoquai. Le peu d’air que je pouvais respirer était rempli de poussière. Je tentai de me dégager comme je pouvais. Une vive douleur au-dessous des côtes m’arrêta net dans mes mouvements. J’y posai une main et sentis un liquide chaud couler entre mes doigts. Du sang… pensai-je en grimaçant. Je devais me sortir de là au plus vite. Je posai les mains sur les rochers qui m’entouraient. Encore une fois, rien ne se produisit malgré tous mes efforts. Ma magie semblait s’être évaporée. Le stress commença à m’envahir. Je tentai de respirer calmement mais c’était presque impossible. Je poussai alors les pierres de toutes mes forces et, au bout de quelques secondes, une première roche céda sous la pression de mes doigts. D’autres suivirent en cascade, me permettant enfin de me libérer. La lumière m’éblouit, m’obligeant à plisser les yeux. Je pris une profonde inspiration, savourant de nouveau l’air frais. Soudain, une nouvelle vague d’angoisse me submergea lorsque je me rappelai d’une chose : mon cheval. Je tournai la tête de tous les côtés, le cherchant du regard. Ne le voyant pas, je décidai d’escalader prudemment le tas de roches qui s’était écrasé au sol. Ce ne fut que lorsque je me trouvai au sommet, que je trouvai enfin l’animal de l’autre côté. Il n’avait pas eu la même chance que moi. D’énormes pierres recouvraient la majeure partie de son corps. Sa robe claire était parsemée de sang. Il gisait là, mort.- AnsaAdmin
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Re: La Reine des Neiges 3
Sam 25 Nov 2023, 13:27
C'est moi ou ça sent pas bon pour Elsa ?!
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Re: La Reine des Neiges 3
Sam 25 Nov 2023, 13:39
En effet ça commence à se compliquer sérieusement...Ansa a écrit:C'est moi ou ça sent pas bon pour Elsa ?!
- AnsaAdmin
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Re: La Reine des Neiges 3
Sam 25 Nov 2023, 13:40
x.a.l.a.n.d.a a écrit:En effet ça commence à se compliquer sérieusement...Ansa a écrit:C'est moi ou ça sent pas bon pour Elsa ?!
Y a encore combien de chapitres ?
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Re: La Reine des Neiges 3
Ven 01 Déc 2023, 17:15
BeaucoupAnsa a écrit:x.a.l.a.n.d.a a écrit:En effet ça commence à se compliquer sérieusement...Ansa a écrit:C'est moi ou ça sent pas bon pour Elsa ?!
Y a encore combien de chapitres ?
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La Reine des Neiges 3 (Chapitre 53)
Ven 01 Déc 2023, 17:17
Chapitre 53
Honeymaren
« Elle ne reviendra pas pauvres idiots ! Elle a choisi son camp, et ce n’est pas le nôtre !
— Et alors ? Tant mieux non ? Depuis qu’elle est ici, elle ne nous a apporté que des malheurs ! »
Tout le monde se tut. J’écoutais, sans rien dire, depuis le début de cette réunion. Mon frère était assis à côté de moi et paraissait inquiet. Malgré la nuit noire, nous nous étions tous rassemblés au centre du village, assis sur des pierres ou des morceaux de troncs d’arbres desséchés. Le ciel était dégagé. La lune et les étoiles étaient notre seule source de lumière. Cependant, personne ne paraissait gêné de cette faible luminosité. Nous y étions habitués dorénavant. Puis, au bout de longs instants de silence, une nouvelle voix s’éleva :
« Ah oui ? Quoi ?
— Quoi ? Je ne pensais pas qu’on me poserait la question, ça me paraissait évident mais si tu insistes… Tu crois vraiment que toutes les catastrophes qui nous tombent dessus aujourd’hui ne sont que les fruits du hasard ? Eh bien non ! Si nous en sommes là, à crever de faim, je peux vous assurer que c’est pour une raison, et pas n’importe laquelle ! »
Yéléna, qui était restée silencieuse jusque là, se leva pour faire face à l’homme au centre de l’assemblée.
« Qu’entends-tu par là au juste ? » lui demanda-t-elle calmement.
Ils se firent face silencieusement quelques secondes. On pouvait sentir dans les regards qu’ils se jetaient toute la tension qui régnait dans l’atmosphère.
« Je pense, ô chef vénérable, que c’est en grande partie de ta faute ! C’est toi qui a accepté que cette… que cette fille nous rejoigne ! Et selon moi, ce genre de décision complètement injustifiée et incongrue témoigne d’un manque d’aptitude à diriger convenablement un peuple ! »
Des murmures fusèrent de toute part dans l’assemblée. L’insolence de l’homme ne sembla pas ébranler Yéléna qui se tenait toujours droite, faisant mine de ne pas s’appuyer sur son bâton. Elle le fixait durement, affichant un visage sévère mais parfaitement assuré.
« Eh bien, que proposes-tu alors ? » dit-elle en ne le lâchant pas du regard.
Le Northuldra sembla déstabilisé par le calme de sa voix. De ma place, je pouvais voir la lueur blanchâtre de la lune se refléter dans ses yeux. Je tournai la tête vers Ryder. Celui-ci me lança un regard effrayé. L’homme reprit rapidement contenance et rit avant de reprendre :
« Lorsqu’un chef vieillit et commence à perdre la tête, ça signifie qu’il est grand temps de le remplacer par un plus jeune et un plus sensé. »
Yéléna s’avança lentement vers lui. Lorsqu’elle fut à sa hauteur, elle s’arrêta et contempla un instant la foule autour d’elle avant de poser de nouveau ses yeux sur l’homme qui n’avait pas bougé.
« Tu sais Andreas, tu fais une terrible erreur en confondant ma supposée vieillesse avec une quelconque inaptitude à diriger ce peuple. »
Elle se tourna vers l’assemblée et poursuivit :
« Dois-je vous rappeler que je suis plus puissante qu’aucun d’entre vous ne le sera jamais ? Mais si certains en doutent, qu’ils se lèvent et rejoignent Andreas. »
Personne n’osa faire le moindre geste. Sans réfléchir, je me redressai vivement. Yéléna me regarda avec de grands yeux effarés.
« C’est faux, dis-je d’une voix peu assurée.
— Honeymaren, rassis-toi, me chuchota mon frère en tirant sur ma tunique.
— Tu remets en cause mes paroles ? » s’étonna la chef Northuldra en affichant un sourire en coin qui m’effraya.
Je jetai un rapide coup d’œil à Ryder. Il m’intima de regagner ma place d’un signe de tête. Je me tournai de nouveau vers Yéléna et repris :
« Oui. Vous n’êtes pas la plus puissante d’entre nous.
— Qui est-ce dans ce cas ? »
Sa voix avait subitement changée. Elle était devenue plus dure et menaçante. Je ne devais pas perdre mes moyens.
« Elsa. »
Les conversations autour de moi reprirent de plus belle. Je ne pouvais en saisir que quelques bribes :
« Elle a raison !
— N’importe quoi ! Yéléna est et restera la plus puissante !
— Elsa a des pouvoirs comme nul n’a ici… »
J’essayais de faire abstraction de tout ce que je pouvais entendre. Je devais rester concentrée et ne pas lâcher Yéléna des yeux.
« Elsa ne fait pas partie de notre peuple, dit-elle sévèrement en fronçant les sourcils.
— Vous l’avez acceptée pourtant.
— Jamais ! Jamais je ne pourrai tolérer une personne d’Arendelle parmi nous !
— Ce n’est pas ce que vous disiez il y a quelques mois !
— J’attendais simplement de voir comment elle se comporterait ! Maintenant j’ai ma réponse : elle nous a laissés tomber comme sa mère avant elle !
— C’est faux ! Elle va revenir ! »
Yéléna se tut soudainement et avança jusqu’à moi. Je levai les yeux vers Andreas. Il s’était rassis, me laissant faire face seule à la chef Northuldra.
« Comment le sais-tu ? » me demanda-t-elle en saisissant mon menton entre les doigts de sa main libre.
Malgré la faible luminosité, je pouvais parfaitement distinguer que ses yeux clairs étaient emplis de colère.
« Je… euh… »
Son regard se durcit davantage.
« Je le sais. C’est tout. »
A peine eus-je achevé ma réponse que trois hommes surgirent. L’un d’eux avait arraché un morceau de son vêtement pour en entourer son avant-bras qui devait visiblement être blessé. Les deux autres tenaient un long rondin de bois auquel était suspendu un animal mort. Tout le monde se précipita vers eux en les acclamant. Je voulus, moi aussi, m’approcher mais une main sur mon épaule me retint : celle de Ryder.
« Qu’est-ce qui t’as pris ? me demanda-t-il, en colère.
— Personne ne s’interposait alors je me suis dit que…
— Non, tu ne t’es rien dit du tout ! Tu as réfléchi, ne serait-ce qu’une seconde, à la conséquence que tes actes et tes paroles pouvaient avoir ? me réprimanda-t-il.
— Eh bien je…
— Eh bien non ! Non mais Honeymaren… Faire face comme ça à Yéléna devant tout le monde… Tu t’es juste donné ridiculement en spectacle !
— Si tu veux. Mais si j’étais restée à ma place, qui l’aurait fait ?
— Personne.
— Voilà. Donc maintenant tu sais pourquoi j’ai agi comme ça. »
Mon frère leva les yeux au ciel.
« Tu n’as fait que te mettre davantage en danger !
— Tu as peur pour qui au juste ? Pour moi ou plutôt pour toi ? »
Ryder baissa les yeux.
« Pour nous deux… » murmura-t-il.
Je ne répondis rien, me contentant de le regarder sans la moindre expression sur mon visage. Je me retournai alors vers les trois nouveaux arrivants. L’un d’entre eux s’exclama :
« Les plus faibles d’entre nous auront enfin de quoi manger ! »
Je me faufilai entre tous ceux qui étaient rassemblés là et réussis finalement à apercevoir ce que ces trois hommes avaient ramenés : un loup. Une envie de vomir me prit soudainement. On me poussa, m’éloignant de la vue de la pauvre bête. Je reculai de moi-même, prise d’un nouveau haut-le-cœur. Mais les paroles de ces hommes m’inquiétèrent encore plus :
« Si vous saviez ce qu’on a dû faire pour vous le ramener… On a dû faire face à une sorcière, une vraie ! »
Mon cœur fit un bond dans ma poitrine. Je me sentis encore plus mal…
***
« T’as vu le loup ? — Oh oui je l’ai vu…
— Et alors ?
— Ça me dégoûte !
— Content de te l’entendre dire. Je n’ai pas compris leur enthousiasme… Oui j’ai faim mais peut-être pas encore à ce point…
— Ryder…
— Et puis comment veux-tu qu’ils le fassent cuire ? On n’a même plus de feu !
— Ryder ! S’il te plaît, épargne-moi les détails. »
Mon frère éclata de rire.
« Bah quoi ? C’est vrai non ? Ça risque d’être compliqué pour ceux qui aiment leur viande à point… »
Je le fusillai du regard. Il se remit à rire bêtement.
« Ok j’ai compris, j’arrête », dit-il en essayant de se contenir malgré lui.
Il vint s’asseoir à côté de moi sur le canapé. Nous nous étions furtivement retirés dans notre cabane, sans que personne ne s’en aperçoive. Nous n’étions plus que tous les deux dans une obscurité quasi-totale. Je sentis alors Ryder poser sa tête contre mon épaule.
« Dis-moi la vérité maintenant, me réclama-t-il.
— De quoi tu parles ? murmurai-je faiblement.
— Ce que t’as dit tout à l’heure à Yéléna sur Elsa… C’était faux pas vrai ? T’en sais plus que ce que tu prétendais… »
Je me tus, attendant la suite.
« Pourquoi tu avais l’air si sûre de toi quand tu lui as dit qu’Elsa allait revenir ?
— Parce que… »
Je soupirai.
« Parce que je lui ai envoyé une lettre, soufflai-je.
— Une lettre ? » s’exclama mon frère en se redressant subitement.
Je sentais que son visage était tout près du mien. Je devinais ses pupilles brillantes à quelques centimètres des miennes.
« Comment as-tu pu la lui faire parvenir ?
— Tu me connais… Je me débrouille.
— D’accord et après ? Tu espérais quoi ? Qu’elle arrive et qu’elle nous tire comme par enchantement de cette situation ? »
Au même moment, la porte s’ouvrit brutalement. Nous nous retournâmes vivement, le visage tourné vers l’entrée. Je la reconnus immédiatement, malgré la pénombre.
« Elsa… » murmurai-je.
Ryder resta bouche bée.
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Re: La Reine des Neiges 3
Ven 01 Déc 2023, 17:33
Ok j'avoue ! J'ai tellement ri en voyant le nom de la personne qui s'est opposée à Yélana...A croire que tous les Andréas sont destinés à être ainsi (Je dis ça parce que dans les fictions Frozen qu'on écrit avec @Frantzoze, l'un des nombreux méchants qu'on a parmi la multitude de personnages, s'appelle Andréas et se trouve être le père de Kristoff, Honeymaren et Ryder chez nous . De facto on a une scène un peu similaire dans nos troisième tomes et mon deuxième et quatrième tomes de la deuxième hexalogie )
Bref encore un chapitre rempli de tensions qui donne envie non pas d'avoir un mais deux chapitres de publié par semaine !
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Re: La Reine des Neiges 3
Ven 08 Déc 2023, 18:41
Pour les deux chapitres par semaine ça risque d'être compliqué... J'ai une tonne de choses à faire en ce moment, avec mes examens et mes concours...Ansa a écrit:Ok j'avoue ! J'ai tellement ri en voyant le nom de la personne qui s'est opposée à Yélana...A croire que tous les Andréas sont destinés à être ainsi (Je dis ça parce que dans les fictions Frozen qu'on écrit avec @Frantzoze, l'un des nombreux méchants qu'on a parmi la multitude de personnages, s'appelle Andréas et se trouve être le père de Kristoff, Honeymaren et Ryder chez nous . De facto on a une scène un peu similaire dans nos troisième tomes et mon deuxième et quatrième tomes de la deuxième hexalogie )
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