[FCU] La malédiction du cinquième esprit

Chapitre 23 : Douce amertume



-Comment vous faîtes pour avoir toute cette nourriture ici ?!


Anna se mordit immédiatement la lèvre. Helga était introuvable, elle venait d’apprendre qui était réellement sa lointaine ascendante, son grand père venait de la libérer des limbes et avait face à elle, son lointain ancêtre Sappos mais la seule chose qui la préoccupait, c’était la nourriture ! La jeune reine se maudissait d’être ainsi si gourmande et maudissait aussi l’Hellheim de lui avoir fait conserver le sentiment de faim alors qu’elle se rendit compte qu’elle n’avait rien avalé depuis toute une journée et les gargouillis de son ventre ne firent que davantage la trahir et augmenter son malaise.


-Mange donc ma petite ! Il y a tout pour te plaire ici ! Il faut bien quelques avantages à être le père noël !


Pierre désigna avec un sourire la table remplie de mets fabuleux alors qu’Anna avait oublié toute son éducation royale et se jetait sur une pièce rôtie, heureuse de pouvoir gouter un autre plat que le succulent ragout de sa grand-mère, même si elle se jurait de ne surtout pas lui en parler.


-Je te reconnais bien en elle ma petite ! Une vraie gourmande ! J’aimais la voir ainsi se régaler et elle ne grossissait jamais… Alors que moi ! Ma bedaine fait ma célébrité ! Commenta Pierre.
-Je ressemble à qui ?! Questionna Anna la bouche pleine.
-A Emma bien sûr !


A cet instant Anna, prête à mordre à pleine dents dans une cuisse de volaille bien tendre stoppa immédiatement son action écœurée avant de foudroyer du regard le fondateur de la dynastie Sappos. Kristoff, interloqué par l’attitude de sa belle s’empressa de reposer la nourriture, quant à Elysia, lui aussi accordait un regard mauvais à son aïeul…


-Hum… Pardonne-moi petite… C’est sans doute trop tôt, je vois bien que tu n’apprécies pas la comparaison…
-Attendez quoi ?! Pas apprécier la comparaison avec une manipulatrice qui nous mens depuis des lustres et s’est juré de tous nous détruire, d’une folle qui m’a balancé dans les limbes ainsi que ma petite Helga ?! Non je ne vois absolument pas pourquoi je n’apprécierai pas… Beugla Anna qui de rage, lança la nourriture qu’elle avait en main en direction de Pierre qui heureusement l’évita.
-Allons, on se calme petite ! Ce ne sont certainement pas les manières que t’ont inculqué tes parents ! Calme-toi je te prie, je n’ai guère envie de t’inscrire sur la mauvaise liste ! Gronda Pierre.
-Allez-y faîtes-le ! J’ai perdu Helga déjà ! Et si je suis sur cette liste, je pourrais avoir Emma en face de moi, et je vous jure que des deux ça ne sera pas moi qui serai désolée d’avoir du charbon ! Hoqueta la reine en serrant les poings.
-Penses-tu ma petite que cela soit nécessaire ?! Si je te mets sur la mauvaise liste… Tu ne pourras pas avoir ce que tu souhaites le plus au monde ! Demande à ton grand père, mes services sont très utiles, n’est-ce pas Elysia ?!


Pierre avait beau être le plus sérieux du monde, il s’exprimait systématiquement avec une voix joviale, plus entraînante encore que celle que pouvait avoir Olaf. Anna se retînt de ne pas rire, elle était furieuse, dévastée mais cette voix pourtant lui apportait un certain réconfort, oui, elle reconnaissait dans ce lointain ancêtre son ami fait de neige. Elle en était certaine, Olaf l’adorerait à n’en pas douter ! Aussitôt elle chassa cette hypothèse de son esprit. Elle devait rester concentrée et, curieusement, son grand-père semblait comme elle, totalement désorienté au niveau de ses pensées et faisait de son mieux pour maintenir un regard furieux à l’encontre du père noël.


-Tu veux bien répéter ?! Réussit finalement à articuler le Northuldra, faisant de gros efforts pour paraître distant.
-Tiens, tu tentes de suivre le comportement de ta petite-fille ?! Oh rien d’anormal mon cher Elysia, c’est dans ta nature de suivre, c’est même une grande qualité ! Mais oui, ne t’ai-je pas offert ce que tu désirais.
-Mais, bien sûr que non !
-Ne souhaitais-tu pas sauver ta petite fille des limbes ?!
-Tu m’as poussé dans les limbes !
-Certes… Et qu’as-tu alors ressenti ? De la colère je suppose ?! Rétorqua le père noël avec sa légendaire jovialité qui désarma son descendant.
-Euh… Oui… Evidemment ! C’est le pire endroit de l’univers !
-Certes ça l’est ! Et la colère, un sentiment plus que puissant n’est-ce pas ? D’ailleurs ma petite Anna, toi qui es sans doute la plus experte de nous tous à propos des limbes, que se passe-t-il pour les sentiments en cet effroyable endroit ?
-Ils… Ils disparaissent peu à peu. Expliqua la jeune reine comme une fillette qui récitait une leçon à son précepteur.
-Exact ! Tu auras un bon point pour la liste ! Mais pourtant, tu as bien réussi à retrouver Helga m’as-tu dit ? Grâce à quoi d’après toi ?!
-J’ai… J’ai pensé à elle…
-Et tes sentiments furent forts ?
-Oui Père Noël… Souffla la souveraine surprise de se montrer aussi docile que pouvait l’être sa sœur ainée lorsqu’elles étaient enfant.
-Vois-tu mon descendant où je veux en venir ?! Demanda Pierre en le dévisageant par-dessus ses lunettes.
-Euh…
-Les sentiments forts permettent de retrouver ce que nous perdons dans les limbes !


Anna rougit immédiatement. Elle eût beau creuser dans sa mémoire, jamais, et c’était le drame de ses précepteurs elle n’avait su réciter une leçon avec tant de naturel et de plaisir pourtant avec Pierre, ça lui semblait naturel d’agir comme la plus sage de toutes.


-Décidément, tu le veux vraiment ton cadeau ma petite ! Tu es très futée en tout cas, comme pouvait l’être ton ancêtre Emma, même si je me doute tu n’apprécies pas le compliment, pourtant tu devrais…
-Ca c’est à moi d’en juger…
-Elle aurait dit exactement la même chose que toi je peux te l’assurer ! Mais peu importe… C’est en effet grâce à tes sentiments forts Elysia que tu as pu la retrouver. Si je t’avais dit que tu allais sauter dans les limbes en toute sécurité pour aller la chercher… C’est justement ainsi que tu t’y serais perdu !
-Et moi, le coup de bâton en revanche c’était gratuit ? Objecta Kristoff.
-Tu n’avais pas le rôle agréable et à nouveau je te prie de m’excuser… Cependant, dis-moi, puisque tu m’as vu jeter le grand père de ta belle sans ménagement dans les limbes, n’est-ce pas le sort que tu aurais voulu m’infliger par colère ?
-C’est… Vous lisez dans mes pensées c’est ça ?!
-Oh tu es un connaisseur ?! Je le confesse ! C’est un petit privilège de ma fonction, mais habituellement, personne ne doit s’en rendre compte…
-J’ai été élevé par Grand Pabby !
-C’est vrai… Il nous faudra nous attarder sur ce point un peu plus tard ! Mais en tout cas, j’espère que tu m’as pardonné ! En voyant la bouteille d’hydromel, je suppose que c’est le cas !
-Kristoff !!! S’offusqua Anna
-Quoi ?! Mais… Enfin je n’étais pas le seul à…
-T’aurais pu m’attendre quand même ! Bougonna la rouquine.
-Ne t’en fais pas pour ça ma petite… Tu n’imagines pas combien de ces petites merveilles me sont laissées durant ma tournée ! Mais avant cela, je t’ai promis un cadeau puisque tu t’es montrée si sage. Alors dis-moi Anna d’Arendelle Picéaerd, que souhaites-tu le plus au monde ?
-Arendelle-Picéaerd ?
-Tu es sérieuse ? C’est ça qui te préoccupe ?! S’enquit Pierre
-Non…
-Ne mens pas petite, ça n’est pas bon pour la liste ! Mais oui, tu es née de la famille d’Arendelle ! Mais puisque cela te pose question, serais-tu en train de penser que tu es plus une Picéaerd qu’une Arendelle ?
-Comment ça ?
-Peu importe ! Mais ôtes-toi cette idée de la tête ! N’es-tu pas morte en tant que reine d’Arendelle ?! Quoi qu’il arrive, jamais tu ne devras oublier ton origine et ton rôle ! La famille Picéaerd fait partie de toi, mais ni plus ni moins que la famille d’Arendelle ! Et jamais tu ne dois oublier ce nom, et ce royaume qui compte sur toi ! Ecoute-moi, j’espère que cette leçon tu sauras t’en souvenir le moment voulu ! Bien, et du coup ton cadeau ? Que souhaites-tu ? Après tout, la nuit de Noël chez les vivants se termine, je n’ai que peu de temps pour t’exaucer !
-Je… Je veux Helga bien sûr !


Pierre ne semblait pas étonné par la requête de sa lointaine descendante néanmoins son visage si heureux se ferma tout à coup alors qu’il plongeait son regard d’un bleu azur dans celui menthe à l’eau de la rouquine. Anna ne savait pas l’expliquer mais se regard intense la déstabilisait plus encore que lorsque mamie Anna pouvait la dévisager et pourtant elle ressentait chez ce jovial ancêtre autant de bienveillance que chez sa célèbre grand-mère. Elle n’avait qu’une envie malgré son air triste, c’était de lui sauter dans les bras.


-Helga ?!... C’est vraiment ce que tu veux ?!
-Evidemment !
-Je n’en doutais pas… Elle est en sécurité dans l’Helveg !
-Dans l’Helveg ?! Mais qu’est-ce qu’elle fait là-bas toute seule alors que nous sommes ici ?!
-C’est à toi de le savoir ma petite… De le savoir et à toi de la trouver !
-La trouver ?... Tu penses que je ne peux pas la retrouver dans l’Helveg ! Je sais à quoi il ressemble ! Elle est surement seule à attendre dans la hutte de mamie ! Insista la jeune femme sans même e rendre compte que naturellement elle tutoyait son ancêtre.
-Tu es confiante… C’est une bonne chose.


Pierre adressa un immense sourire qui fit frétiller sa barbe fournie puis maladroitement, gêné par sa bedaine imposante et manquant de renverser un plat en bord de table, se dandina vers la glace du dôme des souvenirs. Avec une étonnante facilité, le père noël fit des manipulations et incantations qu’Anna n’avait jamais vu de la part de sa grand-mère. Quelques instants plus tard, la jeune femme tressaillit alors qu’elle vit une crevasse similaire à celle qui l’avait entraîné dans les limbes se matérialiser. Pierre s’en rendit compte et tendit une main secourable vers sa descendante.


-N’aie crainte, accompagne-moi !


Avec prudence, Anna se rendit au bord du précipice auprès du père Noël et selon sa demande, se pencha pour observer le gouffre avec inquiétude.


-Cela dépend de toi ma petite… Qu’y a-t-il au fond ?!
-Je… Je n’en sais rien…
-Eh bien devine ! Souffla avec malice le premier Sappos avec un ton qui n’était pas sans rappeler celui de mamie Anna.
-Je… Eh bien euh… L’Helveg probablement !
-L’Helveg ? Tu es sûre ?
-Quoi ? Ce n’est pas ça ?!
-Si, c’est possible… Cela dépend de toi en réalité !
-C’est-à-dire ?
-A toi de voir ma petite ! Cette fois ça n’est pas comme pour ton grand père et les limbes… Tu dois savoir où tu vas pour ne pas te perdre au hasard du monde des morts ! Et c’est à toi de vouloir y aller !
-Eh ho ! Doucement attendez ! Anna !!! Tu ne vas pas !... Pas sans moi !
-On se calme Monsieur Bjorgman ! C’est courageux, mais c’est le cadeau de notre petite Anna, c’est à elle de l’accepter ou non. Si tu sais ce que tu veux, alors tu n’as plus qu’à sauter, mais ne crois pas que ça sera facile de la retrouver dans l’Helveg mais ça… C’est à toi de le découvrir, sinon, je peux t’offrir ceci !


Sans attendre de réponse, Pierre activa le dôme et l’image d’Helga apparut sur la paroi. Elle était seule alors que les larmes perlaient sur les joues d’Anna. Elle avait beau ne pas être sa véritable mère, elle sentait au plus profond d’elle que l’adolescente était le fruit de ses entrailles. Lentement, Pierre lui posa la main sur l’épaule.


-Comme tu peux le voir, elle est en sécurité dans l’Helveg… Je peux t’offrir de la voir ici, autant de temps que tu le souhaiteras pour voir qu’elle est en sécurité, ou alors, tu acceptes l’inconnu du gouffre, mais n’oublie pas Anna… Parfois le cadeau que l’on désire le plus n’est pas aussi agréable qu’on ne l’espère…
-Bien sûr que si ça le sera ! Je dois la retrouver ! Je lui dois ! Je le dois à mon double ! Et je me le dois ! Alors désolé mais tu te trompes cher père noël ! Bien sûr que ça sera agréable et je serai la plus heureuse de toutes quand je serai de retour ici avec elle… Rassure-moi, je peux revenir ici dès que je le souhaite n’est-ce pas ?!
-Oui Anna, pour ça, rassure-toi tu peux revenir…
-Parfait ! Poussez-vous ! Moi quand je suis prête ! Je suis prête ! Miaula Anna en sautillant comme une puce sur le rebord.
-Anna att…


Le montagnard ne put terminer sa phrase, la plus impulsive des Picéaerd avait déjà fait le grand saut. Elysia et Kristoff ne purent voir que la cape de l’Arendellienne disparaître rapidement dans le néant et attendre avec angoisse le retour de l’enfant prodigue.
Après le saut, Anna avait envie de hurler tant la chute risquait d’être longue mais curieusement, elle n’avait aucun sentiment de chute, ni même de vol. Le temps semblait comme suspendu, elle était comme figé dans le néant. Rapidement, une angoisse la parcourut. Et si elle avait été assez inconsciente pour sauter à nouveau dans les limbes ? L’angoisse la gagna et, horrifiée elle crut voir au loin, l’ombre d’un arbre géant, pourvu de millions de cocons. Non ! C’était impossible ! Anna se concentra se remémorant les propos de son lointain aïeul. L’Helveg ! Elle devait penser à l’Helveg ! La jeune femme s’empressa de fermer les yeux pour focaliser son esprit. Soudain, elle se sentit enfin chuter l’espace d’une fraction de seconde avant d’atterrir sur un sol dur. Tremblante, Anna ouvrit enfin les yeux. Cette brume, cette forêt, ce pont qui s’éloignait dans un brouillard épais vers l’inconnu… Les souvenirs remontaient ! Elle avait réussi ! L’Helveg ! Elle n’avait que le pont à traverser et Helga serait dans ses bras ! La jeune reine se retînt de ne pas sauter de joie et couru aussi vite qu’elle le put sur le pont suspendu, trop impatiente de retrouver celle qu’elle considérait comme sa fille !


-Helga ! Ma petite Helga ! Ta maman de l’Hellheim est là !!!! Attends… Quoi ?!


Haletante, Anna se stoppa stupéfaite. Elle avait traversée, persuadée de trouver au loin la hutte de mamie avec en son sein, Helga mais rien n’y fit. A la place, seulement la brume épaisse. Les arbres de la forêt avaient disparu, elle était seule !


-Non ! Non !!! Ca n’est pas les limbes !!! Pas encore !


Anna sentit les larmes couler le long de ses joues. Quelle idiote elle avait été ! Comment avait-elle pu croire Pierre Sappos ?! Mais pourquoi l’avoir sorti des limbes la première fois ? Où étais-ce son plan pour mieux se débarrasser des autres ? Anna s’en voulait. De toutes les bourdes qu’elle avait pu faire, celle-ci était le pire de toutes. Elle avait tellement honte ! Que dirait sa mère et sa grand-mère de sa bêtise ? Que penserait Elsa d’elle maintenant qu’elle les a abandonnés ? Elle qui gâchait à ce point le nom de cette illustre famille en terminant dans le pire endroit de l’univers. La jeune femme sentit ses forces lui échapper et tomba lourdement à genoux, pourtant elle n’en ressentit curieusement aucune douleur.
La reine ne s’en rendit pas tout de suite compte et pourtant, ses larmes, ses sentiments…. Certes ils étaient forts mais les limbes cette fois n’aspiraient rien. Peu à peu, Anna tachait de se sentir calme. Elle fit un gros effort pour se souvenir des quelques leçons de chamanisme de sa grand-mère. Elle n’avait aucun espoir de réussir un voyage astral ou quelque prodige digne de sa famille, mais au moins, elle avait su apprendre des méthodes efficaces pour vider son esprit et se calmer. Avec soin, Anna cherchait à faire le vide et réussit à être parfaitement calme. Apaisée, elle lutta pour ne pas ouvrir les yeux, elle se concentrait sur ses émotions sans pour autant les exprimer. Pendant de longues respirations, Anna s’assurait qu’aucune partie de son âme n’était aspiré. Peu à peu, un sourire se dessina sur son visage. Peu importe où elle était, ça ne pouvait être les limbes ! Ses émotions restaient en elle. Rassurée, elle se releva peu à peu et observa la brume essayant de se rappeler les propos de sa grand-mère à propos de cet endroit. Au bout de longues minutes de concentration, enfin elle apparut. Anna se sentit bondir de joie ! Elle était bien dans l’Helveg ! La maison de mamie était à quelques pas ! La jeune femme était assez proche pour sentir l’odeur d’un ragout qui mijotait doucement.


-Chouette ! Mamie avait pensé à laisser à manger avant de partir ! J’arrive Helga ! On va se partager un délicieux repas toutes les deux avant de rentrer et… Helga ?! Helga ?! Helga où es-tu ?!


L’enthousiasme de la dernière Picéaerd s’estompa alors qu’elle observait la hutte désespérément vide. Elle fouilla chaque recoin mais rien, pas une trace, pas un indice pour permettre de penser qu’Helga avait pu séjourner en ce lieu. Avec peine, la rouquine repassa devant la marmite à l’odeur alléchante. La gourmandise d’Anna était forte, mais son désespoir bien plus et préféra ignorer le délicieux repas pour s’en retourner dehors au sein de la brume du néant. Les propos de Pierre revinrent en mémoire de la jeune femme. Il l’avait pourtant mis en garde que la quête ne serait pas aisée, mais elle ne pensait pas à ce point.
Pourtant, la fille d’Iduna releva la tête déterminée. Pas question d’abandonner ! Elle était Anna d’Arendelle ! La jeune sœur de la glorieuse reine des neiges ! Cette sœur pour qui elle avait affronté les dangers de la montagne du Nord et du cœur de glace, celle qui avait su vaincre le félon, celle qui avait su redonner confiance à sa sœur pour qu’elle devienne reine, celle qui avait su tout réparer pour permettre à Elsa de devenir cinquième esprit et libérer les Northuldra, celle qui avait accepté la couronne et prendre en main de la destinée du royaume, celle qui avait affronté la ville d’Arnevik pour la faire gagner à sa cause, celle qui était la fierté de la grande Anna Picéaerd. Elle avait fait la promesse de toujours veiller sur Helga, il était hors de question que cette mission fût la seule que la belle rousse ne saurait mener à bien, si elle savait une chose c’est que jamais une Anna Picéaerd ou une Anna d’Arendelle n’abandonnerait ! Peu à peu la délicieuse reine aux cheveux de feu se redressa et fixa l’horizon d’un regard de braise. Elle ressentait en elle cette flamme de l’optimisme qui jamais ne devait la quitter, peu importe les défis, peu importe les brasiers de tous les dangers, elle saurait les affronter. Elle allait retrouver Helga c’était une certitude tandis qu’elle avançait au hasard droit devant elle.
Soudain, après de longues minutes de marche, son cœur mort s’emballa. Elle cligna plusieurs fois des yeux, elle voulait être certaine que son esprit ne lui jouait aucun mauvais tour mais non, c’était bien réel !
Au loin, cette silhouette ! Anna n’avait aucun doute. Helga ! Enfin Helga était là ! Une nouvelle énergie l’anima et Anna se sentit partir à toutes jambes vers son bonheur retrouvé. Jamais la jeune femme pourtant sportive n’avait couru si vite mais pourtant Helga semblait toujours aussi loin mais peu importait ! Anna savait qu’elle pourrait courir jusqu’à l’autre bout de la terre s’en se stopper s’il le fallait et aurait malgré ça encore assez d’énergie pour la serrer dans ses bras. Chaque foulée était une victoire et la rapprochait de son enfant elle le savait ! C’était sa vue qui la trompait, Helga était là ! Toujours plus proche. Déterminée, elle fixait la jeune fille toujours inatteignable lorsque tout à coup, elle crut apercevoir une ombre sur sa droite. Surprise et de nature trop curieuse, Anna stoppa sa course. Helga semblait toujours aussi loin en face d’elle alors qu’elle détourna le regard. A sa droite lorsqu’elle la vit, Anna crut défaillir. Au loin, une silhouette ! Helga ! C’était elle ! Estomaquée, l’ancienne reine d’Arendelle s’empressa d’observer droit devant elle… Helga était la aussi ! C’était impossible ! Anna tourna la tête rapidement d’un point à un autre, ferma plusieurs fois les yeux mais rien ne changea, des deux côtés, elle pouvait voir la jeune fille.


-C’est une blague ?! Helga !! Helga tu m’entends ?!
-Maman ?!


La douleur fut intense pour la jeune rousse qui s’empressa de se boucher les oreilles tant l’écho de la voix d’Helga fut fort. La jeune souveraine avait le sentiment que la voix de la petite venait de tous les côtés. Elle s’agenouilla et ferma les yeux se protégeant du mieux qu’elle put jusqu’à ce que le bruit infernal ne disparaisse. Tremblante, Anna rouvrit finalement les yeux. Helga était là. Elle n’était plus qu’à quelques mètres mais elle n’était pas seule. Anna réprima un cri de surprise et d’effroi. De tout côté, partout où elle posait le regard, Helga était là, à quelques mètres d’elle. L’environnement avait changé lui aussi. La forêt avait disparue. Anna se sentait comme encerclée par d’immenses portes en verre ou derrière, elle pouvait voir sa précieuse petite. La rousse tourna sur elle-même, se pinça pour être certaine de ne pas rêver, tout autour, des Helga mais aucune identique. Anna avait couru vers la silhouette de sa fille, cette jeune adolescente délestée du chignon strict imposé par Iduna. Anna posa sur elle les yeux puis se décala, quelques mètres plus loin, c’était une Helga adulte qui la fixait. Elle devait avoir sans doute l’âge d’Anna qui la fixait ou peut être même un peu plus. Elle la détaillait. Cette Helga adulte était désormais plus grande qu’elle, sans aucun doute au moins la taille d’Elsa et avait accepté le chignon strict d’Iduna même si celui-ci se trouvait moins protocolaire. Quelques petites mèches dépassaient comme si à force de trop bouger, la coiffure commençait à se défaire. Anna connaissait ça, elle qui était connue pour ne pas tenir en place voyait souvent sa coiffure protocolaire peu à peu se défaire mais pour Helga c’était différent, à croire qu’elle l’avait fait exprès.
Anna lui sourit, heureuse de voir cette part de folie. Helga devait avoir embrassé les responsabilités, mais gardait en elle ce caractère hérité d’Anna. La reine se décala encore et les autres Helga qui la fixaient étaient quant à elles plus jeunes. La cadette d’Iduna sentit les larmes lui monter aux yeux. Elle avait le sentiment de faire un retour vers le passé… Un passé pourtant si proche, une année seulement s’était écoulée ! Helga était encore une toute petite fille, pas encore sortie des langes pour être devenue presque adulte. C’était à peine si elle avait eu le temps de la voir grandir. Et voilà que l’Helveg lui offrait ça ! Une Helga d’une dizaine d’années, le bas de la robe sale et quelque peu déchiré, victime sans aucun doute des cascades et facéties de la fillette qui papillonnait derrière sa vitre. Une autre plus jeune encore, coiffée des doubles nattes qu’Anna aimait tant sautait dans tous les sens à faire des cabrioles un peu partout, une vraie boule d’énergie comme Anna pouvait l’être à 7 ou 8 ans d’après les dires d’Iduna. Un peu plus loin, une Helga toujours plus jeune. La fillette ne devait pas avoir plus de cinq ans et se montrait quant à elle bien plus discrète. Elle semblait peureuse, le visage triste. Sans doute le même que pouvait avoir Anna au même âge après qu’elle fut séparée de sa sœur mais ça n’était pas elle qu’elle reconnaissait, mais plutôt Hans. Après tout, le benjamin des Iles du Sud lui avait expliqué ce jour du couronnement d’Elsa avoir subi les brimades, moqueries et indifférences des autres frères plus âgés. Certes il n’avait fait que lui mentir pour la séduire ce jour-là, mais il avait probablement été sincère sur ce point. Oui, dans cette petite Helga discrète, Anna ressentait toute la tristesse qu’elle avait pu avoir enfant et devinait celle d’Hans. La jeune reine l’observa longuement, attendrie. Curieusement, Helga n’avait pratiquement jamais eu cinq ans au cours de l’année écoulée. En revanche, elle reconnaissait bien mieux les deux dernières Helga. La première devait avoir trois ans, et la dernière plus jeune encore, une tétine dans la bouche qui se dandinait, marchant maladroitement sur ses jambes potelées, gênée par des langes épais.
Anna fit à nouveau le tour des Helga et, sans savoir pourquoi, s’arrêta devant celle peureuse de cinq ans.


-Helga ?... C’est bien toi ma chérie ?!
-Oui… Oui maman ! Renifla la fillette.


Etonnamment, cette fois, Anna n’entendit qu’une seule Helga parler, concentrée à fixer le regard de cette enfant vêtue, à l’instar de l’Helga adulte, d’une robe blanche à épaulettes, tenue à la fois distinguée et militaire qui rappelait tant à la jeune rousse la tenue d’apparat d’Hans lorsqu’il lui fit la cour jadis. Surprise, la jeune reine, laissa l’enfant un instant et se concentra sur l’Helga adulte qu’elle ne connaissait pas.


-Oui maman… c’est bien moi. Souffla-t-elle.


Anna se concentra sur chacune des Helga pour obtenir à chaque fois la même réponse où chaque version d’Helga avait comme point commun d’avoir la même voix intimidée et enfantine que la première. Perdue, la rouquine continuait de tourner autour d’elle-même à dévisager sans fin toutes ces Helga qui chacune portait contre elle, la poupée de chiffon si bien connu par l’Arendellienne. Peu à peu les propos de Pierre remontèrent à l’esprit de la cadette d’Arendelle. « Parfois le cadeau que l’on désire le plus n’est pas aussi agréable qu’on ne l’espère… ». Elle venait d’en comprendre le sens, mais devait en être certaine alors qu’elle se tournait vers l’Helga adolescente.


-C’est toi partout c’est ça ?
-Oui maman… De la plus petite à la plus grande, nous pensons et dirons la même chose…
-Même les petites ?
-Même les petites !... Et nous les grandes pouvons te parler comme des petits par moments. Sourit la jeune fille.
-Je peux poser les questions à toutes ?
-Oui maman.
-C’est pour cela que tu pouvais avoir des changements d’attitude, paraître presque plus adulte que moi et l’instant d’après donner l’impression d’avoir trois ans ? Questionna Anna en s’adressant à la plus âgée des Helga.
-Je suis plus adulte que toi maman… j’ai l’âge de tante Elsa tel que tu me vois. Fit l’Helga qui portait sa tenue d’apparat militaire qui rappelait tant celle des Iles du Sud.
-C’est pour ça que tu grandissais si vite ma belle ?! Rajouta Anna cette fois en se tournant vers l’une des plus petites Anna qui suçait son pouce en serrant la poupée de chiffon à l’effigie d’Anna.
-Oui maman… Gazouilla l’enfant avant que sa mère ne se tourne vers la timide et peureuse.
-Vous étiez déjà toutes là dans Helga qui était près de moi c’est bien ça ?
-Oui maman…
-C’est pour cette raison que vous êtes toutes derrière ces portes ?
-Oui maman… babilla la Helga encore en langes qu’Anna dévisageait.
-Il n’y en a qu’une seule que je vais pouvoir rejoindre n’est-ce pas ?
-Oui maman… Lança la jeune Helga qui stoppait ses cabrioles.
-Vous vous moquez de moi à toutes répondre oui maman ?! Insista Anna vers la Helga d’une dizaine d’années qui n’avait pas encore parlé.
-Oui maman ! Répliqua l’enfant avec un grand sourire et réprimant un rire.
-Vous deux, l’acrobate et l’insolente, vous êtes bien ma fille ça ne fait aucun doute…


La rouquine resta un instant silencieuse, heureusement, les deux petites espiègles purent lui rendre le sourire mais au fond d’elle-même, une pensée lui vînt à l’esprit et elle redoutait tant de devoir poser la question dont elle connaissait déjà la réponse.


-Tu ne dois pas t’inquiéter de ça maman… tu n’as pas à choisir l’une d’entre nous… Nous sommes toutes une seule personne.
-Quoi ?! Fit la rouquine vers la plus âgée qui avait brisé le silence.
-Elle a raison maman… Enfin j’ai raison ! tu ne choisis pas une Helga… Seulement à quel âge si tu veux mais de toute façon tu le sais, là j’ai 10 ans, mais j’ai aussi 24 ans ou 2 ans…
-Et quand je vais ouvrir une des portes, ou irez-vous toutes les autres ?
-Ne t’en fais pas tu n’as pas à t’en préoccuper ! J’ai pas mal, je ne suis pas malheureuse ! Vas y ouvre une porte et ne t’en fais pas pour le reste ! Insista l’adolescente
-Tu es aussi candide que je pouvais l’être à 16 ans ma petite ! Bien sûr que si je me dois de choisir. Te voir toi ? Te voir plus grande ? Te voir plus jeune… C’est une torture ! Soit je peux vous parler ici sans rien faire pour vous, sans vous, enfin te prendre dans mes bras ou c’est choisir si je te préfère petite ou grande ?!
-Tu as raison maman… C’est vrai tu as un choix à faire, mais le seul qui me ferait de la peine, ça serait que tu décides de n’ouvrir aucune porte.


La mère resta interdite pendant un temps alors que c’était la Helga âgée d’à peine trois ans qui venait de parler. Ce raisonnement ne collait tellement pas à une enfant si jeune.


-Ce n’est pas toi mais l’adulte qui parle non ?!
-C’est nous toutes de toute façon et puis… ze veux surtout un câlin de maman… Siffla la plus âgée avec une voix enfantine.
-Vous ne serez pas tristes, celles que je ne verrais pas ?
-Bah non maman… On est toutes la même donc celle que tu verras, tu nous verras toutes ! Insista la Helga qui s’amusait à faire le poirier et dévoiler ainsi ses sous-vêtements.
-Veux-tu bien te tenir toi… ça n’est pas une attitude de princesse… sauf devant le tableau de Jeanne d’Arc ! Gonda faussement Anna.
-Oui pardon maman ce n’est pas bien tu as raison. Souffla de sa voix triste la Helga intimidée de cinq ans.


A nouveau, le silence s’abattit sur l’Helveg. La voix toute timide et craintive avait attirée la jeune femme. Elle adressa un sourire aux deux fillettes intrépides et leur tourna le dos pour s’approcher de la version la plus intimidée d’Helga. Elle l’observait avec une mine attendrie. Pourtant, Helga ne parvenait pas à sourire, elle restait cette enfant réservée. Sans savoir pourquoi, Anna se sentait comme attirée, il fallait qu’elle soit là pour la réconforter, pour la protéger, pour la câliner. Cette Helga avait tant besoin d’elle, comme si c’était véritablement sa fille et pas celle de son double d’une autre temporalité.
Anna agissait sans s’en rendre compte et déjà elle se trouvait face à cette petite fille, elle tendit la main, cette curieuse vitre se dissipa. Un sourire se dessina sur le visage de l’enfant et celui de sa mère. L’une comme l’autre se tombèrent dans les bras. Lorsqu’elles se touchèrent, les autres images d’Helga disparurent dans la brume de l’Helveg, mais ni Anna, ni l’enfant ne s’en rendirent compte. Seule leur étreinte comptait, ainsi qu’une mer de larmes inondaient leurs beaux yeux clairs avant de déferler sur leurs jolis visages. La brume elle aussi semblait refluer quelque peu les laissant toutes les deux comme dans un néant, hors du temps et des mondes connus. Ce moment, était seulement pour elles deux, de longues embrassades, des câlins, des mots doux glissés, une complicité entre la mère et la fille, des rires des larmes. Jamais ni Helga, ni Anna ne s’étaient senties si complices, si proches. Après de longs jeux, elles finirent par s’allonger toutes les deux, l’enfant bien blottie contre sa mère qui lui caressait tendrement les cheveux. Peu à peu, Anna sentit que l’Hellheim commençait à la rappeler. Heureuse, elle lança un grand sourire à l’enfant.


-Ma chérie ?... Tu es prête à rentrer à la maison ! Tu vas voir il y a une surprise là-haut !
-Je ne crois pas maman… Soupira Helga qui retrouvait sa voix triste.
-Comment ça ?... Tu penses que maman est une menteuse petite chipie ?!
-Oh non maman ! Tu dis toujours la vérité ! Mais… c’est la maison…
-Oui ? Eh bien quoi ?


Helga ne répondit pas, seul un petit signe de tête lui échappa alors qu’elle regardait ses pieds en serrant fort contre elle sa poupée de chiffon à l’effigie de sa mère.


-Quoi ?... Non ?! Non !! Helga… Non tu vas venir avec moi tu vas voir on va remonter !!!


Anna insistait et sentait les larmes lui monter à nouveau aux yeux mais pas par joie cette fois. A demi paniquée, refusant d’imaginer l’hypothèse folle de sa fille. L’éclair de lumière qui indiquait le retour béni dans l’Hellheim se fit voir. Anna s’empressa de tirer sa fille avec elle, prête à se sentir aspirée vers les hauteurs, mais alors qu’elle se sentait partir, elle eût l’impression d’être retenue dans l’Helveg comme par un boulet invisible. Elle tenait fermement la main d’Helga. Sidérée, elle tourna la tête vers l’enfant et la dure vérité la frappa. La fillette semblait comme fixée au sol de l’Helveg, pour elle, point d’Hellheim.


-Helga !!! Allez ma chérie fais un effort !! Tire avec moi !!! Tu vas y arriver !!
-Non maman… C’est impossible ce n’est pas la peine d’essayer… Soupira l’enfant.
-Quoi ?! Non !!! Mais c’est impossible !!! L’Hellheim c’est chez toi ma chérie !! Il doit y avoir une erreur !!! Ne t’en fais pas ma puce, maman est là !!! On trouvera ensemble une solution !!


Le regard de l’enfant se plongea dans les yeux trempés d’Anna. Helga faisait de son mieux pour se montrer courageuse.


-Ca va aller maman ! Ne t’en fais pas ! Ca ira bien !
-Non Helga ! Approche !! Je ne vais pas te laisser !!! Je t’interdis d’y penser tu m’entends ! Si tu continues d’y penser je me fâche tout rouge !
-Ca ne marche pas maman… Ce n’est pas toi la mère fouettarde tu ne me fais pas peur !
-T’es bien ma fille toi ! Tu ne t’en rends même pas compte mais tu dis des bêtises ! Soupira Anna en réprimant un rire nerveux.
-C’est mieux que d’en faire tu ne crois pas ?! Et toi si tu restes, tu vas en faire une !
-Quoi ?!
-Tatie, Mamie DuDu et Grand Mamie Anna elles ont besoin de toi pour gagner !
-Je ne vais pas te laisser toute seule !! Pleura Anna.
-Je ne suis pas toute seule maman ! Regarde, t’es là juste avec moi ! Fit la fillette en montrant la poupée.
-Oui… T’as bien raison ma puce… L’autre est là-haut !
-Super comme ça tu pourras te dire que c’est moi ! Allez maman vite, sauve-toi ! Tu te souviens de ce qu’on te disait toutes ?! Ce qui me déplaît, c’est que tu n’accomplisses pas ton destin.
-C’est ta toi adulte qui parle c’est ça ?
-Oui… Sans doute une dernière fois ça doit être important !
-C’est ce que tu veux vraiment ma puce ? Que je m’en aille ?!
-Pas forcément, mais il le faut ! Allez maman sauve-toi vite !
-Je ne t’oublierai jamais ma puce !
-Moi non plus maman ! de toute façon je suis là ! Et toi tu es là ! Indiqua l’enfant en pointant ses mains sur le cœur de sa mère et le sien.
-Ce que tu peux être sage pour une si petite fille ! Sanglota Anna.
-Pas tant que ça ! Dis maman, je peux te demander quelque chose ?
-Tout ce que tu veux mon trésor ! Fit Anna en s’agenouillant auprès de l’enfant qui s’était allongé.
-Juste avant que tu partes… Tu peux me chanter la berceuse de Mamie DuDu ?


Anna eût un léger hoquet pour reprendre ses esprits. Avec douceur, comme le faisait jadis Iduna pour elle, elle caressa tendrement le front et le bout du nez de la fillette alors qu’elle commençait de sa voix cristalline à entonner la célèbre berceuse héritée des Picéaerd. Helga souriait, heureuse d’avoir seulement pour elle la douce voix d’Anna tandis que ses paupières commençaient à devenir si lourdes. Peu à peu, la voix de la jeune reine devenait de plus en plus tremblante. Elle se rendit compte qu’Helga avait fini par s’endormir juste avant le dernier couplet. Luttant contre ses larmes, la voix de moins en moins puissante, entrecoupée de sanglots discrets, Anna commença à s’éloigner, veillant à cajoler l’enfant jusqu’au dernier moment. Elle luttait contre son chagrin pour arriver jusqu’à la fin du chant. La jeune rousse continuait de lutter contre ses larmes alors qu’elle se sentait happée. Elle voulait garder les yeux ouverts le plus longtemps possible jusqu’à ce que la petite ne disparaisse de son champ de vision. Anna ne put lutter plus longtemps. Elle eût l’impression de se noyer dans ses larmes avant de sentir à nouveau le sol dur et froid d’Ahtohallan. La vision troublée par ses yeux trempées, elle finit par distinguer le ventre prépondérant et la barbe fournie de Pierre qui lui tendait un précieux morceau de chocolat.


-Allez ma petite… Mange ça doucement, ça te fera du bien… Souffla le vieux patriarche alors que Kristoff accourrait pour la soutenir.
-Helga… Hoqueta Anna.
-Nous savons Anna… Commenta Elysia.
-Q… Quoi…
-Pardon, nous ne voulions pas t’épier, seulement savoir si tu allais rentrer ma petite… Je t’ai montré, nous pouvons voir l’Helveg… Regarde ! Elle est bien, elle dort paisiblement !


Pierre ne mentait pas et Anna réussit à se lever pour observer la paroi gelée. Elle put clairement distinguer Helga, exactement dans la même position où elle l’avait laissée. Un vrai petit ange. A nouveau cette vue, se savoir séparée et à ses pieds, la seconde poupée de chiffon, ce fut trop pour Anna. Jamais elle n’aurait pu imaginer avoir tant de larmes et pourtant à nouveau ses yeux se mouillèrent. Avec précaution Pierre s’approcha et étreignit la jolie rousse avant de faire disparaître l’image de l’ange Picéaerd.


-Cela n’est pas bon que de rester à l’observer trop longtemps. Je te l’avais dit ma petite, ce présent que tu voulais tant pouvait ne pas être tel que tu l’espérais, je ne voulais pas qu’il te rende si triste… S’excusa Pierre.
-Non ! Non il ne me rend pas triste ! Merci ! Merci de m’avoir permis de la voir ! Renifla la belle rousse.
-Tu es très courageuse ma petite ! Rassure-toi, elle ne sera pas seule, toute ta famille pourra aller la visiter régulièrement comme tu viens de le faire !... Ne t’en veux pas ! Rien n’est de ta faute ! Ca n’était pas sa destinée que de revenir ici…
-Quoi ?
-Chut… Repose-toi petite, tu as eu bien assez d’émotion pour une seule journée ! Monsieur Bjorgman, tu peux aider ta belle à s’endormir !
-Euh oui ! Oui bien sûr ! Fit Kristoff en prenant Anna dans ses bras avant de l’installer sur un lit crée par la grâce de l’Hellheim.
-Elysia ?... Et si nous les laissions pour ce soir ? Proposa Pierre.
-Euh… Oui… Mais… Où allons-nous ?
-Ma réserve d’hydromel ça te tente ?!
-Oh… Eh bien ça ne se refuse pas ! Fit le Sappos tenté avant de laisser le jeune couple se reposer en paix.

Chapitre 24 : La vie de Pierre Sappos


Même si elle était restée blottie contre le corps puissant de l’homme qu’elle aimait, le repos d’Anna fut saccadé. Elle ne cessait de se réveiller, à penser à sa petite Helga, en sécurité oui, mais si seule dans l’Helveg. Fort heureusement, les bras de Kristoff étaient là pour la calmer et l’aider à trouver du réconfort. Au petit matin, l’ancienne souveraine, certaine de ne pouvoir retrouver le sommeil se leva. Elle qui n’était pourtant pas habituée aux réveils aux aurores laissant cela à son ainée se risqua à déambuler dans le dôme gigantesque, et observait l’immense buffet, offert par le père noël. L’esprit d’Anna était certes embrumé, mais pas son estomac qui su prendre le relais. Avec plaisir, la jeune rousse n’hésita pas à se servir, faisant fi de la politesse d’attendre les autres.


-Bon appétit !


Anna sursauta. Elle se retourna et découvrit le visage jovial de Pierre Sappos avancer bras dessus-bras dessous avec son descendant, chacun une bouteille d’hydromel vide à la main.


-Si j’étais maman… Je ne te féliciterai pas pour cette attitude ! Commenta Anna qui voulait se donner de la prestance à l’attention de son grand père.
-Pardon ?... Ah tu n’as pas connu la vraie Iduna ! Elle aurait surtout râlé de ne pas en avoir eu…
-C’est bien ce que j’ai dit papy !
-Touché ! Elle a de l’esprit ta petite fille Elysia ! C’est une bonne chose ! Et ne t’en fais pas pour ça ma petite, je t’en garde une cuvée spéciale juste pour toi si tu le souhaites, en attendant, régale-toi ! Même si ça n’est pas poli de n’avoir attendu personne ! Heureusement que tu as toute une année pour te rattraper et rester sur ma liste ! Fit Pierre, avant de proposer à Elysia de s’éloigner.
-Pierre ! Attends !
-Oui ?
-Je… Est-ce que je peux voir Helga ?
-Tu es certaine de le vouloir ?
-Oui ! Je veux la voir !
-Fort bien… Elysia, je te charge de faire disparaître les preuves ! J’ai un service à rendre !


AveC sa bonhommie habituelle, le premier Sappos confia sa bouteille vide à son descendant et s’empressa de prendre Anna par la main pour l’entraîner vers le dôme des souvenirs. A nouveau, avec grande expertise il fit plier Ahtohallan à sa volonté. Anna subjuguée vit alors ce qu’elle souhaitait tant. Helveg était devant ses yeux. Elle reconnaissait la hutte de Mamie Anna, mais pas l’environnement extérieur. Il n’était pas celui de la forêt comme elle l’avait ressenti mais différent. La mer était présente, une mer bleu azur, chaude, bien loin des plages de la mer sombre ou du fjord Arendellien.


-C’est son Helveg Anna! Il prend la forme et la géographie de ce qu’elle souhaite !... Cette petite n’est-elle pas à moitié Sudilienne ? Commenta Pierre devançant la question de la rousse.
-Je… Je comprends
-Ne sois pas inquiète, elle va sans doute bientôt arriver.


Pierre avait dit vrai. Anna sentit un frisson la parcourir alors que la petite fille vêtue de sa tenue militaire et la poupée de chiffon serrée contre elle apparaissait enfin sous les yeux de la souveraine. Anna ne put s’empêcher de prononcer son nom, même si elle savait qu’elle ne pouvait l’entendre. Elle était hypnotisée. Hypnotisée et heureuse, la fillette avait le sourire. Elle jouait, elle gambadait. L’Helveg était paisible, elle était en sécurité et ne semblait manquer de rien. Si ! Il lui manquait quelque chose se disait la souveraine alors que ses yeux s’humidifièrent… Il manquait sa présence à ses côtés ! Captivée, elle ne remarqua même pas Pierre qui s’était discrètement éclipsé. Prêt à rejoindre Elysia et Kristoff, enfin réveillé autour de la table pleine de victuailles. Les trois hommes discutaient mais Anna quelques pas plus loin ne les entendaient pas. Elle était seule dans l’univers, seule, avec Helga, de l’autre côté du miroir de glace. Dans cette prison paisible qu’elle ne pouvait atteindre, le temps n’avait plus aucune prise sur la douce héritière d’Arendelle.


-Anna ?!... Il faut revenir parmi nous…


La voix apaisante de Pierre fit enfin cligner des yeux la jeune femme et la vision d’Helga rapidement se brouilla pour finir par rendre sa transparence immaculée à la paroi d’Ahtohallan. La souveraine n’eût pas le temps de réagir, son lointain ancêtre fut le plus prompt et s’autorisa une étreinte avec la jeune femme aux cheveux de feu. Anna voulait protester mais les bras protecteur et chaleureux du premier Sappos eurent raison de sa colère. Au contraire, elle sentit soudain à quel point ses jambes semblaient lourdes.


-Voila plus de six heures que tu es immobile face à cette paroi, même si elle te fait grand bien, il te fut t’en détacher et poursuivre ton existence… La berceuse de ta famille qui parle de se perdre dans les méandres d’Ahtohallan évoque aussi ceci !


Pierre avait parlé avec sagesse, comme s’il devinait les pensées confuses et contradictoires d’Anna d’Arendelle. Elle souhaitait poursuivre son visionnage mais se pinça la lèvre en prenant connaissance du temps passé.


-Et vous… Vous êtes restés ainsi à me regarder fixer ce mur… Bégaya-t-elle.
-Non… Nous en avons profité pour manger également ! Releva Kristoff avant de rougir, regrettant ses paroles.
-La magie d’Ahtohallan te permet de voir ton désir le plus cher Anna… Mais aussi doux et réconfortant que soit cette bénédiction, elle ne peut t’apporter l’accomplissement que ta destinée recherche… Fit Pierre avec philosophie.
-Attends quoi ?
-Je vais faire plus simple, te souviens tu de ma mise en garde ? Le plus beau des cadeaux n’est pas forcément ce qu’on espère… je devrais ajouter aussi que notre plus beau présent, est aussi celui que l’on n’attend pas… Cette vision est ce que tu souhaites le plus au monde, mais elle n’est rien en comparaison à l’existence que tu te dois d’alimenter…
-Je n’ai rien compris…
-C’est là une parole bien sage que de le dire ! … Je suis âgé de plusieurs siècles et, tout à fait entre nous, je ne suis pas certain de comprendre moi-même ce que je viens de dire… Mais cela fait son effet tu ne crois pas ?!


Anna resta interdite face à la facétie de Pierre qui riait dans sa barbe avant de reprendre une mine fermée et sérieuse, visiblement heureux de retrouver la paroi vierge de toute image.


-De toute manière, il nous faut aborder des sujets sérieux. Ne te méprends pas Anna, ta petite Helga est une préoccupation sérieuse également…
-Tu veux nous parler d’Emma c’est bien ça ?!
-Toi aussi saurais-tu lire dans les pensées ?! S’étonna Pierre.
-Non ! Mais je veux savoir pourquoi elle est comme ça ?! Qu’est-ce que tu as fait pour qu’elle nous déteste ainsi ?! Demanda la rousse d’une voix plus accusatrice et dure qu’elle ne l’aurait souhaité.
-Ce que j’ai fait ?! Tu es vraiment aussi pertinente qu’elle !... Car tu n’as pas tort de poser la question ainsi.
-Comment ça ? Demanda Elysia perdu.
-Approchez… Veuillez me pardonner, je n’ai pas le talent de narrateur de votre chère Anna Picéaerd mais le mieux, c’est que vous compreniez mon passé…


Interloqués, Elysia, Anna et Kristoff échangèrent des regards circonspects alors que Pierre manipula avec dextérité le dôme des souvenirs. D’une curiosité maladive, Anna le questionna mais Pierre fit la sourde oreille, trop préoccupé par sa tâche. De multiples images défilaient devant ses yeux alors que la père noël marmonnait dans sa barbe, en quête d’un élément bien précis. Finalement, au bout de longues minutes, il poussa un soupir de soulagement.


-La voilà !!! Triompha-t-il.

Sans plus de cérémonial, il activa la curieuse boule de souvenirs. La paroi se troubla et peu à peu de images se firent plus nettes. Anna demeura totalement interdite, elle reconnaissait le château d’Arendelle. Elle comme sa sœur étaient présentes, ainsi qu’Eugène et Raiponce. Pourtant, elle n’avait aucun souvenir de ce moment.

-Eh mais…
-Chut… Regarde, tu comprendras.


Anna se surprit elle-même à ne pas protester et continua son observation. Soudain, aux côtés d’Eugène, assis au plus près de la cheminée, se tenait une charmante petite fille qui ne devait pas avoir plus de cinq ou six ans. La fillette venait de quitter les bras d’Anna et Kristoff alors que les deux observaient depuis Ahtohallan médusés. Jamais ils n’avaient vécu cette scène. Anna se questionna et dévisagea l’enfant. Elle était adorable dans une jolie robe pastel parés de motifs gelés sans doute réalisés par Elsa. Les cheveux blonds, elle avait le même sourire et expressions facétieuses d’Anna, mais aussi, un regard profond qui n’était pas sans rappeler celui du débiteur de glace.


-C’est… C’est une de nos autres vies c’est cela ?
-Exact ! Un point pour toi je te félicite pour ta déduction ! Vous n’êtes pas sans savoir que votre vie, ainsi que votre trépas ici n’est pas la seule parcelle de votre existence…
-Oui… Helga d’ailleurs…
-Et la vie à laquelle tu fais mention Anna, n’est pas la seule autre qui puisse exister…
-Celle-ci est différente ? Questionna Kristoff.
-En effet elle l’est ! Permettez-moi tous les deux de vous présenter… Votre fille ainée.
-Notre fille ?! A Kristoff et moi ?!
-Oui Anna !
-Elle est trop chou !!! Regarde Kristoff notre fille comme elle peut être magnifique !!! Aussi sublime qu’Helga !!!! S’enthousiasma Anna qui sautillait comme une puce.
-Calme-toi Anna ! D’autant qu’il ne sert à rien de comparer ces deux êtres… Tempéra Pierre.
-Oui pardon ! Mais Kristoff ! Regarde comme notre fille peut être parfaite !!!


La souveraine d’Arendelle était subjuguée, pour la première fois depuis la disparition d’Helga, un sourire se dessinait sur le doux visage de la femme aux cheveux de flamme. Les Sappos, ainsi que Kristoff gardèrent un instant le silence, tous soulagés et satisfait de voir renaître dans les yeux d’Anna cette flamme si forte qui l’animait tant.


-Allons, garde raison Anna … Cette demoiselle vous coûte une fortune en jouets et robes !
-Oh ?!
-Enfin… Surtout à ta sœur ainée si je dois être parfaitement honnête qui y laisse bien souvent toute sa bourse pour cette petite. Remarqua le premier Sappos.
-Attends quoi ?! … Elsa ?! Elsa qui dépense ?! Mais c’est noël cette vie !
-Anna je te prie, restons sérieux !
-Oui pardon… Mais… Est-ce qu’on peut savoir comment elle s’appelle ?! J’aime bien Suzanne ? Ou peut-être Iduna comme maman ?! … Oh non, pourquoi pas Beata, comme ta mère Kristoff ?!
-Euh… Eh bien je t’avoue qu’en fait… J’aime bien pour une fille le prénom Emma… Balbutia gêné Kristoff alors que le sourire d’Anna s’effaça.
-Oh ?... Ainsi cela serait donc son père qui a choisi le prénom de cette enfant…
-Attends quoi ?! Fustigea Anna en dévisageant Pierre.
-Cette petite se prénomme ainsi…
-Pourquoi ?! Pourquoi se prénom nous poursuit-il ?!
-Tu ne crois pas si bien dire… Dans cette vie, ta sœur a une jumelle qui se nomme également ainsi. Que tu le veuilles ou non, le prénom Emma est particulièrement important dans la dynastie Picéaerd… Celui-ci mais aussi le tiens ! Anna Picéaerd. Quel titre lourd à porter dans ta famille. Indiqua Pierre.
-Comment ça ?
-Permets-moi de garder encore quelques instants le mystère… Vous devez comprendre ce qui nous lie Emma et moi. Et dans cette vie, Eugène Fitzerbergh n’est pas loin de la vérité !


Pierre eût un geste d’autorité dissuadant Anna ou quiconque de réagir. Sans plus de cérémonial, il donna vie au souvenir. Ahtohallan donna la sensation aux morts de s’animer, comme s’ils se retrouvaient tels des spectres, propulsés dans cette vie alternative mystérieuse pour eux. Rapidement, ils comprirent qu’Eugène comptait narrer une histoire de noël à la fillette d’Anna et Kristoff aux anges. La voix de l’ancien voleur résonnait dans le confortable salon d’Arendelle, entrecoupé des commentaires de la fillette qui ne pouvait s’empêcher de s’exprimer. Anna reconnaissait bien la son caractère espiègle même si peu à peu, le prince de Corona réussit à narrer son histoire de Noël :


« Au village en revanche si tous vivaient en famille, il y avait aussi deux enfants, un garçon et une fille qui eux n’avaient pas de famille et vivaient seuls dans un pauvre orphelinat, ils s’appelaient… Emma et Pierre. Le village vivait du bois, et se préparaient le 24 Décembre à fêter le lendemain, en famille la fête de la naissance de Jésus. Pour ce faire, les hommes partirent tôt chercher du bois pour le feu de cheminée et trouver la plus belle des buches de noël. Et les deux enfants eux aussi partirent en forêt trouver un peu de bois, afin d’aider à chauffer l’orphelinat. Toute l’année, ils ne font que des travaux pour permettre à l’orphelinat de fonctionner… Les enfants partirent en forêt, mais les hommes leur demandèrent d’aller jouer ailleurs pour ne pas être dérangés dans leur travail, sans même prendre le temps de comprendre que ces pauvres enfants cherchaient à se procurer un peu de bois. Ne voulant pas se faire disputer les braves petits décidèrent de partir plus profondément dans la forêt, dans une partie qu’ils ne connaissaient pas. Derrière eux, un grand monsieur les regardait sévèrement…C’était Claus ! Il n’avait pas l’habitude de croiser du monde, encore moins des enfants dans cette partie reculée de la forêt ! Surtout quand les enfants venaient se servir dans son tas de buches ! Alors sévère il leur demanda ce qu’ils faisaient ici. Pierre et Emma expliquèrent à Claus qu’ils étaient des orphelins et voulaient du bois pour se chauffer. Claus les interrogea, les deux enfants expliquèrent que leur vie à eux était d’aider à l’orphelinat pour que tous les enfants puissent manger, et dormir au chaud. L’homme était assez choqué car les deux enfants ne se plaignaient pas de leur vie difficile. Il apprit également qu’ils n’avaient jamais eu de jouets, en fait jamais rien eu vraiment à eux ! Ils étaient courageux et ne recevaient jamais rien. Claus, s’empressa de mettre quelques-unes de ses plus belles buches sur le traineau des enfants et les regarda partir après avoir été remercié… »


-Je ne connaissais pas cette histoire de Noël… Et je ne savais pas non plus qu’Eugène avait des talents de conteur ! Commenta Anna qui ne pouvait détacher son regard de la fillette.
-En effet, ta sœur non plus, bien qu’elle s’en défende !
-Ah oui nous avons pu voir ça ! Constata amèrement Elysia alors que tous pouvaient admirer Elsa n’avoir de cesse d’interrompre le prince de Corona qui prenait grand plaisir à la taquiner alors que l’ancien voleur le lui rendait bien.
-Mais pourquoi nous montrer cette histoire ?
-Comme souvent, la bonne question Anna !... Permets-moi d’avancer quelque peu, tu comprendras.


A nouveau, Pierre, s’empressa de relancer le souvenir. Il prit soin de passer soigneusement les multiples interventions des membres de la famille avant qu’enfin, Eugène puisse poursuivre son conte.


« Claus ne pensait qu’aux enfants qu’il avait croisés. Les imaginant dans un orphelinat miteux alors que toutes les familles au village devaient préparer Noël et le réveillon pour la nuit prochaine. Mais qu’eux ne feraient rien ! Alors, regardant ses buches bruler dans la cheminée, Claus prit une décision et alla s’enfermer dans son atelier, il y resta toute la nuit. Et le lendemain, le 24 Décembre, il n’alla pas travailler et resta dans son atelier en ayant dit qu’il ne voulait surtout pas être dérangé ! Il ne toucha même pas au lait chaud et aux cookies que lui avait laissés sa femme devant la porte. Finalement, le soir venu, il sortit enfin, un peu fatigué mais heureux. Il trouva le plateau de sa femme et apprécia les bons cookies et le lait ! Il voulait que les deux enfants puissent avoir un petit peu de joie dans leur vie pour cette nuit. Eux qui n’avaient rien, cela serait leur petit miracle pour Noël. Celui d’avoir un objet rien qu’à eux pour pouvoir espérer, rire et imaginer. A la fin de son récit, son épouse était également très émue et s’empressa d’aller dans la commode pour ressortir deux grandes écharpes rouges et vertes. Puis elle les déposa dans les paniers. Ainsi Pierre et Emma n’auraient pas froid pendant cet hiver rigoureux…Claus voulait que cela reste secret et décida d’attendre la nuit pour se mettre en chemin. Très tard le soir il décida de se mettre en route, son épouse le rappela, lui indiquant son grand manteau rouge pour ne pas avoir froid alors qu’il chargeait dans un grand sac sur son traineau ses précieux trésors. Au dernier moment, son épouse lui conseilla de se déguiser, lui qui voulait rester anonyme et lui tendit une fausse barbe blanche.


-En fait c’est l’histoire du père noël qu’il raconte ?... C’est sympathique ! J’avoue que je ne l’a connaissait pas ! Papa n’était très friand de ce genre d’histoire, et maman nous en parlait peu…
-Ta mère Iduna aurait pu pourtant… C’est elle qui a raconté cette histoire au jeune Eugène quand elle-même vivait à l’orphelinat…
-Attends quoi ?!
-Elle n’est pas la seule… Elle l’a apprise grâce à son père ! N’est-ce pas Elysia ?!
-Papy ?!... C’est toi qui a raconté cette histoire à maman ?! Alors là je n’aurai jamais cru !! J’aurai pensé que c’était mamie qui…
-Ta grand-mère sait bien des choses Anna, mais pas ceci… ça n’est pas une histoire que l’on raconte chez les Picéaerd… Intervînt Pierre.
-Comment ça ?
-Ceci n’est pas une histoire qu’Emma compte raconter, mais pas toi Elysia !
-Mais je n’ai jamais narré cette histoire à…
-Non, mais elle était écrite sur tes carnets n’est-ce pas ?... Il est une année où ta fille Iduna n’était pas sur ma liste cher Elysia puisqu’elle te les avait subtilisés, ne les avais-tu pas cherchés pendant des semaines avant de les retrouver miraculeusement et les faire envoyer en sécurité sur les terres gelées ?!
-Si… Anna, je peux te l’assurer, quand je vais retrouver ta mère en face de moi, elle va en entendre parler ! Maugréa Elysia.
-Bref… Permettez-moi de vous montrer la fin car, si je puis me permettre une critique, ce conteur est plus que doué mais peut être un peu lent… A croire qu’il n’aspire qu’à proposer une histoire la plus longue possible
-ça n’est pas étonnant… Eugène et la longueur c’est son drame ! Pouffa Kristoff.
-Qu’est-ce que tu racontes ?
-Monsieur Bjorgman doit faire référence à un tirage à la courte paille sans doute ?! Objecta Pierre.
-Co… Comment savez-vous ?! Bégaya le montagnard.
-Il est certains éléments dans les vies qui se répètent, va savoir pourquoi cher Kristoff, dans toutes tes vies où tu côtoies ce prince de Corona, tu finis par ce curieux concours…
-Oh ?... « Ce genre de courte paille » ?... J’y ai participé dans ma jeunesse avec Amarok à propos d’Anna… Sans me vanter… J’ai largement gagné !
-Quelle gloire y-a-t-il à gagner à la courte paille ? C’est seulement du hasard ! Objecta Anna.
-Mais me semble-t-il Elysia, tu as perdu contre Pieter Picéaerd à ce jeu… ET non Anna, il n’y a pas de hasard, pour ce jeu de garçons… Les joueurs n’utilisent pas de pailles mais…
-Oh mes aïeux ! Euh… Attendez !... Kristoff?! Oh ?! En même temps, ça ne m’étonne pas qu’Eugène n’ait eu aucune chance contre toi !


Les deux amants ne purent s’empêcher de rire de ce jeu puéril alors qu’Elysia dévisageait de manière mauvaise son lointain ancêtre, vexé que lui fusse rappelé sa seule défaite à ce jeu, un soir dans la ville d’Arnevik contre son beau-frère. Petit à petit, Pierre retrouva son sérieux et rappela les jeunes amants au calme avant de présenter la fin de l’histoire où ses descendants purent voir ces jeunes enfants s’associer à ce curieux vieux monsieur et créer ensemble, la légende du père noël.


-Et pourquoi nous avoir montré ça ? Questionna Kristoff.
-Simplement, monsieur Bjorgman parce qu’Eugène Fitzerbergh propose ici, l’un des récits les plus proches de la réalité… N’avez-vous pas reconnus les enfants ?!
-C’est… C’est Emma et toi ?! Vous ? Vous êtes frère et sœur ?! Cria soudain Anna.
-Non !... Mais nous avons en effet grandis ensemble tous les deux… Dans notre cœur, nous étions comme frère et sœur en effet puis en grandissant… Disons que c’est un autre lien auquel nous aspirions tous les deux. Ce que le prince de Corona dans cette vie raconte est une belle histoire mais il faut lui reconnaître qu’il est très proche de la réalité. Emma et moi vivions pauvrement et nous avons fait cette rencontre miraculeuse, lui l’appelle Claus mais ce vieil homme n’était pas qu’un simple bucheron.
-Attends quoi ?! Tu es en train de nous dire que toute cette histoire est vraie ?!
-Oui Anna… Pas en totalité mais les grandes lignes en effet ! Vous me pardonnerez de vous avoir montré cette histoire plutôt que la réalité, je voulais vous épargner une histoire trop longue ! Mais oui ! Nous vivions dans un village reculé, aux confins des frontières entre le pays Northuldra et Arendelle, bien avant que ces territoires n’existent ! Aujourd’hui, ce village n’existe plus, la forêt qui l’entoure à disparue, à la place, ont été construites de gigantesques mines et une ville au nom de Kraberg… Nous y étions heureux avant de partir sur les terres gelées à l’âge adulte ! Tout ce que le prince raconte s’approche de la vérité, même si Claus, vous le connaissez davantage sous d’autres noms… Certaines cultures le nomment : Yuki Onna ! D’autres le gardien d’Yggdrasil.


Anna resta mutique. Ce nom en revanche, elle l’avait déjà entendu dans la bouche de sa grand-mère. Pierre s’empressa de détailler cette rencontre mystique avec le gardien du grand arbre de vie complétant le conte d’Eugène. Le gardien avait mis les enfants à l’épreuve. Il les avait tentés avec des jouets mais leur cœur était demeuré pur. Ils avaient tous deux compris la véritable valeur d’une action désintéressée. Le premier Sappos ne s’arrêta pas là, n’omettant aucun détail sur sa relation avec la future Emma Picéaerd. Comment la fillette qui avait vécu à ses côtés était devenue une femme forte, déterminée et épris de justice, comment elle s’était chargée de défendre son acolyte et garder son cœur pur, alors que chez Pierre, comme chez elle, une flamme commençait à s’allumer. Pierre occulta l’histoire d’Eugène et se montra on en peut plus précis jusqu’à ce que les jeunes gens ne finissent par allumer devant le gardien de l’Yggdrasil une buche dans le foyer en symbole de leur attirance.


-Voilà quelque chose qui ressemble beaucoup aux histoires de coupoles de ta grand-mère. Remarqua Kristoff.
-Tu ne crois pas si bien dire… D’une certaine manière, ce fut les premières coupoles allumées… Mais sans coupoles ! Oui, Emma et moi, nous nous aimions de toute notre âme.
-Quoi ?! Vous étiez… mariés ?! Demanda la jeune rousse.
-Non… Ce feu, Emma a fini par l’éteindre…
-Elle t’a trahie ?... Ça ne m’étonne pas ! Explique-moi ce qu’elle a fait ! Insista Anna en colère.
-Tu n’y es pas… ça n’est pas elle qui a trahi… Mais moi…


Un lourd silence s’abattit alors au sein du glacier mystique. Tous étaient sonné de la révélation du premier Sappos. Lui, le père noël ?... Un traitre ?! C’était impossible !


-C’est parfaitement possible au contraire ! De nous deux, la plus sage, la plus déterminée, la plus épris de justice, la plus désintéressée… Emma m’était tellement supérieur ! Mais je m’en fichais ! Je l’aime !
-Tu veux dire, tu l’aimais plutôt ?
-Non… Tu as bien entendu ! Répondit l’ancêtre en dévoilant sous son manteau une chaîne en or autour de son cou, relié à un pendentif en forme de cœur sur lequel était gravé les initiales d’Emma et Pierre.
-Que s’est-il passé ? Questionna Elysia.


Pierre laissa le silence s’installer. Tous pouvaient voir à quel point il luttait pour soutenir le regard de ses descendants. Une larme perla sur le visage du vieillard, une larme de remords au coin de son œil.


-Alors que nous étions adultes… Emma était parfaite ! Une véritable déesse, sans défaut… Finalement, le gardien d’Yggdrasil finit par créer les esprits de la nature élémentaire et souhaitait en confier la responsabilité à Emma. J’étais jaloux ! La gloire lui revenait, ainsi que les responsabilités ! Oh elle le méritait ! Elle était tellement meilleure que moi… Mais je ne m’en rendais pas compte. Après tout, moi aussi j’agissais pour le plus grand bien, moi aussi je voulais ma reconnaissance. Je suis donc allé voir le gardien pour le supplier de me choisir à la place de celle que j’aimais…
-Quoi ?... Tu… Tu l’as trahie ? Hoqueta Anna choquée, sans même se rendre compte qu’elle prenait le parti d’Emma.
-Exactement… Et le pire c’est que le gardien m’a écouté !
-Quoi ?
-Il m’a dit que je serai le plus célèbre ! Le plus aimé des deux, mais que seul celui de nous deux qui le méritait le plus, aurait le rôle clef. Il abandonna son idée d’esprits. Un peu plus tard, il nous a réunis Emma et moi et doté de pouvoirs immenses… Il venait de faire de moi le Père Noël, et d’Emma, la mère fouettarde. Selon ses dires nous devions assurer l’équilibre du monde. De mon côté, j’apportais la joie et la chaleur dans les chaumières… Emma en revanche si épris de justice, se chargeait de redresser les torts ! Je ne m’en suis pas rendu compte tout de suite. Après tout on ne parlait que de moi ! On m’aimait, alors qu’Emma était détestée mais je m’en moquais… Pourtant, je le sais maintenant, c’est elle la plus importante de nous deux…
-Quoi ?! Mais non !! Bien sûr que non ! Tu es le père Noël ! Tout le monde compte sur toi ! Objecta Anna.


La voix de la souveraine résonna en écho contre le grand dôme mais ne rendit pas son sourire au jovial vieillard. Jamais Anna n’avait pu voir des yeux si désemparés que ceux de son lointain ancêtre.


-Tout le monde ?... C’est gentil de le dire ainsi. Mais qui ai-je rendu meilleur ?
-Mais ? Enfin tout le monde ! Tout le monde veut être sur ta liste !
-Et pour quelle raison ?... Pour avoir des cadeaux ?... Il n’y a rien de désintéressé là-dedans ! Alors qu’Emma ! Elle a su rendre les gens meilleurs !
-En distribuant punition et charbon ?!
-Oui ! … Rien de très agréable ! Elle a endossé le mauvais rôle, mais sa visite te force à t’améliorer ! Ta mère est un bon exemple Anna ! Elle s’est assagie après la visite de la mère fouettarde ! Et c’est le cas de bon nombre de ceux qu’elle s’est chargée de corriger ! Alors que moi ? ... Je n’ai fait que favoriser la vénalité des Hommes ! Le gardien avait raison… Le meilleur d’entre nous avait bel et bien reçu le meilleur rôle, mais ça, je ne l’ai compris que bien trop tard… Bien après avoir tout gâché…


La tristesse se lisait sur le visage du Sappos et tranchait tellement avec l’image jovial du père noël. Kristoff, Anna et Elysia se sentaient mal à l’aise face à la confession du vieillard. Les mots s’étouffaient dans sa barbe. Il balbutiait quelques explications alors que ses descendants souhaitaient savoir comment il avait reçu ses dons. C’était trop dur pour lui. Il préféra activer le dôme des souvenirs. Tous observèrent en silence. Pierre était pathétique à prier devant une ombre gigantesque. Tous le comprenaient, cela ne pouvait être que le gardien de l’Yggdrasil. Peu de temps avant, Emma encore une fois avait su le défendre face aux brimades et moqueries dont il pouvait être victime. Mais cette fois, Pierre pleurait bien contre elle. Il hurlait son désespoir ! Emma était meilleure dans tous les domaines. Le gardien le savait.


« C’est vraiment ce que tu souhaites Pierre ?!
-Oui, plus que tout !
-Ton cœur est bon, qu’il en soit ainsi, mais n’oublie jamais que la plus noble des taches, n’est pas forcément la plus agréable de toutes… Prophétisa le gardien alors que Pierre recevait ses dons.


Tout heureux, il avait retrouvé Emma, elle aussi parée de nouveaux pouvoirs, bien que la jeune femme eût la mine plus sombre. Mutiques, la famille observait les jeunes gens agir pour leurs premiers noëls. Ils voyaient Pierre rayonner toujours davantage et Emma, se morfondre d’être ainsi craint et détestée. Pierre en avait conscience et chaque année, il offrait à sa partenaire une liste d’enfants qu’elle avait su remettre dans le droit chemin grâce à ses corrections. Chaque année la liste s’agrandissait, Emma en sauvait toujours plus, mais cela ne l’empêchait pas de se détester pour son rôle.


-Je ne peux plus Pierre !... Cette tâche, je n’en veux plus. Je ne sais par quel miracle nous avons reçu ces dons mais je veux que cela cesse ! Lança-t-elle un jour.


Pierre eût beau la supplier, Emma était toujours la plus forte et la plus déterminée des deux. Jamais il ne pourrait la convaincre ! Les yeux inondés de larmes, Il dût reconnaître sa défaite et tous deux échangèrent un baiser long et doux. Ils le savaient, un baiser d’adieu. Emma quittait les terres gelées pour espérer perdre ce rôle qu’elle n’avait jamais voulu.


-Toi continue d’être ce gros bonhomme que tout le monde adore ! Je me demanderai toujours comment le destin a fini par nous choisir ! Tu dois sans doute être meilleur que moi… Adieu Pierre ! Jamais je ne t’oublierai !
-Emma ! Attends ! Il… Il faut que je te dise…
-Oui ? Questionna la femme retenue par la main.


Pierre se pinça les lèvres. Il devait soulager sa conscience, ce poids qui pesait sur sa poitrine. Les mots, ils souhaitaient les dire alors que ses yeux plongeaient dans le regard d’Emma, mais malgré toute sa volonté, il en fût incapable.


-A jamais tu seras dans mon cœur Emma !
-Toi aussi Pierre !... Je n’oublierai pas le garçon qui se perdait dans les sapins ! Sourit Emma.
-Les épicéas sont de bien plus beaux arbres ! …Comme toi !
-C’est gentil… J’y penserai si j’en vois là où j’irai… Adieu !


Emma laissa le père noël à sa solitude. Pierre s’empressa alors de prier le gardien de l’Yggdrasil lui qui venait de tout perdre.


-Ainsi tu as compris quelle pouvait être la plus noble des taches ?
-Pitié… Libérez-là de ce fardeau, donnez le moi et laissez la !
-Je ne puis défaire ce qui a été fait… Sa destinée doit s’accomplir !
-Alors, offrez-lui du bien ! Que là où elle aille, les gens ne prennent pas peur ! Qu’elle soit pour eux une bénédiction !
-Relève-toi Pierre ! Tu n’as pas à prier !
-Quoi ?
-Emma est remplie de sagesse ! Elle sait reconnaître le bien et le mal, elle sait reconnaître toute chose de la nature… Ce don que tu veux que je lui offre, je n’ai nul besoin de lui en faire présent… Il vient à elle pour son mérite ! Ce fameux don que tu voulais pour toi jadis…
-Quoi ?


Pierre resta interdit face à l’ombre du gardien. Devant le dôme, Anna l’était tout autant et dévisageait le premier des Sappos.


-Et en langage clair ça veut dire quoi ?
-Par sa grandeur d’âme, Emma venait de gagner le droit de devenir, le premier cinquième esprit. Un esprit capable de tempérer les folies, celles des Hommes qui veulent dominer la nature, et celle de cette dernière. Seule une âme capable de discerner le bien du mal comme Emma pouvait prétendre à cette responsabilité… Tout simplement Anna !
-Wow… Mais tout ça… Eugène ne l’a pas raconté dans son histoire !...
-Ce qu’il a raconté, c’est une histoire pour faire rêver une petite fille, mais, il était assez proche malgré tout. Nous avons grandi ensemble. Nous aurions pu devenir un couple ! La première buche que nous avons brulé ? De quoi crois-tu qu’Emma se soit inspirée pour inventer les coupoles sacrées ?!
-Vous vous aimiez ?!
-d’un amour éternel…


Pierre joignit le geste à la parole et dévoila à nouveau le pendentif en forme de cœur qu’il portait sous son imposant manteau. Tous purent distinguer les initiales s’entrecroiser élégamment dans un cœur d’or.


-Nous rêvions d’une famille aimante elle et moi… C’était avant que je n’aie cette folie de supplier le gardien ! Chacun de nous a fini par faire sa vie, tous deux nous nous sommes attachés à une autre personne, mais jamais avec cet amour… Il n’y avait aucune malhonnêteté ! La femme que j’ai épousée le savait, cela ne nous a pas empêché d’être heureux. Je crois que ce fut pareil pour Emma… Jusqu’au jour où elle m’a fait, le plus précieux des cadeaux…
-Quel est-il ?
-Sa dernière lettre.


Le père noël sortit alors un précieux papier de sa poche et le tendit à Anna. Curieuse, la jeune rousse s’empressa de le prendre et le parcourir avant de réprimer un hoquet de surprise. Heureusement, Kristoff la soutenait où elle aurait pensé défaillir. Incapable de parler, Pierre lui fit un signe de tête, la souveraine comprit, et lut à haute voix les derniers mots.


« … J’ai désormais contre moi ce petit être précieux. Le fruit de mes entrailles. Je l’aime de tout mon cœur mais au fond, je ne puis m’empêcher de regretter qu’elle ne soit pas tienne. J’ai souhaité qu’elle le devienne, son prénom a été une évidence à choisir. Le seul que tu aurais voulu : Anna. A mes yeux, le plus beau prénom du monde, puisque c’est celui que tu voulais pour nous. … »
-Ce prénom est chère au cœur d’Emma… par amour pour moi. Tu comprends maintenant pourquoi je t’ai dit que ton prénom ne la laissait pas indifférente, pourquoi ce prénom est si important dans ta famille. Porter le nom de Picéaerd est un honneur, mais le plus grand de tous c’est celui de se nommer Anna Picéaerd. Chacune des femmes qui fut touchée par cet honneur ont toutes été destinées, à de grands desseins !... Comme toi aujourd’hui.
-Pourquoi étais-ce la dernière lettre ? Suggéra Elysia alors qu’Anna, pour une fois demeurait incapable de parler.
-Cela fut trop pour moi… Je n’ai pu me résoudre à me taire plus longtemps… Je lui ai alors avoué pourquoi nous étions devenus ce que nous sommes… De ce jour, tout a changé et Emma … Emma a décidé de vouloir tout détruire… Voilà des siècles qu’elle cherche à gagner en puissance, des siècles, pour atteindre un pouvoir capable de détruire tout ce que j’ai fait… Je suis sans aucun doute, le premier nom sur la liste des personnes à punir…Mais désormais, elle est trop aveuglée par sa haine envers moi… Ce qu’elle souhaite n’est plus une correction pour permettre de s’améliorer non, ce qu’elle veut, c’est une vengeance. C’est pour ça qu’elle est repartie dans le monde des vivants ! Grâce à ta mère et ta grand-mère… Cette fois elle peut entrevoir ses pires desseins !
-Quoi ?! Elles… Elles sont parties ?!
-Oui !
-Mais… Mais il faut les arrêter !
-Je suis heureux que tu le dises ainsi… Tu es bien une Anna Picéaerd ! J’espérais que tu sois d’accord pour que nous puissions repartir dans le monde des vivants. Après tout, toi aussi tu es cinquième esprit ! Tu partages ce don avec ta sœur, et ça, heureusement pour nous. Emma ne le sait pas ! Grâce à toi, nous avons une chance d’arrêter son projet… Mais surtout n’oublie pas, tu es certes une Picéaerd, mais aussi tu es de la famille d’Arendelle Anna !
-Quand partons-nous ?! Coupa la souveraine qui n’écoutait guère.
-Bientôt… Mais avant, nous devons prévenir le reste de votre famille Anna !


La souveraine ne savait si Pierre était sérieux ou non, il semblait totalement perdu et désorienté, peu importait pour la jeune femme. Elle se sentait investie d’une mission nouvelle. Toute excitée, elle se retourna vers Kristoff et Elysia qui eux étaient bien plus calmes.


-Bah vous en faîtes une tête ?! Vous n’avez rien compris ?!
-Si Anna… Nous savions ! Pendant que tu observais la paroi, Pierre nous as déjà expliqué sa volonté de nous faire partir là-bas… Avoua Kristoff.
-Oh ?
-Ne te méprends pas, il te l’aurait dit en même temps que nous, mais il te fallait du temps pour Helga Ajouta Elysia.
-C’est… Mais je le comprends tout à fait. Fit Anna qui s’efforçait de réprimer ses émotions, à cet instant, elle souhaitait se montrer parfaite et digne… Digne du plus beau titre du monde. Celui qu’elle portait par son nom : Anna Picéaerd.
-Je suis ravi de l’entendre ma petite Picéaerd… Tu es bien la petite fille de ta grand-mère ! Souffla Elysia en l’embrassant sur le front.
-Papy ?! Si nous retournons dans le monde des vivants, tu vas pouvoir reconquérir mamie ! Comme il me tarde de voir ça ! S’enthousiasma Anna.
-Absolument pas, ne va rien imaginer de tel ! ta grand-mère Anna et moi… c’est de l’histoire ancienne ! Trancha sèchement Elysia.